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dant des lieux. Quant aux deux autres vœux, ils n'y sont obligés qu'autant que peut le comporter la situation différente où ils se trouvent. Ces vœux lient bien encore, puisqu'ils n'en sont pas dispensés; mais ils ne peuvent les obliger de la même manière, leur position n'étant plus la même. Au reste, pour éviter toute difficulté, il est prudent de recourir au Souverain Pontife, qui peut modifier ou commuer les vœux solennels, et même en dispenser.

545. Jusqu'ici nous avons parlé des ordres religieux, qu'il ne faut pas confondre avec les congrégations séculières, d'hommes et de femmes, improprement dites religieuses. Mais il se présente une question: savoir, si nous avons encore, en France, des ordres religieux proprement dits; si la profession des Bénédictins, des Franciscains, des Dominicains, des Chartreux, des Trappistes, des Carmélites, des Visitandines, et autres personnes qui suivent, parmi nous, des règles autrefois approuvées par le saint-siége, est une vraie profession religieuse, et si leurs vœux sont solennels. Il n'appartient qu'au Souverain Pontife de décider cette question de manière à ne laisser aucune difficulté; lui seul a droit de modifier les conditions prescrites pour la profession religieuse et la solennité des vœux. Si donc, malgré notre législation civile, qui ne reconnaît pas de religieux, et qui laisse aux religieuses la faculté d'acquérir et d'aliéner des biens temporels, le saint-siége statuait que le vœu de pauvreté, tel qu'il s'observe dans nos communautés, sera solennel, on devrait le regarder comme tel, ainsi que les vœux d'obéissance et de chasteté : comme au contraire ce ne seront que des vœux simples, si tel est l'esprit du siége apostolique.

Or, pour ce qui regarde les religieuses, il résulte de plusieurs décisions de la Sacrée Pénitencerie (1), que notre Saint Père le Pape ne regarde leurs vœux que comme des vœux simples. Par conséquent, dans l'état actuel des choses, leurs vœux, si on excepte celui de chasteté, cessent d'être réservés au Souverain Pontife. Et le décret du concile de Trente, les constitutions des Souverains Pontifes concernant la clôture, perdent toute leur force et leur application pour les communautés de religieuses, comme le porte expressément une décision de la Pénitencerie, adressée, en 1821, Â un chanoine de Nantes (2).

En est-il de mème de nos religieux? Nous ignorons quelle est, à cet égard, la pensée du saint-siége. Nous ne connaissons qu'une réponse particulière du Saint Père, du 24 avril 1831, laquelle sup

(1) Voyez le Traité de M. Carrière, de Justitia et Jure, no 223. — (2) Ibidem.

pose que les vœux des Trappistes ne sont point des vœux so

lennels (1).

TROISIÈME PARTIE.

Du troisième Précepte du Décalogue.

546. Le troisième commandement de Dieu est ainsi conçu : « Memento ut diem sabbati sanctifices. Sex diebus operaberis, et « facies omnia opera tua. Septimo autem die sabbatum Domini Dei « tui est : non facies omne opus in eo, tu, et filius tuus et filia tua, ser-` « vus tuus et ancilla tua, jumentum tuum, et advena qui est intra « portas tuas. Sex enim diebus fecit Dominus cœlum et terram, et << mare, et omnia quæ in eis sunt, et requievit in die septimo : «< idcirco benedixit Dominus diei sabbati, et sanctificavit eum (2). »

Les Juifs observaient le sabbat, sabbatum, qui signifie jour de repos, en mémoire de ce que Dieu, après avoir employé six jours à la création, se reposa le septième. Mais l'Église substitua le premier au dernier jour de la semaine, en mémoire de la résurrection de Notre-Seigneur Jésus-Christ; et ce jour, que nous devons sanctifier comme chrétiens, s'appelle dimanche, c'est-à-dire jour du Seigneur. Ainsi, quoique l'obligation de consacrer quelque temps au culte extérieur et public soit de droit naturel et divin, l'obligation de sanctifier le dimanche plutôt qu'un autre jour n'est que de droit ecclésiastique; c'est l'Église elle-même qui a transféré le culte et la célébration du sabbat au jour du dimanche, comme l'enseigne le catéchisme du concile de Trente: «Placuit Ecclesiæ Dei «< ut diei sabbati cultus et celebritas in dominicum transferretur « diem (3). » C'est aussi la doctrine de saint Thomas: «Observantia « diei dominicæ in nova lege succedit observantiæ sabbati, non ex vi præcepti legis; sed ex constitutione Ecclesiæ, et consuetudine « populi christiani (4). »

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547. Saint Alphonse de Liguori regardant ce sentiment comme étant beaucoup plus probable que le sentiment contraire, longe

(1) Voyez le Traité de M. Carrière, de Justitia et Jure, no 223. — (2) Exod. c. 20. v. 8, 9, 10 et 11. (3) Catéch. du Conc. de Trente, sur le 3o comman· dement. (4) Sum. part. 2. 2. quæst. 122, art. 4. Conc, de Reims, de 1583,

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probabilior et communis, en tire les conclusions suivantes : « Et «ideo observantia dominicæ ab Ecclesia mutari et dispensari potest; « quamvis dispensari non potest quod nullus sit dies festivus cultui a divino specialiter deputatus.... licet sit de jure divino et naturali, « ut designetur aliquod tempus determinatum ad Deum colendum, « determinatio tamen hujus cultus, et dierum quibus conferendus « erat, fuit a Christo dispositioni Ecclesiæ relicta; ita ut posset Papa « decernere, ut observantia dominicæ duraret tantum per aliquas <«< horas, et quod licerent aliqua opera servilia (1).

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L'Église peut établir des fêtes pour la célébration des principaux mystères de la religion, ou pour honorer la sainte Vierge, les martyrs et les saints; et le précepte de sanctifier les fêtes oblige sous peine de péché mortel, comme on le voit par la condamnation de la proposition suivante : « Præceptum servandi festa non obligat sub « mortali, seposito scandalo, si absit contemptus (2); aussi, ce que nous disons de la sanctification du dimanche s'applique, généralement, aux fètes commandées par l'Église, tant pour ce qui regarde l'obligation d'entendre la messe, que pour ce qui regarde la défense de vaquer aux œuvres serviles.

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CHAPITRE PREMIER.

De ce qui nous est commandé par l'Église pour la sanctification des Dimanches et des Fêtes.

548. Entendre dévotement la sainte messe, assister aux vêpres et aux autres exercices de piété qui se font à l'Église, s'approcher des sacrements de Pénitence et d'Eucharistie, écouter avec respect et attention la parole de Dieu, faire quelque lecture spirituelle, visiter les malades, soulager les pauvres, consoler les affligés, sont les principaux actes que les vrais fidèles ont coutume de faire les dimanches et fêtes de commandement.

Mais de toutes ces œuvres, il n'y a que l'assistance à la messe qui soit obligatoire sous peine de péché mortel; et cette obligation est

(1) Theol. moral. lib. 111, no 265. Voyez aussi les Conférences d'Angers, sur le 3o commandement de Dieu, question 1, etc.; Billuart, de Religione, dissert, VI. art. 1. (2) Décret d'Innocent XI, de l'an 1679.

pour tous les fidèles non empêchés qui ont atteint l'usage de raison. Suivant plusieurs théologiens, on est encore obligé, mais sous peine de péché véniel seulement, d'assister à l'office des vêpres. Enfin, il y a obligation, non pour tous les fidèles, mais pour ceux qui ne sont pas suffisamment instruits des devoirs du chrétien, d'assister à la prédication ou au catéchisme qui se fait le dimanche, s'ils n'ont pas d'autre moyen de se procurer l'instruction nécessaire au salut (1). Quant aux autres pratiques, auxquelles un curé doit exhorter les fidèles, elles ne sont que de conseil, que de dévotion; et, à s'en tenir à la rigueur du droit, celui qui se contente d'entendre la messe le dimanche, de quelque peu de durée qu'elle soit, s'il s'abstient d'ailleurs de toute œuvre servile, satisfait au troisième précepte, en ce sens du moins qu'il ne pèche pas mortellement (2).

ARTICLE I.

De l'Obligation d'entendre la Messe.

549. Pour satisfaire à l'obligation d'entendre la messe, il suffit de l'entendre une fois, lors même qu'une fête de commandement tomberait le dimanche : il en est de même pour le jour de Noël, où l'on a coutume de dire trois messes. Mais, en tout cas, on doit, autant que possible, entendre la messe en entier, moralement parlant. En omettre une partie considérable sans raison serait une faute grave; si la partie omise n'était que légère, la faute ne serait que vénielle. Or, de Lugo et plusieurs autres théologiens pensent que ceux qui arrivent pour l'offertoire ne pèchent pas mortellement; parce que, disent-ils, au rapport de saint Isidore, la messe ne commençait anciennement qu'à l'offertoire. Mais il nous paraît plus probable qu'on se rend coupable d'une faute grave en manquant depuis le commencement de la messe jusqu'à l'évangile inclusivement. Saint Alphonse croit même qu'il y a péché mortel à n'arriver qu'après l'épitre. Toutefois, il reconnaît comme probable l'opinion qui veut que la faute ne soit mortelle qu'autant qu'on n'arrive pas pour l'évangile (3).

(1) Voyez S. Alphonse, lib. 1. no 308; Benoît XIV, de Synodo, etc. lib. vii. cap. 64; Billuart, de Religione, dissert. vi. art. 8, etc. (2) S. Antonin, Sum. part. 2. 2. tit. Ix. cap. 7. § 4; Billuart, ibidem. (3) S. Liguori, lib. iv. no 310; Billuart, de Religione, dissert. vi art. 5.

Mais ce serait une faute grave de manquer tout ce qui précède l'évangile et ce qui suit la communion du prêtre; ou de manquer le temps de la consécration et de la communion; ou même de manquer seulement la consécration ou la communion sous les deux espèces; ou enfin de manquer depuis la fin de la consécration jusqu'au Pater exclusivement (1).

On convient au contraire que la faute n'est que vénielle, si on omet seulement l'offertoire ou la préface, ou la partie de la messe qui suit la communion du prêtre (2).

550. Celui qui entend en même temps deux demi-messes de deux prêtres différents, ne satisfait point au précepte. Le pape Innocent XI a condamné l'opinion contraire, en censurant la proposition suivante: « Satisfacit præcepto Ecclesiæ de audiendo sacro, qui « duas ejus partes, imo quatuor simul a diversis celebrantibus audit (3).

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Mais il est assez probable qu'on satisfait au précepte, lorsqu'on assiste à une partie de la messe d'un prêtre et à une partie de la messe d'un autre, qui célèbrent successivement, pourvu qu'il n'y ait pas trop d'intervalle entre les deux messes, et que l'on assiste à la consécration et à la communion faites par le même prêtre. Exemple: Paul arrive à la messe de son curé immédiatement avant la consécration; il entend le reste de la messe jusqu'à la fin; ensuite il entend la messe du vicaire jusqu'à la consécration exclusivement: il parait qu'il accomplit le précepte; mais s'il agit ainsi sans raison légitime, on ne peut l'excuser d'une faute vénielle (4).

551. Pour entendre la messe, il faut être à l'église ou à l'endroit où on célèbre les saints mystères. Mais on peut l'entendre étant au chœur, derrière l'autel, ou à une fenêtre qui donne dans l'église, quand bien même on ne pourrait pas voir le célébrant; pourvu qu'on puisse le suivre par le moyen des autres fidèles qui sont plus rapprochés de l'autel. Celui-là pourrait encore l'entendre qui se trouverait derrière un mur ou une colonne de l'église, et même hors de l'église, s'il faisait partie de la foule qui pénètre dans l'intérieur. Ce cas arrive assez souvent dans les grandes solennités. Enfin, plusieurs docteurs admettent qu'on peut entendre la messe étant à la fenêtre d'une maison qui n'est séparée de l'église que par la voie publique, pourvu toutefois qu'on aperçoive le prêtre à l'autel, et que la distance ne soit pas trop considérable. Saint Al

(1) Billuart, de Religione, dissert. vi. art. 5—(2) S. Liguori, lib. iv. no 310. (3) Décret de l'an 1679. — (4) S. Liguori, lib. 1v. no 311. M. I.

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