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En écrivant ces lignes, je cède au désir exprimé par de nombreux amis et parents qui, à plusieurs reprises, m'ont demandé de ne pas attendre mes derniers jours pour retracer par écrit les événements les plus importants qui se rattachent au demi-siècle pendant lequel j'ai exercé des fonctions publiques en Suisse et en France.

Depuis le moment de ma retraite, j'ai pu m'occuper de ce travail, et je crois que les détails donnés sur les circonstances relatives aux parties les plus importantes de ma carrière auront, aux yeux des personnes impartiales, l'intérêt qu'elles en attendent.

Je compte donc sur leur bienveillante sympathie, et, si quelque erreur de détail,

bien involontaire du reste, s'était glissée dans ces souvenirs, je m'empresserais de faire droit aux rectifications qui pourraient me parvenir.

Je me déclarerai très-heureux si je réussis à procurer aux amis de notre histoire nationale des matériaux qui pourront faire aimer davantage encore, s'il est possible, notre chère patrie et surtout contribuer à son développement, ainsi qu'on est en droit de l'exiger, dans l'intérêt de la vérité historique, de tout homme d'état qui a eu le privilège de participer, pendant de longues années, aux affaires publiques.

J'ai exposé, dans mes souvenirs politiques, les parties les plus importantes des événements auxquels j'ai assisté pendant ma longue carrière, tant en Suisse qu'en France, de 1833 à 1883.

Tout ce que je puis regretter, c'est que mon âge avancé et surtout ma santé

ébranlée, affaiblie pendant les dernières années de mes fonctions diplomatiques, ne m'aient pas permis d'ajouter, comme je l'aurais vivement désiré, d'autres considérations, d'autres compléments à mon travail; mais le renouvellement d'insomnies nerveuses, dont j'avais déjà souffert précédemment pendant deux hivers, a retardé considérablement mes travaux et m'a rendu extrêmement difficiles les recherches ultérieures.

Les médecins qui sont en même temps mes amis qui m'ont soigné à Nice, comme ceux qui, plus tard, m'ont traité à Zurich, ont tous déclaré, d'un commun accord, qu'il ne me restait quelque chance de retrouver un sommeil réparateur, et avec lui la santé, qu'en renonçant à des travaux littéraires ou historiques.

Eu terminant, qu'il me soit permis cependant d'espérer que les communications contenues dans ce travail et qui embrassent

une période de cinquante années, offriront quelque intérêt pour l'appréciation des événements politiques qui ont contribué à classer notre chère patrie au même rang que celui occupé par d'autres états.

Que ces témoignages soient donc accueillis avec la sympathie et avec la bienveillance que je réclame en raison de mon âge avancé et de ma santé bien affaiblie depuis trois ans.

ZURICH, en février 1887.

DR J.-C. KERN.

CHAPITRE Ier

NOTES AUTOBIOGRAPHIQUES

Je suis né le 11 juin 1808 à Berlingen (canton de Thurgovie), où mon enfance s'écoula paisiblement. Mes premières études classiques remontent aux années 1826 à 1827. A cette époque, j'étudiais la philologie (les classiques grecs et latins) chez le pasteur de Diessenhofen, qui, plus tard, fut appelé aux fonctions de recteur de l'école cantonale de Frauenfeld.

M. Benker, tel était le nom de l'éminent pasteur, avait, par sa grande amabilité et son talent, le don tout particulier d'encourager ses élèves dans l'étude souvent aride des auteurs classiques, de sorte que, en peu de temps, je devins grand admirateur des Ovide, Cicéron, Homère, etc.

Après un séjour de deux ans à Diessenhofen, je continuai mes études au gymnase de Zurich, puis plus tard aux universités de Bâle, Heidelberg et Paris.

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