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LES NOUVELLES PRESCRIPTIONS

POUR LE

service et l'instruction de la cavalerie suisse

L'édition actuelle du Règlement pour le Service et l'Instruction de la cavalerie suisse date de 1894; depuis lors des idées nouvelles se sont fait jour concernant soit la tactique de combat, soit le service d'exploration de notre arme; d'autre part chacune de nos quatre brigades a été dotée d'une unité nouvelle, la compagnie de mitrailleurs, destinée à renforcer sa puissance de feu. Il est donc devenu nécessaire d'entreprendre une revision de notre règlement, en tenant compte des innovations et en donnant une sanction officielle à divers principes reconnus justes et appliqués du reste depuis quelques années par plusieurs de nos chefs,

Le travail de revision, qui vient d'être mené à bien, n'implique en aucune façon le bouleversement de notre ancien règlement; des modifications introduites, beaucoup sont purement rédactionnelles ; d'autres ne concernent que des points de détails. Tels par exemple l'art. 77 a qui précise les occasions où la garde de police devra faire usage de ses armes; l'art. 87 qui attribue les forges-cuisines des escadrons au train de combat; les articles 286 et 287 qui règlent l'usage des commandements et des signes pendant la manoeuvre; l'article 99 a qui institue un paquetage réduit, etc.

Les changements plus importants, que nous examinerons chapitre par chapitre, portent: 1° sur l'instruction à cheval ; 2o sur les formations de manœuvre ; 3° sur le service d'exploration; 40 sur l'instruction du tir et le combat à pied; 5° sur l'instruction des mitrailleurs.

1o Le chapitre de notre règlement concernant l'instruction de l'équitation est destiné d'après la volonté du Chef du Départe

ment militaire fédéral à servir dorénavant de Règlement d'équitation pour toute l'armée. Il était donc nécessaire de prévoir une instruction un peu plus poussée qu'elle ne peut l'ètre dans les écoles de recrues; les articles qui règlent l'emploi rationnel des aides ont été complétés et précisés et quelques mouvements nouveaux destinés à faire comprendre cet emploi ont été introduits (tourner sur l'avant-main, agrandir et diminuer la volte). 2o La principale modification relative aux formations de manoeuvre, consiste en l'adoption du principe des colonnes de marche parallèles, soit dans l'escadron déjà, soit dans le régiment ou la brigade. Cette formation, qui donne le maximum de mobilité dans certains terrains, et qui favorise le déploiement en tirailleurs rapide et simultané de la cavalerie sur un point étendu à volonté, a été expérimentée à maintes reprises dans nos dernières manœuvres.

C'est d'après un principe semblable que le nouveau règlement admet la formation de la brigade en deux colonnes parallèles de régiments formés par peloton.

3o Dans le chapitre consacré au service d'exploration, plusieurs changements d'une certaine importance ont été introduits l'article 466 précise les buts que doivent poursuivre les chefs de patrouille, les renseignements qu'on peut exiger d'eux et aussi ceux qu'il leur sera souvent impossible de se procurer; l'article 467 a établit comme règle que les patrouilles ne doivent pas être envoyées à plus d'une journée de marche en avant du gros et recommande, lorsqu'il devient nécessaire d'explorer à de plus grandes distances, d'employer des escadrons entiers qui deviennent des escadrons d'exploration. Les unités ainsi déplacées devront se transporter rapidement jusqu'à un point important, un nœud de routes par exemple, s'y établir et envoyer de là des organes d'exploration dans toutes les directions.

Le nouveau règlement fait d'autre part ressortir l'importance des dispositions à prendre par tout chef de patrouille pour assurer l'arrivée rapide de ses rapports: envoyer les rapports importants à double, laisser en arrière des postes de relais. Il recommande l'adjonction de bicyclistes aux escadrons indépendants poussés devant le front.

Enfin les articles consacrés au service de sûreté de la cavalerie indépendante ont été complètement remaniés, mais plutôt au point de vue de la répartition de la matière que des principes.

4° L'on s'est rendu compte depuis quelques années que notre cavalerie avait encore des progrès considérables à faire dans l'instruction du tir, la conduite du feu et d'une façon générale tout ce que comporte le combat à pied. Aussi est-ce dans les chapitres intitulés « les Feux » et « le Combat à pied de la cavalerie » que nous trouvons le plus d'innovations et de changements.

Pour améliorer l'instruction du tir de combat le nouveau règlement commence par la simplifier en n'admettant plus qu'une sorte de feu, le feu d'une cartouche, dans lequel chaque homme tire individuellement depuis le commandement qui donne le but et la hausse jusqu'à celui de halte. Après chaque coup les tireurs doivent revenir à la position de la charge et la rapidité de leur tir doit se régler sur l'importance du but et la distance. Cette indépendance laissée au tireur suppose naturellement un dressage poursuivi avec le plus grand soin, qui l'amènera à tirer calmement et à observer l'effet de son feu. Du reste l'officier commandant la ligne de feu devra toujours arrêter le feu et le faire reprendre avec une moindre vitesse, dès qu'il le jugera nécessaire.

Quant au combat à pied il doit devenir un des principaux moyens d'action de la cavalerie et il pourra le devenir toutes les fois qu'il sera engagé avec énergie contre un adversaire pris à l'improviste. Il ne devra pas être copié sur le combat d'infanterie, ni comporter de longues lignes de tirailleurs; il sera effectué par des groupes de feu (escadrons ou même pelotons) agissant d'une façon plus ou moins indépendante et pourra souvent être combiné, avec l'intervention d'une partie de l'unité à cheval. Cette tactique, dont le principe est non pas de rechercher une supériorité du feu sur l'adversaire, mais de le déconcerter par des attaques imprévues, venant tantôt d'un point tantôt d'un autre, exige une grande mobilité de nos troupes. La cavalerie devra toujours éviter de s'établir sur des positions pour y attendre l'ennemi, et chercher constamment à agir offensivement.

Toute intervention de la cavalerie à pied exige que le commandant de détachement s'oriente personnellement, en se portant en avant de sa troupe, soit sur le terrain, soit sur les dispositions de l'adversaire. Puis, une fois l'orientation nécessaire. acquise, il s'agira de lancer les unités à l'action, en indiquant à chacun le but poursuivi, la direction générale de l'attaque et

son objectif particulier et en leur laissant toute liberté sur les formations à prendre et les moyens à employer. Ainsi chaque groupe de feu pourra habituellement avoir ses chevaux à portée et prendre ses dipositions d'après les circonstances.

Après l'indication de ces principes tactiques notre nouveau règlement passe à la conduite du feu et insiste tout particulièrement sur l'importance de l'estimation juste des distances et sur la nécessité de régler son tir, en concentrant le feu sur un même point avant de le répartir sur l'ensemble du but à battre. Ce réglage du tir devra être en général dirigé par les commandants d'escadron. D'autre part, les officiers devront prêter l'attention la plus sévère à la discipline du feu et à l'emploi judicieux de la munition.

Il va sans dire qu'un semblable emploi de nos escadrons exige de nombreux exercices de tir de combat effectués dans le terrain et d'après des suppositions tactiques. Il est nécessaire que nos hommes s'y habituent à tirer contre des buts partiellement masqués et placés soit aux moyennes distances (500-800 m.), soit aux grandes distances (800-1200 m.) Il faut aussi que dans chaque tir de combat l'arrivée des différentes unités dans la ligne de feu se fasse dans la formation et aux allures qui résultent normalement de la supposition admise.

5o D'après une décision prise par la commission de cavalerie, le règlement des mitrailleurs à cheval fera dorénavant partie intégrante du règlement de service de la cavalerie. Par ce moyen, on a cherché à maintenir intacte l'unité d'esprit qui doit exister entre les brigades de cavalerie et les compagnies de mitrailleurs qui leur sont adjointes, et l'on a procuré un moyen facile à tous les officiers de cavalerie de s'initier au service spécial des mitrailleurs.

Ce chapitre tout nouveau de notre règlement prévoit une organisation des compagnies de mitrailleurs fort différente de celle qui avait été établie au début. D'abord ces unités sont divisées en quatre pelotons de deux pièces au lieu de deux pelotons de quatre pièces; ensuite chaque pièce est accompagnée de deux chevaux de munition au lieu d'un seul (soit 4000 cartouches au lieu de 2000); enfin l'effectif, reconnu depuis longtemps comme insuffisant, est considérablement augmenté et les attributions des sous-officiers, spécialement des brigadiers, sont notablement modifiées.

Le premier but que devra poursuivre l'instruction spéciale des mitrailleurs sera d'obtenir la plus grande rapidité possible dans le montage et le démontage des pièces; il est essentiel que les hommes s'habituent à se porter vivement avec l'arme démontée sur un point donné et à y établir leur pièce dans le moins de temps possible, car la réussite d'une prise de position dépendra absolument de l'ordre et de la dextérité avec lesquels seront exécutés ces mouvements; de même il est indispensable que les mitrailleurs puissent cesser le feu et disparaître en quelques secondes. Ces exercices de prises de position et de levers de position devront donc être exercés dès le début en caserne, sans les chevaux, puis plus tard dans le terrain pendant le service de campagne ou les marches.

L'instruction du tir sera toujours précédée de l'école de pièce; elle commence, lorsque les hommes auront saisi le maniement de leur arme, par le tir d'école, qui comprendra d'abord des exercices avec le feu d'une cartouche, ensuite seulement des exercices avec le feu par salve et l'emploi de la dispersion soit verticale soit horizontale. Enfin viendront les tirs de combat, réglés d'après les mèmes principes que ceux de la cavalerie, et qui devront toujours servir, en outre, à exercer le ravitaillement de la munition.

Les mitrailleurs connaissent trois sortes de feu :

1o Le feu par salve, qui est un tir de réglage et dans lequel les deux pièces du peloton tirent alternativement des salves courtes (20-30 coups) et concentrent leur feu sur un point donné.

2o Le feu de vitesse, qui est le tir normal et qui diffère du précédent par la plus grande longueur des salves (environ 100 coups) et par la répartition du feu.

3o Le feu par pièces, dans lequel chaque mitrailleuse tire aussi vite qu'elle le peut et qui ne s'emploie qu'exceptionnellement contre les buts spécialement dangereux ou favorables.

Les formations des mitrailleurs sont excessivement simples. Pour le peloton nous ne connaissons que les colonnes par trois, par deux ou par un et la formation de combat dans laquelle les deux escadrons correspondant aux deux pièces cheminent en colonne de marche sur la même ligne à 20 pas environ d'intervalle. Pour la compagnie, nous ne connaissons, outre les trois sortes de colonnes, que la masse dans laquelle les quatre

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