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rière sont en ligne ou en ligne ouverte de sections. Sous le feu efficace de l'ennemi il sera même nécessaire de prendre la formation sur un rang. S'il y a des couverts il faut donner la préférence à la colonne » (chiffre 237).

« Les formations qui conviennent le mieux aux compagnies que le commandant a gardées à sa disposition immédiate sont la colonne par pelotons, la ligne ou la ligne ouverte de sections. Sous le feu efficace de l'infanterie ennemie, même depuis 1500 m., et en terrain ouvert, il sera nécessaire de prendre la formation sur un rang» (chiffre 243).

«En terrain ouvert, la meilleure formation pour les bataillons que l'on garde en arrière est celle en ligne de colonnes par peloton» (chiffre 246).

Ces prescriptions du règlement ne peuvent plus être appliquées actuellement à la lettre. Elles ne répondent plus aux besoins créés par la portée lointaine et la puissance des armes à feu modernes. Il serait dangereux de les considérer comme limitatives et, d'une manière générale, il est permis de penser qu'un règlement ferait mieux, en pareille matière, d'indiquer le but à atteindre, et de laisser le choix des moyens, qui pourront varier d'un cas à l'autre, au chef responsable. Le but à atteindre, c'est d'amener les soutiens et les réserves à la distance et an point voulus, et cela avec les moindres pertes. Les moyens consistent dans l'emploi des formations appropriées; le choix de ces formations doit être laissé aux chefs des troupes. Parmi les formations que peuvent prendre les soutiens et les réserves, il n'en faut exclure aucune, du moment qu'elle répondrait au but, pas même l'ordre dispersé, quand l'effectif, l'espace disponible et les autres circonstances du combat en légitimeraient l'emploi.

Nous pourrions relever d'autres points qui ne cadrent plus d'une manière parfaite avec les besoins actuels de la tactique. Restons-en là. Notre intention n'était point de soumettre le Règlement d'exercice actuel à une critique serrée pour démontrer qu'une revision s'impose; c'eût été hors de saison. Pour entreprendre une revision qui se fera tôt ou tard, on peut encore attendre, si l'on veut bien admettre dans l'application de certaines formations au combat une interprétation plus large, analogue à celle que nous avons donnée dans les pages précédentes. En terminant, nous voudrions pourtant insister sur un point:

Il faut de plus en plus vouer tous ses soins à développer l'individualisme du soldat, chercher à le rendre indépendant. Cette obligation va croissant. L'ordre dispersé poussé à certains moments jusqu'à son extrême limite, le bruit de la bataille, la possibilité de la mise hors de combat des chefs, etc., exigent du soldat qu'il soit en état de se tirer d'affaire de lui-même, quand les commandements ou les ordres de son chef ne parviennent pas jusqu'à lui. Cela est surtout vrai pour l'emploi du feu. Dans la plupart des cas ce sera par son exemple, bien plus que par des commandements, que le chef entraînera ses soldats.

Certes, s'il s'agissait de reviser en entier le Règlement, nous demanderions des simplifications nouvelles elles seraient possibles et la mise à l'écart de tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à des mouvements de parade, pour s'en tenir exclusivement aux formes, aux formations, aux mouvements, aux évolutions et aux manœuvres nécessaires pour faire stationner, marcher, mouvoir et combattre les troupes.

Cela viendra en son temps.

N.

L'ARTILLERIE DE CAMPAGNE

à Recul sur affût

EN NORVÈGE

(Planches I-IV.)

C'est l'artillerie norvégienne qui, la première, a suivi l'exemple de la France en adoptant pour son matériel de campagne un canon à long recul sur affût.

A la suite d'un concours et d'essais entre pièces isolées de modèles très différents, la commission norvégienne se prononçait, le 4 juin 1900, à une époque où l'on n'avait que des renseignements incertains sur le matériel français à tir rapide, en faveur d'un canon de campagne de 75 mm., à long recul sur affût et à flèche télescopique, présenté par la «Rheinische Metallwaaren- und Maschinenfabrik ». Peu après, une batterie de quatre pièces Ehrhardt, auxquelles on avait apporté quelques modifications proposées par la commission, était soumise à des épreuves de tir et de roulement, et ce canon était définitivement adopté le 8 juillet 1901 par la Norvège, qui commandait à Dusseldorf:

132 canons de campagne de 75 mm., système Ehrhardt, avec 500 coups par pièce;

72 caissons.

La remise de ce matériel aux troupes était terminée en juillet 1902. On sait que la Norvège a encore dernièrement commandé à Dusseldorf quatre canons de position de 75 mm., du même

système.

Un intéressant rapport sur des expériences de tir et des épreuves de roulement exécutées à Lexdalen, du 4 au ro août 1903, a paru dans la Norsk Artilleri-Tidsskrift. Il s'agissait

non seulement d'éprouver encore le nouveau matériel, mais de préparer pour l'artillerie de campagne un règlement d'exercice et une instruction sur le tir. Nous reproduisons un extrait de ce rapport, en le faisant précéder de quelques indications sommaires donnant une idée du matériel de campagne norvégien à recul sur affût.

Propriétés caractéristiques du canon de campagne norvégien.

Comme pour le canon de campagne français, la rapidité du tir, qui peut aussi dépasser 20 coups à la minute, est la propriété essentielle du canon norvégien, dont les caractères principaux sont les suivants :

1. Grande tranquillité de l'affût au tir, non seulement sur un emplacement horizontal, mais sur un sol incliné s'abaissant en arrière. Le dispositif télescopique qui permet d'allonger la flèche assure cette tranquillité dans des cas où une longueur moyenne de flèche ne suffirait pas. Il n'y a pas de patins à abattre sous les roues. On peut, pendant le tir, serrer le frein de route; toutefois ce n'est pas nécessaire.

2. Continuité du service de la pièce par des canonniers assis ou à genou à leur poste.

3. Protection des servants par des boucliers détachables, à l'épreuve des balles de shrapnels et des projectiles d'infanterie. 4. Suppression du dépointage. La ligne de mire n'est pas indépendante.

5. Emploi de cartouches complètes.

6. Les shrapnels, du poids de 6,5 kg., renferment 280 balles de 11 grammes. Ils permettent le tir fusant jusqu'à 5600 mètres. La fusée est à double effet. Il n'a pas encore été adopté d'obus. 7. La vitesse initiale est de 500 mètres.

8. Au point de vue de la construction, le matériel norvégien présente un emploi étendu des procédés Ehrhardt pour la fabrication des tubes creux sans soudure ni rivets. Les éléments de la bouche à feu, le berceau, la flèche, l'essieu, les corps de projectile, les douilles, etc., sont obtenus au moyen de ces méthodes

brevetées, assurant à la fois une grande résistance et une grande légèreté.

On sait que d'une manière générale le procédé Ehrhardt consiste à refouler dans une matrice circulaire, au moyen d'un poinçon cylindrique, le métal d'une barre de section carrée portée à une haute température. Le diamètre de la matrice est égal à la diagonale de la section de la barre et la section du poinçon équivaut à la somme des quatre segments compris entre la matrice et les côtés de la barre. Les surfaces de la section sont ainsi compensées et le métal refoulé trouve l'espace nécessaire pour le recevoir. Mais la barre étant chauffée et sa température s'élevant encore par le travail, il y a une forte compression entre le poinçoin et la matrice. En ce qui concerne la bouche à feu, le métal étant condensé surtout dans le voisinage des parois de l'âme offre un surcroît de résistance contre la pression des gaz, les érosions et l'usure produite par le tir. Une fabrication de ce genre rend même surperflu le frettage ou la pose d'une jaquette. Un obus brisant éclatant dans l'âme ne détermine aucune fissure; il ne se produit qu'un gonflement du canon.

BOUCHE A FEU.

La bouche à feu, en acier-nickel, fabriquée par les procédés Ehrhardt, est à jaquette1. Une frette vissée recouvre le joint entre le canon et la jaquette. La bouche à feu repose sur le berceau et se trouve reliée au cylindre du frein, qu'elle entraîne en arrière lors du recul et qui la ramène en avant sous l'action des ressorts récupérateurs, après une course de 1 m. à 125. Des agrafes saisissant les glissières du berceau maintiennent la bouche à feu. De chaque côté, le long du canon, et en arrière sont fixées les plaques de protection du berceau. Le mécanisme de culasse est la vis excentrique Nordenfelt, disposée de façon que la mise de feu soit opérée par le pointeur, assis à la gauche de la culasse. Le fort ressaut de la culasse, dù à l'excentricité. de la vis, est tourné vers le haut, ce qui offre des avantages pour le placement du canon sur le berceau et pour augmenter le maximum de l'angle de tir. On sait que l'artillerie de campagne française a aussi la vis excentrique, dont la manœuvre

1 Voir Aide-memoire du colonel Krag, 1903.

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