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EXAMINONS d'abord quels sont les avantages de la séparation; nous verrons ensuite s'ils se retrouvent dans le divorce.

Ire SUBDIVISION.

Des Avantages de la Séparation de corps.

La séparation ne peut avoir d'avantages que comme en a le remède à un mal, puisqu'elle est instituée pour mettre un terme aux malheurs d'une union mal assortie.

Tout se réduit donc à examiner si elle est un moyen doux et salutaire pour faire cesser les suites de désordres qu'on ne peut pas extirper.

Sous ce rapport on lui a trouvé trois avantages:

L'un, de laisser toujours une porte ouverte à la réconciliation entre les époux » (1) ; ils peuvent détruire, quand il leur plaît, leur séparation, et

(1) M. Maleville, Procès-verbal du 16 vendémiaire an 10, tome Ier page 332.

rendre à leur mariage ses effets. «< Une rencontre fortuite, l'isolement où se trouvent des époux habitués à vivre ensemble, la réflexion qui met à leur place des torts que les passions avoient exagérés, l'aspect sur-tout des enfans communs, peuvent faire répandre autour d'eux les pleurs du repentir et ceux de la elémence » (1).

L'autre avantage concerne les enfans: la séparation ne les rend pas, en quelque sorte, étrangers à leurs pères. « Des époux séparés n'en ont pas moins l'œil sur eux; leurs entrailles n'en sont pas moins émues à ce spectacle » (2).

Le troisième avantage de la séparation de corps est d'offrir une ressource à ceux que leur croyance attache au principe de l'indissolubilité absolue du mariage.

Rapprochons maintenant cette institution de celle du divorce, et voyons si cette dernière peut la suppléer.

IIe SUBDIVISION.

Parallèle entre la Séparation de corps et le Divorce, sous le rapport de leurs avantages respectifs.

Je réduirai toute cette discussion à deux questions.

(1) M. Maleville, Procès-verbal du 16 vendémiaire an 10, tome 1°, page 332. — (2) Ibid., page 331.

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L'une sera de savoir laquelle de l'institution du divorce, ou de celle de la séparation, présente en elle-même le plus d'avantages.

L'autre, si indépendamment de ces considérations, la liberté des cultes et des opinions n'exigeoit pas le rétablissement de la séparation de corps, comme elle exigeoit le maintien du di

vorce.

La première de ces questions se rattache à une de ces théories générales sur lesquelles l'éloquence et la subtilité peuvent long-temps s'exercer sans arriver à un résultat certain. Cependant, pour ne rien laisser incomplet, j'exposerai ce qui a été dit à cet égard.

La seconde question, au contraire, nous ramène à un principe clair, au seul principe régulateur dans cette matière.

NUMÉRO Ier

Laquelle des deux Institutions, considérées en elles-mêmes, présente le plus d'avantages!

D'un côté on a reproché au divorce de ne pas offrir les deux avantages que donne la séparation.

« Il ferme, a-t-on dit, toute issue à la réconciliation si désirable entre les époux, et

ne laisse après lui que des remords et des regrets » (1).

Il sépare, a-t-on ajouté, les pères des enfans. « Un époux divorcé et remarié est, par cela même, constitué hors d'état de remplir, à leur égard, les devoirs dont la nature l'a chargé ; une nouvelle femme, un nouveau mari, rebutent et éloignent ces enfans: mais c'est pour les enfans que le mariage a été établi, et c'est leur intérêt qu'il faut sur-tout considérer dans toutes les questions relatives au mariage. Si les enfans étoient mis, comme à Lacédémone, sous la surveillance de magistrats, et élevés en commun, le divorce leur seroit à-peu-près indifférent, mais peut-on soutenir qu'un tuteur ait la même affection, le même zèle et encore le même pouvoir qu'un père pour leur conservation et leur direction! Toujours il y a eu des tuteurs; et pourquoi cependant toujours les orphelins ont-ils excité la pitié » (2)!

D'un autre côté, on a ainsi exposé les avantages politiques qu'on a attribués au divorce sur la séparation de corps.

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Quel est done, a-t-on dit, l'effet de cette conservation apparente du lien conjugal dans les séparations, et pourquoi retenir encore le nom avec tant de soin, lorsqu'il est évident que la

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(1) M. Maleville, Procès-verbal du 16 vendémiaire an 10, tome , page 332. — (2) Ibid., pages 331 et 332.

chose n'existe plus ? Le voeu principal du mariage n'est-il pas trompé ? N'est-il pas vrai que l'époux n'a réellement plus de femme, que la femme n'a plus de mari! Quel est donc, encore une fois, l'effet de la conservation du lien!

« On interdit à deux époux, devenus célibataires de fait, tout espoir d'un lien légitime, et on laisse subsister entre eux une communauté de nom qui fait encore rejaillir sur l'un le déshonneur dont l'autre peut se couvrir. Nous n'avons que trop vu les funestes conséquences de cet état, etle passé nous annonce ce que nous devrions en attendre pour l'avenir.

Cependant l'un des époux étoit du moins. sans reproche; il avoit été séparé comme une victime de la brutalité ou de la débauche: falloit-il l'offrir une seconde fois en sacrifice, par l'interdiction des sentimens les plus doux et les plus légitimes! L'époux même dont les excès avoient forcé la séparation, ne pouvoit-il pas mériter quelque intérêt ! Étoit-il impossible que, mûri par l'âge et par la réflexion, il pût trouver une compagne qui obtiendroit de lui cette affection si constamment refusée à la première !

« Certes, si nous ne considérons que la personne des deux époux, il est bien démontré que le divorce est pour eux préférable à la séparation.

Il n'y a qu'une objection; on la tire de la possibilité d'une réunion; mais combien de sépa

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