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tinuer sa poursuite, parce qu'elle avait quitté, pendant une vingtaine de jours, la résidence qui lui avait été indiquée par le tribunal. Au fond, le sieur Peignard soutenait que, sn femme n'habitant plus la maison conjugale depuis plus de six mois quand la prétendue concubine y avait été introduite, on ne pouvait pas dire qu'à cette époque cette maison fût la maison commune des époux, ni par conséquent lui appliquer l'article 230 du Code civil.

Nonobstant ces raisons, le tribunal civil de Vienne et la Cour d'appel de Grenoble ont admis la dame Peignard à la preuve des faits qu'elle avait articulés.

Le mari s'est pourvu en cassation. Il a présenté d'abord un moyen de forme résultant de ce que l'arrêt n'énonçait pas qu'il eût été prononcé en audience publique, puisqu'il portait seulement qu'il avait été rendu à l'audience. Au fond, le demandeur a soutenu 1o que l'arrêt attaqué avait violé les articles 268 et 269 du Code civil, en ne déclarant pas la dame Peignard non recevable dans sa demande, bien qu'elle eût quitté le domicile désigné; 2o que l'arrêt avait contrevenu à l'art. 230 du même Code en admettant la séparation de corps, quoique la dame Peignard ne résidât pas dans la maison de son mari, et que, par suite, celui-ci n'eût pas tenu sa concubine dans la maison

commune.

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Du 27 janvier 1819, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Trinquelague rapporteur, MM. Teysseyre et Odillon-Barrot avocats, par lequel:

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« LA COUR, Sur les conclusions conformes de M. Joubert, avocat-général; Attendu, sur le moyen de forme, qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'il a été rendu à l'audience, et que l'audience est publique; Attendu, sur le premier moyen du fond, que les articles 268 et 269 du Code civil ne disposent que dans le cas d'une demande en divorce; que les dispositions de ces articles ne sont reproduites ni dans le chapitre du même Code qui traite de la séparation de corps, ni dans le titre 9 du Code de procédure civile, qui a le même objet; qu'ainsi la Cour royale de Grenoble n'a pu les violer en ne les appliquant pas au cas d'une demande en séparation de Que d'ailleurs cette Cour a jugé en fait que l'absence

corps;

momentanée de la dame Peignard de la maison qui lui avait été provisoirement indiquée avait eu de justes causes ; — Attendu, sur le deuxième moyen du fond, que, lorsque, dans l'article 230 du Code civil, le législateur autorise la femme à demander le divorce pour cause d'adultère du mari, quand il a tenu sa concubine dans la maison commune, cette expression, maison commune, n'est employée là que pour désigner la maison conjugale, celle où réside le mari, et qui, d'après les articles 108 et 214 du Code civil, est le domicile légal de la femme; que c'est cette dénomination qui lui est donnée par l'article 559 du Code pénal, qui punit d'une amende l'adultère du mari dans cette circonstance; que cette maison ne cesse pas d'étre la maison commune par le fait de l'absence de la femme, parce que le mari a le droit de la contraindre à venir l'habiter, et qu'à son tour, elle a celui de s'y faire recevoir; qu'ainsi cette absence n'ôte pas à l'adultère du mari, lorsqu'il a tenu sa concubine dans cette maison, le caractère de gravité qui fait autoriser la femine à demander, dans ce cas, la séparation de corps; qu'il n'en est pas moins vrai que la concubine a tenu la place de la femme légitime et souillé de sa présence le domicile de la famille; - Qu'il suit de là qu'en jugeant, dans les circonstances de la cause, que l'absence de la dame Peignard de la maison de son mari n'avait fait obstacle à la demande en sépara→ tion de corps qu'elle avait formée, la Cour royale de Grenoble n'a fait qu'une juste application des articles 230 et 306 du Code civil; - REJETTE, etc, ».

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pas

Nota. La Cour de cassation a résolu la troisième question dans le même sens, par deux autres arrêts des 18 décembre 1818 (Voy. tom. 20, pag. 791), et 9 mai 1821 (Voy. sur la deuxième un arrêt conforme du 16 janvier 1816, t. 18, p. 61.)

COUR DE CASSATION.

Lorsque le remplaçant n'a été réformé que PLUS DE TROIS MOIS APRÈS SON ADMISSION AU CORPS, le remplacé qui n'a été ni inquiété ni recherché est-il recevable à demander la nullité des engagemens par lui contractés avec le rempla

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çant réformé, ou une réduction du prix convenu, sous prétexte que la cause de la réforme existait à l'époque du contrat de remplacement? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 1104 et 1134; décret du 8 fructidor an 13, art. 54 et 58.

MANSSAUD, C. FAYOLLE.

Cette question avait été résolue affirmativement entre le sieur Fayolle et le nommé Manssaud par un arrêt de la Cour d'appel de Lyon, du 27 août 1816, attendu, y est-il dit, que Manssaud a été réformé pour cause de blessures qu'il avait reçues en 1793 (1), et conséquemment pour cause non venant du service pour lequel il était suppléant de Fayolle; que, si les contrats de remplacement de conscrits sont aléatoires, ils sont aussi des contrats synallagmatiques, d'après lesquels on ne peut s'engager de faire que ce qu'on a la capacité de faire; qu'il est reconnu en fait que Manssaud était dans l'impossibilité de remplacer Fayolle, et qu'ainsi, c'est le cas de l'application du dernier paragraphe de l'article 58 du décret du 8 fructidor an 13. — Mais, sur le pourvoi de Manssaud, cet arrêt a été cassé par la Cour régulatrice, pour contravention à divers articles du Code civil et à loi du 8 fructidor an 13.

Le 27 janvier 1819, ARRÊT de la section civile, M. Brisson président, M. Minier rapporteur, M. Leroy de Neuvillette avocat, par lequel :

« LA COUR, Sur les conclusions de M. Joubert, avocatgénéral; Vu les art. 1104 et 1134 du Code civil; Vu aussi les art. 54 et 58 du décret du 8 fructidor an 13 (2), Attendu Charles Manssaud a été agréé par le conseil de recrutement du département du Rhône, et trouvé

que

(1) Il paraît que cette blessure, reçue à l'armée de l'Ouest, en 1793, s'était ouverte de nouveau, et l'avait empêché de continuer le service qu'il faisait pour Fayolle.

(2) L'art. 54 porte que, si, pendant les trois premiers mois qui suivront l'arrivée du suppléant aux drapeaux, il était reconnu incapable de servir pour raison d'infirmités ou autres causes existantes lors de son admission, et qu'il sera parvenu à dissimuler, il sera renvoyé dans son département, et que le conscrit remplacé sera tenu de fournir un nouveau suppléant, ou de marcher lui-même.....

At

propre, après visite de sa personne, à remplacer aux armées le sieur Fayolle fils, appelé comme conscrit de 1812; tendu que ledit Manssaud a été dirigé, en sa qualité de remplaçant admis, vers l'armée active, et qu'il y a été iucorporé dans le 64 régiment, où il a constamment fait son service. jusqu'au 18 août 1814, époque à laquelle il lui a été délivré un congé de réforme, comme ayant alors été jngé hors d'état de sapporter plus long-temps les fatigues de la guerre ; que cette réforme n'a été prononcée que 6 mois et 18 jours après son incorporation au régiment dans lequel il avait été admis à suppléer le sieur Fayolle fils; qu'il avait alors servi plus de trois mois, et que, d'après l'article 54 du décret du 8 fructidor an 15, sou congé de réforme ne pouvait pas donner lieu au rappel de celui qu'il avait été jugé apte à suppléer ; Attendu que, dans le fait, le sieur Fayolle fils n'a été en aucune manière inquiété ni recherché, et qu'il ne pouvait jamais l'être, aux termes de l'article 54 précité, lequel était évidemment seul applicable à l'espèce, d'après les termes dans lesquels il est conçu ; Qae, dans une pareille position, Fayolle père ne pouvait pas se prétendre dégagé de l'obligation deverser entre les mains du cessionnaire de Manssaud la somme de 5,000 fr., devenue exigible, aux termes du traité du 18 décembre 1813; qu'il semblait tellement avoir reconnu lui-même que rien ne pouvait le délier de son engagement, qu'il avait constamment payé à Thévenet, cessionnaire, les intérêts de ce capital jusqu'au 18 décembre 1815, et que ce n'a été qu'au moment où il s'est vu pressé d'en faire le remboursement, qu'il a prétendu que Manssaud, par sa réforme, avait motivé le refus qu'il faisait d'exécuter ce traité; Attendu qu'il était constant, en fait, que Maussaud avait fidèlement, et autant et si long-temps que cela a été en son pouvoir, exécuté le traité susdaté, dont lui ou son cessionnaire étaient dès lors fondés à demander l'exécution; Attendu que la disposition. finale de l'art. 58 du décret du 8 fructidor an 13 ne pouvait pas leur être opposée avec avantage, parce que cet article doit se combiner avec l'art. 54, qui n'oblige le remplacé à venir prendre la place de son suppléant qu'autant que celui-ci aurait été déclaré incapable de servir, dans les trois mois de son Tome XXI.

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admission au corps, pour raison d'infirmités ou autres cause qu'il serait parvenu à dissimuler pour se faire admettre, e qui n'a pas eu lieu dans l'espèce : --- De tout quoi il résulte qu Manssaud, n'ayant rien fait qui pût donner lieu à la résiliation du traité fait entre lui et le sieur Fayolle père, devait e voir prononcer l'exécution au profit de son cessionnaire, qu'en se refusant à l'ordonner, la Cour royalé de Lyon a fai une fausse application de l'article 58 du décret du 8 fructido an 13, et par suité violé l'article 54 du même décret, et le art. 1104 et 1134 du Code civil; DONNE défaut contre l défaillant, et pour le profit, casse.»

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COUR D'APPEL DE DOUAI.

Lorsqu'un père legue la quotité disponible à son fils, à le charge par celui-ci de rendre cette quotité à ses enfans né et à naître, ce legs est-il réputé fait par préciput et hor part? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 843, 847, 1048 € 1055.

RICHE, C. PRADEL.

Le sieur Maireau est mort en 1816, laissant pour héritiers l dame Pradel sa fille, et les enfans de la dame Riche, sá se conde fille, décédée. Par son testanient, il lègne à la dame Pra del le tiers de tous ses biens meubles et imineubles, à la charg par elle de rendre ce tiers aux enfans nés et à naître d'elle å premier degré seulement.

>>Lorsqu'il s'est agi de procéder au partage de la successio du sieur Maireau, la dame Pradel á demandé à prélever so legs à titre de préciput, et à prendre ensuite moitié da surplu de la succession, laissant aux enfans de sa sœur l'autre moitie

Le sieur Riche, en qualité de tuteur de ses enfans, a conch à ce que le legs du tiers des biens fait à la dame Pradel fi rapporté à la succession, aux termes de l'art: 843 du Cod civil, portant que tout héritier, même bénéficiaire, doit rap porter à la succession tout ce qu'il a reçu du défunt, à moir que les dons et legs ne lui aient été faits expressément på préciput et hors part; il a soutenu que l'obligation de rendre

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