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« LE TRIBUNAL : Vu le procès-verbal dressé contre Deviaz, par la gendarmerie de Sermaize, le 7 juin 1903, enregistré; Ouf le prévenu, en ses explications et aveu; Après avoir entendu le ministère public, dans ses résumé et conclusions à fin de relaxe; Attendu qu'il est de principe qu'une fois saisi de l'action publique, le juge est tenu de statuer sur la prévention, quelles que puissent être les conclusions du ministère public à l'audience, et ce, d'après les appréciations personnelles des faits constatés par les débats; Attendu que Deviaz reconnaît avoir laissé stationner le 7 juin 1903, à 9 heures et demie du soir, sa voiture attelée et non éclairée sur la voie publique, à Villiers-le-Sec, et allègue, pour sa défense, que son cheval étant attaché, il ne se croyait pas en contravention, puisque sa voiture ne circulait pas; qu'il était arrivé de jour à Villiers-le-Sec, et qu'il attendait le moment d'en re

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partir pour allumer da lanterne de sa voiture Attendu que la voiture stationnant dans les conditions susrelatées constituait un obstacle non visible contre lequel pouvait se jeter une voiture ou un cycliste, et par là était susceptible d'être la cause d'un accident; Attendu que, si les textes répressifs sont de droit étroit, le juge a néanmoins le devoir de les appliquer dans leur esprit, et que da loi doit, dans un sens général, être entendue dans l'intérêt de la sûreté publique; Attendu que l'article 15 du décret du 10 août 1852 a pour but de rendre visible et évitable tout véhicule circulant sur les routes pendant la nuit; - Attendu qu'une voiture se rendant d'une localité à une autre doit être considérée comme étant en circulation si, en cours de route, son conducteur s'arrête momentanément à l'auberge, en laissant cette voiture sur la voie publique; que, dès lors, ladite voiture doit, pour répondre au vœu de la loi, être pourvue, dès le crépuscule, d'un falot ou d'une lauterne allumée; qu'il en est si bien ainsi, qu'un arrêt de la Cour de cassation a décidé, à l'appui de cette interprétation, « qu'en exigeant l'éclai«rage des voitures circulant la nuit « sur les routes, le décret du 10 août « 1852 a eu en vue toute la durée de «<leur trajet, sans distinction entre « le temps de marche proprement << dit et le temps d'arrêt survenu au « cours de la marche » (Cass., 31 décembre 1891, ANNALES DES JUSTICES DE PAIX, 1893, p. 22); Altendu qu'en laissant sur la voie publique, dans les circonstances susvisées, sa voiture non éclairée, Deviaz a commis la contravention prévue par

At

l'article 15 du décret du 10 avril 1852 et punie par l'article 5 de la loi du 30 mai 1851, ainsi conçu :...; - Vu également l'article 14 de la même loi, ainsi conçu: ...; tendu que le prévenu ne se trouve pas en état de récidive et qu'il existe en sa faveur des circonstances atténuantes; Vu les articles 483 et 463 du Code pénal; Par ces motifs, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort; Faisant application des articles précités dont il a été donné lecture à l'audience; Condamne Deviaz à 5 francs d'amende et aux dépens liquidés et taxés à 8 fr. 63; fixe à trois jours la contrainte par corps, s'il y a lieu de l'exercer. »

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Jurisprudence

Observations. constante en ce sens. Voir notamment l'arrêt du 31 décembre 1891, cité dans la sentence. Beaucoup de voituriers se figurent qu'ils peuvent laisser stationner leurs voitures sur la voie publique, sans les éclairer, alors qu'ils se sont arrêtés plus ou moins longtemps dans une auberge ou cabaret pour y consommer ; c'est une erreur. La voiture qui stationne est peut-être plus dangereuse pour les autres voitures qui circulent, car aucun bruit ne la signale aux autres voituriers qui peuvent s'y heurter sans l'avoir vue, parce qu'elle n'est pas éclairée. C'est donc avec raison que la Cour de cassation comprend dans le trajet non seulement le temps de marche, mais même les temps d'arrêt au cours de la marche.

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Si la preuve testimoniale n'est adpas mise lorsque l'objet du litige est d'une valeur supérieure à 150 francs, et s'il en est autrement lorsqu'il n'a pas été possible de se procurer une preuve littérale de l'obligation ou du payement allégué, cette exception prévue par l'article 1348 du Code civil doit s'entendre non seulement de l'impossibilité physique, mais encore de toute impossibilité morale, locale ou momentanée. A cet égard, le juge a plein pouvoir d'appréciation.

Spécialement, lorsque le fils a travaillé pour le compte de son père, on doit admettre l'impossibilité morale où il se trouvait d'exiger un contrat écrit.

Ainsi décidé par le jugement suivant:

« NOUS, JUGE DE PAIX: Ouï les parties en leurs explications, moyens de défense et conclusions, Me Silvestre, avoué de Baillard père, et Me Bergère, avoué de Baillard fils, en leurs plaidoiries, et vidant son délibéré; Attendu que l'opposition de Baillard père est régulière en la forme comme ayant été faile et signifiée dans les délais prescrits la loi ; par Au fond: Attendu que par son exploit introductif d'instance, en date du 30 octobre dernier, Baillard fils a fait citer Baillard père devant le présent Tribunal pour l'audience du 4 novembre aussi dernier, à l'effet d'obtenir le

payement d'une somme de 959 fr. 50 à lui due pour louage d'ouvrage comme ayant été une première fois à son service du 23 octobre 1901 au 18 avril 1902 avec trois chevaux, et une deuxième fois depuis le 22 juin 1902 jusqu'au 23 septembre suivant avec un cheval; Attendu que suivant jugement par défaut de ce Tribunal, en date du 4 novembre dernier, le sieur Baillard père a été condamné à payer à son fils la somme de 959 fr. 50 pour les causes susexprimées; Attendu que sur opposition Baillard père soutient que la demande en payement formée par Baillard fils est basée sur un contrat de louage de service qu'il prétend être intervenu avec son père; que, par suite, il appartient au demandeur de faire la preuve de l'existence du contrat qu'il invoque; Attendu que pour justifier le bien fondé de sa demande, Baillard fils a offert de faire la preuve par témoins qu'il a été au service de Baillard, son père, une première fois du 23 octobre 1901 au 18 avril 1902 avec trois chevaux, et une deuxième fois du 22 juin 1902 au 23 septembre suivant avec un cheval; Attendu que Baillard père s'oppose au moyen de preuve sollicité par Baillard fils, en ce sens que le contrat de louage de services invoqué par Baillard fils ne saurait être établi par témoins, la somme réclamée étant supérieure à 150 fr., dont il devait être passé acte, conformément aux dispositions de l'article 1341 du Code civil; qu'il importe donc sur ce point de rechercher si les prétentions de Baillard père sont fondées; Attendu, en droit, qu'il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures

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privées de toutes choses excédant la somme ou valeur de 150 francs; que ces dispositions reçoivent exception toutes les fois qu'il n'a pas été possible au créancier de se procurer une preuve littérale de l'obligation qui a été contractée envers lui; Attendu que si la preuve testimoniale n'est pas admise lorsque l'objet du litige est d'une valeur supérieure à 150 francs, et, s'il en est autrement, lorsqu'il n'a pas été possible de se procurer une preuve littérale de l'obligation ou du payement allégués: cette exception prévue par l'article 1348 du Code civil doit s'entendre non seulement de l'impossibilité physique, mais encore de toute impossibilité morale, locale, accidentelle ou momentanée; et qu'à cet égard, la loi a laissé aux juges un pouvoir absolu d'appréciation; - Attendu qu'il est admissible que le domestique ou serviteur ne peut décemment réclamer de son maître un acte, un écrit constatant la dette pour salaire ou services, contractée envers lui par le maître, toutes les fois que la somme ou la valeur excède 150 fr.; que Baillard fils en venant aider Baillard père dans ses travaux de culture en 1901 et 1902, en lui louant ses services pour une durée qui ne pouvait guère être déterminée d'avance, se trouvait moralement empêché de lui réclamer une preuve écrite de ces opérations; qu'une telle réclamation était contraire aux convenanees et aux rapports de déférence et de respect que le fils doit avoir envers son père; Attendu qu'à ces considérations se joint l'usage constamment suivi par les domestiques et serviteurs de ne point réclamer au

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maître actes ou écrits pour constater des services dont la valeur excède la somme de 150 francs; - Attendu que la gratuité des services ne se présume pas, que Baillard fils est donc recevable à prétendre qu'il a été dans l'impossibilité morale de se procurer de la part de Baillard père une preuve écrite du contrat de louage de services dont il s'agit, que la preuve testimoniale par lui invoquée, d'après les dispositions de l'articlec 1348, § 4", est donc admissible; Par ces motifs; Jugeant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, reçoit Baillard père opposant, pour la forme seulement, envers le jugement par défaut du 4 novembre dernier, ci-dessus relaté, et avant faire droit, autorisons Baillard fils à prouver par témoins qu'il a été au service de Baillard père une première fois du 23 octobre 1901 au 18 avril 1902 avec trois chevaux, et une deuxième fois du 22 juin 1902 au 23 septembre suivant avec un cheval; Réservons à Baillard

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eût été dans l'impossibilité de se procurer une preuve écrite du contrat de louage qu'il invoque. Nous préférons la doctrine du premier juge, plus humaine et plus pratique. Il existe dans les rapports sociaux toute une série de menus contrats qui sont passés verbalement et dont la valeur peut facilement s'élever au-dessus de 150 fr.; tels notamment les engagements des domestiques et gens de service à gages. Il n'est presque jamais dressé de contrat écrit entre le maître et le domestique, et bien qu'il n'existe pas d'impossibilité légale de se procurer une preuve écrite, il faut bien reconnaître que l'usage constant et général doit être considéré comme une impossibilité au moins morale. A plus forte raison doit-il en être ainsi quand de contrat d'engagement est passé entre père et fils, comme dans l'espèce du jugement ci-dessus. La prohibition de la preuve dans de telles circonstances équivaut à un déni de justice. L'offre de faire la preuve par témoins fait tout au moins présamer la bonne foi du demandeur, et il est fâcheux de repousser cette offre en se basant sur l'article 1341 du Code civil, alors que l'article 1348 du même Code admet des excep

exceptions figure l'impossibilité de se procurer une preuve écrite. Il appartient au juge du fait d'apprécier les circonstances qui constituent l'impossibilité matérielle ou même morale.

a été infirmée, sur appel, par juge-tions à la règle générale. Parmi ces ment du Tribunal civil de Tonnerre en date du 20 août dernier. Le Tribunal s'est placé au point de vue rigoureux de la prohibition de la preuve testimoniale au-dessus de 150 francs, en se basant sur ce que rien n'établissait que le demandeur

TABLE ALPHABÉTIQUE

DES MATIÈRES

CONTENUES AU BULLETIN SPÉCIAL DES DÉCISIONS DES JUGES DE PAIX POUR L'ANNÉE 1903.

Si

ACCIDENTS DU TRAVAIL. La responsabilité des accidents doit incomber à l'exploitant principal des coupes de bois et non aux tâcherons avec lesquels il a sous-traité, alors surtout que le sous-traitant n'est en réalité qu'une sorte de contremaître sous la surveillance et le contrôle de l'exploitant principal, chef du chantier, p. 29. - Outre l'indemnité temporaire, le chef d'entreprise doit à la victime de l'accident les frais d'hospitalisation et les frais médicaux et pharmaceutiques. Ibid. les maîtres tonneliers ou fabricants de tonneaux sont rangés au nombre des industriels assujettis, en cas d'accidents du travail, à la responsabilité édictée et réglée par la loi du 9 avril 1898, il n'en est pas de même des vendeurs ou marchands de vieux tonneaux dont la responsabilité demeure réglée par les articles 1382 et suivants du Code civil, p. 102. Par suite. le juge de paix saisi par l'employé d'un marchand de tonneaux non fabricant d'une demande d'indemnité temporaire formée en vertu de la loi de 1898, doit se déclarer incompétent et renvoyer le demandeur à se pourvoir devant la juridiction de droit commun. Ibid. Lorsqu'il n'est pas encore définitivement établi que l'incapacité de l'ouvrier victime d'un accident du travail sera partielle et permanente, le blessé est recevable à réclamer devant le juge de paix le règlement d'une indemnité de demi-salaire, sauf au Tribunal à statuer ultérieurement sur les conséquences de l'accident, au cas où il s'ensuivrait une incapacité permanente, p. 7. L'indemnité de demi-salaire est toujours due jusqu'à décision définitive, p. 268. - Il en est ainsi alors même qu'il résulte du rapport d'un médecin commis que, bien que la blessure soit consolidée, la victime de l'accident est atteinte d'une in

capacité partielle et permanente. Ibid.

Le juge de paix saisi seulement de la demande en payement de l'indemnité temporaire est compétent pour connaître de cette demande, alors même qu'il y a incapacité permanente pouvant donner ouverture à une autre demande Alors en payement d'une rente. Ibid. même que le patron soutient que l'incapacité du demandeur est permanente, le juge de paix saisi d'une demande en payement de l'indemnité temporaire est compétent pour connaître de cette demande, p. 295. Mais l'indemnité temporaire n'est due que jusqu'au jour du jugement. Le juge de paix ne peut pas condamner le patron à payer cette indemnité jusqu'au jour, encore inconnu, de la guérison complète du demandeur. Ibid. Le juge de paix est compétent pour statuer sur une demande d'indemnité temporaire à l'occasion d'une blessure devant entraîner une incapacité permanente partielle, alors même que le Tribunal civil est saisi d'une demande en payement de pension, p. 213. Pendant la période dite d'« invalidité » et qui n'est que temporaire, le blessé a droit seulement à l'indemnité de demisalaire; il appartient au juge de paix de la lui accorder pour le passé d'abord, et ensuite pour l'avenir jusqu'au jour de la solution de l'instance pendante devant le Tribunal civil. Ibid. Le juge de paix est compétent pour connaître de la demande en payement de l'indemnité temporaire due à l'ouvrier victime d'un accident du travail et des frais de maladie, p. 228. Le patron responsable est tenu de la totalité des frais d'hospitalisation sans qu'il y ait lieu d'en rien déduire pour la valeur de la nourriture et de l'entretien du malade, dont celui-ci a profité pendant son séjour à l'hôpital. Ibid. Le fait que l'ouvrier, victime d'un accident du tra

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