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MODERNE,

OU

DICTIONNAIRE ABRÉGÉ

DES SCIENCES, DES LETTRES

ET DES ARTS.

A.

A. ( Antiquités. ) Cette lettre, la première des alphabets hébreu, grec et romain, était chez les Grecs une lettre numérale qui valait 1: de là alpha signifie le premier, comme omega le dernier. Isidore de Séville prétend que les Romains ne faisaient point usage de ces lettres numérales : Latini, dit-il, numeros ad litteras non computant. Mais il était évidemment dans l'erreur, puisque les chiffres romains I, V, X, L, C, D, M, sont les lettres I, qui vaut un, parce qu'il figure un doigt; V, qui vaut cinq, parce qu'il figure les cinq doigts de la main ; X, qui vaut dix, parce qu'il représente deux mains unies; L, qui vaut cinquante, parce qu'il est la moitié du C, qui est l'initiale de centum, et qui se figurait ainsi C dans l'origine ; D, qui vaut cinq cents, parce qu'il est la moitié de M, qui est l'initiale de mille, et qu'on figurait CIƆ.

Ducange, dans son glossaire, explique au commencement de chaque lettre sa valeur en nombre. On la trouve aussi dans Calepin et dans Valérius Probus, qui fait partie du recueil des Grammatici veteres de Pulschius, et des Autores latini de Godefroi, in-4°.

Les Grecs regardaient la lettre A comme de mauvais augure dans les sacrifices, et les prêtres commençaient par elle les imprécations qu'ils faisaient au nom des dieux : ce qui vient sans doute de ce qu'elle est l'initiale du mot grec apà, execratio.

C'est ainsi que chez les Romains A était un signe d'absolution, parce que cette lettre est l'initiale d'absolvo, j'absous. Lorsqu'on devait prononcer sur une cause ou sur un crime, on distribuait à chaque opinant trois tessères ou bulletins, sur l'une desquelles était gravé un A, absolvo, j'absous; sur l'autre un C, condemno, je condamne; et sur la troisième une N suivie d'une L, non liquet, le fait n'est pas clair. C'est à cet usage que Cicéron fait allusion lorsqu'il appelle l'A littera salutaris, la lettre qui sauve.

A servait encore à rejeter une loi proposée dans les comices. Ceux qui s'opposaient à la nouvelle loi se servaient d'une tessère marquée d'un A, qui signifiait antiquo, je tiens, je vote pour l'ancienne loi, je refuse; ou antiqua sequor, nova non placent, je tiens à l'ancienne loi, et je rejette la nouvelle. Les acceptants donnaient une tessère, sur laquelle on lisait V. R., uti rogas, comme vous le demandez.

A, dans le calendrier Julien, est la première des sept lettres dominicales; c'était chez les Romains la première des lettres nundinales.

On prétend que cette lettre était chez les Égyptiens un hiéroglyphe qui représentait l'ibis; mais tout ce qu'on a dit à ce sujet, tant pour cette lettre que pour la lettre B, est de pure imagination. Une lettre alphabétique étant la figure d'un son ou d'un mot, et un hiéroglyphe celle d'une personne ou d'une chose sacrée, comme l'indique ce mot

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lui-même, qui signifie sculpture sacrée, lettre alphabétique et hiéroglyphe impliquent contradiction.

E. J.

A, ▲, a. (Grammaire.) A, lettre voyelle, est un substantif masculin invariable ayant plusieurs acceptions.

A, troisième personne du présent de l'indicatif du verbe avoir, exprime l'idée principale de possession: il a du bien, des connaissances. On dit par extension : il a des chagrins, des douleurs, des soupçons. A verbe n'est jamais marqué de l'accent grave par lequel nous distinguons la préposition à.

Dans ces locutions, il y a des hommes, il y a des jours qui, etc., a est le même verbe avec une extension plus grande encore. Voici comme l'analyse le démontre : y ou là, ou dans ce point, il ou cette chose, cet être à imaginer, a des hommes, des jours qui. Les autres langues disent simplement des hommes, des jours sont qui, etc.

A préposition est toujours marqué de l'accent grave. Cette préposition, comme toutes les autres, indique le second terme d'un rapport que quelquefois elle exprime. Sa place est entre deux termes qu'elle lie, et le terme qui la suit se nomme son complément.

Mais la préposition à n'est jamais un adverbe, comme l'ont soutenu quelques grammairiens. L'adverbe renferme par sa nature une préposition avec son complément, et par suite présente un sens complet. La préposition à, comme toute autre, appelle un complément pour offrir un sens.

Elle concourt à former des expressions adverbiales, à reculons, à tâtons; elle prend des adverbes pour complément, à toujours, à jamais.

Si elle s'unit sans intermédiaire à la préposition de, elle fait partie d'une expression elliptique où son complément est sous-entendu, parce qu'on l'entend sans qu'il soit exprimé. Ainsi, à de si bonnes raisons est pour à un nombre de si bonnes raisons. Elle figure encore dans les ellipses suivantes, il a à manger, donnez-lui à boire, où l'on découvre aisément le premier terme du rapport qu'elle in

dique, et qui est, des mets, une liqueur, que ses compléments manger, boire, font suffisamment concevoir.

Elle forme les composés au pour à le, aux pour à les. Elle s'unit à certains adverbes composés, qui ajoutent ainsi à leur signification une nouvelle vue de l'esprit, dérivée toujours de la destination de cette préposition : s'adonner à, pour se donner à; amener, pour mener à; apporter, pour porter à.

Enfin elle se substitue à une multitude d'autres prépositions. On s'en convaincra aisément. Elle remplace ainsi dans, sur, vers, avec, après, etc., vivre à Paris, monter à cheval, venez à moi, aimer à la folie, pas à pas, etc.

A, lettre première de presque tous les alphabets, semble devoir ce rang aux causes indiquées dans cet article. Lettre numismatique, elle désigne les monnaies grecques d'Argos et quelquefois d'Athènes; celles de Rome, sous les consuls; celles d'Antioche, d'Aquilée, d'Arles, durant le Bas-Empire; notre hôtel des monnaies de Paris, dans nos espèces d'or et d'argent. Lettre lapidaire, elle exprime, au gré du sens total d'une inscription, augustus, ager, aiunt; double, elle désigne plusieurs augustes ; triple, ære, argento, auro; simple, devant miles, soldat jeune; suivie du D, antè diem.

Le son dont elle est le signe est consacré dans le dialecte dorien à exprimer l'énergie; chez les Latins, la douceur; chez les Italiens, une sorte de mollesse ; les Espagnols semblent l'avoir adopté pour l'emphase et l'ostentation. (Voyez ALPHABET.)

G.

A. (Musique.) Cettre lettre désigne la, qui est la première note du tétracorde hyperboléen; elle répond maintenant à la sixième note de notre gamme, depuis que Gui d'Arezzo trouva dans l'hymne Saint-Jean, ut queant laxis, etc., le nom des six premières notes de notre échelle, qu'il commença par ut. Mais l'usage de donner des noms de lettres aux notes a prévalu; et, pour mieux désigner le ton, on en nomme la dominante immédiatement après

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