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aucune place à la discussion, à formuler les règles dans un langage aussi limpide que la question était obscure, à prévoir en un mot et à prévenir toute controverse basée sur la rédaction elle-même. Le danger était d'autant plus difficile à éviter qu'il ne s'était encore jamais présenté. Les législateurs n'ont pu le vaincre entièrement. L'expérience peut seule permettre de faire de bonnes lois, et de les rédiger d'une manière aussi parfaite, que leurs termes ne donnent lieu à aucune discussion. Espérons que s'il intervient bientôt un remaniement du Code, cette lacune sera comblée, et que la plupart des controverses, résultant de la mauvaise rédaction des textes, disparaîtront à la suite de cette révision.

132. La règle est posée au commencement de l'art. 312, le premier de notre titre : « l'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari, » ce n'est point une traduction littérale du fragment 5 de in jus vocando, quoique ce texte fût présent à toutes les mémoires, et qu'on voulût rendre la même pensée. Dans les différents projets de la Convention, on semblait s'attacher à le traduire : « le mariage, disait-on, indique le père. » La nouvelle formule est préférable. Elle circonscrit immédiatement la sphère de la pleine application du principe. Elle dit expressément que la condition pour l'invoquer sera la conception pendant le mariage; la loi romaine ou ses traductions ne le disaient qu'implicitement. De plus, elle appelle immédiatement et comme corollaire indispensable la présomption sur la durée des grossesses. Quel enfant sera réputé conçu pendant le mariage? telle est la question qui se pose après la lecture des premiers mots de l'art. 312.

133.

Il faut remarquer, en outre, que la règle est posée d'une manière absolue et générale. Elle est limitée au mariage; Elle s'applique toujours, sauf dans les cas exceptionnels prévus expressément par la loi même. En dehors du mariage, elle ne peut au contraire recevoir aucune application. La loi prohibant la recherche de la paternité naturelle ne saurait la présumer en aucune circonstance. Il existe pourtant un cas dans lequel cette recherche est admise, c'est dans l'hypothèse d'un enlèvement correspondant à l'époque de la conception. Le juge peut alors, sur la demande des parties intéressées, déclarer le ravisseur père de l'enfant. C'est une simple faculté, non une obligation, que la loi lui confère. Elle permet très-exceptionnellement de rechercher et de prouver, même à l'aide de simples présomptions de l'homme, une paternité dont elle défend la réclamation dans les cas ordinaires; elle donne au juge le pouvoir de l'admettre, s'il la croit suffisamment démontrée, mais elle n'érige point en présomption légale la paternité du ravisseur1. La règle pater is est ne s'étend pas en dehors de l'union conjugale.

1 Indépendamment du texte même de l'art. 340, les travaux préparatoires démontrent manifestement cette vérité. La proposition d'admettre la recherche de la paternité dans le cas d'enlèvement fut reprise par la section de législation du Conseil d'Etat, durant la séance du 13 brumaire an XI. La première rédaction du projet rendait la déclaration de la paternité du ravisseur obligatoire pour le juge. C'était alors une véritable présomption légale, et Treilhard en demandait l'admission. Néanmoins, sur les observations de Boulay, ce système fut écarté et la rédaction primitive remplacée par celle que nous lisons aujourd'hui dans l'art. 340.

Il est même curieux de faire remarquer. que la faculté laissée au juge n'a pour ainsi dire aucunes limites. Supposez, en effet,

134. Le principe que nous venons de poser souffre une seule exception. Un mariage peut être, par suite d'une annulation rétroactive, censé n'avoir jamais eu d'existence, et la présomption de paternité légitime s'appliquerait encore. Cela résulte de la combinaison entre l'art. 312 et les art. 201-202 du Code Civil, qui introduisent dans notre législation l'ancienne théorie du mariage putatif. Un mariage a été contracté au mépris d'un empêchement dirimant: la bonne foi de l'un des conjoints assure à cette union tous les effets d'un mariage valable. Les enfants qui lui auront dû le jour, seront considérés comme légi-times et pourront invoquer la présomption légale de l'art. 312. C'est la seule hypothèse dans laquelle la paternité se trouve présumée au dehors du mariage. Ce résultat ne se produit que parce que le législateur accorde à cette union un caractère fictif de légitimité.

que la femme victime du rapt ait été tenue en chartre privée durant la période de conception tout entière, c'est-à-dire, depuis le trois cent-unième, jusqu'au cent quatre-vingtième jour avant et y compris celui de la naissance de l'enfant, le juge, malgré la presque certitude de la paternité du ravisseur,ne serait pas obligé de la prononcer, et sa décision échapperait sur ce point à la censure de la Cour suprême. Chr. Aubry et Rau, . 569 note 17, et les auteurs qu'il cite. Demolombe t. 5 no 493 professe la même opinion.

CHAPITRE PREMIER

PRÉSOMPTION SUR LA DURÉE DES GROSSESSES

SOMMAIRE

136.

Section 1re. Détermination exacte des délais.

.135. — Travaux préparatoires, rapport de Fourcroy. - Fixation définitive des délais, art. 314 et 315. 137. - Détermination exacte de la durée des plus courtes grossesses.

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Des naissances tardives.

Durée exacte des plus longues grossesses.

Détermination de la période de conception.
Suite.

Contradiction entre l'art. 312-2° et les art. 314 et

Cause de cette contradiction.

Il faut s'en rapporter pour le calcul des délais aux

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147.Etat de la doctrine. Système de MM. Duranton, Marcadé, Massé et Vergé.

148. Idée première des autres interprètes.

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149. Opinion de Toullier et Delvincourt.

150. Opinion de la majorité des auteurs.

-

151. - Système de calcul de momento ad momentum, ses avantages.

152.

153.

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154. Suite; principes généraux sur le mode de calcul des délais, art. 2260.

155.Etat de la jurisprudence sur la question. 156. Suite.

Section II. Force de la présomption sur la durée des gros

sesses.

-

157. Cette présomption peut-elle être combattue par la preuve contraire? Esprit des rédacteurs du Code.

158. Suite.

159. 160.

161.

La négative est certaine pour le cas de l'art. 314.
Id. pour l'hypothèse de l'art. 312-2o.

Vive controverse relativement à l'art. 315. Le juge pourrait d'après certains auteurs déclarer légitime l'enfant né après l'expiration des délais fixés par cet article. — Arguments de ce système.

162. Suite.

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166. question.

Etat de la doctrine et de la jurisprudence sur cette

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