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recevoir sa créance entière sur le mobilier, lorsqu'il se trouve ensuite qu'il eût été utilement colloqué sur la totalité de sa créance, ne répugne-t-il pas que la condition des chirographaires soit plus ou moins fàcheuse selon que les immeubles ont été vendus avant ou après le mobilier?

» C'est cependant de cette circonstance, qui, de sa nature, semble être purement arbitraire, qu'a pris naissance l'usage dont je propose le changement.

» Il est à présumer que l'article 169 de la coutume de Paris, qui n'admet aucune préférence sur les meubles, étoit exécuté dans toute sa pureté, lorsqu'en 1659 la question s'éleva entre des créanciers chirographaires et des créanciers hypothécaires, non pour faire décider la question que nous agitons, mais uniquement pour faire décider si les immeubles hypothéqués ne devoient pas être discutés avant les répartitions sur le mobilier. Les chirographaires exposoient que les répartitions sur le mobilier ne pouvoient être à l'abri de l'incertitude et du trouble que quand on connoissoit ce qui devoit revenir aux créanciers hypothécaires sur les immeubles. On répondoit, pour les hypothécaires, qu'ils avoient droit au mobilier, et qu'ils ne devoient pas être exposés aux longueurs des ventes d'immeubles et

senter à chaque faillite pour la totalité de sa créance, jusqu'à ce qu'il soit entièrement payé. >> Cela résulte de la solidarité que le porteur de la lettre exerce contre chaque faillite : l'équité ne permet pas que l'une de ces faillites profite au préjudice de ce créancier, de ce qui lui a été payé sur l'actif de l'autre faillite. La réserve de la solidarité pour la totalité de la créance est présumée de droit par la loi dans la quittance de chaque payement.

» Il ne sauroit en être ainsi lorsqu'il n'y a qu'un débiteur : il n'y a point alors de solidarité à invoquer. Ce seroit une fiction d'un nouveau genre, si on supposoit que les règles de la solidarité peuvent être invoquées par un créancier, parce que son débiteur a des biens de nature différente, et qu'il a hypothèque sur des immeubles.. » Le résultat de cette discussion dans l'hypothèse où le créancier hypothécaire a commencé par recevoir une partie de sa créance sur l'immeuble hypothéqué, conduit à décider que, sans violer aucune règle de droit, il est plus conforme à l'équité de ne donner à ce créancier le droit de ne se présenter sur le mobilier que pour ce qui lui reste dû.

>> Si maintenant on raisonne dans l'hypothèse où le créancier hypothécaire a commencé par

recevoir sa créance entière sur le mobilier, lorsqu'il se trouve ensuite qu'il eût été utilement colloqué sur la totalité de sa créance, ne répugne-t-il pas que la condition des chirographaires soit plus ou moins fâcheuse selon que les immeubles ont été vendus avant ou après le mobilier?

» C'est cependant de cette circonstance, qui, de sa nature, semble être purement arbitraire, qu'a pris naissance l'usage dont je propose le changement.

» Il est à présumer que l'article 169 de la coutume de Paris, qui n'admet aucune préférence sur les meubles, étoit exécuté dans toute sa pureté, lorsqu'en 1659 la question s'éleva entre des créanciers chirographaires et des créanciers hypothécaires, non pour faire décider la question que nous agitons, mais uniquement pour faire décider si les immeubles hypothéqués ne devoient pas être discutés avant les répartitions sur le mobilier. Les chirographaires exposoient que les répartitions sur le mobilier ne pouvoient être à l'abri de l'incertitude et du trouble que quand on connoissoit ce qui devoit revenir aux créanciers hypothécaires sur les immeubles. On répondoit, pour les hypothécaires, qu'ils avoient droit au mobilier, et qu'ils ne devoient pas être exposés aux longueurs des ventes d'immeubles et

à l'incertitude des résultats. Il ne fut nullement question de la manière dont les créanciers hypothécaires entreroient dans la perte sur le mobilier. L'arrêt de 1659 décida, ce qui n'est point contesté, que les chirographaires n'étoient point fondés à demander la discussion préalable des immeubles.

» Il est arrivé que, dans la plupart des faillites, le mobilier a d'abord été réparti; les créanciers hypothécaires y sont en raison de la totalité de leur créancé.

>> Si les chirographaires avoient ensuite profité du prix des immeubles hypothéqués, jusqu'à concurrence de ce que le créancier hypothécaire eût été utilement colloqué, la balance se seroit rétablie; mais on a conclu de ce que le créancier, payé sur le mobilier, ne l'avoit pas été sur l'immeuble, que son droit d'hypothèque se trouvoit ainsi transmis au créancier postérieur, qui n'auroit pas été colloqué en ordre utile, si les immeubles avoient été vendus les premiers; c'est donc encore à cette circonstance, qu'au préjudice des chirographaires, un créancier, qui n'eût point été utilement colloqué, exerce son droit d'hypothèque.

» L'immeuble hypothéqué est sans doute un part. Les chirographaires n'y ont aucun

gage

droit; mais puisqu'ils ont le malheur de ne pouvoir y rien prétendre, au moins ne doit-il, en aucun cas, servir de prétexte pour aggraver leur condition.

que,

>> Il faut en revenir, surtout en matière de commerce, à des règles fixes et plus équitables. En effet, lors même que ce système continueroit d'être suivi dans les déconfitures de ceux qui ne sont pas commerçans, ne doit-on pas considérer dans les faillites des commerçans, les chirographaires doivent être plus favorables? Leur -malheur est le plus souvent un effet inévitable de la circulation commerciale, qui doit être pro→ tégée; et on peut présumer que, parmi les créan→ ciers hypothécaires, la plupart n'ont ce titre qu'en vertu de jugement, et que l'origine de leur eréance étant la même que pour les chirographaires, la règle qui établira le plus d'égalité entre eux est celle qui sera la plus conforme à l'équité, et qui, dès-lors, conviendra mieux au commerce » (1).

« M. REGNAUD (de Saint-Jean-d'Angely) dit qu'il n'y auroit pas de justice à permettre à un créancier hypothécaire qui se trouve payé pour moitié sur le prix des immeubles, de venir exer

(1) Procès-verbaux du Conseil d'état, 34°. séance, n°. xc.

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