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CHRONIQUES et NOUVELLES

CHRONIQUE SUISSE

L'instruction militaire préparatoire et l'avant-projet de réorganisation
de l'armée.

Je voudrais entretenir les lecteurs de la Revue militaire suisse de l'enseignement militaire prépararoire. Je ne puis le faire, cela va sans dire, que brièvement la question ne peut être examinée ici que dans ses grands traits.

L'instruction militaire préparatoire fait partie du programme du Département militaire. Elle figure à son avant-projet d'organisation. Elle est destinée à compenser la durée relativement courte que ce projet donne à l'école de recrues.

Cette instruction préparatoire comprendrait deux degrés :

D'abord l'enseignement de la gymnastique à l'école par le régent, qui aura reçu, à cet effet, l'instruction spéciale nécessaire. On atteindra, par ce moyen, à peu près tous les jeunes Suisses appelés plus tard à devenir des miliciens et on contribuera à leur développement physique.

Mais ce moyen atteindra-t-il réellement le but poursuivi ?

C'est douteux, car tous les régents ne seront pas aptes à enseigner la gymnastique. Les jeunes s'en acquitteront fort bien; mais, à mesure que l'âge les alourdira, ou leur fera perdre leur souplesse, ils arriveront insensiblement à ne plus pouvoir enseigner la gymnastique d'une manière profitable. Cet enseignement continuera à se donner, sans doute, mais sans produire les fruits attendus.

L'instruction préparatoire comprendrait ensuite, de 16 à 20 ans, une instruction militaire proprement dite, destinée à développer physiquement les jeunes gens et à les exercer au tir. L'enseignement serait donné dans les communes par des officiers et des sous-officiers; il comprendrait 60 heures par année.

Atteindra-t-on par ce moyen tous les jeunes gens auxquels cet enseignement est destiné, ou, au moins, la généralité d'entre eux ? On peut en douter, et l'avant-projet ne se le dissimule pas. Aussi prévoit-il que les jeunes

gens qui, pour une cause ou pour une autre, n'auraient pas suivi, avec succès, au moins deux cours annuels devraient faire, avant le commencement de l'école de recrues, un cours spécial de quinze jours. Il prévoit même que dans les communes où cela présenterait trop de difficultés on pourrait y renoncer.

Voilà donc, dores et déjà, deux catégories de jeunes gens qui seraient astreints à un cours préparatoire de quinze jours ceux qui, appartenant à des communes où l'instruction préparatoire se donne, n'auraient pas suivi avec succès deux cours annuels, et ceux appartenant à des communes où cet enseignement ne se donne pas du tout.

Quelle serait la proportion de ces jeunes gens appelés à des cours préparatoires? Il n'est pas possible de le dire, ni même de s'en faire une idée approximative. Toute base d'appréciation manque. Mais on peut supposer qu'elle sera assez considérable.

Cet enseignement serait donné par des officiers et des sous-officiers.

Je ne veux mettre en doute ni la bonne volonté, ni le zèle, ni même la capacité de ceux qui seraient chargés de cette lourde tâche; mais il leur manquera certainement l'expérience.

On tient pour nécessaire, chez nous, que l'enseignement militaire soit confié à un corps spécial: le corps des instructeurs. Si ces instructeurs ne sont pas chargés d'instruire directement la troupe, leur rôle consiste au moins à servir de guides, de conseillers aux autres officiers et aux sousofficiers, dans l'accomplissement de leur tâche. Comment voudrait-on qu'il pût en être autrement pour l'enseignement militaire préparatoire ?

Il existe une pédagogie pour l'enseignement militaire, comme pour tout autre enseignement. Cette pédagogie doit être apprise, et on ne l'apprend pas par le fait seul qu'on a passé, comme officier, ou sous-officier, par une ou deux écoles de recrues.

Si celui qui sera chargé de l'enseignement militaire préparatoire fait fausse route, ce sera très grave; il donnera à ses élèves un mauvais pli ou des habitudes dont ils auront beaucoup de peine à se défaire plus tard, et qui donneront à l'instructeur de l'école de recrues beaucoup plus de peine que le dressage de jeunes gens ne sachant absolument rien.

On pourrait avancer contre l'instruction militaire préparatoire d'autres raisons encore: elle fera perdre, aux officiers, sous-officiers et élèves, un temps beaucoup plus considérable que les 60 heures annuelles qui sont prévues; elle coûtera très cher, puisqu'on en évalue les frais à 800 000 fr.; elle donnera aux jeunes gens l'idée fausse qu'ils sont des soldats avant le temps où ils doivent le devenir, et ils arriveront à ce moment-là peut-être déjà blasés ou lassés, etc.

Tout bien considéré, je crois qu'il serait plus avantageux de donner à l'école de recrues une durée suffisante pour former complètement un soldat

Le Département militaire propose 60 jours, dans l'idée que les recrues seraient déjà préparées; les commandants de corps d'armée et de division ont demandé 80 jours. Entre ces deux chiffres, il y a de la marge.

Je pense qu'une instruction suivie, non pas de quinze jours, mais d'une semaine, immédiatement avant l'école de recrues, donnerait de meilleurs résultats que deux cours annuels de 60 heures, dont le dernier aurait pu avoir lieu, peut-être, deux ans auparavant. Il suffirait pour cela de porter la durée de l'école de recrues, suivant l'avant-projet du Département, à 67 jours ou même à 74 jours si une semaine n'était pas jugée suffisante.

Dans ses considérants en faveur de l'instruction préparatoire, l'exposé des motifs du Département militaire s'exprime comme suit :

« La valeur de cette instruction préparatoire ne saurait être dépréciée. Elle procède de facteurs moraux. Elle a pour but d'implanter au cœur du jeune Suisse les vertus qui feront de lui un homme, qui rendent un pays et son armée forts et invincibles. C'est là que se développeront en lui le sentiment du devoir, l'esprit de sacrifice, le courage et la décision, la conscience de sa solidarité avec ses compagnons de lutte; il y apprendra la nécessité de soumettre sa volonté à la volonté générale, le culte de la vérité et de la droiture, de la fidélité, les joies de la lutte et le calme dans l'action; mais avant tout il y gagnera un amour ardent et réfléchi pour la patrie. Il est certain que l'école, la famille ou le maître d'école doivent agir dans le même sens. Mais, à partir de l'âge de 16 ans, la grande majorité est soustraite à l'influence de l'école, et il y a bien peu de familles et de maîtres d'école qui puissent guider dans cette voie les jeunes gens de 16 à 20 ans. L'instruction préparatoire est encore un moyen propre à maintenir, à un âge difficile, la jeunesse dans le droit chemin. »

J'en suis bien fâché, mais je ne puis pas partager ces généreuses illusions. Si l'instruction militaire préparatoire réussit à apprendre au jeune homme à faire des à-droite et des à-gauche, à marcher droit, à manier un fusil, à viser et à mettre ses balles en cible, il faudra se déclarer très satisfait, mais elle ne lui apprendra rien de plus.

Et puis cela empiète sur le domaine de l'école et surtout sur celui du père de famille. Là où le père de famille et le régent n'auront rien pu pour le développement des excellents sentiments énumérés ci-dessus, que pourra y faire un officier, la plupart du temps simple lieutenant, ou un sousofficier. Il faut laisser à chacun ce qui lui appartient, et c'est au père de famille et au régent à préparer l'enfant et le jeune homme à ses futurs devoirs militaires.

Il y a un vieux proverbe qui dit : « Chacun son métier, les vaches seront bien gardées. » Il n'est pas superflu de le rappeler ici.

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Les mutations mensuelles datent du 20 juillet. Dans les hauts emplois on compte trois démissions: le commandant de Danzig, lieutenant-géneral v. Horn, le major-général v. Hennigs qui commandait la 85 brigade d'infanterie à Strassbourg, et le major-général v. Mitzlaff, commandant de la 3 brigade de cavalerie de la Garde. Le général v. Horn est sorti du régiment de grenadiers no 2 où il était entré en 1866. Il a fait les deux guerres de 1866 et 1870-71. Comme colonel, il commandait le régiment n° 147, comme major général la 70e brigade d'infanterie. Il reçut le commandement de Danzig en 1902. Son successeur est le major-général v. Seydlitz-Kurzbach, commandant de la 61 brigade d'infanterie à Strassbourg. Né en 1847, il entra en 1865 au régiment des fusiliers no 37 et prit part, lui aussi, aux campagnes de 1866 et 1870-71. Comme major et lieutenant-colonel, il commandait l'école de sous-officiers à Weissenfels, comme colonel, le régiment d'infanterie n° 26. Son successeur à la tête de la brigade est le majorgénéral Bendemann, qui appartint longtemps à l'état-major général.

Le second démissionnaire, v. Hennigs, est sorti du 2e chasseurs, il prit part à la campagne de France. Comme colonel, il commanda le régiment d'infanterie n° 83 à Kassel. Son successeur à la brigade est le colonel Frhr. v. Rheinbaben.

Enfin, le major-général v. Mitzlaff était entré en 1868 aux chasseurs no 3, mais fut transféré dès 1869 aux uhlans no 10 avec lesquels il fit la campagne de 1870. Il a commandé de 1897 à 1902 le 2o dragons de la Garde. Son successeur à la tête de la 3° brigade de cavalerie de la Garde est le colonel Bartsch v. Sigsfeld. La 11e brigade d'artillerie de campagne dont le commandant major-général Schuch est décédé, a passé au colonel v. Wasmer. Le colonel Röhrssen, commandant du régiment d'infanterie no 154, a été nommé commandant de la place de Wesel en remplacement du major-général Weber, décédé.

Le colonel Dürr, inspecteur de l'infanterie de la marine, qui avait dirigé en janvier le « détachement expéditionnaire de marine » dans l'Afrique sud-occidentale, mais qui, tombé malade d'une crise du cœur, a dû rentrer au pays, a été remplacé comme inspecteur par le colonel Wyneken, commandant du régiment n° 97. Dürr a été nommé aide de camp du grand-duc de Bade.

Au total, ont été promus: 1 major-général, 4 colonels, 20 lieutenantscolonels, 20 majors, 33 capitaines, 53 lieutenants en premier et 3 en second. Ont démissionné: 1 lieutenant-général, 2 majors-généraux, 1 colonel, 1 lieutenant-colonel, 11 majors, 10 capitaines, 25 lieutenants des deux classes.

L'artillerie a célébré la date du 18 juillet 1904; il y eut un siècle, ce jour-là, qu'est né le général v. Hindersin, qui fut inspecteur général de l'artillerie de 1864 à 1872, année de sa mort. V. Hindersin eut le grand mérite, en 1867, de créer une école de tir pour l'artillerie, si bien que l'on peut dire de lui qu'il inaugura l'enseignement de l'emploi du canon rayé. On comprend les souvenirs qui se rattachent dès lors à son nom, surtout si l'on pense que les succès de notre artillerie furent un des facteurs fondamentaux de nos victoires sur les Français.

On a publié quelques dates intéressant les expéditions de troupes en Afrique sud-occidentale. Depuis le 7 juin, le compte de ces expéditions s'élève à 211 officiers, 51 officiers de santé, 64 employés militaires, 4965 sousofficiers et soldats, 32 pièces de campagne, 12 caissons, 6 mitrailleuses 3320 chevaux tirés de nos provinces orientales. On a importé en outre 1310 chevaux et 420 mulets du Cap et 547 chevaux et 25 mulets de l'Argentine. On indique encore comme expédiés, d'autre part, 8 pièces de campagne, 7 mitrailleuses, 1 canon automatique.

Les pertes, au 19 juin, étaient de 428 hommes, y compris 32 officiers. Tués 129 hommes y compris 14 officiers, blessés 121 (14 officiers), morts de leurs blessures 9 hommes (3 officiers), de maladies 48 hommes (1 officier), disparus et assassinés environ 125. Ces chiffres sont tirés d'un tableau statistique du Conseil colonial.

D'après les journaux, manquent encore au corps expéditionnaire : les aumôniers. Le service de la poste comporte 40 employés sous les ordres d'un directeur stationné à Windhoek. L'envoi des chiens de guerre a eu lieu dans. un transport organisé au camp de Munster. Pour un régiment on a emmené plus de 200 chiens. Ils sont destinés au port des dépêches d'un point à un autre et au service de chiens de garde.

Les manoeuvres impériales du corps de la Garde et du IXe corps seront combinées avec des manoeuvres de la flotte de combat. Celle-ci détachera un corps de débarquement comme en 1901.

Les revues des corps auront lieu pour la Garde, le 2 septembre, près de Berlin, pour le IXe corps et le corps de débarquement le 6 septembre près d'Altona. Les manœuvres des corps auront lieu du 13 au 15 septembre

Les nacelles des régiments de cavalerie doivent être remplacées par des pontons de cavalerie en acier. Au lieu d'une voiture du train des nacelles à 6 chevaux, chaque régiment disposera de deux voitures du train de pon. tons à 4 chevaux. Le nouveau modèle de voiture est de construction beaucoup plus solide, plus mobile et plus maniable que l'ancien. Le « Kavalleriǝ

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