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Nouveau canon de campagne à tir rapide

AUX ÉTATS-UNIS

L'une après l'autre, les diverses puissances se décident à faire les sacrifices financiers qu'exige l'adoption de canons de campagne à recul sur affût. Parmi celles qui se sont prononcées tout récemment pour ce système, citons les États-Unis, l'Angleterre et la Hollande. Nous aborderons aujourd'hui l'étude du matériel de États-Unis1.

Les premières expériences du Département de l'artillerie relatives à des canons de campagne à recul sur affût datent de 1898. L'affût alors en essai comportait un frein de recul à deux cylindres hydrauliques et à ressorts récupérateurs. Comme le nouveau canon français, il était à coulissement sur l'essieu, système offrant cet avantage que le recul de la bouche à feu n'est jamais oblique par rapport au plan vertical passant par l'axe de la flèche. Par contre, il faut, pour pointer en direction, déplacer presque tout l'affût autour d'un centre situé à l'extrémité de la crosse; il en résulte que le poids à mouvoir est considérable et que l'amplitude du déplacement nécessaire pour changer la direction est relativement grande.

Ce système fut abandonné et on admit le principe de la rotation du berceau autour d'un pivot vertical. Ainsi, le centre de gravité de la masse à déplacer latéralement se trouvant presque directement au-dessus du centre de rotation, un minimum

1 The new field artillery, by captain George W. Burr, ordnance Department U.S.A. << Journal of the United States artillery », nov.-déc. 1903.

d'effort suffit pour produire un mouvement déterminé. En 1900, le Département de l'artillerie proposa une pièce de ce genre, à court recul sur affût, à frein hydraulique à deux cylindres contenant les ressorts récupérateurs, et à bêche rabattable. Bientôt après, il présentait parallèlement un modèle à long recul (1m12), encore à deux cylindres hydrauliques et à ressorts récupéra

teurs.

Comme mécanisme de culasse la vis à filets interrompus. La bêche de crosse était rigide. Les projets de ces deux canons étaient dus au capitaine Ch. B. Wheeler, du Département de l'artillerie. En 1901 et en 1902, ces deux pièces prirent part à des essais comparatifs avec des pièces construites soit par des fabriques américaines, soit par des maisons des maisons d'Europe. La Rheinische Metallwaaren und Maschinenfabrik, de Düsseldorf, avait envoyé un canon à recul sur affùt, modèle Ehrhardt, avec vis excentrique Nordenfelt et flèche télescopique.

Les épreuves de tir et de roulement auxquels ces divers canons furent soumis pendant plus d'une année ont été très sérieuses. Plusieurs centaines de coups furent tirés au polygone et en pleins champs dans les conditions les plus variées. Après une première élimination, trois systèmes seulement ont été conservés jusqu'à la fin des expériences celui de Bethlehem no 2, celui de Ehrhardt et le canon à long recul sur affût du Département de l'artillerie.

Le résultat du concours fut l'adoption, sous le nom de canon de 3 pouces, modèle 1902, de la pièce du Département de l'artillerie, mais avec des modifications essentielles, dues à l'influence du matériel Ehrhardt, dont on a emprunté les éléments principaux du frein hydraulique, du berceau, la disposition des ressorts récupérateurs, l'arrangement excentrique de la fermeture, etc. Ainsi le canon américain se présente comme un compromis « Ordnance Department-Ehrhardt ».

En effet, le canon soumis aux expériences avait montré au tir une très grande stabilité et donné d'excellents résultats, mais le Bureau de l'artillerie lui reprochait son poids trop considé rable, le faible diamètre de ses roues (120), d'où une mobilité insuffisante. Il estimait aussi que la vis de fermeture, à filets interrompus sur deux secteurs et à un seul mouvement pour ouvrir ou fermer la culasse, malgré des avantages réelstels que rapidité de manoeuvre supérieure à celle de la vis excen

trique, plus grande force d'extraction, d'éjection et de rotation, facilité de chargement, volume et poids minimes ne pouvait être acceptée que si on faisait disparaître tout danger de départ accidentel d'un coup avant que la culasse fût complètement

fermée.

Le nouveau canon pèse moins que le premier canon à long recul sur affût; les roues sont d'un plus fort diamètre (142). La vis de culasse, à filets interrompus, est à percuteur excentrique, d'après le système Ehrhardt; en outre le percuteur ne peut se porter en avant qu'une fois la culasse fermée. Le frein de recul est à un seul cylindre.

Les particularités du matériel américain sont :

1. Une puissance considérable, bien qu'inférieure à celle du canon français. Le poids du projectile est 6,8 kg. et la vitesse initiale 519 m. 1.

2. Des boucliers très résistants. Quand la partie supérieure en est rabattue, ils s'élèvent moins haut que les roues; ils sont ainsi peu visibles de loin.

3. Il y a deux manivelles de pointage en hauteur, l'une à la gauche, l'autre à la droite de l'affût, ce qui permet d'accélérer le pointage dans certains cas en faisant pointer en direction par le pointeur et en hauteur par le servant de culasse assis à la droite de l'affût. Pour cela, un niveau de pointage est fixé à la droite du berceau.

4. Le frein de route de l'affût est du côté de la bouche du canon. Lorsque la pièce est en batterie, il ne gène donc pas les servants assis sur les sièges de la flèche.

5. Chaque affût transporte 4 coups.

6. Les coffres n'ont pas de dossier; ainsi les servants peuvent facilement monter par l'arrière quand la voiture est en marche.

7. Les roues sont à huilage automatique.

8. Emploi de la cartouche complète.

1 France projectile, 7,2 kg; vitesse initiale, 529 m.

Description du matériel.

BOUCHE A FEU

(Fig. 1 et 2.)

La bouche à feu, en acier au nickel, est à jaquette, Le mécanisme de culasse est une vis à filets interrompus sur deux secteurs. La culasse s'ouvre ou se ferme d'un seul mouvement horizontal imprimé à la manivelle. La vis est disposée un peu

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excentriquement 1 par rapport à l'axe de l'âme; ainsi un choc de la pointe du percuteur sur l'amorce de la cartouche est impossible au retour de la vis au fond de son logement quand on ferme la culasse. Le percuteur ne se présente vis-à-vis de l'amorce de la cartouche qu'à la fin de la rotation de la vis de fermeture. Dès qu'on tourne la vis pour ouvrir la culasse, il s'écarte de cette position. En outre le percuteur ne peut se porter en avant tant que la culasse est incomplètement fermée. L'extraction se fait par un anneau entourant le culot de la cartouche. On peut déterminer le départ du coup au moyen d'un tire-feu, mais on se sert originairement pour cela d'un levier qui se trouve à la droite du berceau et reste sans action tant que la bouche à feu n'est pas de retour en batterie. En cas de raté, on réarme le percuteur sans ouvrir la culasse.

La bouche à feu porte en arrière un bras fixé au cylindre du frein; de chaque côté sont des plaques protectrices mettant à l'abri les glissières du berceau auquel elle est agrafée.

1 Comme au mécanisme de culasse à bloc ogival excentrique Ehrhardt. 1904

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AFFÛT

Berceau. Le berceau, en tôle d'acier, à section transversale en fer à cheval, porte la bouche à feu et renferme le frein de recul. Il est recouvert d'une plaque d'acier, dont les bords, garnis de bronze, forment glissières pour la bouche à feu. Au départ du coup, le cylindre du frein est entraîné en arrière par le bras de la bouche à feu, tandis que le piston, retenu à la partie antérieure du berceau, ne recule pas. Les ressorts récupérateurs, à section rectangulaire, sont au nombre de trois, placés

FIG. 2.

bout à bout autour du cylindre. Par le recul, ils sont comprimés contre la partie arrière du berceau. La tension initiale en est suffisante pour ramener la bouche à feu en batterie quand l'élévation est de 150. La résistance du liquide, augmentée de celle des ressorts, est réglée de façon que les roues ne soient pas soulevées quand on tire avec la bouche à feu horizontale. Un index, à la droite du berceau, permet de mesurer la course de la bouche à feu (1m22).

Le cylindre ne renferme que 3,630 kg de liquide. Il n'y a qu'une seule boite à étoupes. Le retour en batterie se fait sans à-coup. Le berceau peut recevoir autour d'un pivot un mouvement latéral d'une amplitude de 8 degrés.

Au-dessous du berceau, le porte-berceau peut tourner autour de l'essieu pour le pointage en hauteur. Il porte le mécanisme de pointage en direction.

L'appareil de visée est fixé à la gauche du berceau.

Affût inférieur. -La flèche, formée de deux flasques en acier comprimé, reliés par des plaques et des entretoises, est

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