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DE LA

RÉVOLUTION FRANÇAISE.

CORDAY

(MARIE-ANNE-charlotte),

Née à Saint-Saturnin-lès-Vignaux, près de Séez en Normandie, le 28 juillet 1768;
morte à Paris, sur l'échafaud, ie 17 juillet 1793.

Marat était arrivé à l'apogée de son étrange pouvoir. Dans les journées des 31 mai et 2 juin, il avait disposé à son gré de la liberté des Girondins. Il avait fait retrancher de la liste fatale les députés qu'il jugeait les plus faibles et les plus inoffensifs; il avait fait ajouter à ces listes ceux qui avaient mérité sa haine par leur patriotisme et par leur courage. Continuant, dans son Journal de la république, l'horrible mission dont la Montagne l'avait chargé, il dénonçait à la colère du peuple et aux décrets de proscription du Comité de salut public, tout ce qui portait ombrage aux ultrarévolutionnaires. Parmi les généraux, Custine, Stengel, Mia

ginski et Beurnonville avaient eu le triste honneur d'exciter plus particulièrement ses soupçons. Biron, qui venait de passer au commandement de la Vendée, eut bientôt sa place à côté d'eux; et ce tribun, si longtemps méprisé des partis, même de ceux qui le mettaient en œuvre, étendit son bras sur toutes les branches de l'administration et du gouvernement. Le pouvoir, entre les mains des hommes de septembre, avait été étrangement dénaturé et éloigné de ses conditions normales. Ceux qui l'exercèrent, du 31 mai au 9 thermidor 1794, furent moins des gouvernants que des juges formant un vaste tribunal d'épuration, devant lequel toute la France devait être citée tour à tour. Marat s'était proclamé, pour ainsi dire, le ministère public de ce tribunal redoutable, comme Fouquier-Tinville avait été nommé l'accusateur public du tribunal révolutionnaire. Plus puissant dans ce poste que Robespierre et que Danton eux-mêmes, il gouvernait réellement le pays, non pas tout-à-fait dans le sens que nous attachons aujourd'hui à ce mot, mais dans le sens que la révolution du 2 juin lui avait donné. Gouverner alors, c'était éliminer des fonctions publiques et du rang de citoyen tous les suspects, les emprisonner, et les envoyer à l'échafaud. Le véritable chef de la république était donc l'homme audacieux qui s'était chargé de signaler les écueils sur lesquels le vaisseau de 1793 menaçait de se briser. Malheureusement, en portant la fortune de la France, ce vaisseau portait aussi la fortune des septembriseurs, et l'orage qui menaçait ceux-ci devait frapper au cœur celle-là.

Marat avait été forcé d'abandonner à ses collègues la tribune de la Convention nationale. L'état continuel d'irritation dans lequel il avait vécu depuis les premiers décrets lancés contre lui par l'Assemblée constituante, son séjour prolongé dans les caves des Cordeliers, les discussions si violentes des clubs, avaient rapidement usé en lui les ressorts de l'existence. En proie à une maladie inflammatoire des plus graves, il ne scrtait presque plus de sa chambre, et ne parvenait à apaiser les horribles douleurs qu'il ressentait, qu'en demeurant dans un bain la plus grande partie

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