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cherche à gagner l'empereur, le grand-duc et les Français, pour donner son coup plus sûr. Hier au soir nous avons dit au général qui commande les troupes du grand-duc, que nous sommes toujours alliés des Français, et que nos troupes seraient toujours unies aux siennes, celles que nous avons ici, car des autres, cela ne nous appartient pas ; et même de celles-ci, nous ignorons les ordres que mon fils leur aura donnés; mais nous nous mettrions à leur tête pour qu'elles nous obéissent, qui est d'être bien avec les Français. -LOUISE.

Moniteur du 5 février 1810.

N.° XXV.

Note écrite de la main de la reine d'Espagne, et remise par la reine d'Etrurie, sa fille, au grand-duc de Berg en 1808.

La réponse de mon fils à la lettre que le roi, mon mari, lui écrivit avant-hier, et dont la copie fut envoyée hier au grand-duc, nous la remettons: nous ne sommes guère contens d'elle ni de sa façon de s'expliquer ;

mais le grand-duc aura la bonté et l'amitié d'arranger tout et faire que l'empereur nous sauve bien tous trois, le roi, mon mari, le pauvre prince de la Paix son ami, et moi; qu'il soit bien persuadé, et qu'il le fasse connaître aussi à l'empereur, que notre sort dépend de lui, étant entre ses mains, et que s'il n'a pas la générosité, grandeur d'âme et amitié pour nous trois, qui avons toujours été ses bons et fidèles alliés, amis et attachés, notre sort sera des plus malheureux. L'on nous a dit que mon fils Charles allait partir au plutôt, et même demain, pour aller au-devant de l'empereur, et que s'il ne le rencontrait pas, d'aller jusqu'à Paris il nous le cache; ils ne veulent pas que le roi et moi nous le sachions, ce qui nous fait craindre quelque mauvaise idée; car mon fils Ferdinand ne se sépare pas un moment de ses frères et de son oncle et les gâte absolument avec des promesses et des attractifs qui trompent les jeunes gens, et sur-tout sans expérience; que le grand-duc tâche et fasse que l'empereur ne soit point trompé par les faussetés apparentes, ayant et cherchant tous les moyens pour les faire paraître véritables; mon fils n'est pas attaché aux Français : à présent, et

quand il croira en avoir besoin, il le fera paraître. Je tremble si le grand-duc, en qui nous espérons tout, ne fait tous ses efforts. pour que l'empereur prenne notre cause comme la sienne; nous ne doutons nullement que l'amitié du grand-duc soutiendra et sauvera son ami, et nous le laissera auprès de nous, dans notre coin, finir nos jours tranquillement ensemble; que nous sommes sûrs que le grand-duc prendra tous les moyens et toutes les mesures pour qu'on mène le pauvre prince de la Paix, son ami et le nôtre, dans un endroit sûr près de la France, pour qu'il n'y ait point de risque qu'on le tue, et être plus à portée de le transporter et délivrer des mains sanglantes de ses ennemis. Nous désirerions bien que le grand-duc envoyât quelque personne qui pût informer à fond de tout l'empereur, pour qu'il ne puisse pas être prévenu par les faussetés qu'on trame ici jour et nuit contre nous et le pauvre prince de la Paix; que nous préférons son sort au nôtre même : mais ces deux pistolets chargés pour le tuer, nous font trembler, et c'est un ordre donné sûrement par mon fils, ce qui fait connaître son cœur; car je crois qu'on ne fait jamais un pareil attentat, quoique ce fût le plus

grand scélérat, et croyez qu'il ne l'est pas. Enfin, le grand-duc et l'empereur sont uniquement ceux qui le sauveront et nous; car si l'on ne le sauve pas et nous le donne, nous périrons, le roi, mon mari, et moi: nous croyons que s'il lui pardonne la vie, ils l'enfermeront dans une cruelle prison, où il aura une mort civile; et ainsi, de grâce, que le grand-duc et l'empereur le sauvent entièrement, et le laissent finir ses jours avec les nôtres, où ils voudront.

L'on connaît aussi que mon fils craint beaucoup le peuple, et les gardes-du-corps sont toujours ses conseillers et ses tyrans. LOUISE.

Moniteur du 5 février 1810.

N. XXVI.

Lettre du roi d'Espagne Charles IV et de la reine son épouse, au grand-duc de Berg, le 3 avril 1808.

MONSIEUR et très-cher frère, M. Joachim Manuel de Villena, gentilhomme de ma chambre et mon plus fidèle serviteur, devant aller à Madrid, pour ses affaires particulières,

l'ai chargé de passer chez votre altesse impériale et royale, et de l'assurer de toute ma reconnaissnce pour l'intérêt qu'elle prend à tout ce qui me concerne et âu sort du prince de la Paix, qui est bien innocent. Vous pouvez vous fier à M. de Villena, je suis sûr de lui. Je ne parlerai plus de mes douleurs. Mon épouse vous donnera ci-dessous des détails sur les affaires. Dans le cas où M. de Villena ne pourrait aller chez votre altesse impériale et royale, de peur de donner des soupçons, ma fille vous fera tenir cette lettre. Pardonnez-moi tant d'importunités. Sur ce, je prie Dieu qu'il ait votre altesse impériale et royale en sa sainte et digne garde.

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Monsieur et très-cher frère, de votre altesse impériale et royale, l'affectionné frère et ami, CHARLES.-Aranjuez, le 3 avril 1808.

Lettre de la reine.

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Monsieur mon frère, le départ si prompt de mon fils Charles, qui est demain, nous fait trembler; les personnes qui sont avec lui sont malignes; le secret inviolable qu'on lui fait observer envers nous, nous met dans la plus grande inquiétude, craignant qu'ils lui fassent porter des papiers remplis de fausse

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