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d'Émile avec un ravissement inexprimable, en retrouvant, après trente ans d'absence, celte fleur qui lui rappelait sa jeunesse et ses premières amours.... Le compositeur de Stratonice, Méhul, atteint de la maladie qui le conduisit lentement au tombeau, se faisait transporter, peu de temps avant sa mort, dans un parterre de rosiers qu'il avait lui-même plantés, et dont la vue et les émanations calmaient ses douleurs et adoucissaient sa profonde mélancolie. Ainsi l'étude de la botanique est non seulement utile à l'humanité, mais elle est encore remplie d'intérêt et de charmes; elle inspire des sentimens religieux en rendant plus claires encore les preuves de cette intelligence suprême qui créa la plante dont les vertus guérissent nos maux, et la fleur qui pare le sein de la beauté et embellit nos fêtes. L'ouvrage le plus parfait sorti de la main des hommes approcha-t-il jamais de la plus humble fleur sortie de la toute-puissance de Dieu ?...

Pénétré de ces sentimens, M. de Courset attachait à ses travaux un point de vue moral qui les lui rendait encore plus chers. Le livre de la nature, qu'il feuilletait chaque jour, luì parlait sans cesse de son sublime auteur, et jamais les tristes calculs d'une orgueilleuse incré

dulité ne vinrent un seul instant troubler la sérénité de son esprit.

Au milieu de ses recherches scientifiques, il avait trouvé le temps de composer un ouvrage dont le manuscrit est entre les mains de sa fille, et qui a pour titre : Considérations sur l'homme, relativement à son bonheur. Il est à désirer ce manuscrit soit publié.

que

Il a laissé plusieurs autres écrits intéressans, entre autres un travail étendu sur les insectes, et des observations météorologiques qui embrassent un grand nombre d'années.

Les arts furent toujours cultivés par lui; il dessinait avec facilité, et l'on conçoit que, de préférence, il s'attachait à retracer avec le pinceau les beautés fugitives des fleurs. Son porte. feuille renferme plus de mille plantes des Pyrénées, dont sa main a fixé sur le papier les formes et les couleurs si variées.

Amateur de la musique, M. de Courset se plaisait à accompagner sur la harpe les beaux. chants de Grétry et de Monsigny, dont la famille était originaire des lieux qu'il habitait. On le voyait, dans les derniers momens de sa longue et honorable existence, assister avec assiduité aux concerts, applaudir aux talens des artistes, des amateurs boulonnais, et serrer avec affec

tion la main de ceux d'entre eux qui reproduisaient avec succès l'esprit des compositions de nos grands maîtres. Le genre de musique qu'il préférait était en harmonie parfaite avec ses goûts et ses mœurs; une mélodie simple, naturelle; les airs qui peignaient le calme et la douceur de la vie champêtre lui causaient un vif plaisir; il avait formé une collection choisie de pastorales suisses, qu'il exécutait souvent au milieu de ses plantes et de ses fleurs en l'écoutant, on se croyait transporté dans les paysages si pittoresques de l'Helvétie, et ses cheveux blancs, sa figure pleine de franchise et d'aménité ajoutaient encore à l'illusion, en offrant l'image d'un vénérable descendant de Tell.

Après quelques jours de maladie, M. de Courset mourut, en juin 1824, à l'âge de soixante-dix-huit ans, entouré des soins de sa famille et des consolations de la religion. Sa perte fut vivement sentie par tous ses compatriotes, et la douleur de sa fille, dans cet instant cruel, ne saurait être exprimée.

que

Homme savant et vertueux! puisse cet éloge, le cœur seul a dicté, faire mieux connaître, mieux apprécier encore les talens et les services que tu as rendus à la Société !.... Heureux celui

qui peut marcher sur tes traces, et acquérir, ainsi que toi, toi, le droit de se dire en mourant : « J'ai vécu, j'ai fourni la carrière que le sort » m'avait ouverte. »

« Vixi, et quem dederat cursum fortuna peregi! »

(HOR.)

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