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A

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dans l'intérieur d'une sphère dont la densité est uniforme l'énergie de la pesanteur est proportionnelle à la distance au centre; en sorte que s'il était possible d'arriver à ce lieu la tendance des corps à tomber serait absolument nulle, ce qu'il est d'ailleurs aisé de prévoir, puisqu'ils seraient alors également attirés dans tous les sens.

La rotation de la terre autour de son axe, en lui donnant la figure d'un sphéroïde aplati vers les pôles et renflé sous l'équateur, fait que les corps placés à sa surface ne sont pas à la même distance de son centre. De plus, comme tout corps qui circule est animé d'une force qui tend à l'écarter du point autour duquel il se meut, on conçoit qu'à l'équateur ces deux causes réunies affaiblissent l'action de la pesanteur. Aussi, en nommant G l'énergie de cette force sous la latitude de 45°, en un lieu dont la latitude esto, elle devient G' = G (10,002837 cos 2 g); enfin elle serait tout à fait nulle à l'équateur si la durée de la révolution diurne de la terre était dix-sept fois moins longue.

THILLAYE.

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PESTE. (Médecine.) La peste est une maladie de tout l'organisme, caractérisée par de la fièvre, des bubons, des charbons et des pétéchies. Les noms de houós, pestis, sont donnés par les auteurs anciens à plusieurs maladies, qui ne paraissent pas pouvoir être toutes rapportées au type de la peste orientale, et dont un certain nombre n'avaient probablement de commun avec cette affection que le caractère épidémique. Jusqu'à ces derniers temps on croyait même que la peste d'Orient s'était montrée pour la première fois au sixième siècle de l'ère chrétienne; mais un passage de Rufus, conservé dans un livre inédit d'Oribase et publié par le cardinal Mai en 1831, prouve que la peste était connue et décrite dès le premier siècle. Voici la traduction de ce passage par M. Littré: « Les bubons appelés pestilentiels sont les plus dangereux et les plus aigus, tels qu'on les voit surtout dans la Lybie, l'Égypte, et la Syrie, et dont a fait mention Denys surnommé Kyrtus. Dioscoride et Posidonius s'en sont surtout occupés, au sujet de la peste qui régna de leur temps en Lybie. Ils disent que dans cette peste il y avait une fièvre aiguë, de la douleur, une tension de tout le corps, et le développement de bubons volumineux, durs, et qui ne venaient pas à suppuration. Its se développaient non-seulement

dans les lieux ordinaires, mais encore aux jarrets et aux coudes (1). »

Rufus vivait sous Trajan; Denys Kyrtus,' Dioscoride et Posidonius lui étaient antérieurs, et par conséquent la peste d'Orient, qu'on ne peut méconnattre dans la description de Rufus, s'était montrée dès avant le premier siècle. Ce point une fois démontré, certains passages d'autres auteurs, et notamment d'Hippocrate, exclus de la question quand on regardait la peste comme une affection récente comparativement, prennent une importance évidente. Le même Rufus (dans Aétius) s'exprime ainsi : « Tous les symptômes les plus terribles surviennent dans la peste...; ils sont multipliés et variés délires de toute espèce, vomissements de bile, tension des hypochondres,... hémorrhagies nasales, chaleurs dans la poitrine,' langues brûlées, insomnies, spasmes violents. Il survient aussi dans la peste des ulcères de mauvaise nature, charbonneux et très-redoutables... (2). « Les bubons pestilentiels, dit Arétée, dépendent du foie, et sont extrêmement funestes. » Cicéron (3), Pline, Posidonius dans Strabon, Théophraste dans Athénée, parlent de pestes sévissant en Égypte ou détournées de ce pays sous l'influence de causes diverses. Hippocrate enfin, dans ses Aphorismes, et surtout dans le deuxième livre des Épidémies, parle de la coïncidence de la fièvre et des bubons dans des termes qui pourraient s'appliquer à la symptomatologie de la peste.

On est donc fondé à dire, avec M. Littré, que parmi les diverses maladies désignées sous les noms de loimos, de pestis par les auteurs anciens, il faut compter la peste d'Orient.

En revanche, la description des symptômes caractéristiques de quelques-unes des épidémies de l'antiquité ne permet pas de les confondre avec la peste à bubons, bien qu'elles soient appelées pestes par les auteurs qui en parlent. Ainsi, la peste d'Athènes dont Thucydide nous a laissé la description, l'épidémie qui attaqua l'armée carthaginoise devant Syracuse, et celle qui sous Marc-Aurèle ravagea l'Italie et les Gaules, étaient caractérisées par une éruption sur toute la surface du corps, se montrant à une époque déterminée, donnant lieu à la formation de croùtes, et s'accompagnant de symptômes généraux que leur siége et leur nature rapprochent beaucoup de ceux des fièvres éruptives. Ces trois épidémies, à peu près identiques entre elles, doivent-elles se rapporter à la variole? C'est ce qui n'est pas suffisamment établi; mais il est certain qu'elles ressemblaient plus à cette affection qu'à la peste d'Orient, bien,

(1) OEuvres d'Hippocrate, t. II, p. 884.
(2) Littré, OEuvres d'Hippocrate, t. V, p. 57.
(5) De Natura Deorum, 1, 36.

qu'on ait toujours désigué sous le nom de peste l'épidémie d'Athènes et celle du deuxième siè cle, ou peste antoninienne.

Des auteurs recommandables ont pensé que la peste du quatorzième siècle, ou peste noire, devait aussi être distinguée de la peste d'Orient, parce qu'aux symptômes ordinaires de celle-ci on voyait se joindre dans la peste noire la gangrène des poumons. Cette opinion❘ n'a pas prévalu.

Nous avons vu, en parlant des épidémies, quels ravages la peste a faits depuis le sixième siècle jusqu'au commencement du dix-neu vième. Il est à remarquer que l'Afrique, l'Europe et l'Asie ont été seules atteintes par ce fléau, qui ne s'est jamais montré en Amérique. Après avoir élu domicile dans l'Europe occidentale, où pendant douze siècles elle ne cessa de frapper des régions plus ou moins étendues, elle a quitté nos contrées; depuis 1815 (peste de Noja) on ne l'y a pas vu sévir, même sur des points isolés. Elle semble main. tenant confinée dans les pays qu'on a considérés comme son berceau, et même à partir de 1835, époque où elle décima la Turquie et l'Égypte, on ne l'a pas vu reparaître en Orient sous forme épidémique. Depuis des siècles peut-être l'Égypte n'avait pas vu la peste assoupie durant un si long espace de temps. Doitelle se réveiller un jour ? Reprendra-t-elle jamais le chemin de l'Occident? Pour répondre à ces questions il faudrait avoir sur l'étiologie de la peste des notions que la médecine ne possède pas encore. On doit, avec M. Littré, la considérer comme un ennemi lointain, mais dangereux encore, et qui réclame sans cesse la vigilance de l'administration et l'étude du médecin.

Plusieurs causes, telles que la constitution épidémique, la période de l'épidémie, l'état sporadique, influent sur le développement des symptômes de la peste; c'est ainsi que l'on trouve dans les auteurs des observations de malades succombant presque aussitôt après avoir été atteints, et quelquefois n'ayant présenté que des phénomènes peu caractéristiques, tandis que chez d'autres la maladie se développe avec un long cortége de symptômes. Les vomissements se montrent en général au début; l'intelligence, quelquefois intacte, est ordinairement sous l'influence de l'état typhoïde; souvent le délire s'empare du malade dès l'invasion; souvent aussi la douleur est nulle, excepté sur les points où s'est développé un bubon ou un charbon. Le pouls est presque toujours fréquent, petit et dépressible. L'époque où se montrent les bubons et les charbons n'est pas constante; mais les autopsies tendent à établir que chez tous les pestiférés les ganglions lymphatiques sont plus ou moins engorgés. La plupart des personnes qui sont ex

posées à l'influence épidémique de la peste éprouvent d'ailleurs une sensibilité anormale des ganglions lymphatiques, et chez tous ou presque tous ceux qui ont été précédemment atteints les cicatrices de bubons ou de charbons deviennent douloureuses. On ne saurait faire de la peste, comme de quelques autres maladies, une description qui présente en peu de lignes le tableau des phénomènes morbides. A côté d'un malade dans la stupeur et le délire, couvert de pétéchies, de charbons et de bubons, les auteurs nous en montrent un autre atteint d'un bubon ou d'un charbon, presque sans fièvre, vaquant à ses affaires et pouvant dissimuler sa maladie.

M. Aubert-Roche a parfaitement exprimé ce que la symptomatologie de la peste offre de vague en disant : « Il n'existe pas de maladie que la peste ne simule lors de son début; les médecins même les plus habitués à voir des pestiférés s'y trompent quelquefois : ils prennent des pestes pour d'autres maladies et d'autres maladies pour des pestes. »

Les charbons et les bubons se montrent tantôt séparément, tantôt ensemble. On les observe sur toute la surface du corps; mais ils sont plus ou moins redoutables, suivant qu'ils siègent sur tel ou tel point. Ainsi les charbons qui se développent à la face ou dans la région cervicale peuvent ameuer la mort par suffocation; il en est de même des bubons: on craint aussi de voir ces derniers se développer au pli de l'aine, parce qu'ils peuvent causer la formation d'abcès dans le bassin.

L'anatomie pathologique a démontré comme généraux les faits suivants : des péléchies et des ecchymoses dans la plupart des viscères; la vésicule du fiel remplie d'une bile épaisse et visqueuse; des charbons aux poumons et aux reins; le sang tiré de la veine ne se sépare pas en cruor et en sérum, il se décompose rapidement; toujours le système ganglionnaire a été trouvé malade, qu'il se fût ou non montré des bubons; la rate est plus grosse, et ramollie: elle se déchire au moindre contact; tous les organes parenchymateux sont gorgés de sang noir. M. Aubert Roche a vu un grand nombre de fois les ganglions dụ grand sympathique d'un rouge lie de vin à l'intérieur, engorgés et parsemés d'une foule de petits points rouges.

Le pronostic, toujours grave dans une pareille maladie, est l'objet d'un grand nombre d'indications de la part des loïmographes. Il serait trop long de rapporter ici les signes donnés par eux comme annonçant une terminaison heureuse ou funeste.

Quant au traitement, il a varié suivant les écoles et les doctrines, autant et plus que suivant les épidémies. La saignée et les débilitants en général ont été presque complétement abandon

nés dans les pestes de 1834 et 1835; l'émétique, les toniques et les antiseptiques ont au contraire donné de bons résultats. Le cautère actuel employé par M. Aubert est présenté par cet observateur comme un moyen utile, surtout quand on l'applique dès le début conjointe. ment avec les sinapismes et les vésicatoires, M. Aubert a tenté aussi avec succès dans quelques cas l'emploi du phosphore et du bachisch.

En résumé, pour la peste comme pour le choléra, le typhus et tant d'autres affections, la médecine ne connaît pas de thérapeutique spécifique, et se borne à remplir les indications que lui fournit l'observation du malade et de la constitution épidémique.

La grande question de la contagion domine toutes les autres dans le sujet qui nous occupe, et malheureusement on n'est nullement d'accord sur ce point. La science a fait pourtant quelques progrès à cet égard depuis un demisiècle, et surtout depuis quinze ans. L'opinion admise, à l'exclusion de toute autre, par les populations franques du Levant, et suivant la quelle la peste serait transmissible par le contact du malade ou des objets contaminés, mais nullement par la voie de l'air, et n'aurait rien de commun avec les maladies épidémiques, cette opinion est à peu près abandon. née, par les médecins du moins et par les hommes éclairés.

La transmission par le contact ou par l'inoculation, admise comme un fait certain par quelques observateurs, est considérée comme douteuse ou complétement niée par d'autres. Enfin des auteurs recommandables pensent que la peste peut se transmettre par voie d'infection, c'est-à-dire par l'absorption à la surface des muqueuses de l'air vicié.

L'influence épidémique n'est guère plus révoquée en doute pour la peste que pour la variole, et parmi les médecins contagionistes il en est même qui n'admettent la contagion comme possible que sous l'influence des prédispositions épidémiques. Les faits les plus curieux ont été cités à l'appui de ces diverses opinions; mais leur importance même interdit une conclusion au lecteur, qui ne peut que douter en présence de résultats opposés.

L'article ÉPIDÉMIE de cette Encyclopédie contient un tableau chronologique des pestes dont les auteurs font mention; par une erreur, que nous rectifions ici, nous avons omis dans ce tableau et placé parmi les épidémies de typhus, la peste de Nimegue (1635), observée et décrite par Diemerbroeck.

Hippocrate, OEuvres complètes, traduction de M. Littré, t. II, p. 584; t. III, p. xxxví; t. IV, p. 414; t. V, p. 48.

Boccace, Il Decameron, introduction.

B. Littré, dans le Dictionnaire de Médecine en

30 vol., article PESTE. Cet article est suivi d'une bibliographie très-étendue.

Prus, Happort à l'Académie royale de Médecine sur la peste et les quarantaines; Paris, 1846, in-8°. A. LEPILEUR.

PESTH. (Géographie et Histoire.) Pestum ou Pestinum en latin, Pessi en Magyar. Ville de Hongrie, chef-lieu d'un comitat du même nom. Population : 51,000 habitants.

Le premier fait certain de l'histoire de Pesth est l'établissement d'un péage sur le Danube par le roi Pésa, le même prince qui accorda aux missionnaires chrétiens l'autorisation de prêcher leur religion dans ses États. Cette ville fut saccagée par les Mongols en 1241; les États de Hongrie y reconnurent, en 1310, Charobert pour leur roi. Elle tomba en 1526 au pouvoir des Ottomans, auxquels le traité de Grand-Varadin, signé deux ans après, sembla devoir en assurer la possession. Ferdinand d'Autriche la leur reprit cependant en 1540; ils y rentrèrent la même année; l'ar. chiduc Mathias la leur reprit en 1612; enfin, ils y rentrèrent encore l'année suivante, et la gardèrent jusqu'en 1684. Forcés alors de l'abandonner pour toujours, ils détruisirent ses fortifications, et la ruinèrent complétement.

Elle ne fut définitivement réunie à l'Autriche qu'en 1686. De nouveaux colons, la plupart Allemands, s'y établirent; et, grâce à son excellente position commerciale, elle reprit bientôt sa prospérité. Les empereurs d'Allemagne s'efforcèrent de réparer ses anciens désastres, et lui rendirent les priviléges de ville impériale, dont elle avait autrefois joui. On y établit en 1723 et 1724 les tribunaux suprêmes du royaume; on y construisit en 1727 un hôtel des Invalides; Joseph II y transféra en 1784 l'université de Bude; il y bâtit un séminaire et un hôpital, et pendant la guerre avec la Hongrie il en fit l'entrepôt de ses approvisionnements. Dès lors l'histoire de Pesth se lie intimement à celle de la Hongrie, et ses accroissements successifs sont les seuls faits qui puissent être relevés.

Regardée comme la plus belle et la plus inportante ville de ce pays, Pesth justifie cette réputation par la beauté de ses rues, de ses maisons, de ses édifices, et par l'activité industrielle et commerciale de ses habitants. Des faubourgs et des jardins l'entourent, et lui donnent l'aspect le plus agréable. Elle est située sur la rive gauche du Danube, et se divise en deux parties, l'ancienne et la nouvelle; elle est fortifiée par une enceinte, un fossé et un château.

Parmi les monuments de cette ville on distingue l'hôtel des Invalides ou la grande caserne; une autre immense caserne, où se trouve le dépôt militaire de toute la Hongrie ; le théâtre, qui passe pour l'un des plus grands

de l'Europe; les bâtiments de l'université. On y compte quinze églises, dont onze catholiques, deux grecques, une luthérienne, une réformée, et différents couvents.

Pesth peut passer après Vienne pour la ville la plus commerçante des bords du Danube; il s'y fait en effet un commerce important de denrées coloniales, de grains, de vins, de laine, de bois, de bestiaux, de cire, de miel, de tabac, etc.

Steph. Katona, Historia Regum Hungariæ; Pestini, 1779-1806, 41 vol. in-8°.

Jo. Chr. Von Engel, Geschichte des Ungrischen Reichs; Wien, 1814-1815, & vol. in-8°.

Scham, Description complète de la ville de Pesth; Pesth, 1820.

ACHMET D'HÉRICOURT.

PÉTRIFICATION. (Histoire naturelle.) Ce nom a été appliqué aux fossiles qui proviennent de parties organisées, dont les molécules détruites ont été remplacées par des molécules minérales. Nous renvoyons le lecteur aux mots FOSSILES et PALÉONTOLOGIE, ainsi qu'à quelques articles spéciaux.

E. DESMAREST.

PÉTROLE. (Minéralogie.) Substance liquide à la température ordinaire. Couleur variant du blanc jaunâtre au brun noirâtre; on a donné le nom de naphte au pétrole blanc jaunâtre. La densité varie de 0,75 à 0,85. Cette substance s'enflamme facilement; le naphte est même si volatil, qu'il prend feu avant que le corps en combustion l'ait touché.

L'analyse a fait reconnaître que le pétrole est composé de carbure d'hydrogène mélangé de diverses matières, et particulièrement d'un corps particulier, nommé pétroléine par M. Boussingault. Le pétrole brunit et s'épais. sit par l'exposition à l'air et à la lumière. Il paraft intimement lié au grizou, avec lequel il a, du reste, une grande analogie de décomposition. Ses sources gisent toujours dans le voisinage des lieux où se dégage ce gaz si dangereux pour les mineurs. On en connaît quelques-unes en Europe, dans les terrains volcaniques; mais les plus abondantes se trouvent en Asie, et principalement sur les rives de la mer Caspienne.

On retire, par la distillation, de certains schistes bitumineux, surtout de ceux du terrain pénéen des environs d'Autun, une huile minérale qui est une variété de pétrole, et que l'on emploie actuellement, avec succès, à l'éclairage. Le pétrole provenant de Grèce et d'Asie est employé au même usage depuis une haute antiquité; on s'en sert pour la fabrication des vernis; enfin, on en fait usage en médecine sous le nom d'huile de Gabian. ROZET.

PHARE. (Technologie.) On appelle ainsi des feux allumés la nuit sur des tours éle

vées sur les côtes, et qui servent à guider la marche des vaisseaux, en leur indiquant les points les plus remarquables du littoral, les écueils, l'embouchure des fleuves, ou l'entrée des ports. L'usage de ces feux pour aider à la navigation remonte aux époques les plus reculées. Les tours de Sestos et d'Abydos, fameuses dans l'antiquité, étaient des phares. Pharos fut autrefois le nom d'une fle voisine de l'ancienne Canope, et plus voisine encore de la ville qu'Alexandre fonda près de la bouche occidentale du Nil. Ptolémée-Philadelphe y avait fait construire une magnifique tour à feu, élevée de trois cents coudées et qui s'apercevait à cent milles en mer. C'est de cette tour, l'une des sept merveilles du monde, que les constructions qui nous occupent ont emprunté leur nom. Les Romains construisirent aussi des phares on voyait même encore en 1643 des restes de celui qu'ils avaient élevé à Boulogne pour diriger les navires qui traversaient la Manche.

Les phares ont été éclairés jusque dans le siècle dernier avec des feux de bois ou de charbon de terre, que l'on entretenait avec beaucoup de soin pendant la nuit. Le chevalier Borda eut le premier l'idée de remplacer cet éclairage imparfait par des lampes à réflecteurs. C'était un premier perfectionnement, qui fut suivi, vers 1785, d'un second, dû à M. Lemoyne, maire de Dieppe, et qui consistait dans l'emploi des lampes d'Argant à double courant d'air, qui donnent bien plus de lumière. Vers la même époque, en 1784, M. Lemoyne avait proposé, dans un mémoire lu à l'Académie des Sciences, la résolution d'un problème que Borda avait déjà cherché à résoudre, et qui consistait à donner aux navigateurs un moyen certain de distinguer la lumière d'un phare d'une étoile de première grandeur qui serait située près de l'horizon, ou d'un feu allumé par hasard près du rivage, ou même de distinguer les phares entre eux pour ne pas prendre l'un pour l'autre; car on comprend que de semblables méprises peuvent arriver, et on en a eu beaucoup d'exemples : dans ce cas les phares sont plutôt funestes qu'utiles aux navigateurs. Borda avait proposé de faire disparaftre la lumière après des intervalles égaux en employant des feux tournants et à éclipses. M. Lemoyne offrit de faire tourner non pas le feu lui-même, mais des écrans qui en tournant autour de la lumière au moyen d'un mouvement d'horlogerie, produiraient une suite d'éclipses dans l'ordre qu'on voudrait. Mais ce projet ne fut pas mis à exécution. Cependant depuis lors les phares ont reçu de très-grands perfectionnements: les réflecteurs paraboliques ont été substitués aux simples Téflecteurs; les réflecteurs paraboliques en métal, qui, quoique préférables aux réflecteurs

simples, présentent cependant des inconvénients, comme, par exemple, d'être trèspesants et d'absorber beaucoup de lumière, ont été remplacés eux-mêmes par des lentilles dioptriques en cristal; l'éclat des lampes a été augmenté par l'emploi de mèches concentriques à double courant d'air; enfin l'idée de Lemoyne relativement aux feux à éclipses a été appliquée et perfectionnée. On a d'abord réuni tous les rayons lumineux en un seul faisceau, qui est visible à une bien plus grande distance; puis on a fait tourner le réflecteur lui-même. De cette manière le même faisceau est constamment utilisé en parcourant successivement les différents points de l'horizon. Ce perfectionnement est dû à un Suédois. Tous les autres datent à peine d'une vingtaine d'années, et on les doit à MM. Arago et Fresnel, particulièrement à ce dernier, qui peut être regardé comme le créateur du système d'éclairage de nos côtes.

Pour la parfaite sûreté de la navigation', il est nécessaire que les principaux pliares, qui d'ailleurs doivent être placés sur les caps les plus saillants et les pointes les plus avancées, puissent être aperçus d'aussi loin que possible, et soient entre eux à des distances telles que lorsque dans les temps ordinaires, en longeant les côtes, on commence à perdre de vue le phare dont on s'éloigne, on aperçoive celui dont on se rapproche. Il faut encore qu'on ne puisse, dans une étendue déterminée par la plus grande erreur dont la position d'un vaisseau en mer soit susceptible, être dans le cas de se tromper, en prenant un phare pour un autre ; d'où il résulte la nécessité de varier l'apparence des phares de manière qu'il ne s'en trouve jamais deux d'une apparence semblable dans une étendue de côte moindre que le maximum d'erreur qui peut affecter la position d'un vaisseau.

Sur nos côtes les phares de premier ordre sont situés à 14 ou 15 lieues marines les uns des autres; c'est-à-dire à une distance plus grande que l'erreur dans laquelle peut être un bâtiment sur sa véritable route. Il y en a de plus un autre plus petit dans le milieu de l'intervalle, qui sert à indiquer la ligne des côtes. Ce qui est important, c'est de disposer celui-ci de manière qu'il ne puisse être confondu avec l'un des deux grands entre lesquels il se trouve, ce à quoi il est fa cile d'arriver par un petit nombre d'espèces d'éclairages. De plus, il y en a d'autres qui ne sont destinés qu'à indiquer la route qu'il faut suivre pour éviter certains écueils ou pour pénétrer dans certaines passes. Ces derniers, qui n'ont pas besoin d'être vus d'aussi loin, ne doivent pas présenter une lumière aussi intense. Cependant comme il est nécessaire qu'ils aient plus ou moins de portée, selon

leur position, il s'en trouve de plusieurs grandeurs. Nos phares sont donc partagés en quatre classes de grandeurs et de portées différentes :

Les phares de premier ordre, qui servent à faire reconnaitre les parages, et, pour les bâtiments qui viennent du large, à corriger l'estime;

Les phares de deuxième et de troisième ordre, qui indiquent les écueils, les baies et les rades foraines;

Enfin les phares de quatrième ordre, qui signalent les passes, l'embouchure des fleuves et l'entrée des ports.

Les moyens de distinction qu'on a employés sont de placer sur certains phares des feux fixes, c'est-à-dire qui éclairent constamment tous les points de l'horizon; sur d'autres, des feux à éclipses séparées par des intervalles plus ou moins longs; sur d'autres enfin des feux fixes mais variés par des éclats périodiques très-brillants. Toutefois les feux à éclipses sont les plus communs de tous; seulement les éclipses périodiques se représentent après des espaces de temps différents pour chaque phare, et cela peut suffire pour empêcher toute confusion. On a aussi essayé d'employer des verres de couleur pour les phares de quatrième grandeur; mais on y a renoncé, parce que ces verres absorbaient beaucoup de lumière et étaient plutôt une cause d'erreur, par la raison que certains états de l'atmosphère peuvent changer la teinte habituelle des lumières au point même de faire paraître colorés des feux blancs, qu'il eût été très-facile ainsi de confondre avec d'autres.

Les différents points du littoral n'offrant pas les mêmes dangers, il y a nécessairement des parties qui ont besoin d'être plus ou moins éclairées. Ainsi les côtes plates, sablonneuses, formées de terrains d'alluvion, telles que celles qui se trouvent depuis la frontière de Belgique jusqu'à Eu, offrant beaucoup de bancs et de hauts-fonds et presque pas de lieux de refuge, sont très-peu fréquentées, et n'ont, par conséquent, besoin d'être signalées que par un petit nombre de phares. Aussi sur cette partie de nos côtes n'en a-t-on construit que pour indiquer les ports de Dunkerque, Calais, Boulogne et Saint-Valery. Après la ville d'Eu ce ne sont que des falaises escarpées jusqu'à l'embou chure de la Gironde. Ensuite on retrouve des côtes plates qui s'étendent au delà de Bayonne. Les côtes à falaises offrent générale. ment de bons mouillages et de grandes profondeurs d'eau jusqu'au pied des terres; elles sont par conséquent peu dangereuses et bien plus fréquentées aussi est-ce entre l'embouchure de la Seine et celle de la Gironde que nous avons le plus de phares, surtout dans la

:

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