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Toutes les dispositions de la présente loi, » autres que celles qui sont relatives à l'autori»sation, sont applicables aux congrégations et » maisons religieuses de femmes autorisées an»térieurement à la publication de la loi du 2 » janvier 1817.

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Comme la loi s'étoit abstenue jusqu'à présent d'étendre sa protection sur les congrégations religieuses, les membres de ces congrégations avoient conservé la jouissance de leurs droits civils. En vertu de ces droits, beaucoup de religieuses ont disposé ou de la totalité de leur fortune, ou d'une portion plus considérable que ne le permet le projet de loi, en faveur des congrégations à qui elles doivent, comme le dit si bien M. l'évêque d'Hermopolis, leur bonheur dans la vie présente, et leurs plus douces espérances en la quittant. Les congrégations elles-mêmes ont fait des acquêts, contracté des engagements, d'après ces ressources que la loi leur assuroit. Que feront-elles maintenant? que vont-elles devenir? Vous les dépouillez de ce qui devoit légitimement leur appartenir, vous ne leur laissez que leurs dettes, au moment même où un ministre déclare, devant les pairs assemblés, qu'elles n'ont pas seulement le nécessaire: et c'est là ce que vous

appelez ne faire pour elles ni trop, ni trop peu '.

Monseigneur, pour vous mettre à lieu d'apprécier vous-même votre projet de loi, nous ne vous renverrons pas à des temps où la religion fut trop florissante; daignez seulement remonter avec nous jusqu'à Buonaparte. Relisez, dans le Moniteur, ce rapport de 1808, où l'on rend un témoignage si honorable et si vrai aux utiles associations qui« se vouent, avec cette charité » que notre sainte religion peut seule inspirer, > au service des hôpitaux et des malheureux. » Comparez ensuite, dans l'ensemble des dispositions légales, ce que faisoit Napoléon, et ce que vous proposez de faire. Ainsi que votre. projet, il ne reconnoissoit point de vœux, car cet homme ne vouloit pas de législation catholique; mais, conséquent au moins et juste dans l'erreur, il laissoit aux religieuses la jouis

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Si l'on essayoit de s'appuyer sur l'ancienne législation françoise pour justifier le projet de loi, nous répondrions que, par une suite des préjugés parlementaires, et, plus tard, par le progrès toujours croissant des idées philosophiques, cette législation tendoit à devenir oppressive; et que d'ailleurs elle ne ressembloit en aucune manière, dans son ensemble, à la loi que nous discutons. C'est ce qu'il seroit aisé de montrer; et, par exemple, les vœux perpétuels étoient reconnus; l'état des personnes étoit fixé immuablement; l'autorité civile ne prononçoit pas seule la suppression; en cas de suppression ou d'extinction, les biens ne faisoient pas-retour aux testateurs, donateurs, etc., etc.

sance de leurs droits civils, ou, s'il y portoit atteinte, c'étoit, comme vous nous l'apprenez, en faveur des communautés, parceque, les ayant une fois jugées utiles, il comprenoit qu'elles devoient avoir au moins le nécessaire. Après les avoir établies, il ne provoquoit pas contre elles les plus viles passions du cœur humain. Il n'appeloit pas d'avides héritiers, les communes, les départements, au partage de leurs dépouilles. Que si quelque sœur égarée essayoit de rompre ses engagements et scandalisoit le siècle par sa présence, une administration vigilante arrêtoit, vous le savez, ce désordre aussitôt. Vous, Monseigneur, vous lui rendez, à l'instant où elle viole ses vœux, les droits que vous lui ôtez au moment de sa profession. Nous ne pousserons pas plus loin le parallèle.

Non, non, Monseigneur, vous n'êtes pas de ceux qui se précipitent dans le bien; ne craignez pas qu'on vous en accuse, vous vous êtes mis à l'abri de ce reproche; votre loi suffiroit seule pour confondre à jamais quiconque oseroit vous l'adresser. Mais quoi! seroit-ce parceque tant de pieuses filles se précipitent dans le bien, y consacrent leur vie entière, sans réserve comme sans relâche, que vous provoquez contre elles

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des dispositions si rigoureuses? Les avez-vous, à cause de ce dévouement même, si plein, si complet, si désintéressé, si simple à la fois et si magnanime, les avez-vous condamnées sans retour et sans espérance? Ne peut-on vous demander grâce au moins pour l'humble religieuse qui attire elle-même les grâces du ciel sur l'Église, sur la France, sur vous-même, Monseigneur, par ses saintes austérités et par ses prières? au moins pour la fille charitable dont la vie modeste et cachée se partage entre le soin de l'enfance et les œuvres de miséricorde envers l'indigent? au moins pour la sœur hospitalière, qui, au moment peut-être où vous invitiez la Chambre à prononcer, contre l'institut où elle puisa l'esprit de sacrifice qui l'anime, une sorte de sentence de mort, soulageoit sans doute, dans un hôpital, quelque malade délaissé du monde, abandonné des siens, ou, comme un ange de consolation, adoucissoit le dernier passage à un agonisant? Monseigneur, craignez plus encore les larmes et les regrets de l'enfance, les gémissements de la misère désormais écoutés de Dieu seul les plaintes solitaires des mourants, le silence des cellules où la prière cessera, que de vous précipiter dans le bien!

NAZON.

Nazon a peu d'esprit, mais il use toujours de tout l'esprit qu'il a. Il est incapable d'une haute pensée, mais il a une pensée constante, qui est lui-même : laissez le faire; il a résolu d'arriver, il arrivera. Il est propre aux petites choses, c'est déjà beaucoup; il n'est pas propre aux grandes, c'est encore plus. Qui oseroit lui contester d'être supérieur à ce qui n'est rien? Ne ́sait-il pas lire, calculer, parler, et surtout se taire? Entre le oui et le non, le vrai et le faux, il y a toujours pour lui un milieu sûr: le silence. Il a trouvé un autre milieu entre le bien et le mal, entre les intérêts de la société et les intérêts de ceux qui l'attaquent, et ce milieu, c'est sa conscience; sa conscience est donc également utile à la société et aux ennemis de la société; sa conscience parviendra donc. D'ailleurs, comment douter qu'il soit nécessaire au salut de l'État, lorsqu'il l'a dit et redit tant de fois, et qu'il le croit peut-être? Ses talents, qui les ignore? Ne s'est-il pas fait applaudir alternativement par tous les partis? N'a-t-il pas plus d'une fois négocié avec avan

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