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LA CLEF DE L'ÉNIGME

SUR LES CAUSES SECRÈTES D'UN PROCÈS MÉMORABLE.

DANS un royaume, que je vais nommer, des SAB-SYAP, régnait, en l'an 1821, un souverain très-sage. Ce prince avait réuni sous sa domination deux peuples différens. Leurs coutumes ainsi que leur langage les rendaient ennemis naturels, et d'autant plus que l'on prétendait faire payer aux uns les dettes contractées par les autres. Un ministre, devenu célèbre sous les gouvernemens qui s'étaient succédé depuis la révolution EVATAB, semblait vouloir réunir ceux qu'il avait les plus divisés. D'accord avec l'aigle de la finance des sept provinces unies, il proposa au roi des saB-SYAP un supplément d'impôts, impôts qui, selon lui, devaient enrichir le royaume et épuiser les ressources des sujets. On commençait à murmurer hautement contre les taxes nouvelles, surtout contre celle qui frappait la mouture. Quelques plaintes s'élevèrent et parvinrent jusqu'aux oreilles du prince héréditaire. Il les accueillit, et manifesta son intention de s'occuper des intérêts du pauvre. Les meneurs lancèrent leurs limiers jusqu'aux marches du trône pour empêcher la vérité de parvenir jusqu'au nouveau Charles v. Suivant eux, le salut de l'État se rattachait éminemment à cette grande mesure. Dès lors elle fut soumise aux lumières des députés des états-généraux du royaume. Bientôt les sycophantes triomphèrent de voir que le fils d'un roi, que l'héritier présomptif d'un aussi bel empire n'avait aucune influence dans les conseils !!! A les entendre, son opinion n'y était d'aucun poids. Ils firent plus, ils entreprirent même de former une division au sein de la cour. Là, on représentait au roi que son fils aîné désapprouvait les actes de son gouvernement; on

disait au moderne Titus que son père lui préférait un autre Frédéric. Tels étaient les discours imposteurs des fondateurs de la république EVATAB, des flatteurs de ETRAPANOB (SIUOL) et du ministre en crédit auprès de S. M, EMUALLIUG 1. Pendant quelques instans le beau-frère d'un CZAR devint simple sujet dans les états des SAB-SYAP (le bruit se répandit qu'il avait donné sa démission de la place de grand amiral, etc. ). On avait entrepris de blâmer la noble popularité de l'idole de la EUQIGLEB; on tentait tous les moyens de pouvoir l'humilier; on imagina même, pour jeter en quelque sorte le ridicule sur son auguste personne, ainsi que sur celle de la princesse son épouse, d'emprisonner une femme connue par diverses productions littéraires. La reine des SAB-SYAP, ses illustres enfans (protecteurs nés des lettres) avaient daigné encourager ses talens, et même lui permettre de leur dédier un livre sur le congrès d'Aixla-Chapelle, etc. Ainsi l'auteur, qui s'était vu dans SELLEXURB l'objet de la plus rare bienveillance, fut arrêté avec éclat le 18'avril 1821 et traité en criminel d'état. On fit le procès à ce livre fameux environné des plus honorables suffrages; on y découvrait, d'après un ministre de la justice et un procureur-général, le plan d'une conspiration imaginaire. (Elle leur semblait se diriger contre eux. x.) Ils en conclurent que les plus illustres personnages de l'État avaient visité l'étrangère, qu'elle entraînerait un jour tous les suffrages, méme celui de leur maître. (La haute sagesse de ce souverain, reconnue universellement, ne pouvait admettre que les réflexions contenues dans un ouvrage eussent pu motiver l'opposition formelle manifestée hautement contre les nouveaux impôts dont on menaçait son royaume.) Les ennemis du prince et de la princesse EGNARO'D répandirent à dessein les plus insidieux mensonges. Tantôt on avait découvert qu'une visite mystérieuse avait été faite à cette Delphis parisienne, par ceux que l'on se plaisait à désigner, et tantôt elle avait annoncé quelle serait l'époque de la vacance d'un trône. Alors on en vint à procéder criminellement contre une Française paisible, après l'avoir calomniée en tous sens. Les sicaires firent plus, ils osèrent la faire condamner à une année

d'emprisonnement, à 50 francs d'amende et aux frais du procès, comme ayant composé un livre mystique dédié et agréé par le fils aîné du roi des SAB-SYAP. Ce livre d'autant plus dangereux que les caméléons s'y trouvaient signalés, livre à jeter au feu !!! (son auteur ayant essayé d'enlever la fortune ou partie de la fortune de ses admirateurs.) On reversait le blâme sur les protecteurs pour avoir honoré d'une marque d'estime toute particulière une femme qui se trouvait sous le poids d'un jugement correctionnel. L'affront était sanglant pour ceux qui avaient daigné accueillir ses œuvres. Mais les frelons politiques du royaume étaient loin de s'attendre à la belle et courageuse défense de la victime qu'ils prétendaient sacrifier à leur vengeance atroce. Durant CENT jours que dura ce procès fameux, le souverain maître des saB-SYAP avait gardé le plus morne silence. Son cœur souffrait d'une injustice aussi révoltante; son devoir lui imposait rigoureusement de s'en rapporter à la conscience des juges et à la justice de son ministre de la justice. Le prince et la princesse héréditaires ne furent point dupes dcs courtisans pervers, ils répétèrent plusieurs fois : « Nous serions bien surpris que cette Française fût coupable?» Le second fils du roi, qui l'avait jugée sans la connaître, revint aussitôt de ses préventions; il admira comme tant d'autres sa constance dans le malheur et son éloquence persuasive à présenter ses moyens de défense. Dès lors il jugea que l'on avait voulu opérer une diversion favorable en faveur des Sigisbés qui surveillaient et désapprouvaient LL. AA. II. et RR., en appliquant à celle qu'ils avaient bien voulu distinguer une amende de 15 francs. Il dut penser que mademoiselle dnamroN eL, que l'amour seul de la gloire dirigeait vers SELLEXURB ne pouvait démériter d'elle-même; que celle qui fut honorée de la protection bienveillante du monarque frère de son auguste belle-sœur, n'avait pu ternir sa juste réputation; que l'éditeur des Mémoires d'une princesse regrettée de son siècle, Mémoires ornés du nom le plus auguste, Mémoires déposés par elle aux pieds du souverain des souverains, au milieu d'un conseil de rois, ne pouvait ni ne devait encourir aucune accusation ? L'émule du grand Frédéric se re

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cueillit dans ses pensées. Alors il dit : « Cette Française est digne » de ma protection et de celle de mon frère. Au souverain des » SAB-SYAP appartient cependant le droit de lui faire oublier ses » malheurs et de sévir contre ceux qui l'ont persécutée. Les coupables calomniateurs devraient être contraints à l'indemniser » eux-mêmes du tort irréparable qu'ils ont fait à sa fortune. C'est » à la justice de mon auguste père, c'est à celui qui donne l'exemple de toutes les vertus que j'en appelle ! lui seul a le droit de réparer et de punir les fautes de ses ministres. » (Le plus prévoyant d'entre > eux correspondait à la fois avec les trois prétendans à la cou»ronne du royaume des SAB-SYAP (en l'an 1813), noélopaN, » ETKAPANOB (SIUOL), et son maître légitime. Le prince EGNARO'D, ayant été rendu aux vœux de ses sujets, le protégé de Thémis se » prosterna humblement aux pieds d'un roi très-sage. Ce type > des courtisans obtint enfin de la bonté royale le pardon le plus généreux, au point qu'il possède aujourd'hui la confiance de » celui que naguère il avait fait proscrire !!! » Ainsi parle cet autre Frédéric. Ce prince se promit bien de mettre sous les yeux du Sé sostris SIADNALLOH un tableau fidèle des vexations et des abus de pouvoir dont les caméléons, qui ont figuré à toutes les époques, qui se sont illustrés à force de bassesses sous tous les règnes, se sont rendus coupables, notamment dans les sept provinces unies de la EDNALLOH. (Ce pays forme aujourd'hui la partie la plus intéressante du royaume des SAB-Sy1P. )

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FIN.

Mademoiselle Le Normand s'occupe de la seconde édition des Mémoires de l'impératrice Joséphine (Marie-Rose-Tascher de la Pagerie), première épouse de Napoléon Bonaparte). L'accueil dîstingué fait à cet ouvrage, honoré du nom et de la protection de S. M. l'empereur Alexandre, ont engagé l'éditeur à l'enrichir d'une foule d'anecdotes curieuses et inédites; il en est de rédigées par un prisonnier malheureux! Celui qui du faîte de la gloire militaire s'est vu précipiter au pied du roc de Sainte-Hélène dut citer souvent dans son exil le nom de Joséphine. Ce nom célèbre fut prononcé par lui à son moment suprême ! il crut la revoir en pensée, et s'endormit, dit-on, d'un sommeil plus tranquille !!! Les notes les plus précieuses ont été remises à mademoiselle Le Normand, en Belgique, par l'une des personnes attachées à l'ex-empereur, et qui ne l'ont point abandonné pendant le cours de sa dernière infortune. Un prospectus annoncera très-incessamment l'époque précise à laquelle doit paraître cet intéressant ouvrage.

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