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<< Trop souvent il arrive alors que le filon ne répond pas aux espérances qu'on avait conçues, et comme d'autre part, il faut toujours un temps assez long pour Ouvrir une mine et la développer, les capitaux viennent à manquer. Aussi, un nombre considérable de moulins reste sans emploi. Il faut avoir parcouru les régions minières des États-Unis pour se faire une idée de la quantité extraordinaire de moulins à or et à argent qui restent ainsi à l'abandon dans les solitudes du FarWest. >> (1)

J'ai constaté de mes yeux les mêmes effets, occasionnés par les mêmes causes, dans les plaines glacées de la Sibérie. J'en trouve un nouvel exemple sous le ciel brûlant de la Guyane. Cette erreur s'explique, indépendamment des causes si clairement mises en évidence par Cumenge et Fuchs, par l'état d'emballement que cause la découverte de quartz aurifères à teneurs élevées. On désire arriver au plus vite au moment où on sera en mesure de recueillir le métal précieux, ce qui empêche d'apprécier sainement les circonstances défavorables qui peuvent se présenter.

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L'or "invisible". Dans le cas que je signale en Guyane, il y a une circonstance aggravante: les travaux miniers proprement dits furent conduits de telle façon, qu'on dédaignait systématiquement toutes les galeries où se rencontrait du quartz contenant des mouches d'or visible. Le mot d'ordre de la direction technique de cette mine, était d'abandonner les avancements dans lesquels le quartz présentait des traces d'or visible pour se cantonner sur ceux qui donnaient du quartz à or

(1). CUMENGE et FUCHS, Encyclopédie chimique. Tome V. - L'Or, Fage 134.

invisible. Ces derniers étaient trop pauvres pour être broyés avec profit.

Cette histoire, qui est légendaire à Cayenne, m'avait paru suspecte comme toutes celles qui ont cours sur les mines malades ou abandonnées : quartiers riches murés ou cachés par un maître-mineur remercié, puits inondés par malveillance et autres couleurs auxquelles un Ingénieur ayant de l'expérience s'est trouvé maintes fois aux prises dans sa carrière. Pourtant, dans le cas actuel, le fait n'est pas niable. Il a même été imprimé dans un ouvrage, exposant tout au long la théorie de l'or invisible seul intéressant. J'avoue que pour ma part, je ne fais aucune différence entre l'or visible et l'or invisible; ce qui m'importe avant tout, c'est qu'il y en ait en quantité payante!

En outre, on doit s'attendre à ne trouver de l'or natif que dans le voisinage des affleurements. En profondeur, on le rencontrera très probablement sous forme d'association avec la pyrite ou avec le tellure, conformément d'ailleurs à la loi générale qui régit les mines d'or.

Adieu-Vat. Le filon d'Adieu-Vat, sur lequel la Compagnie de Saint-Elie a entrepris, depuis dix huit mois environ, des travaux sérieux, est situé dans le bassin de Sinnamary, juste à l'embranchement d'un des principaux affluents de ce cours d'eau, nommé le Courcibo. Pendant la saison des hautes eaux, des chaloupes à vapeur fluviales, remorquant des chalands de cinq à six tonnes, peuvent venir débarquer leurs marchandises à trois kilomètres environ du puits en fonçage. C'est en grande partie à ces facilités exceptionnelles au point de vue des moyens de transport, qu'est dû le succès de cette entreprise.

Les travaux commencés au début de 1900, consistent

dans un puits incliné à 70° environ sur l'horizontale, suivant la pente du filon. Ce dernier, connu déja par suite des travaux dont j'ai résumé la malencontreuse odyssée, avait été recoupé, après la liquidation de la première affaire, par les soins persévérants de M. Duvigneau, un des administrateurs de la Compagnie de Saint-Élie, connaissant de longue date pour y avoir fait des séjours prolongés, la Guyane et ses ressources minières.

Ce percement d'un travers-banc dans la couche dure, non décomposée, est un enseignement précieux à retenir. En Guyane, tout le pays est recouvert d'un épais manteau de latérite (roche décomposée superficielle) provenant de l'altération prolongée des éboulis ou même de la roche primitive formant l'ossature de la contrée. Dans ces conditions, les affleurements des filons se trouvent profondément bouleversés, et il est très difficile de saisir le gîte " par les cheveux" comme cela se pratique généralement dans les pays où les affleurements sont encaissés dans la roche vive, formant leurs épontes naturelles. Cette roche décomposée superficielle, composée d'argile ferrugineuse ou même d'un vrai minerai de fer est commune à toutes les Guyanes; au Vénézuela et au Brésil, elle s'appelle le cascajo; à Cayenne, c'est la Roche à Ravets. Quelle que soit sa dénomination, elle a l'inconvénient commun à tous les terrains argileux, de manquer de cohésion et les galeries qu'on pratique dans son sein sont mises rapidement hors d'état. Au bout de peu de mois, pendant lesquels on s'égare sur des blocs de quartz ne présentant aucune continuité réelle, on lâche les travaux et au bout d'un an la brousse a tout recouvert. C'est l'histoire uniforme de toutes les recherches pour filons que j'ai visitées dans la Colonie,

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