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les pays de l'Europe, que par conséquent chaque citoyen peut être appelé à risquer sa vie au service de la patrie, l'un des premiers devoirs des gouvernements est de veiller à la santé de leurs soldats et de prendre soin de leurs blessés. C'est pourquoi le service sanitaire, qui occupe déjà une place importante dans les armées modernes, prend de jour en jour plus d'extension. Ceci est tout spécialement le cas chez nous où, en ce moment, on crée, par l'organisation systématique des secours volontaires, un puissant auxiliaire pour le service de santé militaire.

Il est intéressant de comparer ce qui se fait aujourd'hui avec ce qui se faisait autrefois dans ce domaine. Nous voyons que, de toute antiquité, on sentit le besoin d'un service sanitaire, mais qu'il fallut très longtemps pour l'organiser; qu'au moyen âge et au commencement des temps modernes, ce service était, particulièrement en Suisse, fort bien organisé; que plus tard, il y eut un temps de recul jusqu'à ce que, dans la seconde moitié du XIXme siècle, la Convention de Genève, sur l'iniative d'Henry Dunand, inaugurât une ère nouvelle.

Voilà ce que M. Schulthess dit dans sa préface et développe dans sa brochure. Il a su rendre celle-ci non seulement instructive, mais attrayante, par de nombreuses anecdotes, tirées en particulier de la campagne du Sonderbund.

L.

Les sous-marins dans la prochaine guerre navale, par H. NOALHAT. Un vol. in-8° de 246 pages, avec 20 figures. Paris, Berger-Levrault, 1903.

Prix: 3 fr. 50.

Voici un ouvrage que les circonstances présentes rendent particulièrement intéressant. Est-il écrit avec la sereine impartialité de l'homme de science? Je n'en jurerais pas. L'auteur me semble avoir obéi à une idée préconçue. Mais il la défend avec chaleur, non sans talent, et à l'aide de documents probants, d'arguments séduisants. Sa thèse est que la France a trop de cuirassés ou du moins qu'elle en a assez, et qu'elle n'aura jamais trop de croiseurs, de torpilleurs et de sous-marins. Nous devons multiplier les moyens de harceler l'ennemi, de l'exaspérer, de le fatiguer. Moucherons bourdonnant autour du lion (ou plus exactement du léopard britannique), nous l'userons par des escarmouches, et nous le mettrons dans un tel état d'énervement et de dépression, que, pour venir à bout de sa résistance, il suffira de lâcher sur lui une escadre toute fraîche qui aura attendu ce moment-là pour entrer en action. Et voilà, à en croire, M. Noalhat, quelle doit être la tactique navale de l'avenir. E. M.

L'armée japonaise, brochure in 8o de 32 pages. Paris, Chapelot, février 1904.

Prix : 75 cent.

Cette plaquette est extraite de la Revue militaire des armées étrangères. publiée par le second bureau de l'Etat-major de l'armée. C'est-à-dire qu'elle contient des renseignements exacts. Et ils ont le mérite de l'actualité.

Les rivages indo-chinois, par M. R. CASTEX, enseigne de vaisseau. Un vol. grand in-80 de 327 pages, avec six croquis. - Paris, Berger-Levrault, 1904. Prix : 5 francs.

Cette « Etude économique et maritime » sort un peu du cadre des publications parement militaires. Bornons-nous donc à la signaler aux personnes qu'intéressent les questions coloniales, géographiques et même politiques. Peut-être, en ce moment, sont-elles plus nombreuses que jamais, l'attention du public se portant sur ce qui se passe en Extrême-Orient et envisageant les conséquences prochaines ou lointaines des événements qui s'y déroulent. E. M.

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Si jamais conflit est apparu comme soumis à la loi de fer du développement historique des belligérants, c'est assurément le cas de la guerre actuelle.

Depuis des siècles, l'Empire russe aspire à des ports libres de glace, et les progrès croissants de sa population elle s'élève aujourd'hui à 130 millions d'âmes-lui imposent l'acquisition de territoires d'émigration.

Le Japon, puissance insulaire, entretient, sur un domaine de 183 000 km. carrés (sans Formose), 46 millions d'habitants. Il souffre d'un excès de natalité. Il y va de son existence de posséder dans le voisinage de ses iles un sol propre à la colonisation où, sans rompre politiquement avec la mère-patrie ni affaiblir les liens qui l'unissent à elle, puisse se développer le surcroît de sa population.

Entre ces deux pays en constante expansion s'étalent des territoires susceptibles de leur fournir pour longtemps l'espace dont ils ont besoin, et ces territoires sont partie intégrante du sénile empire chinois. Telle la Corée, vassale de la Chine jus

Ce récit est basé sur les informations reçues au jour le jour. L'auteur s'applique a ne retenir que les nouvelles dignes de foi. Dans les cas où il ne réussirait pas, malgré ses efforts, à dégager l'exacte vérité, il requiert d'ores et déjà l'indulgence des lecteurs.

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qu'en 1895, dont la complète impuissance politique s'ajoute à la richesse du sol pour tenter la convoitise de ses voisins.

Rappelant par sa situation et sa superficie (218 000 km. carrés) la presqu'île Italique, la Corée compte 9 millions d'habitants, de race et de langue apparentées aux Japonais, et ayant adopté sans y rien changer la culture chinoise. Le pays, abondant en terres cultivables, en forêts, en mines de charbon et en métaux, est administré par l'empereur J Höng qui, lui-même esclave de son harem, fonde son pouvoir sur un mandarinat pourri et sur une caste militaire de brigands.

La majeure partie du peuple coréen est formée de paysans misérables, peu soucieux de cultiver le sol autrement que pour s'assurer une chétive existence. Le 50 à 60 % des produits reviennent en effet aux percepteurs de l'impôt et à la soldatesque qui les accompagne. De fréquentes révoltes agraires sont la conséquence naturelle de cet état de choses.

Des siècles durant, la Corée fut une pomme de discorde entre la Chine et le Japon. Elle fut tributaire de la Chine du commencement du XVIIIe siècle jusqu'en 1895. Toutefois, le Japon obtint des droits particuliers, droits commerciaux et d'entrepôts, dont il s'autorisa pour accroître son influence économique. C'est ainsi que le port de Fusan, à l'extrémité sud de la presqu'île, devint une base commerciale et une colonie japonaise. De même Chemulpo, sur la côte occidentale, port de la capitale et résidence, Séoul. Quand donc les Russes entreprirent la construction de leur chemin de fer transsibérien, les Japonais eurent tous motifs de craindre le prochain voisinage, sur le continent, d'un rival supérieur en puissance qui ne tarderait pas à contrecarrer leurs prétentions sur la Corée, prétentions qu'ils n'avaient jamais abandonnées. Aussi, en 1894, tentèrent-ils, pour s'opposer aux Russes, un vigoureux effort.

Des troubles internes leur fournirent l'occasion de débarquer des troupes en Corée pour la protection de leurs nationaux ». Les Chinois se levèrent afin de défendre leurs droits de suzeraineté, mais furent défaits sur terre et sur mer. Les Japonais, bientôt maîtres de la presqu'ile, s'avancèrent à travers la Mandchourie sur Pékin, tandis que leur flotte s'emparait de PortArthur, Wei-Haï-Weï, puis occupait Formose.

Mais, au printemps de 1895, leur marche victorieuse sur Pékin fut interrompue tout à coup par l'intervention de la

Russie et de la France, auxquelles se joignit l'Allemagne. La paix de Simonosaki, signée le 17 avril 1895, les contraignit à renoncer à leur conquête, Formose excepté, et à se contenter d'une indemnité de guerre de 200 millions de taels (au cours de fr. 50). La Corée fut proclamée indépendante.

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Cependant, les Japonais, afin de n'être pas obligés de restituer le port de Weï-Haï-Weï, le remirent à l'Angleterre, et nouèrent avec cette puissance une convention, dont l'effet fut de les couvrir vis-à-vis de la France, alliée de la Russie.

L'indemnité de guerre fut consacrée à renforcer la flotte et l'armée.

Dès le temps de Pierre-le-Grand, l'Empire russe s'est efforcé de gagner à travers la Sibérie l'océan Pacifique et de prendre pied sur quelque rivage libre de glace. Ce ne fut qu'en 1857, toutefois, que la Chine consentit à voir dans l'Amour la ligne frontière. En 1860, les Français et les Anglais marchaient sur Pékin; les Russes franchirent l'Amour et prirent possession, entre l'Oussouri et la mer du Japon, d'un territoire chinois égal en superficie à la France et s'étendant jusqu'à la frontière septentrionale de la Corée. Au sud « du gouvernement de l'Oussouri », 'dont ils s'étaient emparés ainsi presque sans combat, ils fondèrent sur la baie Pierre-le-Grand le port de Vladivostok. Mais ce port encore, malgré sa latitude du 43° degré, qui est celle de Marseille, reste gelé pendant quatre mois d'hiver; en outre, il communique avec la haute mer par des détroits que commandent les îles du Japon.

Pendant une trentaine d'années, l'état des choses ne se modifia guère en Extrême-Orient. Les préoccupations russes se portaient sur les troubles de Pologne, sur la guerre de 18761878, et sur la conquête, dans l'Asie centrale, des khanats de Merw, de Buchara et de Samarkand. Mais la situation prit une autre tournure lorsque, le 29 mars 1891, le tzar décréta l'établissement du chemin de fer transsibérien. La puissance moscovite devait en être considérablement accrue.

L'année 1896 vit l'ouverture à l'exploitation de la ligne de la Sibérie occidentale, 1420 km., de l'Oural à Ob; l'année 1898 celle du tronçon de la Sibérie centrale, 1868 km., jusqu'au lac Baïkal. Pour la traversée de celui-ci, le transport des trains se fait par bateaux.

L'an d'avant déjà, en 1897, deux réseaux avaient été achevés dans la Sibérie orientale, celui du lac Baïkal à Stretensk, et la ligne de l'Oussouri, de Chaborowsk à Vladivostok. L'établissement du réseau intermédiaire, de Stretensk à Chaborowsk, fut ajourné, le transit devant s'effectuer par voie fluviale; la navigation à vapeur emprunta le Schilka et l'Amour. Mais cet expédient ne pouvait durer. Un tracé permettant d'éviter le détour par l'Amour jusqu'à Chaborowsk, en traversant directement, en territoire chinois, la Mandchourie pour atteindre Vladivostok, devait présenter non seulement l'avantage d'une communication. sensiblement plus courte, mais celui d'un parcours en des contrées climatériquement et économiquement mieux partagées. C'est sur ces entrefaites que le 27 août 1896, une grosse nouvelle surprit le monde. Par une convention passée entre le gouvernement chinois et la Banque russo-chinoise, à Pékin, derrière laquelle agit le gouvernement russe, celle-ci s'engageait à construire, par le plus court, du lac Baïkal à Vladivostok, à travers la Mandchourie, une ligne de 1520 km. Cette ligne, placée sous le contrôle russe, devait être protégée par des troupes russes. En fait, ce traité équivalait à une main-mise de la Russie sur le nord de la Mandchourie.

Le 8 octobre 1897, autre traité, cette fois-ci entre la Russie et l'empereur de Corée ce dernier abandonnait à des administrateurs russes la gestion des finances coréennes, et, peu après, des officiers russes entreprenaient la réforme de l'armée. Mais le manque d'argent ne leur permit pas de la pousser très avant. La même année, une « Société anonyme» obtint de l'empereur de Corée une concession pour « l'exploitation des forêts sur le Ya Lu». Des colonies devaient être créées sur sol coréen, protégées par des postes de cosaques. Enfin, toujours la même année, au mois de décembre, une escadre russe s'établit à PortArthur, soi-disant afin d'hiverner dans un port à peu près libre de glace. Mais au printemps suivant, une convention était passée avec la Chine en vertu de laquelle cette dernière cédait à bail, pour 25 ans, à la Russie, la presqu'ile de Kwantung avec les ports de Port-Arthur et de Talien-wan et lui concédait la construction d'un chemin de fer reliant Port-Arthur à la ligne du nord-mandchourien. Pour assurer la protection de ce chemin de fer « contre les entreprises des Thoungouses », la Russie fut autorisée à échelonner des troupes le long du tracé. Environ

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