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controversée. Trois systèmes ont vu le jour, qui ont divisé les auteurs et la jurisprudence. Toutefois cette dernière, surtout chez les magistrats cantonaux, tend à s'affirmer et à se fixer dans le sens de la compétence absolue du juge de paix. C'est, à notre avis, avec juste raison. En attribuant, en effet, en cette matière, au juge de paix, un droit de juridiction sans appel, le législateur de 1898 a eu pour but de satisfaire, dans le plus bref délai, à des besoins urgents, aux nécessités pressantes de l'existence tant de l'ouvrier que de sa famille. Si la victime d'un grave accident était obligée, pour obtenir une indemnité journalière, d'attendre une décision du Tribunal civil, elle pourrait se trouver, pendant un temps assez long, dans le plus complet dénuement et sans la moindre ressource pour subvenir à ses besoins journaliers et à ceux des siens. Elle se verrait ainsi moins favorisée que l'ouvrier dont l'accident n'a entraîné qu'une incapacité temporaire de travail, puisque ce dernier, en saisissant le juge de paix, obtiendrait une satisfaction prompte, sinon immédiate, par une décision non susceptible d'appel. L'équité et l'humanité ne veulent pas qu'il en soit ainsi.

Le législateur de 1898 ne l'a pas voulu non plus; une lecture attentive du texte qu'il a établi suffit pour le démontrer. En effet, l'article 15 attribue compétence au magistrat cantonal pour toutes les contestations relatives non point seulement à l'indemnité journalière due pour incapacité temporaire, mais aux indemnités temporaires, c'est-à-dire à toute indem

nité journalière sans distinction. aucune entre l'incapacité temporaire et l'incapacité permanente.

Il paraît bien difficile de distinguer là où la loi ne distingue pas, dit fort justement notre savant collègue, M. Pabon; c'est d'autant plus difficile que, si nous examinons l'article 16 qui prévoit l'indemnité temporaire en cas d'incapacité permanente, nous y trouvons cette phrase: Si la cause n'est pas en état, le Tribunal surseoit à statuer et l'indemnité temporaire continue à être servie jusqu'à la décision definitive; en se servant des mots continue à être servie, la loi suppose nécessairement que le demandeur a obtenu son indemnité temporaire avant la décision du Tribunal saisi de la demande en payement de rente; par conséquent, la loi suppose bien que ce n'est pas ce Tribunal qui a ordonné qu'une indemnité temporaire serait servie à la victime de l'accident jusqu'à sa décision définitive; or, si la décision relative à l'indemnité temporaire n'a pas été rendue par le Tribunal saisi de la demande en payement de rente de qui peut-elle émaner si ce n'est d'un accord préalable des parties ou bien du juge de paix? La loi reconnaît donc, implicitement mais nécessairement, la compétence du juge de paix dans la disposition que nous venons d'analyser et qui est ainsi en parfaite concordance avec l'article 15 de notre loi. » (Traité des Justices de paix, t. I, n° 1163.) C. Q. F. D.

Pour l'exposé de la controverse sur ce point, se reporter au texte de ce traité, loc. cit., et ad notam où sont citées les autorités à l'appui des trois opinions qui se sont produites..

Pour nous, la solution tendant à admettre la compétence exclusive des juges de paix pour toutes les demandes d'indemnité temporaire est non seulement la seule conforme au texte de la loi, mais encore la seule qui soit rationnelle et équitable..

Sur le deuxième point: Il faut bien se garder de confondre la provision que le Tribunal peut allouer, en vertu du dernier paragraphe de l'article 16, lorsque l'affaire n'est pas en état d'être solutionnée, avec l'indemnité temporaire dont parle le quatrième paragraphe de ce même article 16. Ce sont là deux prestations absolument distinctes et essentiellement différentes.

En effet, l'une est purement facultative, tandis que l'autre est absolument obligatoire. De plus, comme l'explique très bien le rédacteur de notre jugement, l'indemnité temporaire, due en cas d'incapacité permanente jusqu'au jour où commencent à courir les arrérages de la rente viagère, constitue une allocation intermédiaire, mais non provisionnelle, et n'est pas, comme telle, sujette à répétition. La provision, au contraire, a un caractère essentiellement provisoire, et les sommes avancées à ce titre par le patron peuvent être, lors de la liquidation définitive, retenues par ce dernier en déduction de sa dette.

Il semble bien, en outre, si l'on consulte les travaux préparatoires et la discussion de la loi devant le Parlement, que la provision vise et concerne non la victime elle-même, mais bien uniquement, en cas de décès, ses représentants dont la situation ne laisse pas de différer de

celle de l'ouvrier blessé. On comprend très bien que les représentants de la victime décédée, privés de leur soutien naturel, qui n'ont aucun droit à une indemnité journalière, puissent avoir besoin d'une provision pour vivre, en attendant la solution du litige pendant devant le Tribunal civil. Par contre, l'utilité de cette provision ne s'explique pas lorsque l'ouvrier blessé survit à ses blessures. D'une part, son existence est assurée par l'indemnité journalière qui devra lui être servie jusqu'à la décision du Tribunal. D'autre part, l'assistance judiciaire, dont il bénéficie de plein droit, lui permet de plaider sans bourse délier. A quoi bon une provision?

Nous pensons donc que, saisi d'une demande tendant à l'allocation d'une indemnité journalière, le juge de paix doit y faire droit, sans avoir à s'occuper de la provision qui aurait été accordée par le Tribunal civil. Il n'a à se préoccuper que d'une seule chose, à savoir si le demandeur se trouve bien dans les conditions requises pour que sa demande soit accueillie.

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linge au lavoir municipal de cette commune, a refusé de payer la taxe imposée par arrêté du maire aux étrangers.

Un tel fait ne peut donner lieu qu'à une action civile,

Ainsi décidé par le jugement sui

vant:

A l'appel de la cause et lecture faite d'un procès-verbal du garde champêtre de la commune d'Ondeuil, en date du 8 janvier dernier, enregistré, constatant que la prévenue, la dame Sellier, accompagnée d'une femme de journée, été trouvée au lavoir communal couvert dit de l'Arche, situé au centre d'Ondeuil, en contravention à l'arrêté de M. le maire d'Ondeuil, en date du 24 novembre 1901, ainsi conçu: « Le maire de la commune d'Ondeuil; - Vu la délibération du conseil municipal de ladite commune, en date du 17 novembre 1901; -Considérant que les lavoirs communaux couverts et non couverts n'ont été établis que pour les habitants de la commune; Arrête : « Art. 1er. Toute personne étran<< gère à la commune ne pourra se <«<< livrer au lavage, dans les lavoirs « communaux, qu'après avoir payé << une redevance de 40 centimes par « personne dans les lavoirs cou« verts, 25 centimes par personne <<< dans les lavoirs non couverts; << Art. 2. Le garde champêtre a sera chargé de percevoir les som<«<mes dues qui seront versées dans << la caisse du percepteur;- Art. 3. « Les contraventions au présent « arrêté seront constatées par des " procès-verbaux. » En se refusant de payer entre les mains de l'agent verbalisateur la redevance fixée par ledit arrêté, M. Sellier, tant en son nom qu'au nom de sa femme, a formellement contesté la légalité dudit arrêté et dans tous les cas la perception par le garde champêtre de la redevance fixée par ledit arrêté, en prétendant que le garde n'avait ni droit ni qualité pour encaisser les revenus commu

naux, et il a conclu au renvoi pur et simple de sa femme.

Le ministère public, après avoir résumé l'affaire et visé l'article 471, n°15, du Code pénal, a déclaré s'en rapporter à justice:

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« LE TRIBUNAL : Attendu que l'arrêté de M. le maire de la commune d'Ondeuil, en date du 24 novembre 1901, ne constitue pas un règlement de police de la classe de ceux visés en l'article 471, no 15, du Code pénal; qu'en effet, cet arrêté est uniquement fondé sur une délibération du conseil municipal de ladite commune, qui fixe le tarif d'une redevance communale que les personnes non domiciliées à Blicourt devront acquitter pour fréquenter les lavoirs couverts ou non couverts de cette commune; que dès lors, le refus opposé au payemert de cette taxe par la dame Seliier ce constitue aucune contravention de police et ne peut donner lieu contre elle qu'à une action purement civile ; - Attendu, du reste, qu'en matière pénale la loi doit être interprétée rigoureusement; - Vu l'article 159 du Code d'instruction criminelle ainsi conçu...;

AN

NULE le procès-verbal de contravention; en conséquence, acquitte la prévenue et la renvoie sans amende ni dépens. »

Observations. Un arrêté qui établit, à la charge de telle ou telle personne, la perception d'une taxe au profit de la commune, n'a pas le caractère d'un règlement de police obligatoire et pouvant donner lieu, en cas d'infraction, à des peines de simple police. Ce n'est là qu'une mesure purement fiscale, et le refus de payer la taxe ne donne ouverture qu'à une action civile, cela a déjà été jugé plusieurs fois.

TABLE ALPHABÉTIQUE

DES MATIÈRES

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-

---

Ibid. Il appartient en ce cas au juge
de police d'examiner la prétention de
possession annale soulevée par le pré-
venu et de la rejeter, alors qu'en fait
elle ne lui paraît pas justifiée. Ibid.

ABUS DE JOUISSANCE. Si, d'après

l'article 1730, le preneur doit rendre la

chose telle qu'il l'a reçue, cette dispo-
sition doit s'entendre en ce sens qu'il
est tenu de rendre les lieux loués au
moins en aussi bon état, de façon à ce
que le bailleur ne subisse aucune perte
en en reprenant la jouissance, p. 120.

- Et si le propriétaire n'est pas tenu de

payer à son fermier les augmentations

et améliorations même très utiles par

lui faites sans son ordre sur sa pro-

priété, il doit toutefois lui en tenir

compte dans le règlement des indem-

nités qui pourraient lui être dues pour

malversations et abus de jouissance.

Ibid.

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a lieu pour le juge de paix saisi de l'ac-
tion civile en réparation du dommage,
d'ordonner, avant faire droit, une en-
quête tant sur les causes réelles de l'ac-
cident que sur l'importance du dom-
mage. Ibid.

-

-

-

ACCIDENTS DU TRAVAIL. Le juge
de paix est incompétent pour statuer
sur une demande d'indemnité tempo-
raire lorsque le Tribunal civil (ou Cour
d'appel est déjà saisi d'une demande
en payement d'une rente viagère à rai-
son d'une incapacité permanente,p. 233.
Il n'appartient pas à un chef d'entre-
prise, en cas de contestation, de décider
sur la simple production d'un certificat
de son médecin, que l'indemnité tem-
poraire doit cesser à partir du jour que
fixe ce certificat, p. 300. Le juge de
paix du lieu de l'accident, seul compé-
tent en matière d'indemnités tempo-
raires, peut nommer un ou plusieurs
médecins experts sur le rapport des-
quels il fixera, s'il y a lieu, la date de
la consolidation de la blessure, et par
suite, celle de la cessation de l'indem-
nité temporaire. Ibid. Les heures
supplémentaires de travail, non conve-
nues à l'avance entre le patron et l'ou-
vrier, ne doivent pas entrer en ligne de
compte pour l'établissement du salaire
et par suite du taux de l'indemnité tem-
poraire, p. 206. Les principes d'hu-
manité et de protection, qui ont présidé
au vote de la loi du 9 avril 1898, com-
mandent qu'il soit de toute justice de
considérer la nourriture de l'ouvrier,
prise chez son patron, pendant la pé-
riode d'incapacité temporaire, comme
étant l'accessoire des frais de maladie,
p. 35. Par suite, doit être repoussée
comme mal fondée la prétention soule-
vée par le patron de compenser, en tout
ou en partie, l'indemnité temporaire dont
il est débiteur avec la nourriture qu'il a
fournie à son ouvrier pendant la période
d'incapacité. Ibid. Il est seulement
équitable et juste, pour le calcul de
l'indemnité temporaire, lorsque l'ou-
vrier a été nourri chez son patron, de
déduire du salaire journalier la quotité
afférente à la nourriture et de prendre
pour base le montant du salaire payé en
numéraire. Ibid. - En cas où l'accident
n'a pas été causé par l'emploi de ma-
chines et moteurs inanimés, l'ouvrier
agricole victime d'un accident survenu
dans son travail ne peut baser son ac-
tion en responsabilité contre son patron
que sur les principes des articles 1382
et suivants du Code civil, p. 61. — Spé-

-

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-

cialement, le patron n'est civilement
responsable qu'autant qu'il a commis
une imprudence ou une faute. Ibit.
Si l'accident a été causé par un animal
appartenant au patron, c'est à celui-ci
qu'incombe la charge de prouver que
l'ouvrier a été victime de sa propre im-
prudence. Ibid. — Il y a imprudence et
faute de la part de l'ouvrier, lorsque,
s'occupant de traire une vache, il s'est
placé, malgré les avertissements à lui
donnés, dans une situation particuliè-
ment dangereuse et de nature à l'expo-
ser à l'accident qui est survenu. Ibid.
L'action en indemnité temporaire que
la loi du 9 avril 1898 accorde à l'ouvrier
victime d'un accident se prescrit par un
an. Cette prescription est interrompue
soit par la reconnaissance que le patron
fait de l'accident lors de l'enquête or-
donnée par la loi, soit par l'assignation
devant le Tribunal civil en payement
d'une rente viagère pour incapacité per-
manente, p. 45. La profession de fa-
bricant ou négociant en produits chi-
miques est assujettie à la loi. Ibid.

-

La loi du 9 avril 1898 ne distingue pas
entre les accidents ayant occasionné
une incapacité temporaire et ceux ayant
entraîné une incapacité permanente ou
susceptible de le devenir. Elle attribue,
dans tous les cas, compétence au juge
de paix pour statuer sur l'indemnité
journalière, que cette indemnité soit
demandée, à raison d'une incapacité
temporaire jusqu'à la cessation de cette
incapacité ou à raison d'une incapacité
permanente jusqu'à l'allocation d'une
rente viagère, soit par ordonnance du
président donnant acte de l'accord in-
tervenu entre les parties, soit par déci-
sion du Tribunal, p. 314. L'indemnité
temporaire, due en cas d'incapacité per-
manente jusqu'au jour où commencent
à courir les arrérages de la rente via-
gère, constitue une allocation intermé-
diaire, mais non provisionnelle, et n'est
pas, de ce chef, sujette à répétition,
alors que la provision — ainsi d'ailleurs
que le mot l'indique a un caractère
essentiellement provisoire, et les som-
mes avancées à ce titre par le patron
peuvent être, lors de la liquidation défi-
nitive, retenues par ce dernier en dé-
duction de sa dette. Ibid,

ACTION CIVILE.

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-

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V. Diffamation.

ACTION POSSESSOIRE. Le juge de
paix saisi d'une action possessoire est
incompétent pour statuer sur l'excep-
tion de propriété soulevée par le défen-

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