de ces sortes de règlements et l'insuffisance des`experts. Et puis, les intérêts pécuniaires ne sont pas seuls atteints: le fabricant est blessé dans sa dignité professionnelle. Voilà un homme qui a fait des sacrifices pour apprendre un état; il l'exerce avec probité et intelligence, il jouit parmi ses collègues d'une réputation justement acquise; et un jour, lorsque cette probité et cette intelligence devront être appréciées et reconnues, il sera à la merci d'un expert étranger à son industrie, qui pourra lui dénier son talent et faire suspecter sa loyauté. Un tel état de choses ne peut plus durer; il est trop contraire aux sentiments de justice et de protection qui inspirent le gouvernement de l'Empereur dans tout ce qui intéresse les classes diverses des travailleurs. Mais, dira-t-on, si le règlement est mal fait, les tribunaux le redresseront? Erreur; cela se dit sans connaissance pratique de ce qui se passe ordinairement. Quand un tribunal a chargé un expert d'un règlement, c'est qu'il a confiance en lui; et, lorsque vous viendrez plaider contre son travail, à moins d'y opposer des erreurs matérielles, votre prétention ne sera pas accueillie: et cela se comprend, autrement la vérification serait inutile; non que nous voulions en rien diminuer le respect et la considération si bien dus à la magistrature, mais parce que nous sommes convaincu qu'en beaucoup d'occasions, les auxiliaires qu'elle emploie l'égarent au lieu de l'éclairer. Aussi, malgré ce que peuvent penser les esprits prévenus ou superficiels, nous ne cesserons de le répéter, parce que c'est pour nous une vérité qui ne peut pas supporter de discussion, pour tous les travaux dont les prix ne sont pas fixés par la SÉRIE DE PRIX; pour toutes les industries qui n'y figurent pas, le seul règlement possible est celui des chambres syndicales. Indépendamment de la sincérité de ses règlements, ce mode de procéder offrirait encore d'autres avantages. Les conciliations seraient plus communes. En 1856, sur cent soixante-six affaires renvoyées devant la chambre syndicale des tapissiers, cent dixhuit ont été conciliées. Les frais sont beaucoup moins considérables. Le chiffre des mémoires réglés s'est élevé à 408,456 fr. 10 cent. Il a été perçu pour droit de chambre 2,160 fr. 50 cent., soit 52 centimes 8/10 pour cent. Les honoraires des vérificateurs étant au moins de 2 1/2 pour cent, cela aurait fait 10,211 fr. 30 cent., ou une perte supportés par l'industrie de 8,050 fr. 80 cent. Enfin, les affaires reçoivent une solution beaucoup plus prompte. Sur les cent soixante-six affaires dont la chambre a eu à s'occuper, deux seulement n'étaient pas terminées au 1er février 1857. Mais, diront les intéressés à l'état de choses actuel, quel gage d'impartialité donnera aux acheteurs ce mode de règlement? Les corporations offrent toujours une somme de moralité plus grande que les individus. Réunis dans un but d'utilité générale ou de bien public, les hommes s'élèvent à la hauteur de leur mission; chacun est plus soucieux de conserver intacte la réputation du corps que de favoriser celui de ses membres qui s'écarte des principes de probité et de loyauté si essentiels au commerce; et, à moins de supposer que tout sentiment de justice et d'honneur soit éteint chez ceux qui se livrent à l'industrie, pourquoi seraient-ils privés des avantages accordés aux notaires, avoués, huissiers, commissaires-priseurs, agents de change, etc., qui ont des chambres disciplinaires, reconnues par l'autorité, faisant auprès des tribunaux le même office que les chambres syndicales ? Mais ils sont sous la surveillance des parquets? Que l'autorité, au lieu de tolérer les chambres syndicales dont elle reconnaît l'utilité par ce fait même, les autorise, leur donne une constitution légale; qu'elle exige, pour être admis à telle fonction, que le candidat ait un certain temps d'exercice; enfin, qu'elle les encourage et les protége, et les chambres syndicales prendront, dans l'opinion publique, la part de considération et d'estime que méritent leurs travaux et l'honorabilité des membres qui les composent. On se plaint, non sans raison, que beaucoup d'industriels ne répondent pas à la confiance publique; celui qui a reçu de l'autorité le droit d'ouvrir sa porte à l'acheteur doit lui offrir une garantie de bonne foi, dont celle-ci peut, jusqu'à un certain point, être moralement responsable. N'est-ce pas un affligeant tableau que celui des condamnations journalières de tous les marchands et fabricants pour tromperies? Il est malheureusement prouvé, par le nombre toujours croissant des délits, que ces répressions sont impuissantes à extirper le mal, et qu'il faut chercher d'autres remèdes dans une autre organisation. Autrefois, les corporations donnaient aux acheteurs des garanties qui n'existent plus aujourd'hui avec la liberté illimitée du commerce et de l'industrie. Les syndics de chaque métier se transportaient chez leurs confrères, examinaient les matières qui devaient servir à la fabrication, appréciaient le mérite de celles qui étaient mises en vente; ils confisquaient les produits s'ils n'étaient pas de qualité suffisante, ou si la main-d'œuvre était défectueuse. Nous comprenons ce qu'un pareil régime aurait d'étranger à nos mœurs et à nos habitudes commerciales, et nous le repoussons de toutes nos forces; mais ne serait-il pas possible de ménager les intérêts des deux parties! De même que l'autorité a le droit de faire visiter par des experts ou des agents toutes les denrées ou marchandises de consommation, et de saisir celles qui sont de mauvaise qualité ou falsifiées, pourquoi celui qui a fait faire un meuble ou tout autre ouvrage, pour lequel il a dû accorder confiance à un fabricant ne pourrait-il pas, s'il croit avoir à se plaindre, faire examiner l'objet fabriqué, sans être obligé d'entamer un procès qui entraîne toujours perte de temps et d'argent? Pourquoi ne citerait-il pas, à l'amiable, son fournisseur devant la chambre syndicale d'où ressortirait cette industrie, et cela sans frais, sur une simple lettre délivrée, comme aux conseils de prud'hommes, par le secrétaire de la chambre? On procéderait comme devant cette juridiction, c'est-à-dire que cet appel serait une tentative de conciliation; si les parties ne pouvaient s'entendre, il serait dressé un avis remis à l'une |