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que vous aviez l'intention de récompenser les efforts que j'ai faits à la tribune de l'Assemblée législative de mon pays pour amener et pour assurer le rétablissement de l'autorité pontificale à Rome.

La justice m'oblige à ne me réserver qu'une très-faible part dans votre reconnaissance. Elle doit se reporter sur bien d'autres encore que sur moi. C'est à la prudente persévérance de M. de Falloux et de ses collègues du ministère; c'est à M. Thiers, dont l'éloquent et courageux rapport a tant fait pour éclairer la question; c'est à la majorité énergiquement résolue de l'Assemblée législative; c'est au Président de la république, fidèle et loyal interprète des vœux du pays; c'est en un mot à l'union du grand parti de l'ordre en France que Rome a dû le bonheur de revoir le Souverain Pontife dans la pleine possession de sa liberté et de son autorité.

Puisse l'avenir répondre à ce passé si heureux puisse la ville qui me fait aujourd'hui un si grand honneur offrir longtemps le spectacle consolant qu'elle présente en ce moment à l'Europe, et trouver toujours dans l'amitié tutélaire de la France une garantie de plus pour l'autorité paternelle de la papauté !

Permettez-moi, prince, de vous dire en terminant la satisfaction que j'éprouve à pouvoir exprimer ces sentiments à un personnage qui porte si dignement ce grand nom d'Odescalchi, consacré dans le cœur de tous les catholiques par une sainte mémoire, et veuillez agréer pour vous et vos honorables collègues l'assurance de la gratitude et de la haute considération avec lesquelles j'ai l'honneur d'être, de Votre Excellence, le très-humble et très-obligé serviteur,

CH. DE MONTALEMBERT.

CONFLIT

ENTRE

L'AUTRICHE ET LA PRUSSE

25 novembre 1850.

Le 16 novembre 1850, un décret du Président de la République appela sous les drapeaux 40,000 jeunes soldats de la classe de 1849. Le 19 du même mois, un projet de loi portant demande d'un crédit extraordinaire de 8,460,000 fr. pour dépenses non prévues au budget du ministère de la guerre fut présenté à l'Assemblée. Ces mesures étaient motivées par les complications politiques qui menaçaient alors la tranquillité de l'Allemagne, à la suite de la lutte qui semblait devoir éclater entre l'Autriche et la Prusse, et rendaient nécessaire la présence d'un effectif plus considérable sur nos frontières. Le message présenté le 12 novembre par le Président de la République annonçait l'intention de garder la plus stricte neutralité dans les affaires d'Allemagne. Toutefois, quelques représentants particulièrement dévoués au président paraissaient disposés à s'associer à la politique prussienne. La plupart des chefs de la majorité furent d'avis que l'Assemblée devait, en votant le crédit demandé, se prononcer en faveur de la neutralité, et en expliquer le véritable sens. Le 25 novembre, les bureaux furent réunis pour nommer une commission chargée de l'examen du projet de loi.

L'opinion exprimée par M. de Montalembert dans le 14 bureau se trouve reproduite dans les journaux du lendemain ainsi qu'il suit:

M. de Montalembert pense qu'il faut voter le crédit demandé, mais que le vote doit être accompagné d'un rapport qui fixe avec énergie et précision la pensée de l'Assemblée, en ce qui

touche à la politique extérieure et aux événements d'Allemagne. Cette pensée est celle de la neutralité absolue quant à présent. Il faut la proclamer très-haut, afin de rassurer les esprits qui commencent à s'inquiéter au dedans, et afin de pacifier, s'il en est encore temps, les ambitions et les imaginations qui s'agitent au dehors. Il est certain, comme l'a fait très-justement observer un orateur, que l'intervention des Assemblées dans la diplomatie et dans la conduite des affaires extérieures offre de grands inconvénients; mais, outre que cette habitude est invétérée chez nous depuis l'introduction du gouvernement constitutionnel, la nouvelle constitution impose au pouvoir législatif, en ce qui touche aux éventualités de paix et de guerre, des devoirs qu'il est indispensable de remplir. La neutralité est à la fois un intérêt et un devoir pour la France. Il est des événements qui pourraient l'en faire sortir; chacun les comprend et chacun les prévoit; il n'est pas besoin d'annoncer les cas où la France tirerait l'épée. L'histoire du pays, le patriotisme de tous les Français, l'intelligence de tous les hommes politiques de l'Europe, suffisent pour dissiper d'avance toute incertitude sur ce point. Dans l'état actuel des choses, l'Assemblée n'a point à se prononcer entre les deux partis qui semblent vouloir entrer en lutte au delà du Rhin. S'il fallait absolument choisir, l'orateur pense qu'il faudrait incliner du côté de l'Autriche, malgré la raideur et la précipitation qu'elle a peut-être montrées dans le cours des négociations. Les préférences et les sympathies des amis de l'ordre, de la paix et de la vraie liberté dans toute l'Europe paraissent être aujourd'hui pour l'Autriche. Mais, encore une fois, la France n'a pas en ce moment un choix à faire; elle n'a qu'à manifester une neutralité vigilante et digne. L'orateur ne saurait être suspect de malveillance ou de défiance à l'égard du pouvoir exécutif; il en est au contraire le défenseur persévérant et sincère. Mais il croit le servir et le fortifier en lui indiquant, par une démonstration de l'Assemblée, la voie où la politique française doit rester. Le message du Président a d'ailleurs proclamé cette neutralité. Si l'on a fort bien fait de renoncer aux discussions des adresses qui servaient autrefois de réponse aux communi

cations du pouvoir exécutif, on doit aujourd'hui se féliciter d'avoir une occasion toute naturelle de répondre au passage si applaudi du message sur la politique extérieure. S'il faut, dit en terminant l'orateur, s'il faut un jour tirer l'épée et se résigner à la guerre, j'estime et j'espère que cette guerre étrangère sera la même que celle que nous faisons à l'intérieur, la guerre de l'ordre contre le désordre, et de la société contre la révolution.

M. de Montalembert fut nommé membre de la commission. Le 30 novembre, le rapport de cette commission fut présenté par M. de Rémusat. Il concluait à l'adoption du projet de loi, et demandait à l'Assemblée d'adopter après la clôture de la discussion générale la résolution suivante :

<< L'Assemblée nationale, convaincue que dans les questions qui divisent en ce moment l'Allemagne la politique de neutralité, telle qu'elle est exprimée et définie dans le message du Président de la République, en date du 12 novembre dernier, est la seule qui convienne à la France, passe à la discussion des articles. »

La résolution fut votée par 478 voix contre 207, et l'ensemble du projet par 466 voix contre 213.

RAPPORT

SUR LA PROPOSITION DE M. D'OLIVIER

RELATIVE A

L'OBSERVATION DES DIMANCHES ET JOURS FERIES

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du 10 décembre 1850.

L'Assemblée nationale, dans sa séance du 30 mai 1850, avait, sur le rapport de M. Ferré des Ferris, au nom de la deuxième commission d'initiative parlementaire, pris en considération une proposition de M. d'Olivier, relative à l'observation des dimanches et jours fériés. Cette proposition fut renvoyée à l'examen d'une commission au nom de laquelle M. de Montalembert présenta le rapport suivant, dont la lecture fut demandée dans la séance du 10 décembre 1850:

MESSIEURS,

Nous venons soumettre à vos délibérations une mesure qui intéresse au plus haut point la dignité du peuple français, sa liberté morale et la véritable sécurité du corps social! UNE VOIX A GAUCHE. On n'entend pas!

M. LE PRÉSIDENT, à l'orateur. Lisez comme vous parlez, monsieur de Montalembert, on vous entendra bien.

M. LE RAPPORTEUR, continuant. Elle touche aux questions les plus élevées qu'il soit donné aux individus ou aux

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