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profits, jusqu'à ce qu'on l'exclue, ce qui ne se peut qu'en lui conservant les droits qui lui sont acquis, ou dont il ne peut être privé par cette

exclusion.

13. De même que les associés peuvent interrompre la société avec un prodigue et un insensé, le curateur du prodigue et celui de l'insensé peuvent aussi renoncer de leur part à la société (1).

14. Comme la société ne peut subsister que par l'union des personnes qui se sont choisies, et que c'est quelquefois par l'industrie d'un seul qu'elle se soutient, la mort de l'un des associés interrompt naturellement la société à l'égard de tous; si ce n'est qu'ils soient convenus qu'elle subsistera entre les survivans, ou que, sans cette convention, ceux qui restent veuillent demeurer ensemble en société (2). (1868.)

15. La mort civile fait le même effet à l'égard de la société que la mort naturelle; car la personne étant hors d'état d'agir, et ses biens confisqués, il est à l'égard de la société comme s'il était mort (3).

16. La société étant finie, les associés se remboursent réciproquement de leurs avances, et partagent leurs profits; et s'il reste des dettes passives à acquitter, des dépenses à faire, et des profits et pertes à venir, ils prennent leurs sûretés respectives pour toutes ces suites (4).

SECTION VI.

De l'effet de la société à l'égard des héritiers des associés.

1. Quoique l'héritier entre dans tous les droits de celui à qui il succède (5), l'héritier d'un associé n'étant pas associé, n'a pas droit de s'immiscer à exercer cette qualité. Ainsi, celui qui succède à un associé dont la charge était de tenir le livre de la société, ou de faire les emplettes ou d'autres affaires, ne peut pas s'ingérer dans ces fonctions; mais quoique cet héritier n'ait pas la qualité d'associé, il est, à l'égard des autres associés, comme sont entre eux ceux qui ont quelque chose de commun ensemble sans convention; ce qui lui donne le droit de prendre connaissance de ce qui se passe dans la société, et de s'en faire rendre compte pour la conservation de son intérêt. Et enfin il entre dans les droits et dans les engagemens qui sont attachés à la simple qualité d'héritier, comme il sera expliqué dans les règles qui suivent (6).

(1) L. ult. Cod. pro soc. (2) L. 65, § 9. ff. pro soc. L. 59, eod. L. 37, ff. pro soc. (3) L. 65, § 12, ff. pro soc. § 7, inst. eod. L. 63, § ult. eod. (4) V. ci-devant l'art. 11 de la sect. 4. L. 27, ff. pro soc. L. 38, eod. L. 65, § 13, eod. L. 30, eod. (5) L. 59, ff. de reg. jur. L. 9, § 12, ff. de her. inst. L. 24, ff. de verb. signif. L. 62, ff. de reg. jur. (6) L. 63, § 8, ff. pro socio. V. l'art. 3 de la sect. 2.

2. L'héritier de l'associé a part aux profits qu'aurait eus celui à qui il succède, soit qu'ils lui fussent déja acquis par les commerces ou affaires qui étaient consommés, ou qu'ils dussent résulter des opérations qui restaient; et il doit aussi supporter sa portion des charges et des pertes de ces mêmes affaires (1). (C. civ. 1868.)

3. Quoique l'héritier ne soit pas associé, il ne laisse pas d'être obligé de parfaire les engagemens du défunt qui peuvent passer à lui; et il doit satisfaire non-seulement aux contributions, mais aux autres suites. Ainsi, si le défunt avait entre ses mains quelque affaire ou quelque travail, dont la conduite puisse passer à son héritier, il doit achever ce qui en reste à faire, avec le même soin et la même fidélité dont le défunt aurait été tenu (2).

4. L'héritier de l'associé est aussi tenu envers la société du fait du défunt, et de tout ce qu'il pourrait y avoir causé de perte ou de dommage, soit par sa mauvaise foi, ou par des fautes dont il devait répondre (3).

5. Si la mort d'un associé arrive avant que l'on ait commencé l'affaire pour laquelle la société avait été faite, et que cette mort soit connue des autres associés, la société est finie, au moins à l'égard de celui qui est décédé, et de son héritier, et il est libre aux associés de l'en exclure, comme à cet héritier de n'y point entrer. Mais, si cette mort étant inconnue des autres associés, ils commencent l'affaire, l'héritier du défunt y aura sa part, et succèdera aux charges et aux profits ou aux pertes qui en arriveront (4). Car le contrat de société a eu cet effet, que l'ignorance de cette mort et la bonne foi de ces associés a fait subsister l'engagement du défunt sur lequel ils avaient traité, et en a formé un nouveau réciproque entre eux et l'héritier.

6. Tout ce qui a été dit en divers endroits de ce titre sur la dissolution de la société, soit par la mort d'un associé ou par la volonté des associés, et sur la manière dont les engagemens des associés passent ou ne passent point à leurs héritiers, ne doit pas s'entendre indistinctement des sociétés où des personnes tierces sont intéressées; comme sont les sociétés des fermiers ou des entrepreneurs de quelque ouvrage. Car il faut distinguer dans ces sortes de sociétés deux engagemens, l'un des associés entre eux, et l'autre de tous les associés envers la personne de qui ils prennent ou une ferme ou quelque chose à faire. Et comme ce dernier engagement passe aux héritiers des associés (5), c'en est une suite que se trouvant dans un engagement commun envers d'autres, ils soient liés entre eux. Et si cette liaison ne les rend

(1) L. 65, § 9, ff. pro soc. L. 3. Cod. eod. L. 63, § 8, ff. pro soc. L. 65, § 2, eod. (2) L. 40, ff. pro soc. L. 21, § 2, ff. de neg. gest. L. 35, ff. pro soc. et L. 63, § 8, pro socio. (3) L. 35, in fine, et L. 36, ff, pro soc. (4) L. 65, § 10, ff. pro soc. V. l'art. 7 de la sect. 4 des Procurations. (5) V. l'art. 1o de la sect. I du Louage.

ff.

pas associés, comme le sont ceux qui se sont choisis volontairement, elle a cet effet que, par exemple, l'héritier d'un fermier étant obligé aux conditions du bail envers celui qui a donné à ferme, et ayant aussi le droit d'exploiter ou faire exploiter la ferme pour son intérêt, ce droit et cet engagement distinguent sa condition de celle des héritiers des autres sortes d'associés, en ce qu'il ne peut être exclus de la ferme, quand même l'exploitation n'en aurait pas été commencée avant la mort de l'associé à qui il succède (1).

TITRE IX.

Des dots.

Le mariage fait deux sortes d'engagemens celui que forme l'institution divine du sacrement, qui unit le mari et la femme, et celui que fait le contrat de mariage par les conventions qui regardent les biens (2).

L'engagement du mariage en ce qui regarde l'union des personnes, la manière dont il doit être célébré, les causes qui le rendent indissoluble, et les autres matières semblables, ne sont pas de ce dessein, comme il a été remarqué dans le plan des matières, au chapitre 14 du Traité des Lois.

Pour ce qui est des conventions qui regardent les biens, quelques-unes sont du dessein de ce livre, et d'autres n'en sont pas ; et pour en faire le discernement, il faut en distinguer trois sortes: la première, de celles qui ne sont pas du droit romain, quoiqu'elles soient de notre usage, soit dans tout le royaume, comme les renonciations des filles aux successions à venir (3), et les institutions contractuelles et irrévocables (4), ou seulement en quelques provinces, comme la communauté de biens entre le mari et la femme; la seconde de celles qui sont du droit romain, mais qui ne sont en usage qu'en quelques provinces, et qui même n'y ont pas un usage uniforme, comme sont les augmens de dot; la troisième, de celles qui sont du droit romain et d'un usage universel dans le royaume, comme celles qui regardent la dot, et cette sorte de biens de la femme qu'on appelle paraphernaux, c'est-à-dire les biens qu'elle peut avoir autres que sa dot.

Il n'y a que cette dernière sorte de conventions qui étant du droit romain et de notre usage, soit du nombre des matières qui sont du dessein de ce livre. Mais pour la communauté de biens, les douaires, l'augment de dot, et autres matières propres à quelques coutumes ou à quelques provinces, elles y ont leurs règles qu'on ne doit pas mêler ici. Il faut seulement remarquer que ces matières, et aussi celles des institutions contractuelles, et des (1) L. 59, ff. pro soc. L. 63, § 8, eod. (2) Tob. 7, 15. (3) L. 3. Cod. de collat. (4) L. 15. Cod. de pact. L. 5. Cod. de pact, conv.

renonciations des filles, ont plusieurs règles tirées du droit romain, qui se trouveront dans ce livre en leurs lieux propres dans les matières où elles ont leur rapport. Ainsi, plusieurs règles de la société et des autres conventions conviennent à la communauté de biens entre le mari et la femme; et plusieurs de celles des successions et aussi des conventions peuvent s'appliquer aux institutions contractuelles.

Il ne restera donc, pour la matière de ce titre, que les règles du droit romain qui regardent la dot et les biens paraphernaux : on n'y mettra que celles qui sont d'un usage commun. Mais on n'y mêlera pas quelques usages particuliers du droit romain, quoique observés en quelques lieux, comme, par exemple, le privilége de la dot avant les créanciers du mari antérieurs au contrat de mariage.

Les règles des dots ont leur fondement sur les principes naturels du lien du mariage, où le mari et la femme forment un seul tout dont le mari est le chef. Car c'est un effet de cette union, que la femme se mettant elle-même sous la puissance du mari, elle y mette aussi ses biens, et qu'ils passent à l'usage de la société qu'ils forment ensemble (1).

Suivant ce principe, il serait naturel que tous les biens de la femme lui fussent dotaux, et qu'elle n'en eût point qui n'entrassent dans cette société, et dont le mari, qui en porte les charges, n'eût la jouissance. Mais l'usage a voulu que le mari n'ait pour dot que les biens qui lui sont donnés à ce titre; et si la femme ne donne pas en dot tous ses biens présens et à venir, mais seulement de certains biens, la dot sera bornée aux biens qui sont donnés sous ce nom, et les autres qui n'y sont pas compris seront paraphernaux.

Il faut remarquer cette différence entre les conventions du contrat de mariage, et celles des autres contrats, qu'au lieu que toutes les autres conventions obligent irrévocablement ceux qui s'y engagent, et dès le moment que la convention est formée, celles du contrat de mariage sont en suspens jusqu'à ce que le mariage soit célébré, et renferment cette condition, qu'elles n'auront lieu qu'en cas qu'il s'accomplisse, et qu'elles demeureront nulles s'il ne s'accomplit point (2). Mais lorsque la célébration du mariage suit le contrat, elle y donne un effet rétroactif, et il a cet effet du jour de sa date. Ainsi l'hypothèque pour la dot est acquise dès le contrat et avant le temps de la célébration du mariage.

Quelqu'un pourrait remarquer et trouver à dire dans la lecture de ce titre, qu'on n'y ait rien mis de quelques maximes du droit romain en faveur de la dot: comme sont celles qui disent en général que la cause de la dot est favorable, et qu'il est de l'intérêt (1) L. 8, Cod. de pact. conv. (2) L. 68, ff. de jur. dot. L. 10, § 4, eod.

public qu'elle soit conservée (1); que dans le doute il faut juger pour la dot (2), et en particulier les maximes qui donnent à la dot quelques priviléges, comme est le privilége entre créanciers, et la préférence même aux hypothèques antérieures (3), et celui qui, en faveur de la dot, validait l'obligation d'une femme qui s'obligeait pour la dot d'une autre (4), quoique dans le droit romain les femmes ne pussent s'obliger pour d'autres personnes. Mais, pour ce qui est de ces priviléges, celui de la préférence aux créanciers, même aux hypothécaires et antérieurs, n'est en usage qu'en quelques lieux, et partout ailleurs il est considéré comme une injustice. La loi qui valide l'obligation d'une femme pour la dot d'une autre, est inutile après l'édit du mois d'août 1606, qui permet aux femmes de s'obliger pour d'autres, comme il a été remarqué sur l'art. 1 de la sect. 1 du titre des Personnes.

Pour ce qui est de ces maximes générales., que la condition des dots est favorable, qu'elle intéresse le public, et que dans le doute il faut juger en faveur de la dot, comme elles ne déterminent à rien de particulier, si ce n'est à ces priviléges du droit romain, et qu'elles pourraient être aisément tournées à de fausses applications, on n'a pas cru devoir les placer ici comme règles.

Il est encore nécessaire de remarquer qu'il y a dans le droit romain d'autres dispositions dans la matière des dots, qui, quoique fondées sur l'équité naturelle, n'ont pas été mises dans ce titre. Ainsi, on n'y a pas mis cette règle, que le mari étant poursuivi de la part de sa femme pour la restitution de la dot ou pour d'autres causes, ou la femme de la part du mari pour ce qu'elle pourrait lui devoir, ils ne doivent pas être contraints avec la même sévérité que les débiteurs pour d'autres causes, et qu'ils ne peuvent être obligés qu'à ce qu'ils ont moyen de payer, sans ètre réduits à la nécessité (5). Et ce qui a fait qu'on n'a pas mis d'article pour cette règle, c'est qu'elle était dans le droit romain une suite du divorce qu'on y permettait, et qui est illicite; et que par notre usage la femme n'agissant contre le mari, ou le mari contre la femme, qu'en cas de séparation de corps et de biens, ou seulement de biens, cette règle ne se rapporte ni à l'un ni à l'autre de ces deux cas; et qu'enfin dans tous ceux où l'équité demande qu'on modère la dureté des poursuites des créanciers, notre usage en laisse le tempérament à la prudence des juges, selon les circonstances. Sur quoi il faut voir l'art. 20 de la sect. 4 de la Société.

On n'a pas mis non plus dans ce titre cette autre règle du droit romain, et qui est aussi fondée sur un principe d'équité, que

(1) L. 1, ff. sol. matr. L. 2, ff. de jur. dot. (2) L. 70, ff. de jur. dot. L. 85, ff. de reg. jur. (3) L. 18, § 1, ff. de rebus auct. jud. possid. L. ult. Cod, qui potiores. (4) L. ult. Cod. ad senatus Vell. (5) L. 20, ff. de re jud. Inst. de act. § 37. L. un. § 7. Cod. de rei ux. act. L. 14, iu fin. ff. sol. matr. L. 12, ff. sol. matr. L. 173, ff. de reg. jur.

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