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pas être contredites par celles de l'employé visiteur ? Et ne crée-t-on pas ainsi un antagonisme qui ne peut avoir, pour les pauvres, que les plus déplorables résultats ?

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Dans l'organisation nouvelle de l'assistance à domicile, la fonction de visiteur deviendrait sinon toujours du moins le plus souvent inutile. Du moment où il serait reconnu en droit, comme il nous semble l'être en équité, que les salariants doivent assistance à leurs salariés malades, les renseignements sur la position de ces derniers n'auraient plus d'objet, puisque le maître et le patron paieraient les frais de maladie, sauf le recours qui leur serait accordé dans les cas que nous avons indiqués déjà. (V. notre chapitre 1o de ce troisième livre.) Ainsi circonscrite, l'œuvre des visiteurs se bornerait donc à apprécier la valeur des demandes adressées, par les pauvres non salariés, pour obtenir les secours de l'assistance gratuite. Ils auraient alors à s'enquérir de l'état d'indigence des malades et à s'assurer s'il n'existerait pas, dans le degré de l'héritage, des parents capables de payer pour eux. Les fonctions de visiteur se trouveraient, comme on le voit, considérablement réduites; car, en dehors de ces rares privilégiés qui vivent oisivement de l'héritage paternel, on ne voit guère d'existence possible que celle des salariés. Et les administrateurs ordinaires suffiraient seuls à l'accomplissement de leur nouvelle tâche.

Le médecin domiciliaire, seul juge compétent des besoins des malades, délivrerait les bons nécessaires pour y pourvoir. L'agent comptable du dispensaire

ferait délivrer, par ses gens de service, les matelas, lingeries et autres objets de son ressort. Les ordonnances concernant les bains, les comestibles, les médicaments, etc., seraient exécutées par les adjudicataires. Pour les fournitures des dispensaires, plus encore que pour celles des hôpitaux, c'est à l'adjudication publique que l'on doit s'adresser.

Quant aux sœurs dévouées au service des malades, quels que soient leur mérite et leur zèle, ces qualités ne sauraient, en aucun cas, remplacer le savoir pharmaceutique qui leur manque et, en dehors de la surveillance, leur rôle devrait se borner à la direction de la tisanerie et de la cuisine.

La commission administrative actuelle qui se réunit chaque semaine, «<pour recevoir les renseignements et accorder les secours nécessaires, » est une institution utile et qu'il importe de conserver dans l'organisation future de l'assistance domiciliaire. Composée de médecins et d'administrateurs, sa principale mission serait d'exercer un premier contrôle sur l'ensemble et sur les détails du service. Les médecins y rendraient compte de leurs ordonnances, proposeraient les radiations de malades, leur envoi à l'hôpital, etc., mesures qu'ils auraient toujours, d'ailleurs, le droit de prendre d'urgence. De leur côté, les administrateurs rendraient compte des demandes adressées à l'effet d'obtenir le traitement gratuit, des motifs d'acceptation ou de rejet de ces demandes, des recours à exercer contre les maîtres, les patrons, les familles, etc.

Et enfin, comme couronnement de cette organisation dont nous ne faisons, du reste, qu'indiquer ici les principaux traits, interviendrait l'œuvre du contrôle central chargé de vérifier tous les services de l'assistance sociale. Exercée par des nommes compétents et honnêtes, et toujours à l'improviste, cette vérification aurait l'immense avantage de tenir constamment en haleine les fonctionnaires de l'assistance publique, de faire connaître l'inertie des uns, le zèle des autres et la valeur de tous.

L'assistance à domicile, qui n'est aujourd'hui que le complément, ou plutôt que l'appendice de la charité sociale, ne tardera pas, espérons-le, à devenir la principale branche de ce service. Elle le deviendra quand, à la condition précaire des salariés modernes, aura succédé un état meilleur; quand, au lieu d'être, comme aujourd'hui, entassés dans des demeures sans nom, les travailleurs pourront habiter des maisons saines et convenablement aérées. C'est cet état que nous appelons de nos voeux, et dont nous tâcherons de dire les moyens de réalisation dans un prochain ouvrage. Heureux s'il nous a été donné de faire connaître, dans celui-ci, quelques procédés plus efficaces que ceux que l'on met actuellement en œuvre pour soulager les nombreuses misères inhérentes à la nature humaine et plus encore à notre état social!

FIN.

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