Page images
PDF
EPUB

Au surplus, le divisionnaire a un chef direct en la personne du commandant de corps d'armée. Il serait donc naturel qu'au cas d'un instructeur d'arrondissement chef de la division, le droit d'inspection échût au commandant de corps. Ainsi disparaîtrait une des principales objections au cumul.

D'autre part, on peut faire valoir que le choix n'est déjà pas si considérable des officiers aptes à un haut commandement que l'on en restreigne encore artificiellement l'étendue. Il est de l'intérêt de l'armée de mettre toujours à la tête de ses unités, petites ou grandes, le chef qui paraît le plus capable. Si, dans certains cas, ce chef est un instructeur d'arrondissement, il serait regrettable que cette qualité devint une cause d'exclusion et créat des droits en faveur d'un moins capable.

Il n'en reste pas moins que le Conseil fédéral devra toujours agir avec une extrême circonspection. Il y aurait même lieu de poser en principe que lorsque pour un haut commandemant un officier de troupe est en concours avec un instructeur d'arrondissement, le premier, à qualification égale, devrait être préféré. Deux arguments peuvent être invoqués à l'appui de cette opinion, l'un de nature militaire, l'autre de portée morale.

L'argument militaire est qu'en cas de mobilisation, l'instruction des recrues n'est pas suspendue. Elle est poussée au contraire avec plus d'intensité, le gouvernement pouvant appeler de plus jeunes classes d'âge par anticipation. Il est donc nécessaire qu'une partie au moins des officiers qui ont l'habitude de diriger cette instruction continuent à le faire et demeurent dans les dépôts de recrues.

L'argument moral est qu'il faut éviter de diminuer chez les officiers de troupes émulation résultant du désir de l'avancement. Ce désir est un stimulant légitime au travail: ce serait diminuer grandement l'armée que de n'en pas tenir compte. N'oublions pas que les officiers permanents seront toujours un très petit nombre en Suisse. On ne saurait se passer des officiers dits de troupes. Par conséquent, tout ce qui pourrait contribuer à amoindrir leur qualité, à diminuer leur goût des études militaires et à réduire le temps qu'ils consacrent à leurs obligations de service, se traduirait par un affaiblissement de la défense nationale.

Il faut éviter aussi que le sentiment prenne naissance chez les officiers de troupes qu'ils sont inférieurs à leurs tâche, ce qui risquerait de se produire s'ils se voyaient préférer trop souvent de leurs camarades du corps permanent. La confiance en soi-même est un élément trop précieux de succès dans le commandement pour qu'on ne l'entretienne pas avec un soin jaloux.

[blocks in formation]

La discussion sur la revision militaire bat maintenant son plein dantoutes nos sociétés d'officiers. Pour ne parler que de ce que nous voyons le plus rapproché de nous, les sous-sections vaudoises organisent des soirées

de discussion, dans chacune desquelles est mis à l'ordre du jour un des objets principaux du programme revisionniste. Le débat a été ouvert le 7 novembre, dans la nouvelle salle du mess, à la caserne de la Pontaise, par un exposé général du colonel-divisionnaire Ed. Secretan. Le conférencier a repris les diverses questions abordées par le colonel-commandant de corps Buhlmann, à Zoug, mais avec plus de détail. Il a montré de la façon la plus claire les divergences essentielles existant entre le projet du département et celui du commandement supérieur. Il a du reste conclu par l'espoir qu'un compromis interviendrait, à la suite duquel l'accord s'établirait sur un projet unique. Le succès de la revision l'exige. Prochainement doit se réunir la conférence des commandants supérieurs aux fins d'examiner et de discuter l'avant-projet du département et d'arrêter les points sur lesquels des concessions sont possibles.

Les indications fournies par le colonel-divisionnaire Secretan sur les origines des deux projets établissent qu'un rapprochement a commencé déjà.

Au début, la conférence des commandants entendait limiter à quelques objets essentiels le travail de revision. Les débats agités provoqués aux Chambres par certains actes de l'administration militaire avaient démontré que la tâche la plus urgente était une réorganisation de cette administration. Il importait de mettre plus de clarté dans le partage des compétences: à l'administration les travaux préliminaires, levée des hommes, recrutement, habillement, équipement, incorporation, établissement des contrôles, etc. Cela fait, l'administration remet au corps d'instructeurs les hommes qu'elle a préparé à cet effet; ce corps se charge de les instruire, de faire des jeunes recrues gauches et inhabiles à se servir de leurs armes des sol dats prêts à la guerre. Et ici intervient le commandement, qui inspecte les nouveaux soldats, voit s'ils sont tactiquement aptes, et continue l'instruction des unités.

Il fallait done commencer par mener à bien la réorganisation du département militaire fédéral. Cela, et deux ou trois autres points relatifs aux compétences du commandement, devait suffire comme premier programme à réaliser.

Mais on put s'apercevoir alors ce que l'on savait déjà, en conservant des illusions, — quelle énorme force d'inertie réside dans une grande administration. Certaines habitudes de travail étant prises, il faut un travail d'hercule pour y apporter le moindre changement.

Done, l'administration constatant qu'on en avait à elle, résolut de mettre sur le chantier un programme de revision totale; elle prétendait surtout supprimer par un transfert d'attributions à la Confédération les conflits qui se produisent parfois entre l'administration centrale et les bureaux canto

La conférence s'y opposa. Elle rappela le souvenir de 1895, fit valoir que rien ne permettait de supposer un changement d'orientation dans l'opinion publique qu'au contraire, la réponse négative du peuple à une demande de revision constitutionuelle serait, dans les circonstances du moment, plus que jamais catégorique. La conférence obtint gain de cause, mais dut céder à son tour sur la question d'une revision générale de la loi. Le département se mit à l'œuvre.

Le premier projet qu'il soumit à la conférence tenait compte à quelques égards des vœux qu'elle avait exprimés. Toutefois, des divergences notables apparaissaient, et l'esprit de l'œuvre surtout accusait une différence. La conférence jugea que la façon la plus simple de procéder, celle qui garantirait la discussion la plus rapide et la plus claire, était de soumettre à son tour au département un projet complet. Ainsi fit-elle. C'est sur le vu de ce travail que le Département rédigea l'avant-projet actuellement en discussion et qui est une édition fortement amendée du mémoire primitif.

Le colonel-divisionnaire Secretan a abordé, ensuite l'examen des principales divergences entre les deux projets, attirant plus particulièrement l'attention de son auditoire sur les points essentiels méritant une discussion approfondie instruction de l'armée, organisation du corps d'instruction. répartition des compétences entre l'administration et le commandement, constitution de l'état-major général, etc. Il a relevé la structure générale des deux œuvres en présence, expliquant que la conférence des commandants avait eu surtout en vue de ne fixer dans la loi que ce qui est d'un intérêt général, les questions qu'il importe au peuple de trancher lui-même le cas échéant. Les débats techniques, au contraire, seront avec avantage abandonnés aux décisions des autorités législatives et exécutives.

A ce propos, le conférencier a rappelé l'incident typique du caporal du train des bataillons d'infanterie. Notre loi de 1874 a poussé la minutie jusqu'à prévoir les effectifs de chaque unité et de chaque état-major. Quand done fut reconnue la nécessité d'adjoindre à l'état-major du bataillon un caporal du train, on ajourna une décision jusqu'à ce que l'occasion se présentât d'une revision plus importante de l'organisation militaire. Il n'était pas possible d'élaborer une loi fédérale uniquement pour un malheureux caporal du train.

Par bonheur, un employé fouilleur d'archives découvrit un jour que le dit caporal du train avait été admis par le législateur lors de l'établissement de la loi et que son omission dans le tableau de l'effectif du bataillon était le résultat d'une négligence du scripteur. Le caporal du train put être réintroduit par la voie budgétaire.

Des incidents de ce genre ne seront plus possibles si la loi se borne à appliquer les principes d'intérêt général et s'allège de l'énumération des détails d'exécution.

*

La question de l'instruction militaire préparatoire continue à faire l'objet des discussions des sociétés de gymnastique. D'une manière générale, l'obligation est repoussée, les gymnastes craignant qu'elle ne nuise au recrutement de leurs sections. Quand les jeunes gens devront, de 16 à 20 ans, consacrer une partie de leurs soirées anx exercices militaires préparatoires, où prendront-ils le temps de fréquenter le local de gymnastique dans l'intérêt de leur société? En revanche, les gymnastes montrent le plus grand désir de favoriser l'instruction de la gymnastique facultative des jeunes gens, l'obligation ne conservant qu'un caractère moral, et la fréquentation des exercices étant stimulée par des mesures appropriées. Ce point de vue est résumé dans la résolution votée dans leur réunion du 6 novembre par les délégués de la Société fédérale de gymnastique :

L'enseignement de la gymnastique doit être introduit dans toutes les écoles et développé plus que par le passé.

Tout Suisse âgé de 16 à 20 ans doit pratiquer les exercices corporels.

La Confédération assure l'enseignement préparatoire au service militaire, donné aux jeunes gens dès leur sortie de l'école jusqu'à l'âge de vingt ans. Tous les jeunes gens appelés au recrutement, excepté les infirmes, doivent être soumis à un examen dont les résultats devront fournir un tableau des capacités physiques de la recrue.

La Société fédérale de gymnastique offre son aide à la Confédération pour le développement physique de la jeunesse. L'assemblée des délégués autorise le comité central à faire en temps utile les démarches ultérieures.

CHRONIQUE BELGE.

(De notre correspondant particulier.)

Le nouveau Règlement sur le tir de l'infanterie.

Le grand événement militaire de cette fin d'année en Belgique est l'apparition du nouveau Règlement sur le tir de l'infanterie.

Depuis 1898, date du dernier règlement, de nombreuses discussions avaient eu lieu dans la presse militaire belge, dans le Bulletin de la Presse et particulièrement dans la Belgique militaire, au sujet des réformes à introduire dans l'enseignement et dans la pratique des tirs individuels et des tirs collectifs.

Sous l'impulsion vigoureuse du Département de la guerre, on procéda chaque année à des expériences dans les polygones et à des essais dans les corps; le nombre des cartouches allouées annuellement fut majoré; des modifications capitales furent apportées à la réglementation du tir réduit, du tir individuel à balle, des tirs de combat; enfin, de grandes améliorations furent introduites dans la représentation des objectifs fixes et mobiles.

Au début de l'année 1904, le Département de la guerre, voulant permet

tre à toutes les autorités de contribuer à l'élaboration de règles pratiques et simples, organisa un referendum sur les points principaux ci-après :

1° Convient-il ou non de mettre la bayonnette au canon pour l'exécution des différents genres de tir?

2o Faut-il faire exécuter les feux de salve par section ou par peloton ? 3o Convient-il de maintenir ou de supprimer les tirs d'examen des compagnies?

4° Quelle que soit leur adresse, les hommes doivent-ils tirer invariablement toutes les munitions qui leur sont allouées réglementairement pour les tirs individuels?

5o Les hommes doivent-ils brûler invariablement à chacune des distances de tir le nombre de cartouches prescrites par le règlement, ou bien convientil de ne les laisser passer à une distance supérieure que lorsqu'ils ont mis un certain nombre de balles (ou ballettes) en cible et n'ont pas commis plus d'un nombre déterminé de points d'erreur?

Convient-il que le capitaine puisse régler la consommation des munitions allouées à sa compagnie de manière à faire parcourir, par ses hommes. la série des distances de tir (10 à 100 au tir réduit, 100-400 aux tirs d'école et 100-600 aux tirs d'application) sans être astreint à faire brûler par tous le même nombre de balles? Dans ce cas, les cartouches non consommées par les bons tireurs, pour remplir les conditions exigées (voir question (5") pour passer d'une distance à l'autre, seraient considérées comme disponibles et brûlées soit :

a) Par ces soldats, en exercices appropriés, au choix du capitaine, pour augmenter encore leur adresse et en faire des tireurs de tout premier ordre.

b) Ou bien utilisées pour parfaire l'instruction des inhabiles de manière à les amener à satisfaire à des conditions exigées (voir question 5") et à former des compagnies de bons tireurs moyens.

7 Comment réglera-t-on les droits à l'obtention des prix :

a) De tir réduit ;

by De tir d'école :

e) De tir d'application:

d) Des concours de compagnie, de bataillon et de régiment ;

e) Quelles sont les règles qui devraient présider au classement des tireurs d'élite de 1o, 2o et 3° classes?

f) Quelles conditions faut-il remplir pour prendre part aux concours de compagnie, de bataillon et de régiment?

8 Y a-t-il lieu d'introduire des tirs individuels à distance inconnue pour certains hommes choisis par le capitaine? Ces tirs seraient-ils des encouragements pour les bons tireurs : ils s'effectueraient à l'aide de cartouches disponibles provenant de la suppression des tirs de démonstration et, éventuellement, de la non-exécution des tirs d'examen (voir question 3o)?

« PreviousContinue »