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Les lecteurs de la Revue militaire suisse se rappellent les remarquables articles consacrés par le colonel-divisionnaire Secretan à ce soldat que Napoléon qualifiait de « grenadier par la taille et par le cœur ». Ces articles réunis dès lors en une élégante brochure, ont contribué à raviver le souvenir d'un homme dont l'histoire militaire suisse peut s'honorer à juste titre, et que les générations nouvelles, non sans ingratitude, avaient trop oublié. Une réparation était due à sa mémoire. Le colonel-divisionnaire Secretan l'a poursuivie le premier: le monument de Rolle achève cette œuvre de justice.

Il est un autre général dont nous voudrions voir aussi consacrer le souvenir par un monument dans sa ville natale, le général Jomini, de Payerne. Son universelle réputation dit assez combien il a honoré son pays. Mais tandis que ses ouvrages sont partout, aujourd'hui encore, cités avec éloge, et consultés par quiconque désire se rendre un compte exact de l'histoire des guerres du Premier Empire, ses concitoyens seuls semblent ignorer la trace qu'il a laissée dans la science militaire. Il existe cependant un premier fonds dont la constitution est due à l'initiative de feu le colonel Ferdinand Lecomte. Un modeste appoint suffirait pour permettre à la ville de Payerne de réparer l'oubli dans lequel on laisse tomber un de ses plus illustres citoyens, et de suivre ainsi l'exemple que la ville de Rolle a donné 1.

La liste annuelle des licenciements au 31 décembre vient d'être publiée. Elle est peu fournie cette année-ci. Les officiers supérieurs de la Suisse romande y figurent par deux noms, ceux du colonel d'artillerie F. de Charrière, à Lausanne, breveté du 10 janvier 1896, et du lieutenant-colonel d'infanterie G. Bourgeois, à Orbe, breveté du 10 avril 1891.

Après avoir commandé successivement les régiments d'artillerie de campagne 1 et 9, le colonel de Charrière avait été, sur sa demande, relevé de son commandement en 1901 et affecté au service des étapes. Le fieutenantcolonel Bourgeois était à disposition. Son dernier commandement avait été, comme major, celui du 8e bataillon de fusiliers.

1 Au moment de mettre en pages, nous apprenons que le Comité Jomini, organisé par le colonel Lecomte, s'est réuni à Payerne, sous la présidence de M. Chuard, professeur à l'Université. Il a décidé de faire commencer les études pour l'exécution du monument et en même temps de faire appel au public militaire vaudois pour compléter la somme nécessaire et permettre d'ériger un monument digne du canton de Vaud et du général Jomini. Nous pensons publier cet appel dans notre prochain numéro et recommandons dores et déjà a nos lecteurs cette entreprise patriotique.

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Nous sommes tout à la discussion du budget. Elle offre plus d'intérêt que les années précédentes, la question du quinquennat étant revenue sur le tapis. Celui-ci est en vigueur depuis le 1er octobre 1899 et a pris fin le 1er mars 1904. Diverses circonstances, de nature politique surtout, ont engagé le gouvernement à en proroger l'échéance à une année de date, Il s'agit maintenant d'arrêter le nouveau projet qui doit régler notre situation militaire jusqu'à fin 1909.

En 1893, la réforme importante du quinquennat avait été l'introduction, à titre provisoire et d'essai, du service de deux ans dans les troupes à pied. En 1899, de divers côtés, le gouvernement fut sollicité de rendre définitive cette disposition. Il s'y refusa, déclarant l'expérience incomplète : il admettait que l'on pût être contraint d'en revenir, la réduction du temps de service ayant fort compliqué la tâche des officiers et des sous-officiers. Cette année-ci, la loi nouvelle met fin au régime du provisoire. Le service de deux ans est entré dans les mœurs. Le gouvernement admet que cela soit à titre déinitif. En échange de cette concession au Reichstag, - concession qu'il serait difficile, à la vérité, de ne pas faire, il réclame diverses augmentations d'effectifs et de crédits.

La marine en absorbe une part importante. Nos autorités navales ont suivi et suivent toujours avec une extrême attention les faits dont les mers jaunes sont le théâtre, et elles entendent en tirer immédiatement les conséquences pour le perfectionnement et le développement de notre flotte de guerre.

Le budget de la marine prévoit l'augmentation de 100 officiers et de 2000 hommes; l'introduction d'un nouveau type de torpilleurs, avec un nouveau système de tubes lance-torpilles; l'introduction, dans l'armement des vaisseaux de guerre, d'une artillerie légère destinée à combattre les torpilleurs.

Pour la première fois s'y trouve inscrit un crédit destiné aux essais de sous-marins. Il s'élève à 1 500 000 mark.

Le budget de la marine accuse un total de dépenses de 238 400 000 mark. Les dépenses permanentes du budget ordinaire s'élèvent à 105 260 755 mark, soit une augmentation de 5 950 246 mark, sur l'année dernière. Les dépenses temporaires de ce budget s'élèvent à 111 498 450 mark, soit une augmentation de 10 632 480 mark sur l'année dernière.

Sur le budget sont prélevés 70070 000 mark pour constructions maritimes soit 835 000 mark de plus que l'année dernière.

Comme annuités nouvelles, figurent celles qui sont relatives aux vais seaux de ligne qui seront mis en chantier en 1905 et qui sont les trentesixième et trente-septième cuirassés d'escadre de la flotte allemande, à un grand croiseur, à deux petits croiseurs, à une canonnière d'atterrissement, à une canonnière fluviale pour l'Extrême-Orient, ainsi qu'à un vaisseau destiné à relever les mines dont la nécessité a été démontrée par la guerre russo-japonaise.

Le budget autorise aussi la création d'une compagnie spéciale pour la relève des mines, avec un effectif de trois cents hommes.

En ce qui concerne l'armée de terre, les dépenses permanentes du bud. get ordinaire pour le contingent militaire prussien se montent à 463 961 397 mark en augmentation de 12 845 841 mark sur les chiffres de l'année dernière et les dépenses extraordinaires à 25 026 920 mark en diminution de 993 369 mark comparativement à l'année dernière. Le budget extraordinaire demande une somme de 53 589 400 mark (augmentation de 32 470 700 mark).

Les dépenses permanentes pour le contingent militaire saxon s'élèvent à 43 811 787 mark (augmentation de 1714 548 mark).

Les dépenses permanentes pour le contingent militaire wurtembergeois atteignent le chiffre de 21 973 036 mark (augmentation de 531080 mark).

Naturellement, ces chiffres tiennent compte de l'augmentation des effectifs. Ceux-ci ne comportent pas cependant les grosses réformes du dernier quinquennat. On se rappelle 'que 'celui-ci a introduit l'augmentation et la réorganisation de l'artillerie de campagne avec la pièce modèle 1896, dont on étudie maintenant la transformation ou le remplacement. Il a créé également trois corps d'armée, le XVIIIe prussien, le XIXe saxon et le IIIe bavarois, par dédoublement ou prélèvements sur les formations existantes; il a augmenté les troupes techniques; il a accordé quelques escadrons et un léger renforcement des bataillons. La loi nouvelle développe ce que la précédente contenait en germe.

L'effectif en temps de paix sera augmenté graduellement en tant qu'ef fectif moyen annuel, de façon à atteindre en l'année fiscale 1909 le nombre de 505 839 soldats et caporaux, nombre qui demeurera tel jusqu'au 31 mars 910. C'est une augmentatiou d'un peu plus de 10 000 hommes.

Les volontaires d'un an n'entrent pas dans le calcul de l'effectif de paix. A la fin de l'année 1909, il devra y avoir 663 bataillons d'infanterie, 510 escadrons de cavalerie, 574 batteries d'artillerie de campagne, 40 bataillons d'artillerie à pied, 29 bataillons de génie, 12 bataillons des voies de communication et 23 bataillons du train

Comme détails, la loi prévoit une augmentation des chevaux de l'artillerie

montée, l'amélioration de la solde des sous-officiers, l'augmentation du nombre des munitions d'infanterie, la création de nouveaux champs de tir.

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Nos cercles militaires ont suivi avec une grande attention les incidents qui se sont produits en France. Notre presse professionnelle s'est abstenue généralement de commentaires, mais les conversations n'ont pas chômé. La vérité m'oblige à dire que beaucoup ont considéré ces incidents comme un juste retour des attaques dont nous avons été l'objet au moment du procès de la Petite garnison, du roman de Bayerlein, etc. La France, géné ralisant les faits particuliers relevés par ces publications, en a conclu à un état d'esprit déplorable dans notre corps d'officiers, cause d'infériorité morale. Il ne serait pas convenable de notre part de rendre aux Français la monnaie de leur pièce. Mais il est difficile pour nous de ne pas admettre que les divisions sont profondes entre leurs officiers et que là aussi est une cause d'infériorité morale.

Le 24 octobre, a été inauguré à Berlin, sur la Place royale, un monument élevé à la mémoire du général-feldmaréchal comte de Roon. On sait le rôle de Roon dans le fameux triumvirat Bismarck, Moltke, Roon, grâce auquel fut réalisée l'unité de l'Empire. Il fut le grand forgeron qui battit sur l'enclume le fer d'une main sûre et dure; il pétrit la matière de cette armée dont Moltke fut l'esprit et dont les succès recueillis par Bismarck devinrent la base de notre puissance politique. Roon fut de la lignée des Scharnhorst. Celui-ci prépara les guerres de la délivrance; celui-là assura leur couronnement.

Les Vierteljahrshefte für Truppenführung und Heereskunde, publiés par le grand Etat-major, achèvent la première année de leur existence. Cette revue a très rapidement conquis son droit de cité, tant à cause du caractère pratique de ses articles qu'à cause de leur extrême variété. Elle observe un juste milieu entre les exigences de la science et celles de la vulgarisation des connaissances techniques.

Le dernier fascicule contient entre autres un mémoire du lieutenantgénéral Rohne sur lequel j'attire l'attention des artilleurs. Il résume toutes les données du développement de la moderne artillerie de campagne de 1870 à 1904. L'auteur examine successivement le matériel, l'efficacité de la bouche à feu, le mode d'emploi, l'organisation, enfin l'état actuel de l'artillerie de campagne dans les divers Etats. Il constate que le principe du recul sur l'affût a été admis en France, en Angleterre, en Norvège, en Suède, en Suisse, en Hollande, au Danemark, en Roumanie, en Turquie et aux Etats-Unis. A titre de renseignement, je crois bien faire de transcrire

à votre intention les données numériques que Rohne attribue aux principaux modèles actuellement en usage.

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CHRONIQUE AUTRICHIENNE

(De notre correspondant particulier.)

Changements dans les commandements généraux, L'équipement d'infanterie modifié. Un nouveau cours pour officiers dans la Landwehr hongroise Equipement en artillerie de campagne des deux landwehr. A propos de la question des boucliers. 1905.

Le budget de la défense nationale pour

Au milieu d'octobre ont été désignés les titulaires de deux hautes fonc tions. Le général de cavalerie, comte Paar, depuis de longues années inspecteur général de cavalerie, a été nommé par l'empereur, Kommandant und Garde-Kapitän der österreichsischer Trabanten-Leibgarde. Le neveu de sa majesté, le Feldmarschalleutnant archiduc Otto, l'a remplacé à l'inspectorat général de la cavalerie.

Un second changement important est celui du commandant de la marine. L'empereur a donné suite à la demande renouvelée de l'ancien commandant de la marine d'être mis à la retraite et lui a témoigné par une lettre autographe sa haute reconnaissance des éminents services rendus. En même

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