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bitable qu'il a voulu prohiber toute action rédhibitoire qui aurait pour objet la vente ou l'échange d'animaux domestiques autres que ceux énumérés dans la nouvelle loi. Ainsi, par exemple, le porc et la chèvre ne sont pas com. pris dans l'art. 1er. La conséquence qu'il faut tirer de cette omission, c'est que la vente de ces animaux ne peut donner lieu à aucune action rédhibitoire. La disposition n'est pas énonciative, mais limitative.

Et ce qui le prouve d'ailleurs, c'est que dans le projet, la ladrerie avait été considérée comme vice rédhibitoire à l'égard du porc. Or cette disposition a été retranchée de la loi. On a considéré que la ladrerie était annoncée par une vésicule qui se trouve au bas de la langue, et quiest facilement reconnue par les languéyeurs, et que, d'ailleurs, elle déprécie peu la chair de l'animal et ne la rend point insalubre. « Le dessein du législateur, dit M. LONCHAMPT, n'en demeure pas moins visible. Il n'a pas voulu que l'action rédhibitoire, pour défaut caché, pût être exercée dans la vente et l'échange des porcs: il ne l'a pas non plus permise dans la vente et l'échange des chèvres et des animaux domestiques qui ont une nature analogue à ceux dont il s'est occupé : il a considéré que ces animaux ont dans leur chair une valeur qui n'est jamais essentiellement altérée par les vices cachés dont ils pourraient être atteints, et qu'il ne fallait pas donner lieu à des procès dont le gain ne compenserait pas les frais. (V. Application de la loi du 20 mai 1838, p. 3o)

Art. 2.

L'action en réduction du prix, autorisée par l'article 1644 C. C., ne pourra être exercée dans les ventes et échanges d'animaux énoncés dans l'art. 1er ci-dessus.

Observations.

· D'après les anciens principes consacrés dans les articles 1641 et 1644 C. C., l'acheteur a contre le vendeur deux actions, à raison des vices cachés qui rendent la chose vendue impropre à l'usage auquel elle est destinée. Ces deux actions sont désignées en jurisprudence sous le nom d'action rédhibitoire et d'action estimatoire ou quanti minoris.

Cette dernière action, qui avait pour objet, non de faire résoudre la vente, mais d'obtenir une diminution dans le prix stipulé entre les parties, est désormais supprimée, par l'art. 2, dans les ventes et échanges d'animaux domestiques qui peuvent être atteints de vices rédhibitoires.

Ainsi, dans ces sortes de vente, l'acheteur n'aura plus le choix entre les deux actio ; il ne pourra plus garder la chose vendue et se faire restituer une partie du prix arbitré à dire d'experts; il faudra ou qu'il s'en tienne à la vente sans diminution de prix, ou qu'il en demande la résolution pour vices rédhibitoires; il n'a plus l'alternative qui lui était laissée par les art. 1641 et 1644 combinés.

Voici les motifs qui ont fait rejeter l'action estimatoire. On a considéré que cette action, juste dans les marchés de choses inanimées, ne l'était pas dans les ventes d'animaux; qu'ici le vendeur pouvait ignorer plus facilement les vices objet de la garantie, et que moins de droits contre lui devaient être concédés à l'acquéreur; que l'estimation était plus difficile et le prix souvent idéal; que le vendeur était exposé à laisser

l'animal pour un prix inférieur à sa valeur réelle; que cette action lui était souvent plus funeste que l'action rédhibitoire elle-même; qu'il importait de prévenir les contestations souvent injustes que l'acheteur de mauvaise foi pourrait élever dans le but d'obtenir du vendeur, par les menaces d'un procès, une réduction sur le prix d'acquisition. Telles sont les raisons qui ont fait abroger, en matière de vente d'animaux, la disposi tion de l'art. 1644 G. G. (V. le rapport de M. Lherbette.)

Remarquez que cet art. 2 ne met point obstacle, pas plus que l'art. 1er, à ce que l'acheteur se réserve expressément, dans l'acte de vente, une action contre son vendeur à raison de certains vices non désignés dans la loi. Dans ce cas, ce sera à la convention qu'il faudra recourir pour déterminer l'étendue de la garantie promise par le vendeur. (1. Particle 1627 C. C.)

Art. 3.

Le délai pour intenter l'action rédhibitoire sera, non compris le jour fixé pour la livraison,

De trente jours pour le cas de fluxion périodique des d'épilepsie ou mal caduc;

De neuf jours pour tous les autres cas.

yeux et

Art. 4. Si la livraison de l'animal a été effectuée ou s'il a été conduit, dans les délais ci-dessus, hors du lieu du domicile du vendeur, les délais seront augmentés d'un jour par cinq myriamètres de distance du domicile du vendeur au lieu où l'animal se trouve.

Observations. L'art. 1648 C. C. voulait que l'action pour vices rédhibitoires fût intentée par l'acheteur dans un bref délai, mais il ne le fixait pas, il s'en référait à l'usage du lieu où la vente avait été faite. Cette disposition avait beaucoup d'inconvénients dans la pratique, tant à cause de la grande diversité des coutumes à cet égard, que parce que, dans certains pays, le délai était beaucoup trop long. C'est à ce double inconvénient que l'art. 3 a eu pour objet de remédier en déterminant un délai uniforme et qui n'excédât pas trente jours, à moins qu'il n'y eût lieu à augmentation à raison des distances.

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Le délai pour intenter l'action rédhibitoire ne commence au jour de la vente qu'autant que la délivrance ou la tradition de l'animal vendu s'est faite immédiatement. Il doit être compté à partir du jour fixé pour la livraison, quoiqu'elle n'ait pas été faite ce jour-là, si c'est par la faute de l'acheteur, par sa négligence, par sa confiance dans le vendeur qu'elle n'a pas eu lieu. Mais si c'est le vendeur qui a été en demeure d'opérer la livraison, le délai ne court que du jour de la tradition réelle. (V. LHERBETTR, Rapp. à la Ch. des députés.)

Quand un vice rédhibitoire s'est déclaré dans le délai fixé par l'art. 3 il y a présomption légale qu'il existait au moment de la vente : s'il s'est manifesté depuis, il est présumé de plein droit n'avoir pas existé à la même époque. Dans ce cas, l'acheteur demanderait vainement à prouve que la maladie existait au temps du marché. Nulle preuve n'est admise contre la présomption de la loi, lorsque, sur le fondement de cette

T. LV.'

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présomption, elle dénie l'action en justice. (Art. 1362.C. C.) Ainsi, pour que l'action soit recevable, il faut qu'elle soit exercée dans les délais de la loi; sinon il y a déchéance.

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Art. 5. Dans tous les cas, l'acheteur, à peine d'être non recevable, sera tenu de provoquer, dans les délais de l'art. 3, la nomination d'experts chargés de dresser procès-verbal; la requête sera présentée au juge de paix du lieu où se trouvera l'animal.

Ce juge nommera immédiatement, suivant l'exigence des cas, un ou trois experts, qui devront opérer dans le plus bref délai.

Observations. Cet article est important en ce qu'il trace les formalités à remplir par l'acheteur qui veut exercer une action rédhibitoire; mais, du reste, il ne présente, dans son application, aucune difficulté.

La disposition est très-simple. La loi veut que l'acheteur présente requête au juge de paix du lieu où se trouve l'animal, et qu'il provoque la nomination d'experts chargés de constater l'existence du vice rédhibitoire.

La requête doit être présentée dans les délais de l'art. 3, c'est-à-dire dans les 9 ou 30 jours de la vente ou de la livraison, suivant les distinctions énoncées plus haut : ce délai n'est pas susceptible d'augmentation à raison des distances.

Le juge de paix doit répondre la requête immédiatement. Il désigné, par son ordonnance, les experts qui doivent visiter l'animal.

La loi ne dit pas que les experts dresseront leur procès-verbal dans le délai de l'art. 3; mais elle leur enjoint de procéder dans le plus bref délai. Il est très-important en effet que le vice rédhibitoire soit constaté sans le moindre retard : autrement l'acheteur pourrait facilement éluder la loi.

Quel que soit le nombre des experts requis par le demandeur, le juge de paix est libre d'en nommer un seul ou d'en nommer trois, suivant l'exigence des cas. C'est une dérogation à l'art. 303 C. P. C., qui veut que le juge désigne toujours trois experts, à moins que les parties ne consentent qu'il soit procédé par un seul; mais c'est une dérogation très-sage, car, dans beaucoup de cas, la nomination de trois experts entraînerait des frais hors de proportion avec la valeur de l'objet en litige. Le législateur ne pouvait mieux faire que de s'en référer à cet égard à l'appréciation du juge.

On a critiqué la loi en ce qu'elle n'avait pas exigé que la présentation de la requête eût date certaine; mais ce reproche est peu fondé, car, l'ordonnance devant être rendue immédiatement, il est évident que la date de cette ordonnance fixera la date de la présentation de la requête, et servira de point de départ pour la computation du délai.

Il résulte des explications données aux Chambres par M. MARTIN du Nord, que les experts sont assujettis à la prestation du serment; que leur rapport qu'ils présentent au juge de paix doit être taxé par lui et remis en minute à la partie qui l'a requis, et qu'il ne doit être notifié à la partie poursuivie que lorsqu'elle est assignée en nullité de la vente ou de l'échange. On peut regretter que la loi ne se soit pas expliquée sur tous ces points : quelle

que soit l'autorité des paroles du ministre, peut-être s'élèvera-t-il dans la pratique des difficultés qu'il eût été facile de prévenir.

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Art. 6. La demande sera dispensée du préliminaire de conciliation, et l'affaire instruite et jugée comme matière sommaire.

Observations. Cet article était inutile, car, d'une part, l'art. 49 C. P. C. dispense de la conciliation les demandes qui requièrent célérité, et, de l'autre, l'art. 404 range expressément les demandes de cette nature dans la classe des matières sommaires. - Ajoutez que le plus souvent l'affaire sera de la compétence du juge de paix ou du tribunal de commerce, et que, dans ces deux cas, la dispense de conciliation et l'instruction sommaire sont de droit.

La loi ne trace du reste aucune règle particulière relativement à la juridiction, à la compétence et à la procedure, lors même qu'il s'agit d'actions récursoires qu'occasionnent trop souvent les ventes successives. La conséquence qu'il faut tirer de son silence, c'est qu'elle se réfère aux règles du droit commun. C'est ce qui résulte d'ailleurs des paroles du ministre du commerce et de l'exposé des motifs.

Art. 7.Si, pendant la durée des délais fixés par l'art. 3, l'animal vient à périr, le vendeur ne sera pas tenu de la garantie, à moins que T'acheteur ne prouve que la perte de l'animal provient de l'une des maladies spécifiées dans l'art. 1er.

Observations. -Cet article modifie l'art. 1647 C. C., en ce qu'il dispense le vendeur de la garantie, lorsque l'animal vendu a péri dans les délais de l'action rédhibitoire, à moins que l'acheteur ne prouve que la perte de l'animal provient de l'une des maladies spécifiées dans l'art. 1or. Dans ce cas, l'acheteur n'est pas dispensé du procès-verbal d'expertise exigé par l'art. 5.

Si l'animal avait péri par suite de maladies contagieuses qui ne consti tuent par des vices rédhibitoires, il ne faut pas croire que l'acheteur serait privé de toute action contre son vendeur. — Non, sans doute. A la vérité il n'aurait pas l'action qui lui est ouverte, dans des cas déterminés, par l'art. 1er de la présente loi, mais il aurait contre son vendeur une action en dommages-intérêts.-Telle est l'opinion émise dans le cours de la discussion par MM. LHERBette et Gillon.

Art. 8. Le vendeur sera dispensé de la garantie résultant de la morve et du farcin pour le cheval, l'âne et le mulet, et de la clavelée pour l'espèce ovine, s'il prouve que l'animal, depuis la livraison, a été mis en contact avec des animaux atteints de ces maladies.

Du 20 mai 1838.

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Les avoués ont-ils, concurremment avec les huissiers, caractère pour faire et certifier les copies de pièces signifiées en téte des exploits par ces derniers?

Quoique cette question soit loin d'offrir la même importance que celle sur le droit de plaidoirie, elle n'en a pas moins soulevé de longues controverses et divisé les Cours et les tribunaux. Les art. 28, 29 et 72 du décret du 16 février 1807 contiennent, à notre avis, les éléments nécessaires à la solution de cette difficulté. Les deux premiers, placés sous la rubrique des huissiers, contiennent les dispositions suivantes : Art. 28: « Pour les copies de pièces, etc., le droit de copie de toute espèce de pièces et jugements appartiendra à l'avoué quand les copies de pièces seront faites par lui. » L'art. 29, après avoir fait l'énumération d'une foule d'actes du ministère d'huissier, et après avoir déterminé l'émolument attaché à ces actes, se termine

ainsi : «< Indépendamment des copies de pièces qui n'auraient pas été faites par les avoués et qui seront taxées comme il a été dit ci-dessus. >>

L'art. 72, placé sous le titre des avoués, après avoir attribué à ces derniers l'émolument exclusif résultant des copies de pièces qu'ils signifient en tête des actes de leur ministère, reproduit encore presque textuellement la disposition de l'article 28, en ces termes : « Les copies de tous actes ou jugements qui seront signifiés avec les exploits des huissiers appartiendront à l'avoué, si elles ont été faites par lui. »

D'après ces textes, le décret ne semblait donner naissance à aucun doute sur la solution affirmative de la question posée, puisque, d'une part, le droit paraît résulter uniquement du fait de la certification de la copie; que, de l'autre, ce droit est général et s'applique à toutes les copies, sans exception. Cette opinion est consacrée par plusieurs arrêts. (Paris, 9 février 1833. Nancy, 3 janvier 1833.)

D'autres Cours royales et la Cour de Cassation se sont rangées à l'opinion contraire en se fondant sur des raisons qui sont toutes résumées dans un arrêt de cette dernière Cour, dont voici le texte : « Attendu que, d'après un principe inhérent à la constitution même des choses, l'accessoire suit la nature du principal; que, par une conséquence de ce principe, le droit de

(1) Cette dissertation, comme celle qui a été insérée au commencement du t. 54, est l'ouvrage de M. GLANDAZ, ancien président de la Chambre des avoués.

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