Page images
PDF
EPUB

âge habitant les environs, mais il n'a jamais existé entre le prince et moi de rapports spéciaux d'amitié.

Napoléon se considérait toujours comme prince visà-vis de ses concitoyens, et il n'a jamais oublié cette position.

C'était surtout la mère du prince qui, par ses bienfaits et sa générosité vis-à-vis des Suisses, s'était acquis une grande popularité, qui contribua essentiellement à procurer au prince Louis-Napoléon le titre de bourgeois de la commune de Salenstein.

Plus tard, soit par suite de la polémique provoquée par la demande d'expulsion soit par tout autre motif, on a mis en doute le fait que le prince ait réellement acquis un droit de bourgeoisie, et l'on parlait d'un titre simplement honorifique, autrement dit « Ehrenbürgerrecht » (bourgeoisie d'honneur), qui aurait été accordé à Louis-Napoléon Bonaparte.

Pour écarter tous les doutes à cet égard et pour prouver que le prince avait bien droit au titre de citoyen, il me suffira de citer le document officiel, qui prouve surabondamment, d'une manière incontestable, qu'il a été reconnu par le grand conseil thurgovien, le 18 avril 1832, bourgeois de Salenstein et du canton de Thurgovie, donc « citoyen suisse ». Ce document est conçu comme suit.

[ocr errors]

EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL DU PETIT CONSEIL (GOUVERNEMENT) DU CANTON DE THURGOVIE.

§ 842.

18 avril 1832.

Suivant message du grand conseil du 14 courant, faisant ,connaître la décision par laquelle il a donné, sur la propo,sition du petit conseil, le droit de bourgeoisie du canton au prince Louis-Napoléon, fils de madame la duchesse de Saint„Leu, à Arenenberg;

, ensuite de son admission comme bourgeois par la com,mune de Salenstein, arrête:

[ocr errors]

Un titre formel sera décerné au prince désigné plus haut ,et en même temps confirmation sera donnée à la lettre „régulière de bourgeoisie à établir par la commune de „Salenstein.

[ocr errors][merged small][merged small]

„Au nom de la chancellerie d'état du canton de Thurgovie, Le chancelier d'état: (Signé) Müller."

Ce titre est expressément mentionné dans les procès-verbaux de la diète (Tagsatzungsabschiede).

La législation de Thurgovie ne reconnaît aucunement une naturalisation qui n'accorde que des titres honorifiques. L'acquisition du droit de bourgeoisie d'une commune et d'un canton assure toujours, à la personne à laquelle elle est octroyée, le droit de bourgeoisie dans le canton et implicitement aussi les droits de citoyen suisse.

C'est en application de ces principes de la législation du canton de Thurgovie que le nom du prince Louis-Napoléon a été inscrit dans les registres de la commune de Salenstein et dans ceux du cercle électoral et constitutionnel de Berlingen, dont la commune de Salenstein fait partie.

Le prince Louis-Napoléon, en application des principes mentionnés plus haut, avait donc le droit incontestable de jouir en Suisse de tous les avantages conférés par la naturalisation à un citoyen suisse.

CHAPITRE III

LE SONDERBUND

OU ALLIANCE SÉPARÉE ENTRE LES CANTONS CATHOLIQUES DE LUCERNE, URI, SCHWYZ, UNTERWALDEN, ZOUG, FRIBOURG, VALAIS. SES CONSÉQUENCES ET EXPULSION DES JÉSUITES PAR LA DIÈTE

SA DISSOLUTION.

-

L'origine du Sonderbund, contre lequel la Confédération s'est élevée en 1847, remonte sans contredit à l'année 1843. Sa forme en a été modifiée deux ans plus tard.

En 1843, la diète venait de terminer l'affaire des couvents d'Argovie, conformément au pacte, c'est-àdire au moyen d'une transaction qui, en admettant la suppression des abbayes coupables, laissait subsister les moins compromises. La majeure partie de la Suisse salua avec joie le jour qui semblait mettre fin à une lutte passionnée de plusieurs années. Il ne se passait alors rien qui pût, même de loin, inspirer la moindre inquiétude aux sept états.

Cependant, à cette même époque, avait lieu à Lucerne, entre les cantons catholiques, une conférence, dans laquelle on jetait les bases d'une alliance politique séparée, et où le plan d'une scission entre les suisses était sérieusement présenté; le grand conseil du canton de Lucerne décrétait en outre, en octobre 1843, des préparatifs militaires extraordinaires. Depuis ce moment, les sept états sonderbundiens tinrent séparément leurs réunions et leurs diètes.

Bientôt après se révélait le projet d'appeler l'ordre des jésuites à Lucerne, l'un des trois cantons directeurs.

Un cri unanime de mécontentement et d'indignation retentit dans presque toutes les contrées de la patrie, et un nouveau brandon de discorde se trouva ainsi jeté dans la Confédération.

Il est vrai qu'à la diète de 1844 la majorité des états n'avait pas voulu entrer en matière sur cet objet, parce que le danger, pour la tranquillité et l'ordre intérieur, n'existait pas encore au point de déclarer cette question affaire fédérale. C'est en vain que plusieurs députations donnèrent alors de sérieux avertissements; c'est en vain qu'elles adressèrent à l'état de Lucerne les prières les plus amicales et les plus instantes; c'est en vain que l'état de Zurich délégua dans ce but une députation particulière; au mépris de toutes les intercessions amiables des confédérés et malgré la grande agitation qui devait s'en

« PreviousContinue »