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acceptée, et que ceux qui l'ont acceptée ne pou voient ignorer cette circonstance.

La société de commerce de Rouen avoit donc raison de demander « que la cession volontaire ne pût avoir lieu si un seul créancier s'y opposoit, parce que nul ne doit avoir le droit de contraindre un autre à renoncer à son droit » (1). Mais il étoit inutile que le code s'en expliquât dans ce titre : les principes généraux suffisoient.

Toutefois le contrat deviendroit inébranlable si les cessionnaires désintéressoient le refusant, car lui seul peut le contester, et du moment qu'il n'auroit plus intérêt à l'attaquer, il cesseroit d'en avoir le droit.

On voit maintenant en quoi la cession volontaire diffère du concordat. C'est,

1o. En ce que, dans le cas du concordat, le débiteur conserve ses biens;

2o. En ce que le concordat opère l'extinction de la dette jusqu'à concurrence de la portion qui a été remise et qu'à moins d'une sti

(1) Société libre de commerce de Rouen, observations des tribunaux, tome 11, 2o. partie, page 428.

*

Voyez les notes sur la section in du concordat.

pulation particulière, la cession volontaire n'a pas cet effet;

3o. En ce que le concordat est formé par la volonté de la majorité, et que la cession volontaire n'a de force que par le consentement individuel de tous les créanciers.

ARTICLE 568.

La cession judiciaire n'éteint point l'action des créan➡ ciers sur les biens que le failli peut acquérir par la suite; elle n'a d'autre effet que de soustraire le débiteur à la contrainte par corps,

Cet article a été présenté le 2 mai 1807 (Voyez Procès-verbal, 37. séance, no. XI, art. 122 ) ;

Adopté avec amendement (même séance, no. xxiv);

Présenté de nouveau et adopté le 23 mai (Voyez Procès-verbal, 44. séance, no. 1, art. 124 et no. xxxv) ;

Communiqué au Tribunat le 26 mai;

Présenté après la communication et adopté le 9 juillet (Voyez Procès-verbal, 47*. séance, n°. LV et LVI, art. 132);

Adopté définitivement le 8 août (Voyez Procès-verbal, 58°. séance, no. XVII et XVIII, art. 568).

Cet article règle les effets de la cession judiciaire.

Ils avoient déjà été déterminés de la même. manière du code Napoléon,

l'article par

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lequel porte Elle (la cession judiciaire) opère la décharge de la contrainte par corps. Au sur plus, elle ne libère le débiteur que jusqu'à concurrence de la valeur des biens abandonnés; et dans le cas où ils auroient été insuffisans, s'il lui en survient d'autres, il est obligé de les abandonner jusqu'au parfait payement.

L'un et l'autre article fixe les effets de la cession judiciaire sous deux rapports:

Relativement au failli cédant;

Relativement aux créanciers cessionnaires.

L'avantage que le failli tire de la cession, c'est la sûreté de sa personne.

Il étoit juste d'interposer l'autorité de la loi pour dérober à des rigueurs inutiles un infortuné qui veut payer, mais qui ne le peut pas et qui abandonne loyalement à ses créanciers ce qui lui reste de sa fortune.

Mais le législateur auroit marché contre son but s'il avoit attaché à la cession l'effet d'opérer la libération du failli. La cession judiciaire est un bénéfice que la loi n'accorde, qu'à la bonne foi et au malheur (1). Elle même l'ap

(1) Code Napoléon, art. 1968.

pelle miserabile beneficium, flebile auxilium, un bienfait qu'on ne reçoit qu'avec peine, qu'on n'accepte qu'avec larmes. Si le débiteur a ces sentimens, il doit être dans la disposition de sacrifier tout ce qu'il pourra acquérir par la suite, pour éteindre des engageméns dont le souvenir pèse à sa délicatesse. Quand donc on le laisse sous le poids de ces engagemens, on ne fait que sanctionner les obligations que déjà luimême s'étoit imposées. Que si le failli est insensible à l'honneur, il faut l'y ramener malgré lui.

Au reste, la cession judiciaire affranchit de la contrainte par corps pour les dettes de toute nature. Le Conseil d'état l'a décidé formellement. En effet la section avoit réduit l'exemption aux dettes commerciales (1). Le Conseil a arrêté que cette limitation seroit retranchée (2).

Des obligations du débiteur naissent les droits des créanciers.

La cession les autorise à se saisir des biens présens et à s'emparer également des biens et des droits postérieurement acquis au débiteur

(1) 1re. Rédaction, Procès-verbaux du Conseil d'état, 37o. séance, n. XI, art. 122. — (2) Décision, ibidem, no. xxIV.

Tome VII.

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jusqu'à ce que la totalité des dettes soit payée.

Néanmoins, cette faculté est renfermée dans les limites où l'humanité obligeoit de la circonscrire. Il n'est pas permis aux créanciers de dépouiller le débiteur de ses nouveaux biens, avec une telle rigueur qu'ils lui enlèvent jusqu'à sa subsistance. Is, qui bonis cessit, si quid postea adquisierit, in quantum facere potest, convenitur (1). Cette dureté seroit surtout odieuse à l'égard des alimens qu'une généreuse pitié lui auroit assurés. C'est ce que décident les lois romaines : Qui bonis suis cessit, si modicum aliquid post bona sua vendita adquisivit: iterum bona ejus non veneunt. Unde ergo modum hunc æstimabimus? Utrum ex quantitate ejus, quod adquisitum est, an vero ex qualitate? Et putem, ex quantitate id æstimandum esse ejus, quod quæsiit: dummodo illud sciamus, si quid mísericordiæ causa ei fuerit relictum, puta menstruum, vel annuum, alimentorum nomine, non oportere propter hoc bona ejus iterato venundari: nec enim fraudandus est alimentis quotidianis. Idem, et si ususfructus ei sit concessus vel legatus, ex quo tantum percipitur, quantum ei alimentorum nomine satis est. Si debitoris bona venierint : pos

(1) L. 4, ff. de cessione bonorum.

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