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nable et révoltante doctrine', avoit séduit quelques esprits foibles, car c'est ainsi que le patriarche de la philosophie anti - chrétienne parle de ces hommes de ténèbres; mais jamais, avant nos jours, on n'avoit vu de lois athées, de sociétés athées; jamais on n'avoit dit à aucune nation: Il vous est libre d'abjurer la » foi de toutes les nations, d'oublier et de re» nier l'Auteur de l'univers, de vous déclarer » indépendante de son autorité souveraine, » de vous isoler de tous les âges, et de vous » créer, hors du genre humain, une nouvelle » existence, une nouvelle raison, de nouvelles >> lois et des mœurs nouvelles. » Jusqu'ici, tout ce qui fait les peuples, tout ce qui les conserve, descendoit du Ciel; mais on est las de ce passé, et l'on cherche l'avenir sur la terre. L'homme s'est chargé de son sort. Eh bien donc ! on saura ce que l'homme peut pour l'homme; et la politique, encore indécise, de notre siècle, trouvera peut-être, dans cette expérience, assez de lumières pour résoudre enfin la grande question de l'utilité de Dieu.

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• Dictionnaire philosophique, art. Athée, Athéisme, sect. 1.— Ibid., sect. 2.

(1823.)

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Depuis que la révolution d'Espagne penche vers son déclin; les feuilles libérales sont remplies de vagues déclamations sur la tolérance; elles réclament vivement en faveur des émigrés révolutionnaires une protection qu'elles s'indignoient qu'on accordât aux émigrés royalistes.

Ne nous est-il pas permis, disent-elles, de gémir en voyant que les lois de notre Europe, si fière de sa civilisation, ne protègent pas suffisamment ceux qui l'habitent ; qu'elle » n'offre pas un abri aux victimes des tempêtes » qui l'agitent, et que les partisans de la réforme politique ne trouvent pas même dans »les montagnes de la Suisse et dans les marais » de la Hollande l'asile qu'on n'y refusoit pas » aux partisans de la réforme religieuse '? » Ainsi la justice divine se manifeste tôt ou tard, et le monde reconnoît la main qui le gouverne. Lorsque les hommes de désordre ont bouleversé la société, renversé les trônes, aboli les 1. Constitutionnel du 16 juillet.

lois, exilé, proscrit tout ce qui s'opposoit à leur fureur, il arrive un moment où eux aussi ils ont besoin de pitié. Dieu ne la refuse jamais au repentir; mais l'homme, foible et misérable, la doit même au simple malheur; l'infortune, quelle qu'en soit la cause, est sacrée pour lui. Autres sont néanmoins, en plusieurs circonstances, les devoirs de l'autorité publique chargée de maintenir l'ordre général; elle seroit coupable si elle permettoit de l'attaquer impunément; elle détruiroit la civilisation dans son principe; nul État ne pourroit subsister: livré sans défense aux partisans de la réforme politique, le pouvoir deviendroit le jouet de toutes les ambitions; les droits, les propriétés, la vie des sujets fidèles seroient perpétuellement à la discrétion des réformateurs ; et c'est aussi pousser trop loin l'audace de l'absurdité, que de se plaindre des lois de notre Europe, qui ne protègent pas suffisamment ceux qui s'efforcent de les renverser.

Il y a, dans tout ce que les révolutionnaires disent aux peuples, un mépris inexprimable pour la raison de l'homme. On est quelquefois surpris de la hardiesse avec laquelle ils présentent comme d'incontestables vérités les plus ridicules extravagances. Mais ils savent que ce

sont les passions qui les écoutent, et qu'on peut tout faire croire aux passions.

Le même journal, dont nous venons de citer quelques phrases, s'écrie à propos d'une lettre publiée à Londres par J'ambassadeur persan :

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Quel contraste nous offre aujourd'hui le > monde politique! les proscriptions dans l'Europe civilisée, la tolérance dans l'Asie encore » barbare... A Madrid, on ose écrire que la re»ligion de Jésus-Christ est intolérante, des voix fanatiques invoquent le rétablissement » de l'inquisition; à Ispahan, un prince de la >secte d'Ali proclame qu'il respectera la liberté , de tous les cultes et de toutes les croyances. » Au centre des connoissances, de l'instruction, >on invoque l'ignorance, on met un embargo

sur tous les livres, et dans le fond de l'Asie > un gouvernement reconnoît que la propaga»tion des lumières est un bienfait pour les > peuples; enfin, dans notre Europe libre, au » nom d'une religion qui protège l'opprimé, et qui ne reconnoît entre le riche et le pauvre, » entre le puissant et le foible, d'autre distinc» tion que celle des vertus, on poursuit comme ⚫ criminel jusqu'au nom de ces idées libérales » dont le germe se trouve dans tous les livres > saints.

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Que la révolution soit le développement d'un germe qui se trouve dans tous les livres saints, c'est en vérité ce qu'on persuadera difficilement à notre Europe; il faudra que les lumières fassent encore beaucoup de progrès avant qu'elle comprenne comment les lois de la Convention, du Directoire et de l'Empire, voire même les lois des Cortès, ne sont qu'un commentaire de l'Évangile. Tous les hommes, riches et pauvres, foibles et puissants, sont égaux devant Dieu; qui en doute ? S'ensuit-il qu'il n'existe entre eux d'autre distinction sociale que celle des vertus? Jean de Leyde et ses disciples entendoient, il est vrai, l'Évangile de la même manière que les libéraux de notre temps; mais il est vrai aussi que cette manière savante de l'entendre produisit des maux sans nombre, et couvrit l'Allemagne de ruines et

de sang.

L'écrivain qui prêche ces étranges maximes reproche aux Espagnols leur inquisition. Nous n'invoquons pas son rétablissement en Espagne, car nous ignorons s'il seroit utile; mais nous osons dire que c'eût été un grand bonheur pour la Westphalie qu'elle y eût existé à l'époque où les anabaptistes interprétoient l'ÉcritureSainte comme l'interprètent aujourd'hui les

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