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difications réclamées par l'intérêt du commerce.

En parcourant rapidement les dispositions du projet à cet égard, je fixerai plus particulièrement votre attention sur celles qui me paraîtront dignes de l'occuper.

La grande règle de la loi civile, relativement aux meubles, est la distribution de leur prix entre tous les créanciers indistinctement. Cependant elle accorde des préférences aux créanciers privilégiés.

Art.

La règle et l'exception sont admises dans le 533. projet de la loi commerciale. L'article 97 veut que les créanciers ayant sur les meubles, des priviléges reconnus, soient payés sur les premiers deniers rentrés.

Ces priviléges ne peuvent être que ceux que le Code Napoléon a définis et rangés sous ces deux titres, Priviléges généraux sur les meubles, Priviléges particuliers sur certains meubles.

Mais tous ces priviléges jouiront-ils de leurs avantages respectifs, dans la distribution du prix des meubles d'un failli ?

Les motifs d'humanité et de justice, qui les ont établis dans les cas ordinaires, doivent les maintenir dans celui-ci.

Le privilége du vendeur sur les effets mobiliers non payés, est le seul qu'il ait paru nécessaire de soumettre à des modifications, dont le but et les effets ne peuvent être bien saisis qu'en comparant le privilége, tel qu'il est établi dans le Code Napoléon, avec celui qui est conservé dans le projet.

Le vendeur, suivant le Code Napoléon, a deux avantages: il a la préférence sur le prix

des effets mobiliers qu'il a vendus, et qui sont encore en la possession du débiteur : il a en outre le droit de revendiquer ou de reprendre ces mêmes effets en nature, lorsqu'ils se trouvent dans la main de l'acheteur, et dans le même état où il les avait livrés. L'un de ces avantages lui procure le prix du meuble vendu; Art. l'autre lui en rend la propriété.

576. Le projet du Code commercial n'accorde au vendeur que la revendication des marchandises qu'il a livrées à crédit, et il ne l'accorde qu'aux conditions suivantes :

577. 1°. Que le débiteur sera en faillite;

2°. Que les marchandises expédiées se trouveront encore en route, et ne seront pas entrées dans les magasins du failli ou du commissionnaire chargé de les vendre pour son compte; 578. 3°. Que ces mêmes marchandises, avant leur entrée dans les magasins, n'auront pas été vendues sur facture ;

579.

4°. Qu'elles seront reconnues n'avoir subi, dans leur nature, quantité ou enveloppe, ni changement, ni altération.

Si toutes ces conditions se réunissent, le vendeur, à l'aide de la revendication, reprend en nature la propriété des marchandises expédiées.

Si une seule vient à manquer, la revendication s'évanouit, et nul doute qu'avec elle ne doive s'évanouir aussi toute préférence sur le produit de la revente des mêmes objets.

Ce dernier effet, du moins, à l'égard de la partie du mobilier du failli qui consiste en marchandises, est implicitement renfermé dans le projet qui n'accorde que la seule revendication de ces objets, sans parler d'aucune préférence

sur leur prix; mais il est mis sur-tout en évidence, par les savantes discussions qui ont fixé ce point de législation, et qui se réunissent toutes pour établir que, du moment où le droit de revendication a cessé, le prix des marchandises trouvées en la possession du failli doit être distribué indistinctement entre tous les créanciers, sans aucune préférence pour le vendeur.

S'il en était autrement, le but qu'on se propose en restreignant les revendications serait manqué; puisque le vendeur auquel on refuserait la restitution de sa marchandise en nature, en obtiendrait l'équivalent dans le recouvrement exclusif du prix. La revendication subsisterait en quelque sorte après son abolition, et elle ne ferait ainsi que changer d'objet.

Au surplus, la revendication introduite dans le commerce par des usages locaux, présentait des variations, des incertitudes et des difficultés qui ont fait sentir la nécessité de la régulariser et de la soumettre à une loi uniforme.

Les dispositions proposées par le projet sont basées sur les principes qui veulent que la vente suivie de tradition transfère la propriété; sur l'équité, qui ne souffre pas que le vendeur et le prêteur ayant confié, l'un sa marchandise l'autre son argent, pour en faire l'aliment du commerce du failli, soient soumis à des chances différentes; et enfin sur l'humanité qui, dans le naufrage commun de la faillite, réclame pour tous le même intérêt.

Le projet conserve d'autres revendications qui reposent sur le fondement indestructible de la propriété bien avérée.

Telles sont la revendication des marchandises

580. déposées chez le failli, soit pour être délivrées à un tiers, soit pour être vendues pour le compte du déposant;

538.

La revendication du prix de ces mêmes marchandises vendues conformément au mandat, lorsque ce prix n'a été ni reçu ni négocié par le failli;

582. Et enfin celle des remises en effets de commerce non payés qui se trouvent en nature dans le porte-feuille du failli, lorsqu'il paraît, soit par le mandat spécial qui les accompagne, soit par les livres du failli, que ces remises n'ont été faites que pour l'utilité du propriétaire. 584. Toute réclamation de privilége ou de revendication peut être admise par les syndics avec l'approbation du commissaire, ou doit être jugée par le tribunal, en cas de contestation. 534. Je n'ai point parlé du droit qu'a le créancier 535. porteur d'un engagement de plusieurs coobligés 537 solidaires et faillis, de participer aux distributions de toutes les masses jusqu'à son parfait paiement; ni de l'obligation imposée au créancier nanti d'un gage, de souffrir qu'il soit vendu ou retiré, et de se contenter du recouvrement de sa créance sur le prix, s'il est suffisant; ni du droit qu'a la caution de s'identifier avec le créancier qu'elle a payé. Toutes ces dispositions puisées dans les principes élémentaires et immuables du droit civil, s'appliquent à toutes les matières et à tous les cas. Je me hâte de passer aux droits des créanciers hypothécaires et aux droits des femmes, qui sont réglés, les premiers avec une clarté, les seconds avec une moralité également dignes de vos suffrages.

Tous les biens meubles et immeubles d'un débiteur sont le gage de ses créanciers.

Le créancier hypothécaire a, sur le cédulaire, l'avantage d'avoir assuré, autant que la prudence humaine peut le permettre, le recouvrement de sa créance sur la valeur d'un immeuble qui ne peut être dérobé à ses poursuites.

Pourra-t-il, nonobstant cette garantie, concourir, avec les créanciers cédulaires, à la distribution du prix des meubles?

Cette question était un sujet de controverse dans l'ancienne jurisprudence. Le Code Napoléon n'en offrait pas une solution positive. Le projet la décide avec autant de netteté que de justesse.

La distribution du prix des biens d'un débiteur ne peut varier au gré du hasard ou de la volonté d'un créancier. Il faut qu'elle soit réglée par des principes de justice, et qu'elle soit soumise à un ordre fixe et invariable.

Lorsqu'un moyen de recouvrement qui a toutes les probabilités du succès, est ouvert à un créancier, il ne doit pas lui être permis d'en préférer un autre qui pourrait nuire aux intérêts d'une classe différente.

L'article 93 a fait une application de cette règle au créancier nanti d'un gage qui n'est inscrit dans la masse que pour mémoire.

L'hypothèque sur un immeuble, dans la main du créancier hypothécaire, est aussi un gage tout aussi solide, tout aussi efficace qu'un gage mobilier.

Si quelqu'ombre d'incertitude sur l'issue future de l'ordre hypothécaire, ne permet pas d'exclure ce créancier de la distribution actuelle

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