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le culte établi, la première institution de l'État, le Christianisme et Dieu même.

Que les hommes cependant qui se sont réjouis d'un pareil scandale apprennent qu'ils se trompent dans leurs calculs. La Religion, qui a triomphe de la barbarie des lois, triomphera de leur indifférence. Le désordre et l'erreur n'ont qu'un temps; la vérité est éternelle. Quelles que soient les épreuves qu'elle doit encore subir, la victoire lui est assurée. En vain l'impiété se flatte de la chasser de la terre ; jamais il ne lui sera donné de prévaloir contre elle, et il restera toujours un chrétien pour annoncer Dieu sur la tombe du dernier athée.

SUR

L'ÉTAT DU CLERGÉ EN FRANCE.

(1820.)

L'Almanach du Clergé de France pour l'année 1820 renferme des détails qui nous paroissent mériter d'être recueillis. Ils apprendront à ceux qui l'ignorent quel est le véritable état de la religion. Lorsqu'on élève la voix en sa faveur, lorsqu'on la montre déclinant chaque jour dans le royaume de saint Louis, on vous taxe d'exagération. Il y a même des hommes. graves, au moins par leurs dignités, qui soutiennent que, grâce à la révolution, jamais l'Église gallicane ne fut plus florissante. Que lui manque-t-il en effet? rien, presque rien, une organisation fixe, des évêques, des prêtres, des écoles pour en former, et ce degré de liberté sans lequel nulle institution ne sauroit durer; voilà tout: mais on veut se plaindre; on a juré de n'être jamais content.

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D'autres, avec un rare sérieux, vous disent: « Attendez; ce que vous avez raison de désirer viendra; on ne peut pas tout faire à la

fois, et le moment n'est guère favorable : la religion a tant d'ennemis! Elle se meurt, » dites-vous; nous en gémissons; mais ne doit» elle pas aussi se prêter un peu aux circon» stances?»>

Il n'est que trop vrai, le christianisme menace de s'éteindre parmi nous; il périra faute de ministres, si l'on continue de suivre à l'égard de l'Église lesystème adopté depuis quinze ans. Que le gouvernement se décide, le temps presse; sauvera-t-il le christianisme, ou le laissera-t-il expirer en France? voilà la question; elle a bien, ce nous semble, autant d'importance qu'on en peut attacher à savoir si tel orateur de tribune déraisonnera en vertu d'un mandat direct ou indirect.

Venons aux faits: il n'en est point de plus authentiques que ceux que nous allons citer, puisqu'ils sont publiés par le chef même du bureau des affaires ecclésiastiques au ministère de l'intérieur.

Le nombre des prêtres employés, y compris ceux qui ne reçoivent pas de traitement du trésor, est de 36,183.

Le nombre des places vacantes et pour lesquelles les sujets manquent, est de 15,596; et le gouvernement lui-même est convenu de la nécessité d'ériger de nouvelles succursales, ce qui n'étonnera aucun de ceux qui connoissent l'étendue des fonctions d'un prêtre catholique. Il ne seroit pas moins indispensable de multiplier les vicaires. Il n'en existe point dans plus des trois quarts des paroisses; et comment un curé, si zélé qu'il soit, pourroit-il suffire seul à tant d'œuvres diverses, le culte public, la prédication, l'instruction des enfants, l'administration des sacrements, la visite des malades, etc.? Mais enfin, à s'en tenir à l'évaluation officielle que nous venons de donner, on voit qu'il manque à peu près le tiers des prêtres absolument nécessaires; d'où il suit que le tiers des Français, ou vivent sans religion ou ne la peuvent pratiquer que très imparfaitement.

Sur les 36,183 prêtres employés, 15,539 sont âgés de plus de soixante ans; vénérables athlètes de la foi, ils retrouvent, au bout de leur carrière, de nouvelles forces pour combattre les combats du Seigneur; mais, épuisés par leur zèle même, ils ne tarderont pas d'aller en recevoir la récompense. Dans dix ans, ces

vieillards du sanctuaire auront disparu. Si quelques uns vivent au-delà de ce terme, de plus jeunes succomberont. Qui les remplacera?

En 1819 il a été ordonné 1401 prêtres ; il en est mort 1361. Mais pour juger de ce qu'on doit craindre ou espérer de l'avenir, il ne suffit pas de considérer une seule année; nous avons une base plus sûre pour établir nos calculs. On compte 21,820 élèves pour l'état ecclésiastique; ce nombre doit être réduit d'un tiers, à cause des morts et de l'incertitude des vocations. Reste donc à peu près 14,700 élèves sur lesquels on peut compter, sauf des circonstances extraordinaires. Les cours d'humanités, de philosophie et de théologie durent ensemble au moins dix ans ; ce qui donne, année commune, 1470 prêtres; et par conséquent, vu le nombre présumé des décès, il y auroit, au bout de dix années, un déficit de 600 prêtres environ.

Nous avons malheureusement lieu de croire. ce calcul très exact. Il en résulte que le clergé, sous le régime actuel, ira toujours s'affoiblissant, que chaque année de nouvelles paroisses seront privées de pasteurs; et quand on a vu de près ce que c'est qu'une paroisse sans pasteur, sans instruction religieuse, sans culte, on

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