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tinuer. Le Marquis de Villadarias ne vou lant pas fervir fous un Etranger, demanda la permiffion de fe retirer, laiffant au Maréchal toute la gloire de cette conquête, s'il y pouvoit réüffir. Cependant le Roi l'obligea de demeurer, lui reprefentant qu'il étoit d'une extrême confequence, pour l'avantage & le repos de la Monarchie, de reprendre cette Place. Il l'exhortoit de donner fes foins, & d'agir de concert avec le Maréchal de Tellé, pour l'honneur & le bien commun de la Patrie. Ces raifons & le defir de plaire au Roi le perfuaderent.

Comme il étoit impoffible de réduire Gibraltar fans une armée Navale, qui fermât l'entrée aux nouveaux fecours que l'on introduifoit à tous momens dans la Place affiégée, le Roi d'Espagne donna ordre au Baron de Pointis de fe mettre promptement en Mer avec l'Escadre qu'il commandoit , pour aller devant Gibraltar, afin d'attaquer la Place par mer & par terre, & de finir ce Siége qui duroit depuis long-tems. Pointis avant que de mettre à la voile, alla en polte à Madrid, de Cadix où il étoit, pour reprefenter au Roi, & à fon Confeil, la difficulté de l'entreprise, & le danger où il expoferoit fon Escadre, dautant que les ennemis avoient trente gros vaiffeaux de guerre. L'envie extrême

La Flotte

que l'on avoit de reprendre Gibraltar, empêcha le Confeil d'Efpagne de faire attention aux remontrances de Pointis, & de condefcendre à ses raisons. Il fe rendit devant Gibraltar avec fon Escadre de treize vaiffeaux.

Dès que l'on fut averti de cette manœu vre à Lisbonne, les Anglois & les Hollandois mirent auffi à la voile, & parurent bien tôt devant la Place affiégée avec trente-cinq gros vaiffeaux de guerre. Le combat étoit trop inégal; les ennemis prirent trois vaiffeaux, deux furent échoüez & brûlez, après que l'on en eut fauvé les équipages; les autres avoient été feparez & difperfez par un vent violent. Une partie arriva heureufement à Toulon, & le refte à Cadix.

Ce malheur fit qu'on defefpera de poud'Espagne voir prendre Gibraltar quelques-uns. déeft battuë biterent fauffement qu'il y avoit de la jaloufie & de la mefintelligence entre le Ma

par les

Alliez,

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réchal de Teffé & Villadarias Au contraire, voyant que les ennemis avoient introduit un nouveau fecours dans 1. Place, & rafraîchi la garnifon, ils envoyerent de concert des couriers à la Cour de France & de Madrid, pour reprefenter l'état des chofes, & l'impoffibilité de réüffir à ce Siége, qui duroit depuis plus de fix mois. Ils demanderent des ordres précis,

& déclarerent que l'on ne prendroit jamais la Place, à moins que d'avoir une armée Navale fupérieure à celle des ennemis, pour empêcher les nouveaux fecours. On eut ordre fur ces remontrances, de changer le Siége en blocus; on y laiffa quatre cens hommes d'Infanterie & mille chevaux des troupes d'Efpagne.

Ce mauvais fuccès engagea les Efpa- 1705 gnols à faire de plus grands préparatifs qu'à l'ordinaire. Le Roi déclara qu'il commanderoit les troupes en perfonne, & qu'il iroit chercher les ennemis jufques fur leurs frontiéres. On lui envoya de France fix mille hommes de renfort. On avoit raison de mettre fur pied de nombreufes troupes, pour s'oppofer aux forces des Alliez, lef quels avoient fept armées, fans parler de leurs Flottes; ce qui n'eft pas fort difficile à comprendre, puifque l'Allemagne qui eft une pepiniere intariffable de foldats, l'Angleterre, le Portugal, la Savoye, la Hollande, & d'autres Puiffances encore, se voyoient réunies en cette querelle pour faire la guerre aux deux Couronnes

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Les fréquentes brouilleries & les conteftations qui naiffoient fouvent entre les Anglois & les Ecoffois, & qui étoient fort contraires aux interêts de la Caufe commune & des deux Nations, firent naître au Roi Guillaume la derniere année de fon

Regne,la pensée de réinir les deux Royau mes fous un même Parlement, en l'année 1702. Ce Prince déja infirme & moribond, Réunion écrivit à la Chambre des Communes une de l'an- Adreffe ou un Ordre, que l'on peut regleterre & de l'Ecofle, garder comme la bafe & le premier fondement de ce grand ouvrage. Il faifoit fçavoir à la Chambre qu'il y avoit des Commiffaires en Ecoffe, pour traiter avec ceux qui feroient nommez, des moyens de réunir les deux Royaumes. Ce Prince ajoûtoit dans fon Adreffe, que rien n'étoit plus capable de contribuer à la paix, à l'affermiffement, à l'agrandiffement, au bonheur des deux Nations, en confiderant l'état préfent des affaires, & la fituation de l'Europe,

La levée du fiége de Gibraltar après tant de dépenfes, & après avoir tant facrifié d'hommes & d'argent, mortifia infiniment le Confeil & la Cour de Madrid. On y fut allarmé de nouveau, par les menaces que faifoient les Alliez d'affiéger Cadix, & par les Flottes qu'ils envoyoient de ce côté-là. On fit en Espagne une levée de quinze mille hommes, pour veiller à la feureté de cette Place iinportante, & des plus riches de toute l'Espagne. Loiris XIV. nomma pour fon Ambaffadeur en cette Cour là Monfieur Amelot Confeiller d'Etat, homme d'une grande experience

dans les affaires difficiles, & doiié d'une rare prudence, & d'un grand fang froid; ce qui pouvoit le rendre encore plus agréable aux Efpagnols, quoi que ce fût la coûtume ordinaire de leur envoyer des gens d'épée pour Ambaffadeurs. M Amelot alloit remplir la place du Duc de Grandmont. Le Roi de France dit à ce propos une chofe peu flatenfe pour fes Courtifans qu'il n'avoit perfonne à fa Cour qui fûc capable des affaires dans ces conjonctures difficiles.

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Quoi que la confpiration de Naples eût été heureusement découverte & affoupie, quoi que l'on eût exilé, ou fait mourir plufieurs des Conjurez, cependant tous les complices ne pûrent être découverts ni rêtez. Le Prince de Machia entreprit une feconde fois de faire foulever les peuples de Naples contre le Roi Philippe V. en faveur de la Maifon d'Autriche. Il fit répandre & afficher un grand nombre de billets dans les principales places de la Ville en fon nom, & au nom de quelques Seigneurs Napolitains attachez à la Maison d'Autriche, pour exhorter les habitans de Naples à feconder l'entreprise de la Flotte Angloife & Hollandoife qui alloit paroître fur leurs bords, & faire un grand débarquement de troupes dans leRoyaume. On permettoit à ceux qui voudroienr fa

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