Page images
PDF
EPUB

dications en cas de faillite, sans que la loi fût partielle et injuste, et sans ouvrir la porte à des contestations d'autant plus nombreuses, qu'il nous parolt plus difficile de préciser tous les cas qui doivent établir ce droit et en régler la garantie.

>> Cependant nous devons faire remarquer qu'on a cru trouver une espèce de contradiction entre la disposition de cet article et celle de l'article 349, par lequel la loi présume frauduleux tous engagemens pour faits de commerce contractés par le failli dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite.

» Comme la majorité des observations faites sur la revendication portent à croire que l'on désireroit qu'elle pût avoir lieu pour les marchandises vendues dans les dix jours qui précèdent l'ouverture de la faillite, il y aura lieu d'examiner si les inconvéniens de cette exception sont assez compensés par les avantages qu'on croit trouver dans son admission.

» Elle paroît fondée sur le principe de l'article 349, auquel nous faisons une addition importante après ces mots, sont réputés frauduleux, nous disons: de la part du failli. Ainsi, l'acte commercial n'est pas nul parce qu'il est fait dans les dix jours qui précèdent l'ouver

ture de la faillite, mais lorsqu'il est prouvé qu'il a été fait en fraude des créanciers; la présomption de fraude ne frappe que sur le failli, il faut encore la prouver à l'égard de celui qui a contracté avec lui; autrement tous les actes de commerce devroient rester en projet pendant dix jours pour prévenir la nullité résultant du 1er. paragraphe de l'article 349. ·

» Nous croyons que l'on ne peut appliquer le droit de revendication aux marchandises expédiées et non encore arrivées dans les magasins du débiteur. Ce seroit donner une préférence d'autant plus injuste, qu'elle dépendroit de l'espace que la marchandise vendue auroi à parcourir, sans égard à l'époque où la vente en auroit été faite.

>>Il en résulteroit que le créancier le plus éloigné du lieu de la demeure du débiteur auroit un privilége plus grand que le créancier du lieu même de son domicile ou d'un lieu plus rapproché.

>> En admettant le droit de revendication pour les marchandises et effets vendus dans les dix jours qui ont précédé la faillite, nous ne nous dissimulons pas que c'est encore faire dépendre la règle législative d'une circonstance fortuite; que c'est accorder une faveur sans motifs, par

[ocr errors]

la raison que le vendeur ne seroit pas créancier s'il n'avoit eu confiance dans la personne; et qu'une vente, en fait de commerce, ne porte jamais aucune condition qui puisse légitimer cette prétention.

[ocr errors]

» Nous le répétons, il n'y auroit pas eu de vente si la confiance n'eût été entière; le vendeur ne se seroit pas dessaisi, s'il eût en seule ment la pensée que son acheteur pourroit tomber en faillite.

» L'exercice de ce droit ne peut se concevoir qu'en prêtant aux parties des intentions qu'elles n'ont pu avoir, et en faisant réposer le crédit sur des motifs inconciliables avec le crédit.

* On semble croire que le vendeur ne se dessaisit d'une main que pour retenir de l'autre ; qu'il n'auroit vendu sans cette condition expresse, tandis que si cette intention même qu'on lui suppose eût existé, il n'y auroit point eu de

vente.

pas

» Celui qui expose sa propriété à un danger qu'il prévoit, se précautionne ordinairement contre ce danger : il a recours à des assureurs qui garantissent les risques..

» Dans les transactions du commerce intérieur, lorsque le vendeur n'a pas de confiance dans la personne, il demande des garanties, il

[ocr errors]

exige des effets endossés ou un payement effectif; mais lorsqu'il n'a pris aucune de ces précautions, lorsqu'il a livré sa marchandise sur la foi d'une promesse ou d'un engagement personnel, c'est qu'il a une confiance entière dans la personne pour le prix de la chose; c'est, en quelque sorte, dénaturer les conditions du contrat de vente en fait de commerce, que d'admettre un droit de revendication; c'est supposer aux parties des intentions qu'elles n'ont pu avoir; c'est appliquer faussement aux transactions commerciales les principes du droit civil; c'est enfin établir un doute sur des intentions formelles, et présumer une arrière pensée qui n'a pu exister; c'est accorder un privilége qui n'est dû ni à la vigilance du créancier, ni à sa prévoyance; c'est le sortir sans motifs du rang dans lequel il a voulu se comprendre, pour lui accorder une hypothèque à laquelle il n'avoit pas pensé.

>> Les engagemens pris par le débiteur failli, dans les dix jours qui ont précédé la faillite, sont présumés frauduleux de la part du failli : c'est encore là une présomption de la loi à l'égard du failli seulement; elle avertit le juge de se défier de ces engagemens, elle en provoque l'examen; mais elle ne dit pas qu'ils doivent

être annullés s'ils sont légitimes; elle dit seule. ment qu'il y a présomption de fraude.

» On sait qu'une faillite peut être causée par un événement inattendu, une perte accidentelle et imprévue; il n'y a alers ni de la part du failli, ni de la part des créanciers, aucune surprise; cette circonstance sert à les justifier réciproquement de cette présomption.

Pourquoi donc un créancier voudroit-il profiter d'un hasard qui lui seroit favorable? Pourquoi voudroit-il être privilégié parce que l'objet qui constitue sa créance n'est pas engagé? Sur quoi fondera-t-il cette prétention? Le contrat n'est pas parfait, puisque la condition du payement n'est pas remplie; tous ne peuvent-ils pas tenir le même langage? Tous les autres contrats n'ont-ils pas la même cause de nullité? Tous ne sont-ils pas rompus par le fait même de la faillite? Faut-il que chacun reprenne sa marchandise ou la portion qui en reste? Car, si le principe est juste, l'application doit être rigoureuse; sera-ce par ráng d'antériorité ou par rang de postériorité qu'on établira cette reprise?

>> L'embarras sera partout et la justice n'aura plus de base,

Si la puissance de l'habitude n'étoit point

« PreviousContinue »