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saient l'ancien système européen. La Russie et la France demandaient conjointement que les stipulations de la paix de Lunéville, relatives aux indemnités, fussent accomplies, et s'offraient comme médiatrices dans cette importante dis

cussion.

Une députation fut nommée en 1802. Mais déjà des traités | particuliers avaient été signés entre quelques princes d'Empire et la république. Déjà des territoires dont la France garantissait la cession étaient occupés par des Prussiens et par des Bavarois. Les séances de la députation ne semblaient donc faites que pour donner quelque ombre de légalité, aux yeux des Allemands, à l'œuvre d'une force étrangère. Alors commença cette révolution dès long-temps préparée. Les indemnités furent réglées dans l'intérêt des médiateurs, et surtout pour enlever à l'Autriche toute influence en Empire. Le clergé fut dépouillé de ses possessions souveraines, et cessa d'être membre du corps germanique; le nombre des villes libres fut réduit à six; l'autorité de la Diète et des tribunaux souverains fut ébranlée; la noblesse immédiate perdit toute son influence par les sécularisations. Libertés générales de l'Empire, institutions particulières des Etats, tout fut renversé par le recès. La désorganisation fut complète.

La France tira de puissans secours de cette désorganisation, même quand une troisième coalition se fut formée contre son influence militaire. Des princes élevés à l'électorat, et dont les territoires avaient été agrandis, oublièrent qu'ils étaient Germains, et entrèrent franchement dans le système politique d'un allié puissant. Ils aidèrent le nouvel empereur des Francs à vaincre celui qui portait encore le titre de chef du Saint-Empire romain, et à obtenir la paix de Presbourg, en 1805, qui avança de quelques pas la dissolution en instituant deux royautés nouvelles. Ce qui restait à faire suivit de près la conclusion de ce traité. Quatorze princes déclarèrent, le 1 août, à la diète de Ratisbonne, qu'ils / cessaient de faire partie du corps germanique. François II

abdiqua le 6 la couronne impériale d'Allemagne. L'Empire n'existait plus.

Alors naquit cetac te fameux de la CONFÉDÉRATION DU RHIN, au moyen duquel Napoléon, sous le titre de protecteur, asservit les princes allemands qu'il avait détachés de l'ancien Empire; acte qui pouvait et devait être la réorganisation de l'Allemagne, autant que le rétablissement de l'équilibre continental, et qui ne servit qu'à voiler tous les excès d'un génie conquérant et despotique.

Quelques lignes suffisent maintenant pour terminer cette rapide esquisse; car c'est ailleurs que nous examinerons la situation politique des Etats allemands sous le régime du pro. tectorat. C'était en Allemagne que Napoléon avait fondé sa prépondérance sur les affaires de l'Europe; ce fut en Allemagne qu'elle fut détruite. La haine fermentait dans le cœur de ces princes réduits au rôle de commandans militaires, de ces peuples dépouillés de toutes leurs libertés. Au jour où la victoire déserta ses drapeaux, il fut abandonné, il succomba, et avec lui cet esprit révolutionnaire qui avait bouleversé le continent. Un ordre nouveau dut naître du sein même des victoires de l'Europe coalisée. Tel fut le but des traités et des congrès qui ont naguère fondé la CONFÉDÉRATION GERMANIQUE. A-t-on parfaitement compris la situation dans laquelle la révolution avait laissé l'Europe? A-t-on toujours su distinguer de son esprit de destruction ce respectable esprit des antiques libertés nationales, sur lesquelles doit actuellement reposer la société? La morale a-t-elle été, comme on en avait manifesté l'intention, replacée dans la politique, et le corps germanique offre-t-il cette grande barrière nécessaire pour arrêter les envahissemens possibles du Nord ou du Midi? Ce sont des questions que nous ne traiterons pas, parce que des intentions droites et pures ne suffisent peut-être pas pour les décider, et qu'elles sont du domaine d'un avenir dans lequel nous n'avons pas promis de lire.

CONFÉDÉRATION DU RHIN.

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TRAITÉ DE CONFÉDÉRATION DES ÉTATS DU RHIN,

Signé à Paris le 12 juillet 1806, et ratifié à Saint-Cloud le 19 juillet.

S. M. l'empereur des Français, roi d'Italie, d'une part; et de l'autre part, LL. MM. les rois de Bavière et de Wurtemberg, et LL. AA, SS. les électeurs archichancelier, et de Bade, le duc de Berg et de Clèves, le landgrave de HesseDarmstadt, les princes de Nassau-Usingen et Nassau-Weilbourg, les princes de Hohenzollern Hechingen, les princes de Salm-Salm, et Salm-Kirbourg, le prince d'Isenbourg-Birstein, le duc d'Aremberg, le prince de Lichtenstein, et le comté de la Leyen -voulant par des stipulations convenables assurer la paix intérieure et extérieure du midi de l'Allemagne, pour laquelle l'expérience a prouvé depuis long-temps et tout récemment encore, que la constitution germanique ne pouvait plus offrir aucune sorte de garantie, ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir:

(Suivent les noms des plénipotentiaires.)

Art. 1er. Les Etats de LL. MM. les rois de Bavière et de Wurtemberg, de LL. AA. SS. les électeurs archichancelier, et de Bade, le duc de Berg et de Clèves, le Landgrave de HesseDarmstadt, les princes de Nassau-Usingen et Nassau-Weilbourg, les princes de Hohenzollern-Hechingen et Hohenzollern - Sigmaringen, les princes de Salm-Salm et de SalmKirbourg, le prince d'Isenbourg-Birstein, le duc d'Aremberg et le prince de Lichtenstein et le comte de la Leyen seront séparés à perpétuité du territoire de l'empire germanique, et unis entre eux par une confédération particulière, sous le nom d'États confédérés du Rhin,

2. Toute loi de l'empire germanique qui a pu jusqu'à présent concerner et obliger LL. MM. et LL. AA. SS. les rois, princes et le comte, dénommés en l'article précédent, leurs sujets et leurs Etats, ou parties d'iceux, sera à l'avenir relativement à LL dites MM. et AA. et audit comte, à leurs Etats 'et sujets respectifs nulle et de nul effet, sauf néanmoins les droits acquis à des créanciers et pensionnaires par le recès de 1803, et les dispositions de l'article 39 dudit recès, relatives à l'octroi de navigation du Rhin, lesquelles continueront d'être exécutées suivant leur forme et teneur.

3. Chacun des rois et princes confédérés renoncera à ceux de ses titres qui expriment des rapports quelconques avec l'empire germanique; le premier août prochain, il fera notifier à la diète sa séparation d'avec l'Empire.

4. S. A. S. l'électeur archichancelier prendra les titres de prince primat et altesse éminentissime.

Le titre de prince primat n'emporte avec lui aucune prérogative contraire à la plénitude de la souveraineté dont chacun des confédérés doit jouir.

5. LL. AA. SS. l'électeur de Bade, le duc de Berg et de Clèves et le landgrave de Hesse-Damstadt prendront le titre de grand-duc. Ils jouiront des droits, honneurs et prérogatives attachés à la dignité royale

Le rang et la prééminence entre eux sont et demeureront fixés conformément à l'ordre dans lequel ils sont nommés au présent article.

Le chef de la maison de Nassau prendra le titre de duc, et le comte de la Leyen le titre de prince.

6. Les intérêts communs des Etats confédérés seront traités dans une diète, dont le siége sera à Francfort, et qui sera divisée en deux colléges, savoir le collége des rois et le collége des princes (1).

7. Les princes devront nécessairement être indépendans de toute puissance étrangère à la Confédération, et ne pourront conséquemment prendre du service d'aucun genre, que dans les Etats confédérés, ou alliés à la Confédération. Ceux qui, étant déjà au service d'autres puissances, voudront y rester, seront tenus de faire passer leurs principautés sur la tête d'un de leurs enfans.

(1) Cette Diète ne s'est jamais rassemblée.

8. S'il arrivait qu'un desdits princes voulût aliéner en tout, ou en partie sa souveraineté, il ne le pourra faire qu'en faveur de l'un des Etats confédérés.

9. Toutes les contestations qui s'élèveront entre les Etats confédérés seront décidées par la Diète de Francfort.

10. La Diète sera présidée par S. A. E. le prince primat; et lorsqu'un des deux colleges seulement aura à délibérer sur queique affaire, S. A. E. présidera le collége des rois, et le duc de Nassau le collége des princes.

11. Les époques où soit la Diète, soit un des colléges séparément, devra s'assembler, le mode de leur convocation, les objets qui devront être soumis à leurs délibérations, la manière de former les résolutions et de les faire exécuter, seront déterminés par un statut fondamental, que S. A. E. le prince primat proposera dans un délai d'un mois, après la notification faite à Ratisbonne, et qui devra être approuvé par les Etats confédérés; le même statut fondamental fixera définitivement le rang entre les membres du collège des princes (1).

12. S. M. l'Empereur des Français sera proclamé protecteur de la Confédération, et, en cette qualité, au décès de chaque prince primat, il en nommera le successeur.

13. S. M. le roi de Bavière cède à S. M. le roi de Wurtemberg la seigneurie de Wiesensteig, et renonce aux droits, qu'à raison de la préfecture de Bourgau, il pourrait avoir ou prétendre sur l'abbaye de Wiblingen.

14. S. M. le roi de Wurtemberg cède à S. A. S. le grandduc de Bade, le comté de Bendorf, les villes de Bruhnlingen et de Villingen avec la partie du territoire de cette dernière, située à la droite de la Brigach et la ville de Tuttlingen, avec les dépendances du bailliage de ce nom, situées à la droite du Danube.

15. S. A. S. le grand-duc de Bade cède à S. M. le roi de Wurtemberg la ville (et le territoire) de Biberach avec ses dépendances.

16. S. A. S. le duc de Nassau cède à S. A. I. le grand-duc de Berg la ville de Deutz ou Duitz avec son territoire, la

(1) Cet article est resté sans exécution, et le statut fondamental n'a jamais été dressé. Voir ci-après la note circulaire adressée le 13 septembre 1806, par le Prince Primat aux rois et princes formant la Confédération Rhénane, page 91.

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