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tié environ sur les frais d'exploitation; des rampes de deux centimètres par mètre pourraient être surmontées sans aucun ralentissement de vitesse, faculté que ne posséderont jamais, au moins à degré égal, les locomotives à vapeur aujourd'hui en

usage.

Toutefois, au point où en est cette invention, l'exécution et l'exploitation d'un chemin de fer hydraulique nous semblent de nature à présenter encore de grandes difficultés, et la coûteuse nécessité de faire monter une masse d'eau considérable à une hauteur de 60 mètres nous paraît rendre très-contestable le calcul par lequel l'inventeur établit l'économie consisidérable qui doit résulter de l'application de son système. Cependant le principe sur lequel est fondé le mode de propulsion hydraulique, appliqué aux chemins de fer, peut amener tôt ou tard quelques résultats; c'est seulement après l'expérience qui va avoir lieu sur le railway de Dublin à Cork, disposé à cet effet sur une étendue de 18 milles (29 kilomètres), qu'il appartiendra de prononcer d'une manière définitive sur le mérite, l'économie et la facilité que pourrait présenter l'application générale de ce système.

IV. DU SYSTÈME ÉLECTRO-MAGNÉTIQUE.

On nous permettra, avant d'entrer en matière, de dire quelques mots seulement sur le galvanisme, le père ou le précurseur de l'électro-magnétisme.

Ce nom de galvanisme s'applique à l'espèce d'électricité que l'on produit en mettant en contact, dans de l'eau aiguisée d'acide sulfurique, deux métaux hétérogènes, tels que le cuivre et le zinc par exemple; c'est pourquoi on le nomme également électricité de contact, ou encore électricité voltaïque, parce que Volta fut le premier à démontrer qu'il n'était pas d'origine animale, comme l'avait supposé Galvani, mais bien le produit de métaux hétérogènes mis en contact. Toutefois l'électricité peut aussi se produire par le contact en dehors du liquide d'un fil métallique dont une des extrémités aboutirait à une plaque de cuivre et l'autre à une plaque de zinc; ce fil, qui sert alors de conducteur pour l'électricité qui se développe, reçoit dans ce cas le nom de fil conducteur ou de communication. Lorsqu'on approche du fil conducteur, dirigé horizontalement du nord au sud, une aiguille magnétique suspendue à un fil de cocon, cette aiguille, d'après des lois déterminées et suivant la force du courant électrique, dévie plus ou moins sensiblement de sa direction primitive. C'est ce phénomène que présente l'aiguille aimantée sous l'influence électrique qui a servi

de base à cette nouvelle branche des sciences physiques à laquelle on a donné le nom d'électro-magnétisme.

Depuis cette découverte, qui remonte à 1820 et qui est due à M. OErsted, physicien danois, un grand nombre de savants se sont appliqués à donner une utilité pratique à la force merveilleuse dont la source est dans l'électro-magnétisme. Parmi ceux qui se sont occupés de cette question avec le plus de succès, il convient de citer M. Stærer, de Francfort-sur-le-Mein, qui construisit en 1858 une petite machine motrice électro-magnétique, qui attira vivement l'attention.

Le principe de la machine repose sur cette loi d'attraction et de répulsion qui se manifeste dans deux pièces de fer, chargées (au moyen d'un courant galvanique) alternativement d'électricité positive puis négative, et rendues par ce moyen magnétiques. Cette machine consiste en deux séries concentriques de tiges de fer entourées de spirales de fils conducteurs, dans lesquelles circule le courant électrique. Chaque série se compose de douze de ces tiges, espacées entre elles de 6 à 8 centimètres. Les tiges de la série extérieure sont à une distance d'environ 1,25 de celles de la sèrie intérieure. La série extérieure est immobile, l'intérieure est attachée à la périphérie d'un disque mobile ou volant. Dans cet état, le mécanisme est mis en mouvement avec les fils d'une batterie galvanique, de telle façon que les tiges de l'une des séries soient d'abord chargées d'électricité positive, et celles de l'autre série d'électricité négative; mais presque aussitôt, par une disposition de l'appareil conducteur, le courant de l'une des séries change tout à coup de direction, et les tiges se trouvent chargées d'électricité du même nom.

La conséquence de ce mode de chargement, c'est que les tiges en regard s'attirent d'abord en vertu du magnétisme qu'on leur a communiqué; mais, dès que le renversement de la polarité de celle de l'une des deux séries a été opéré et qu'elles sont devenues des aimants, elles se repoussent avec la même énergie. C'est la répétition singulière de ces attractions et de ces répulsions successives qui fait que chacune des tiges de la série intérieure mobile est attirée et repoussée alternativement par toutes les tiges de la série extérieure immobile, et que le premier de ces cercles prend un mouvement de rotation uniforme. Chacun des éléments ou couples galvaniques consiste en un cylindre de cuivre, un autre cylindre en zinc assujetti dans le premier, et un mélange chimique qui les niet en communication.

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Cette machine indique parfaitement la marche à suivre pour faire servir à la locomotion la force électro-magnétique; ce

pendant elle ne suffit pas pour résoudre la question au point de vue industriel et pratique; elle manque d'un appa reil pour mesurer directement, tant la quantité d'électricité que celle du magnétisme développé; elle nécessiterait encore, pour atteindre un degré quelconque d'utilité pratique, la solution d'un autre problème: savoir, le mode et le moyen qu'il conviendrait d'employer pour que l'application de la force électro-magnétique s'opérât de la manière la plus économique. Cependant, malgré son état d'imperfection, elle n'en constituc pas moins un très-grand progrès, en ce qu'elle permet de déterminer d'une manière certaine les propriétés de la force motrice électro-magnétique, ainsi que ses avantages directs et généraux. Voici quels sont ces avantages, tels qu'ils ont été signalés par l'inventeur lui-même:

1° La force electro-magnétique ne présente aucun danger; elle ne s'accumule pas et ne se produit que lorsqu'on établit le circuit galvanique, ou lorsque l'électro-moteur est mis en activitė.

2o L'électro-moteur particulier, construit par l'inventeur, ne dégage aucun gaz nuisible à la santé, susceptible de faire explosion ou de brûler. Il n'exige par conséquent aucune espèce de surveillance pendant qu'il fonctionne.

3o On n'a besoin ni de renouveler le liquide, ni de nettoyer les plaques de zinc pendant un certain temps (environ douze heures). Pendant le chômage et les temps d'arrêt de la machine, c'est-à-dire lorsqu'on interrompt le courant, la consommation du zinc est à peu près nulle.

4o Celle consommation est d'aulant moins considérable, que la machine fonctionne avec plus de célérité, tandis que dans les machines à vapeur le rapport de la consommation du combustible suit une marche inverse.

5o La machine n'éprouve presque aucune usure, et par conséquent on n'a pas à compter de frais particuliers pour son entretien.

6o La force électro-magnétique produit le plus haut degré de vitesse, et par conséquent s'adapte parfaitement aux besoins de locomotion rapide des sociétés modernes.

7° Elle possède, sous toutes les forces ou vitesses d'impulsion, une très-grande élasticité, de façon qu'on peut suspendre tout à coup et sans choc le mouvement le plus rapide; elle est continue et reste constante, de telle sorte que pour une même résistance la vitesse reste la même.

8o Enfin les frais de consommation peuvent être considérés comme purement nominaux, attendu que le produit de la consommation du zinc (sulfate de zinc) reçoit un emploi dans la

fabrication d'autres produits dont l'industrie fait journellement usage.

Tel est le résumé des avantages de la force motrice électromagnétique, avantages confirmés par les différentes expériences auxquelles fut soumise la petite machine de M. Stærer.

Ces résultats avaient assez d'importance pour engager l'inventeur à continuer ses expériences et à les entreprendre sur une plus grande échelle. Les feuilles allemandes du mois de juillet 1842 annoncèrent que M. Stærer avait fait sur le chemin de fer de Dresde à Leipzig des expériences avec la machine de son invention, d'une force de douze chevaux, et que ces expériences avaient eu un plein succès (1). Toutefois, comme aucun détail n'a été publié depuis sur cette expérience, tout porte à croire que l'annonce de ce succès était au moins prématurée.

D'autres tentatives ont encore été faites en Allemagne pour appliquer l'électricité comme puissance motrice. Les plus connues sont celles de M. Wagner, auquel la diète germanique avait promis une somme de 100,000 florins (215,000 francs) pour le cas où il parviendrait à produire une force suffisante pour mouvoir sur un chemin de fer un convoi pesant 10,000 kilogrammes. Les journaux allemands du mois de juillet 1844 annoncent sans autre indication que l'offre a été retirée par la diète, soit que cette assemblée aít changé de détermination, soit que l'appareil n'ait pu être terminé et que l'inventeur ait succombé sous des obstacles imprévus.

Le même problème occupe depuis bien des années l'esprit des ingénieurs anglais, qui, comme on sait, soit qu'ils inventent ou qu'ils s'emparent des inventions étrangères, abandonnent rarement une question industrielle sans l'avoir épuisée et sans savoir à quoi s'en tenir sur les avantages de sa mise en pratique. Jacoby, Davenport, Stores et plusieurs autres y ont consacré beaucoup de travail et de talent, et ont indiqué plusieurs applications nouvelles. Toutefois les expériences qui ont été entreprises par eux n'ont apporté aucun résultat nouveau.

Ce système est-il destiné à réaliser les grands résultats que ses inventeurs en attendent, et, dans la pratique, l'électromagnétisme remplacera-t-il avantageusement la vapeur sur les chemins de fer? C'est une question sur laquelle on ne

(1) L'expérience a eu lien le 22 juillet 1842. Au dire de ces journaux, la machine n'avait coûté à construire que 5,000 fr., et elle n'exigeait que 3 fr. 60 cent. pour son entretien et sa consommation de chaque jour.

peut encore se prononcer d'une manière absolue, car chaque jour les bases sur lesquelles s'édifie le nouveau système sont mieux étudiées et acquièrent plus de consistance. Pour le moment, il nous suffira d'avoir constaté le point où se trouve parvenue cette science nouvelle: on a inventé un appareil moteur électro-magnétique, on l'a exécuté et mis en pratique. Cet appareil, en surmontant les difficultés qui s'étaient présentées jusque-là, a réalisé des avantages sur lesquels on avait à peine osé compter. De plus il est établi que sa force peut atteindre celle de douze chevaux, et qu'une multiplication beaucoup plus grande de cette force n'offrirait très-probablement aucune difficulté. En se tenant donc aux faits seulement et en rejetant les probabilités, il paraît certain que toutes les fois que l'on aura besoin d'une force motrice d'une faible intensité, l'électro-magnétisme présentera sur la vapeur de nombreux avantages. Sans doute on ne peut former encore que des conjectures relativement à l'époque où cette substitution aura lieu; mais les éléments existent, la route est tracée, arriver au but ne paraît plus qu'une affaire de persévérance et de temps.

V. LOCOMOTIVES A AIR COMPRIMÉ ET DILATÉ.

Il est reconnu que l'air peut être porté à un degré de compressibilité que n'ont pu atteindre encore les moyens dont la science dispose. Comme la vapeur, l'air comprimé jouit d'une grande élasticité. Il reprend son volume habituel dès que cesse la cause de compression; il fait donc l'effet d'un ressort parfaitement élastique et peut servir à emmagasiner une certaine portion de force à une époque pour la rendre à une autre. Il est encore un autre principe physique depuis longtemps établi, c'est que l'air comprimé peut se transporter dans des vases et dépenser sa force dans une autre localité que dans celle où il l'a reçue; il peut servir ainsi à varier le temps et le lieu d'emploi des forces naturelles ou artificielles.-Tels sont les principes, connus depuis longtemps, et dont il s'agissait de tirer parti en les appliquant à la locomotion.

Parmi les noms des inventeurs qui les premiers se sont occupés de l'application de ces principes, nous trouvons ceux de deux artisans qui ont essayé instinctivement, sans aucune prétention à la science, d'employer le pouvoir moteur dont nous nous occupons ici: l'un de ces hommes est M. Allard, mécanicien de Guize en Picardie; l'autre est M. Roussel, simple horloger à Versailles. Le premier fit fonctionner en 1858, en présence de ses concitoyens, une machine fixe, mise en mouvement

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