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avons

de notre côté, éprouvé peu de pertes. Si l'on joint à cela les désertions et les morts, on peut calculer que l'armée autrichienne est déjà réduite de moitié.

Tant de dévouement de la part du soldat, tant de prenves touchantes d'amour qu'il donne à l'Empereur, et tant de si hauts faits, mériteront des détails plus circonstanciés. Ils seront donnés du moment que ces premières opérations de la campagne seront terminées, et que l'on saura définitivement comment les débris de l'armée autrichienne se tireront de Biberach, et la position qu'ils prendront.

Au combat d'Elchingen, qui est un des plus beaux faits militaires qu'on puisse citer, se sont distingués le 18e régiment de dragons et son colonel Lefevre, le colonel du 10e de chasseurs, Colbert, qui a eu un cheval tué sous lui, le colonel Lajonquières, du 76e, et un grand nombre d'autres officiers.

L'Empereur a aujourd'hui son quartier-général dans l'abbaye d'Elchingen.

VIe BULLETIN.

Elchingen, le 26 vendém. an 14 ( 18 octobre). ;

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eussent

La journée d'Ulm a été une des plus belles journées de l'histoire de France. La capitulation de la place est ci-jointe, ainsi que l'état des régimens qui y sont enfermés. L'Empereur eût pu l'enlever défendus par d'assaut; mais vingt mille hommes des ouvrages et par des fossés pleins d'eau opposé de la résistance; et le vif desir de Sa Majesté était d'épargner le sang. Le général Mack général en chef de l'armée, était dans la ville: c'est la destinée des généraux opposés à l'Empereur, d'être pris dans des places. On se souvient qu'après

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les

les belles manoeuvres de la Brenta, le vieux feldmaréchal Wurmser fut fait prisonnier dans Mantoue; Mélas le fut dans Alexandrie, Mack l'est dans Ulm.

L'armée autrichienne était une des plus belles qu'ait eues l'Autriche: elle se composait de quatorze régimens d'infanterie, formant l'armée dite de Bavière, de treize régimens de l'armée du Tyrol, et de cinq régimens venus en poste d'Italie, faisant trente-deux régimens d'infanterie, et de quinze régimens de cavalerie.

L'Empereur avait placé l'armée du prince Ferdinand dans la même situation où il plaça calle de Mélas. Après avoir hésité long-temps, Mélas prit la noble résolution de passer sur le corps de l'armée. française; ce qui donna lieu à la bataille de Marengo. Mack a pris un autre parti. Ulm est l'abou tissant d'un grand nombre de routes: il a conçu le projet de faire échapper ses divisions par chacune de ces routes et de les réunir en Tyrol et en Bohême. Les divisions Hohenzollern et Werneck ont débouché par Heydenheim. Une petite division a débouché par Memmingen. Mais l'Empereur, dès le 20, accourut d'Augsbourg devant Ulm, déconcerta sur-le-champ les projets de l'ennemi, et fit enlever le pont et la position d'Elckingen; ce qui remédia à tout.

Le maréchal Sonlt, après avoir pris Memmingen, s'était mis à la poursuite des autres colonnes. Enfin, il ne restait plus au prince Ferdinand d'autre ressource que de se laisser enfermer dans Ulm, ou d'essayer, par des sentiers, de rejoindre la division de Hohenzollern: ce prince a pris ce dernier parti; il s'est rendu à Aalen avec quatre escadrons de cavalerie.

Cependant le prince Murat était à la poursuite du prince Ferdinand. La division Werneck a voulu l'arrêter à Langenan ; il lui a fait trois mille prisonniers, dont un officier-général, et lui a enlevé deux

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drapeaux. Tandis qu'il manœuvrait par sa droite à Heydenheim, le maréchal Lannes marchait par Aalen et Nordlingen. La marche de la division ennemie était embarrassée par 500 chariots, et affaiblie par le combat de Langenau. A ce combat le prince Murat a été très-satisfait du général Klein. Le 20e régiment de dragons, le 9e d'infanterie légère et les chasseurs de la garde impériale, se sont particulièrement distingués. L'aide-de-camp Brunet a montré beaucoup de bravoure.

Ce combat n'a point retardé la marche du prince Murat. Il s'est porté rapidement sur Neresheim; et le 25 à cinq heures du soir, il est arrivé devant cette position. La division de dragons du général Klein a chargé l'ennemi. Deux drapeaux, un officier- général et mille hommes ont été de nouveau pris au combat de Neresheim. Le prince Ferdinand et sept de ses généraux n'ont eu que le temps de monter à cheval. On a trouvé leur dîner servi. Depuis deux jours, ils n'ont aucun point pour se reposer. Il paraît que le prince Ferdinand ne pourra se soustraire à l'armée française qu'en se déguisant, ou en s'enfuyant avec quelques escadrons par quelque route détournée d'Allemagne.

L'Empereur traversant une foule de prisonniers ennemis, un colonel autrichien témoignait son étonnement de voir l'Empereur des Français trempé couvert de boue, autant et plus fatigué que le dernier tambour de l'armée. Un de ses aides-de-camp Jui ayant expliqué ce que disait l'officier autrichien l'Empereur lui fit répondre : « Votre maître a voulu me faire ressouvenir que j'étais un soldat; j'espère qu'il conviendra que le trône et la pourpre impériale ne m'ont pas fait oublier mon premier

métier. >>

Le spectacle que l'armée offrait dans la journée du 23, était vraiment intéressant. Depuis deux jours la pluie tombait à seaux, tout le monde était trempé; le soldat n'avait point eu de distributions; il était

dans la boue jusqu'aux genoux; mais la vue de l'Empereur lui rendait la gaieté, et du moment qu'il apercevait des colonnes entières dans le même état, il faisait retentir le cri de vive l'Empereur!

On rapporte aussi que l'Empereur répondit aux officiers qui l'entouraient et qui admiraient com ment, dans le moment le plus pénible, les soldats oublient toutes les privations et ne se montrent sensibles qu'au plaisir de le voir : «Ils ont raison car c'est pour épargner leur sang que je leur fais essuyer de si grandes fatigues. >>

L'Empereur, lorsque l'armée occupait les hauteurs qui dominent Ulm, fit appeler le prince de Lichtenstein, général-major, enfermé dans cette place, pour lui faire connaître qu'il desirait qu'elle capitulat, lui disant que s'il la prenait d'assaut, il serait obligé de faire ce qu'il avait fait à Jaffa, où la garnison fut passée au fil de l'épée ; que c'était le triste droit de la guerre; qu'il voulait qu'on lui épargnât, et à la brave nation autrichienne, la nécessité d'un acte aussi effrayant ; que la place n'était pas tenable; qu'elle devait donc se rendre. Le prince insistait pour que les officiers et soldats eussent la la faculté de retourner en Autriche. « Je l'accorde aux officiers, et non aux soldats, a répondu l'Empereur; car qui me garantira qu'on ne les fera point servir de nouveau? » Puis, après avoir hésité un moment, il ajouta : «Eh bien, je me fie à la parole du prince Ferdinand. S'il est dans la place, je veux lui donner une preuve de mon estime, et je lui accorde ce que vous me demandez, espérant que la cour de Vienne ne démentira pas la parole d'un de ses princes. >> Sur ce que M. de Lichtenstein assura que le prince Ferdinand n'était point dans la place: « Alors je ne vois pas, dit l'Empereur, qui peut me garantir que les soldats que je vous renverrai ne serviront pas. »

Une brigade de 4,000 hommes occupe une porte de la ville d'Ulm.

et a

Dans la nuit du 24 au 25, il y a eu un ouragan terrible; le Danube est tout-à-fait débordé rompu la plus grande partie de ses ponts, ce qui nous gêne beaucoup pour nos subsistances.

Dans la journée du 23, le maréchal Bernadotte a poussé ses avant-postes jusqu'à Wasserbourg et Haag sur la chaussée de Braunau. Il a fait encore 4 à 500 prisonniers à l'ennemi, lui a enlevé un parc de 17 pièces d'artillerie de divers calibres; de sorte que, depuis son entrée à Munich, sans perdre un seul homme le maréchal Bernadotte a pris 1500 prisonniers, 19 pièces de canon, 200 chevaux et un grand nombre de bagages.

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L'Empereur a passé le Rhin le 9 vendémiaire, le Danube le 14 à cinq heures du matin, le Lech le même jour à trois heures après midi; ses troupes sont entrées à Munich le 20. Ses avant-postes sont arrivés sur l'Inn le 23; le même jour il était maître de Memmingen, et le 25 d'Ulm.

Il avait pris à l'ennemi aux combats de Wertingen, de Güntzbourg, d'Elchingen, aux journées de Memmingen et d'Ulm, et aux combats d'Albreck, de Langenau et de Neresheim, 40 mille hommes, tant infanterie que cavalerie, plus de 40 drapeaux, un très-grand nombre de pièces de canon, de bagages, de voitures, etc. et pour arriver à ces grands résultats, il n'avait fallu que des marches et des

manœuvres.

Dans ces combats partiels, les pertes de l'armée française ne se montent qu'à 500 morts et à 1,000 blessés. Aussi le soldat dit-il souvent: L'Empereur a trouvé une nouvelle méthode de faire la guerre ; il ne se sert que de nos jambes, et pas de nos baïonnettes. Les cinq sixièmes de l'armée n'ont pas tiré un coup de fusil, ce dont ils s'affligent; mais tous ont beaucoup marché, et ils redoublent de célérité quand ils ont l'espoir d'atteindre l'ennemi.

On peut faire en deux mots l'éloge de l'armée : elle est digne de son chef.

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