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udience, toutes choses demeurant en l'état, suspendait idemment l'exécution du titre, et paralysait la poursuite. es époux Leclerc, avant que de passer outre, devaient ou ivre l'audience et faire lever l'obstacle, ou faire réformer ›rdonnance par la voie de l'appel. Jusque là leur action était achaînée, et la chose jugée opposait à leur poursuite une arrière insurmontable. -Cependant, malgré cette ordonance et la juste sécurité qu'elle devait leur inspirer, les héitiers Devullaine ont été saisis, expropriés sans aucune somnation, sans aucune mise en demeure préalable; il n'est pas l'exemple d'une telle vexation ni d'un pareil mépris pour la ustice et ses oracles. Les premiers juges ont tellement senti a force de ce moyen, que, pour l'écarter, ils ont été obligés de se retrancher dans le défaut de production de l'ordonnance. Mais aujourd'hui que cette pièce est représentée, le prétexte alléguée par le tribunal n'existe plus, et le moyen reprend toute sa force, toute son énergie,

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En dernière analyse, l'ordonnance sur référé du 11 août 1817 était, de sa nature, suspensive; l'huissier qui, au mépris de cette décision, a procédé à la saisie, fait apposer des affiches et hâté par une procédure insolite et vexatoire l'expropriation de tiers détenteurs de bonne foi qui avaient payé leur prix, et qui jouissaient depuis plus de vingt ans, a commis un excès de pouvoir intolérable, et violé la loi. Il a fait une saisie nulle et qui ne peut soutenir les regards de la justice.

Mais ce n'est point assez; la saisie est encore irrégulière sous un autre point de vue. En effet, la loi de brumaire et l'art. 2167 du Code civil n'ont soumis l'acquéreur qui ne transcrit pas à toutes les chances des dettes hypothécaires qui peuvent grever l'immeuble que parce qu'ils le supposent en possession; et ce qui le prouve, c'est que la loi se sert toujours du mot tiers détenteur. Or il suit de là que, si l'acquéreur a vendu, cédé ou échangé l'immeuble, ce n'est plus sur lui mais bien sur le nouveau possesseur, qui est le détenteur actuel, que la saisie doit être pratiquée et poursuivie. Dans l'espèce, les héritiers Devullaine, à l'exception de deux, n'étaient plus détenteurs des objets originairement vendus à leur père par Etienne Gallot; ils les avaient depuis long-temps

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échangés ou revendus : il est donc évident qu'on pouvait tout au plus poursuivre les deux héritiers qui possédaient encore quelques particules de l'héritage, mais qu'on ne pouvait pas saisir ceux qui ne possédaient plus rien, et qui, par conséquent, n'étaient pas tiers détenteurs daus le sens de la loi.

M° Parquin, avocat des intimés, a reproduit et développé sur l'appel les motifs adoptés par les premiers juges, et sa défense a été couronnée du succès.

Du 22 décembre 1819, ARRÊT de la Cour d'appel de Paris, troisième chambre, M. Choppin d'Arnouville président, MM. Bourgois et Parquin avocats, par lequel :

« LA COUR, - Sur les conclusions de M. Quequet, avocat-général; - Adoptant les motifs des premiers juges, Mrr l'appellation au uéant, avec amende et dépens. »

COUR DE CASSATION.

Dans un acte d'appel, le domicile de la femme est-il suffisam ment indiqué par celui du mari? (Rés. aff.) Cod. civ., art. 108.

La désignation du domicile est-elle suffisamment exprimée par le mot HABITANT à tel endroit? (Rés. aff.) Cod. de procéd. civ., art, 61. Birrégularité de l'autorisation nécessaire à la femme pour ester en jugement, peut-elle étre opposée par sa partie adverse? (Rés. nég.) Cod. civ., art. 225.

Le sieur Bernard, C. La dame Girard.

Le 22 mai 1817, les sieurs Dufresne et Desgranges, associés, et la dame Girard, épouse du sieur Dufresne, souscrivirent au profit du sieur Bernard un billet par lequel ils s'engagèrent solidairement à lui rendre, à sa première réquisition, la somme de 18,712 fr. 78c, que ce dernier leur avait remise en dépôt.

A la fin de juillet suivant, Dufresne fit faillite. Alors le sieur Bernard crut devoir prendre des précautions contre la dame Girard, qui lui présentait des sûretés plus que suffisantes. Il l'assigna donc en reconnaissance d'écriture, pour acquérir de suite une hypothèque, et en condamnation du paiement de la

Dinme portée au billet du 22 mai 1817; il assigna également. - sieur Dufresne pour autoriser son épouse à ester en juge

nent.

Le 31 juillet, un jugement du tribunal de Grenoble donna éfaut contre le sieur Dufresne et son épouse, déclara cette lame autorisée à procéder en justice, et tint le billet et la sinature y apposée par la dame Girard pour avoués et re

connus.

Après la signification de ce jugement, la dame Girard y for ma opposition; mais elle en fut déboutée par un second jugement du 7 janvier 1818, qui la condamna en outre à payer au sieur Bernard le montant du billet en question, avec intérêts et dépens.

Cette dame se rendit appelante de ce jugement par exploit du 27 janvier 1818. Cet exploit porte : « L'an 1818, et le 27 janvier, au requis de dame Marie Girard, épouse du sieur Antoine Dufresne, propriétaire, habitant à Grenoble, laquelle déclare, etc. » La dame Girard ne s'était pas fait autoriser préalablement à ester en jugement; elle se contenta d'assigner son mari par le même acte d'appel, à l'effet d'obtenir cette

autorisation.

Un arrêt par défaut, rendu le 9 février contre le sieur Dufresne et le sieur Bernard, déclara la dame Girard dûment autorisée à la poursuite de ses droits.

Le sieur Bernard demanda la nullité de l'acte d'appel, 1 en ce qu'il n'indiquait pas le domicile de l'appelante, 2o en ce que la dame Girard n'avait observé aucune des formalités prescrites par les art. 861 et 862 du Code de procédure pour se faire autoriser à la poursuite de ses droits.

Le 9 juillet 1818, arrêt de la Cour de Grenoble, ainsi conçu: « Considérant qu'aux termes de l'art. 108 du Code civil, la femme mariée n'a point d'autre domicile que celui de son mari; que l'exploit d'appel dont il s'agit renferme l'énonciation du domicile de Dufresne, mari de la dame Girard; que cette énonciation emporte celle du domicile de la dame Girard; que, d'après les dispositions de l'art. 225 du Code civil, les tiers ne peuvent point opposer le défaut d'autorisation de la femme;

considérant - d'ailleurs que la dame Girard a été bien autorisie par l'arrêt du 9 février dernier; - La Cour rejette les mɔyens de nullité proposés par Joseph Bernard contre l'exploit d'appel dout s'agit.... »

Pourvoi en cassation de la part du sieur Bernard. Il est évident, a-t-il dit, que l'exploit ne fait aucune mention du domicile de l'appelante, ni de celui de son mari, qualifié sculement de propriétaire habitant à Grenoble. Il y a en effet we grande différence entre habiter une ville et y être domicilié Il résulte des art. 103, 106, 108 et autres du Code civil, qu l'habitation et le domicile, sout souvent distincts et séparé; que l'on peut habiter dans un lieu et avoir son domicile da un'autre. On établit même une différence assez sensible entre l'habitation, la demeure et la résidence. Le mot demeurt exprime une habitation permanente dans un lien ; le mot ré sidence indique une habitation passagère; quant au mot habitation, c'est une expression vague, qui n'a pas une acception précise et déterminée, parce qu'elle est d'une application trop générale. Aussi la loi, qui emploie tour à tour et presque in différemment les mots demeure, résidence, ne se sert jamais du mot habitation, que l'on ne rencontre dans aucun endroit du Code de procédure. M. Berriat-Saint-Prix, dont l'opinion est si respectable en matière de procédure, dit que l'énonciation de la demeure du demandeur n'est pas suffisante, qu'il faut rappeler son domicile. (Tom. 1, pag, 185, p. 21.)Si la mention de la demeuré n'équivaut pas à l'indication du do micile, que dire de l'acte d'appel dout il s'agit, dans lequel il n'est fait mention ni de demeure, ni de résidence, mais d'ave simple habitation? Il faut donc reconnaître que les moti habitant à Grenoble employés dans cet acte ne remplissent nullement le vœu de l'art. 61; que par conséquent cet exphit était et devait être déclaré nul. La Cour de Grenoble a écarté cette exception par le motif que la femme mariée n'a point d'autre domicile que celui de son mari; mais l'acte d'appel ne fait nullenient mention du domicile du sieur Dufresne : il 'énonce donc pas celui de sou épouse.

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Un second moyen de cassation était pris de la violation des art. 215ct 218 du Code civil, 861 ct 862 du Code de procé

fure, relatifs à l'autorisation nécessaire à la femme pour ester en jugement, et à la manière de l'obtenir. — Il résulte claircment des dispositions de ces articles, disait le sieur Bernard, que la dame Dufresne, avant d'interjeter son appel, aurait dû faire une sommation à son mari, pour que celui-ci eût à l'autoriser, et en cas de refus de ce dernier, obtenir une ordonnance portant permission de l'assigner à la chambre du conseil, pour déduire les causes de son refus. Ce n'est qu'après ces formalités, et après que le sieur Dufresne aurait été entendu ou appelé en la chambre du conseil, que la justice aurait pu accorder l'autorisation. Au lieu de cela, la dame Girard a assigné * son mari à paraître devant la Cour pour l'autoriser à ester en jugement; postérieurement elle a obtenu un arrêt par défaut le qui l'a tenue pour autorisée. Il est évident que toute cette pro5cédure est irrégulière et nulle; que la dame Girard n'était réellement pas autorisée à procéder devant la Cour; que, par conpéséquent, sous ce second rapport, la nullité de l'appel devait être prononcée.

La Cour de Grenoble a rejeté la nullité, sur le prétexte que, d'après la disposition de l'art. 225 du Code civil, les tiers ne peuvent point opposer le défaut d'autorisation de la femme. — Mais cet art. 225 n'est applicable que dans les cas où les jugemens sont intervenus avant que le défaut d'autorisation ait ·élé opposé dans ce cas, la femme, son mari ou les héritiers, peuvent seuls en argumenter. Mais par la raison contraire, il 'est incontestable qu'avant l'obtention de ces jugemens, le tiers assigué à la requête de la femme a le droit d'exiger que cette femme soit valablement autorisée à procéder' en justice contre Jui. Sans cela le jugement qui interviendrait nelierait que l'une des parties. La femme qui n'aurait pas obtenu un jugement favorable ne manquerait pas d'opposer le défaut d'autorisation; dans le cas contraire, le tiers ne pourrait pas se servir du même moyen. Cela blesse évidemment tous les principes du droit, toutes les notions de la justice.

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Du 25 décembre 1819, ARRÊT de la section des requêtes, M. Henrion de Pensey président, M. Liger de Verdigny rap. porteur, M. Guichard avocat, par lequel:

LA COUR,

Sur les conclusions de M. Jourde, avo

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