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leur échéance, sont plusieurs fois renouvelés. Au bout d'un certain temps, elle compte ses billets et se prétend libérée. Si le marchand n'a pas bien tenu ses écritures, s'il n'a pas exactement énoncé les sommes employées au remboursement des effets renouvelés, il peut être débouté de sa demande en payement, sur l'inspection de ses livres mal tenus.

Art. 13. «Les livres que les individus faisant le commerce sont obligés de tenir, et pour lesquels ils n'auront pas observé les formalités ci-dessus prescrites, ne pourront être représentés, ni faire foi en justice, au profit de ceux qui les auront tenus; sans préjudice de ce qui sera réglé au livre des Faillites et banqueroutes.»

Les livres dont il est ici parlé, sont le journal et le livre des inventaires. S'ils ne sont ni cotés ni paraphés, le commerçant ne peut les produire à l'appui de ses prétentions. Au contraire, ils peuvent être invoqués contre lui par ses adversaires; et c'est justice! Celui qui ne veut pas se conformer aux prescriptions de la loi, ne peut se plaindre qu'elle ne le protége pas, puisqu'il n'a rien fait pour mériter son appui.

En cas de faillite, si ses livres sont mal tenus, le commerçant pourra être déclaré en banqueroute simple, et condamné à la prison. S'il a oublié d'inscrire des

sommes reçues ou payées, il pourra être poursuivi pour banqueroute frauduleuse, et condamné aux travaux forcés à temps.

Art. 14. «La communication des livres et inventaires ne peut être ordonnée en justice que dans les affaires de succession, communauté, partage de société et en cas de faillite. »

Si, dans un but d'ordre public et de morale, la loi a exigé, de ceux qui font le commerce, des précautions qui sauvegardent, autant que possible, les intérêts des tiers, elle a voulu que la vie commerciale comme la vie privée, fût à l'abri de toutes recherches indiscrètes.

Elle a indiqué les trois cas uniques où les livres peuvent être compulsés, feuilletés, analysés; en toute autre occasion, le commerçant a le droit d'en refuser la communication. Une indiscrétion peut causer sa ruine en lui faisant perdre son crédit ; c'est en prévision de ce malheur que cet article a été édicté dans la loi.

Art. 15. « Dans le cours d'une contestation, la représentation des livres peut être ordonnée par le juge, ' même d'office, à l'effet d'en extraire ce qui concerne le différend. >>

Un tribunal, sans la volonté des partiés, peut ordonner la représentation des livres. Dans ce cas, le livre n'est pas remis au tribunal, mais simplement repré

senté. Le commerçant peut ne pas s'en dessaisir et envelopper sous cachet tout ce qui est étranger à l'article ou à la page que doit examiner le juge.

Art. 16. «En cas que les livres dont la représentation est offerte, requise ou ordonnée, soient dans des lieux éloignés du tribunal saisi de l'affaire, les juges peuvent adresser une commission rogatoire au tribunal de commerce du lieu, ou déléguer un juge de paix pour en prendre connaissance, dresser un procès-verbal du contenu et l'envoyer au tribunal saisi de l'affaire. »

Un commerçant de Paris réclame à son client, habitant Lyon, le solde de sa facture. Celui-ci prétend ne rien devoir. Le tribunal de commerce de Lyon charge celui de la Seine de déléguer un de ses membres pour compulser les livres du demandeur.

Le juge dresse un procès-verbal qui est envoyé au tribunal de Lyon. C'est ce qu'on appelle une commission rogatoire.

Art. 17. « Si la partie aux livres de laquelle on offre d'ajouter foi, refuse de les représenter, le juge peut déférer le serment à l'autre partie. »

Mon tailleur me réclame une facture que je prétends lui avoir payée. A l'appui de mon dire, je demande l'examen de ses livres; il s'y refuse; le juge peut me déférer le serment, quand j'ai juré que je ne dois

́rien, mon fournisseur est débouté de sa demande. Ce serment est appelé décisoire, parce qu'il termine et décide seul la contestation.

Telles sont les obligations imposées par la loi à tous les commerçants, tels sont les avantages qu'en retirent ceux qui s'y conforment et les inconvénients qui peuvent en résulter pour ceux qui les négligent.

Cependant, nous devons le dire, ceux qui remplissent les prescriptions que nous venons d'indiquer sont peu nombreux; et quoiqu'un plus grand nombre tienne ses livres avec régularité, et fasse tous les ans un inventaire, c'est encore la minorité parmi les patentés. Il est remarquable que les petits marchands et les fabricants croient particulièrement pouvoir s'en dispenser, parce que, disent-ils, ils font peu d'affaires ou qu'ils n'ont pas les capacités nécessaires. Ce raisonnement est faux de tout point; d'abord, ils doivent tenter d'agrandir leurs affaires; ensuite, il est facile de trouver des commis qui viennent le soir donner le temps nécessaire à la régularisation des écritures.

Nous insistons sur ce point, parce qu'il n'y a pas de résultat possible, de prospérité durable sans cette base de tout établissement.

Des maisons de commerce, des négociants mêmes, après avoir fait des affaires considérables qui auraient

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suffi à enrichir plusieurs personnes, ont souvent dû leur ruine, après de longues années commerciales, au manque d'ordre et de régularité dans la tenue des livres.

Voilà la cause qui généralement empêche l'ouvrier parvenu à la maîtrise d'arriver à la fortune.

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