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comme irrecevable l'action en payement ou en dommages-intérêts formée par un concessionnaire porteur d'un traité en due forme; - Que la seule conséquence à en tirer serait le droit pour la personne assujettie de discuter les prix du tarif qui lui paraîtraient excessifs pour les faire ramener dans de justes limites en rapport avec l'importance du service rendu et la valeur réelle des fournitures faites avec bénéfice normal; Sur le troisième moyen : - Défaut d'approbation du traité de rétrocession par l'autorité préfectorale Considérant qu'aux termes des articles 22 du décret du 23 prairial an XII et 7 du décret du 18 mai 1806, les fabriques affermant le droit qu'elles ont de faire les fournitures funéraires ne peuvent ainsi agir qu'en soumettant leurs traités à l'approbation des autorités civiles. sous la surveillance desquelles elles sont placées; Que la nécessité de cette approbation procède de l'état de minorité des fabriques, qu'elle est une mesure de prévoyance dans l'intérêt des assujettis, permettant à l'autorité supérieure de rechercher si l'entrepreneur préposé présente les aptitudes et les garanties suffisantes pour la bonne exécution du service; Que ladite approbation s'impose aussi bien au traité primordial passé par la fabrique qu'aux rétrocessions pouvant intervenir successivement, autrement il pourrait arriver que des garanties reconnues suffisantes lors du traité originaire disparaissent progressivement sans recours contre l'entrepreneur primitif, ou encore que le premier traité n'eût été passé que dans le seul but d'arriver à bref délai à une rétrocession en dehors de tout

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traité du 14 novembre 1896 stipulait en son article 9 que l'Entreprise des Pompes funèbres générales ne pouvait en céder le bénéfice total ou partiel sans le consentement écrit des fabriques; Qu'il ne résulte pas de cette stipulation que la rétrocession pouvait, ainsi qu'il a été prétendu, avoir lieu en dehors de l'approbation préfectorale qui est la règle en pareille matière, l'autorité supérieure ne pouvant être considérée comme ayant abandonné par avance l'exercice d'un droit expressément écrit dans la loi; · Considérant que quiconque est actionné en dommages-intérêts pour prétendu trouble à l'exercice d'un droit, est évidemment fondé à exiger justification que le droit, base de l'action, réside régulièrement en la personne de son adversaire demandeur, alors surtout qu'il s'agit d'un privilège, le droit en vertu duquel se dit agir aujourd'hui la Société anonyme des Pompes funèbres générales étant ainsi reconnu par la jurisprudence et les auteurs; et les auteurs; Qu'en matière de privilège, tout est de droit étroit; que l'on ne saurait comprendre les dispositions des décrets des 23 prairial an XII et 18 mai 1806 appliquées stricto jure, alors qu'une Compagnie subrogée aux fabriques exercerait une action en payement ou en dommages-intérêts et interprétées lato sensu, lorsque ladite Compagnie serait appelée à remplir ses obligations au premier rang desquelles figure celle d'établir régulièrement sa qualité pour agir; Que cette justification demandée par Richard ne discute en aucune façon le droit des fabriques, mais seulement la rétrocession du 6 janvier 1899 par

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l'Entreprise à la Société anonyme, | régularité résultant de ce mode de

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rétrocession qui est avant tout un acte de commerce ayant pour unique but la spéculation, si l'on remarque que l'Entreprise, passant en novembre 1896, avec les fabriques d'Épernay, un traité de neuf années, n'avait plus à cette époque d'existence légale que pour deux ans un mois et quelques jours, prévoyant la liquidation statutaire fixée au 31 décembre 1898, pour céder avantageusement son fonds commercial et les droits y attachés; - Considérant que l'acte de rétrocession du 9 janvier 1899 par l'Entreprise à la Société anonyme n'a pas été approuvé par l'autorité. compétente; - Que si, comme il a été soutenu, il peut être suppléé à l'irrégularité d'un traité par sa ratification tacite ou son exécution volontaire, encore est-il nécessaire que ledit traité ait été connu de ceux par qui on prétend qu'il aurait été exécuté ou ratifié; - Qu'il en a été ainsi décidé par les décrets rendus en Conseil d'État les 7 avril 1864 et 28 avril 1868, maintenant à l'encontre de la ville de Paris au profit de Lenglé et C° divers traités qui, n'ayant point reçu à leur origine l'approbation de l'autorité supérieure, étaient néanmoins connus par l'administration préfectorale par ce fait que, durant plusieurs années, elle avait approuvé le budget de diverses communes portant en recettes la part leur revenant dans les produits de l'Entreprise Lenglé; - Que l'arrêt de cassation du 10 mai 1870, alors qu'il s'agissait d'une fabrique ayant affirmé ses droits par traité de gré à gré et non par adjudication publique, ainsi qu'il est dit au décret de 1806, décide, il est vrai, que l'ir

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procéder pouvait être couverte par « l'exécution volontaire »>, mais ajoute, « et par l'approbation de l'autorité supérieure », ce qui implique nécessairement qu'en l'espèce le traité litigieux avait été soumis à l'administration préfectorale; Considérant qu'il n'a pas été démontré ni même proposé que l'acte de rétrocession du 6 janvier 1899 par l'Entreprise des Pompes funèbres générales à la Société anonyme aujourd'hui demanderesse au procès, ait été soumis à la préfecture de la Marne; - Que la comptabilité des fabriques n'indique nullement qu'elles aient connu cette rétrocession, que les fabriques, après comme avant janvier 1899, se sont bornées à encaisser le montant de leurs remises « du service des Pompes funèbres générales », ainsi qu'il est imprimé en tête des états mensuels, sans rechercher quelle Société payait avec d'autant plus de raison que Dumesnil, directeur de la succursale d'Épernay, pour le compte de l'Entreprise, est demeuré en la même qualité au service de la Société anonyme jusqu'il y a environ trois mois; Que le bureau de bienfaisance d'Épernay, encaissant les redevances auxquelles lui donnait le droit le traité primordial, en a donné quittance à l'Administration des pompes funèbres, d'où il est impossible de conclure que l'administration municipale ait connu la substitution d'une Société à une autre en janvier 1899; - Qu'enfin l'instance actuelle suffit à démontrer que l'acte de rétrocession du 6 janvier 1899 n'a pu être ratifié tacitement par exécution, puisqu'il n'était pas connu, sinon l'on remarque

donne droit d'actionner toute personne qui se fournit ailleurs, et prive ainsi la Compagnie d'un bénéfice auquel elle avait seule droit. Mais encore faut-il que cette Compagnie se soit conformée à toutes les prescriptions légales, et que, si elle bénéficie d'une cession du monopole attribué à une société antérieure, elle ait fait approuver par qui de droit, en l'espèce par l'autorité préfectorale, son traité de rétrocession.

que l'Entreprise des Pompes funè- | pagnie de pompes funèbres lui bres générales en liquidation depuis le 31 décembre 1898 ayant cédé ses droits au traité avec la fabrique d'Épernay, quelques jours après n'en faisait pas moins procéder, le 7 juin 1899, au constat d'un prétendu préjudice causé auxdits droits et délivrer la citation du 8 juillet 1899 suivant, procédure que s'est appropriée la Société anonyme quatre mois après seulement, soit le 10 novembre 1899, à la veille de l'au'dience; Déclarons la Société anonyme des Pompes funèbres générales non recevable en sa demande contre Richard résultant des citations du ministère de Rat, huissier à Épernay, en date des 8 juillet 1899, 10 novembre 1899, enregistrés, l'en déboutons et la condamnons aux dépens. »

Observations. - Antérieurement à ce jugement, M. le juge de paix du même siège avait déjà été saisi d'une demande semblable contre un entrepreneur de menuiserie, et à raison de la qualité des parties en cause, toutes deux commerçantes, s'était, parjugement du 26 avril 1898, déclaré incompétent et avait renvoyé les parties à se pourvoir devant le Tribunal appelé à connaître du litige, c'est-à-dire devant les juges consulaires. Dans cette seconde affaire, le juge de paix d'Épernay a statué au fond, reconnaissant sans doute qu'il n'avait pas les mêmes raisons de se dessaisir de la contestation. Le jugement très complet et très juridiquement motivé que nous rapportons ici ne nous laisse presque rien à ajouter à l'appui des solutions qu'il contient. Il est certain que le privilège concédé à une Com

La Société antérieure dont le traité avait été dûment approuvé par l'autorité administrative compétente avait le droit d'intenter les actions utiles à faire respecter son monopole. La Société nouvelle n'avait pas le même droit et ne pouvait même reprendre en son nom personnel l'action intentée par l'ancienne Société tant qu'elle-même ne s'était pas soumise aux formalités prescrites par les lois ou décrets qui régissent la matière. Il ne faut pas oublier que le droit réclamé par une Société de ce genre constituant un monopole, nuisible par ce seul fait aux droits des particuliers et à la liberté de l'industrie, un tel droit n'est réellement acquis qu'autant qu'il a été, par ceux qui s'en prévalent, satisfait à toutes les prescriptions légales. Le jugement cidessus nous paraît donc devoir être approuvé sur tous les points.

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Ainsi décidé par le jugement suivant :

« LE TRIBUNAL:- Vu le procèsverbal dressé par M. Calmes, commissaire de police à la Ferté-Macé, le 12 août dernier; - Vu la citation. du ministère de M° Colmiche, huissier, du 24 du même mois; - Vu l'arrêté de M. le préfet de l'Orne, en date du 17 février 1894, ainsi conçu: «Art. 1o. Sont interdits, dans le « département de l'Orne, l'exhibi<«<tion et le port de drapeaux, soit « sur la voie publique, soit dans les « édifices, emplacements et locaux « librement ouverts au public; « Art. 2. Sont exceptés de cette me<< sure les drapeaux aux couleurs << nationales françaises et étrangè«res, et ceux servant d'insignes aux <«< Sociétés autorisées ou approu« vées»; — Ouï le ministère public en ses réquisitions et le prévenu en ses conclusions et moyens de défense présentés par M Moro-Giafferi, avocat; Vidant notre délibéré: -Attendu que le sieur Arthur

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Bernier est poursuivi devant le Tribunal de simple police pour avoir contrevenu à l'arrêté préfectoral du 17 février 1894, en exhibant, le 3 août dernier, au-dessus de la porte de son magasin donnant sur la voie publique, rue des Quatre-Roues, en la ville de la Ferté-Macé, un drapeau tricolore portant sur la partie blanche l'inscription: la France aux Français; - Attendu qu'à notre audience publique du lundi 26 août dernier, le prévenu n'a pas méconnu le fait, mais a soutenu : 1° Que l'inscription: la France aux Français est l'expression de ses sentiments patriotiques et n'a aucun caractère séditieux; -2° Que l'arrêté préfectoral, art. 2, autorise l'exhibition des drapeaux aux couleurs nationales; que celui qu'il exposa était, malgré l'inscription qu'il portait, sinon un drapeau national officiel, du moins un drapeau aux couleurs nationales et devait être classé dans la catégorie des emblèmes autorisés; - Que, d'ailleurs, il excipait de sa bonne foi et demandait, vu l'absence de contravention, à être renvoyé des fins de la poursuite, sans amende ni dépens; - Attendu que l'arrêté susvisé a été pris dans les limites des attributions préfectorales, et que, d'autre part, il ne viole aucune disposition de la loi; qu'il est donc légal et obligatoire; Attendu que si le contexte de cet arrêté prête le flanc à des interprétations différentes, il ressort de son esprit qu'il a pour objet d'interdire l'exhibition de tout drapeau autre que le drapeau national officiel; Attendu que le drapeau national ne comporte aucune devise ni inscription; Attendu que le drapeau exhibé par le sieur Bernier, portant,

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outre les couleurs nationales, l'in- | préfectoral susvisé et de lui faire

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scription: la France aux Français, ne saurait être considéré comme le drapeau national; qu'il n'est pas davantage l'insigne d'une société autorisée; qu'il n'entre par suite à aucun titre dans les exceptions que l'article 2 de l'arrêté préfectoral fait à la défense prononcée par l'article 1er; - Que, le 23 janvier 1896, la Cour de cassation, interprétant un arrêté du préfet du Jura, conçu en termes absolument identiques, s'est prononcée en ce sens; tendu que, bien qu'elle cache probablement, certainement même, une intention politique, l'inscription: la France aux Français, n'a rien de séditieux; Mais attendu qu'en règle générale, la contravention existe par la seule matérialité du fait; que la bonne foi du contrevenant et l'absence de l'intention de nuire ne sauraient effacer la contravention; Attendu que toute contravention dont la matérialité a été constatée doit entraîner condamnation, soit sous la qualification qui lui a été donnée, soit sous toute autre résultant légalement des débats dans les limites de la prévention; - Attendu que, pour entraîner l'acquittement, il faudrait qu'il y eût doute ou incertitude des faits constitutifs de la contravention; Or, attendu que, dans le cas qui nous occupe, il n'y a ni doute ni incertitude, puisque le fait a été constaté par un procèsverbal régulier non débattu par la preuve contraire et d'ailleurs reconnu par le prévenu; - Qu'il y a donc lieu de décider, et décidons, que le sieur Bernier, en exhibant un drapeau tricolore portant cette inscription: la France aux Français, a commis une infraction à l'arrêté

l'application de l'article 471, no 15, du Code pénal ainsi conçu :

Vu enfin l'article 162 du Code d'instruction criminelle; - Par ces motifs, déclare constante la contravention relevée contre le sieur Bernier et lui faisant l'application des articles précités dont lecture a été donnée à l'audience, statuant contradictoirement et en dernier ressort;

Le condamne à 1 franc d'amende et aux dépens (taxés à la somme de 7 fr. 15); Fixe à deux jours la durée de la contrainte par corps. »

Observations.- Solution exacte et d'ailleurs consacrée déjà par la Cour de cassation. Le drapeau national ne contient ni inscription ni devise d'aucune sorte. Par suite, l'exhibition d'un drapeau tricolore contenant une devise, un emblème ou une inscription quelconque, constitue une altération de ce drapeau, et une infraction à l'arrêté qui prohibe de telles exhibitions. Nos lecteurs savent que la contravention est un fait matériel, et que la bonne foi ne saurait être invoquée comme excuse. Le juge de police, en matière de contraventions, ne peut admettre une excuse qu'autant qu'elle a été formellement prévue par la loi.

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