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priétaire; on y a aussi vu quelles étaient les obligations de ceux qui trouvent des choses perdues, des choses naufragées.

Ceux dont les marchandises ont été conservées, par le jet dans la mer de celles qui appartenaient à d'autres personnes, pour éviter le naufrage du navire, doivent contribuer à cette perte qui doit être supportée en commun tant par les maîtres des marchandises sauvées que par les propriétaires de celles jetées.

Les marchandises jetées sont estimées suivant leur valeur au lieu du déchargement, pour déterminer le dédommagement qui est dû à leurs maîtres, parce qu'elles seraient dans cet endroit et qu'elles y vaudraient le prix courant si elles n'avaient pas péri, et si elles avaient au contraire été sauvées par le jet des autres effets; qu'enfin ces derniers objets délivrés du danger par le jet se vendent au prix courant au lieu de la destination; art. 415, cod. comm.

On va dire en deux mots quels sont ceux qui ont droit à cette indemnité, quels sont les objets qui y contribuent, et dans quelle proportion.

D'abord on doit dédommager non-seulement les propriétaires des marchandises jetées, mais encore tous les maîtres de celles endommagées par le jet: quid enim interest jactatas res meas amiserim, aut inundatas deteriores habere cœeperim? nam sicut ei qui perdiderit subvenitur, ita et ei subveniri oportet qui deteriores propter jactum res habere cœperit; 1. 4, §. 2 in fine ff. de leg. Rhodiá, argument à contrario sensu de la seconde partie de l'art. 421, cod. comm.

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Il faut cependant excepter du droit à l'indemnité, soit qu'ils ayent été jetés, soit qu'ils

ayent été endommagés, 1o les effets dont il n'y a point de connaissement ou de déclaration du capitaine, parce qu'il est établi dans ce cas qu'ils ont été placés à bord sans l'aveu de ce dernier; qu'ainsi n'étant point responsable de leur perte, il ne peut faire contribuer personne à un dommage dont il n'est pas tenu; 2o les effets qui étaient sur le tillac, parce qu'alors il y a faute de la part du capitaine qui a reçu des marchandises au-delà de ce que pouvait contenir le vaisseau, ou qui, dans le cas contraire, est toujours en faute de ne les avoir pas mises dans un endroit convenable; c'est donc lui seul qui doit supporter le préjudice résultant de sa faute; art. 1382 et 1383, c. c.; 421, cod. comm.

On pense que cela n'a pas lieu quand il s'agit du petit cabotage; dans ce cas le capitaine n'est pas en faute d'avoir placé des effets sur le tillac, puisqu'il y est autorisé par le second alinéa de l'article 229, cod. comm. ; ainsi les maîtres de tels objets chargés sur le tillac des bateaux pontés et jetés à la mer pour le salut commun, doivent être indemnisés par les propriétaires des marchandises sauvées par le jet; il faut bien leur accorder ce recours, la loi ne leur en donnant aucun contre le capitaine qui n'est pas en faute dans cette circonstance. Cela a été ainsi jugé par une sentence de l'amirauté de la Rochelle, du 28 septembre 1747, dont on n'a point interjeté appel; elle est rapportée dans le commentaire de Vaslin sur l'ordonn. de 1681, liv. 1, tit. 2, art. 12.

L'indemnité doit être payée par les effets sauvés et par ceux jetés, dans la proportion de leur valeur respective; il est juste qu'un malheur commun soit supporté par tous les intéressés au

prorata de leur intérêt particulier; si les propriétaires des marchandises jetées ne contribuaient pas à réparer le préjudice causé par le jet, ils seraient plus avantages que ceux dont les effets ont été sauvés; il faut donc, pour que la perte soit commune, que tous les objets sauvés, jetés en mer, ou endommagés par le jet, en supportent une part : lege Rhodia cavetur, ut si levandæ navis gratiâ jactus mercium factus est omnium contributione sarciatur quod pro omnibus datum est; l. 1, ff. de leg. Rhod. Au reste les propriétaires des marchandises endommagées n'y contribuent que déduction faite de ce qui leur est dû pour ce dommage; deducto hoc quod damnum passus est, reliquum conferre debet; 1. 4, §. 2, versic. deducto, ff. de leg. Rhod.

Pour fixer l'indemnité, il faut d'abord faire estimer les marchandises jetées, et le préjudice souffert par celles endommagées par le jet; ensuite on procède à l'appréciation de celles sauvées ainsi que du navire. Supposons que la perte soit de 16,000 fr., et que la totalité des marchandises tant sauvées que jetées et le navire soient estimés 80,000 fr., la perte est au total des choses contribuables, comme 1 est à 5; chacun des propriétaires des marchandises sauvées payera le cinquième de la valeur de ses marchandises pour indemniser les maîtres des effets jetés, qui supporteront eux-mêmes une part de la perte, en recevant un cinquième de moins qu'ils n'ont perdu; en effet le cinquième de 64,000 fr., prix des objets sauvés, ne s'élève qu'à 12,800 f., soit aux quatre cinquièmes de 16,000 f.

Pour engager les chargeurs à déclarer de bonne foi et sans fraude la véritable qualité

des marchandises dans les connaissemens, la loi décide que si elles ont été déclarées d'une qualité inférieure à la véritable, elles seront estimées leur véritable valeur si elles sont sauvées, et d'après la déclaration si elles sont jetées; si au contraire elles ont été désignées d'une qualité supérieure à la véritable, elles sont estimées d'après l'indication si elles sont sauvées, et d'après leur véritable valeur si elles sont jetées ainsi la fausseté ou l'inexactitude des déclarations peut tourner à l'avantage des contribuables à l'indemnité, sans pouvoir jamais leur nuire; art. 418, cod. comm.

Après avoir vu quels sont ceux qui ont droit à l'indemnité, et comment on procède pour la fixer, on va faire connaître quels sont les objets qui la supportent.

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10 Les propriétaires du navire sauvé par le jet contribuent à l'indemnité; itaque dominum etiam navis pro portione obligatum esse; 1. 2 §. 2, versic. itaque, ff. de leg. Rhod.; art. 417, cod. comm. La contribution frappe tout à la fois le navire et le fret qui a été aussi sauvé par le jet, puisqu'il n'en aurait point été dû si les marchandises avaient été prises, ou si elles avaient péri par naufrage ou échouement, art. 302, cod. comm.; mais comme le fret n'est dû aux armateurs qu'à cause de leur navire, et comme représentant les détériorations que le voyage lui cause, et les dépenses qu'il faut faire pour l'armement, les agrès, apparaux et victuailles, afin d'arriver au terme du voyage, on a cru avec raison qu'il y aurait double emploi si on forçait les maîtres du vaisseau à contribuer sur la totalité du vaisseau et du fret; c'est pourquoi le code de

commerce ne leur fait supporter la perte causée par le jet que dans la proportion de la moitié du navire et du fret.

Les armateurs ne contribuent pas pour les munitions de guerre ou de bouche qui sont restées dans le navire, parce que les premières s'y trouvent pour la défense commune du navire et des marchandises, et que les secondes y sont destinées à la nourriture des officiers et matelots dont les manoeuvres sont nécessaires pour conduire le vaisseau et son chargement à leur destination: nisi quæ consumendi causá imposita fuerint, quo in numero sunt cibaria; 1. 2, §. 2, ff. de leg. Rhod.

2o Les propriétaires des marchandises qui sont restées sur le navire sauvé par le jet, doivent contribuer à l'indemnité des maîtres de celles jetées, d'après la valeur des marchandises au moment de la contribution, déduction faite du fret qui est dû pour ces marchandises, parce qu'il se prend sur cette valeur, qu'ainsi elle en est diminuée nécessairement; bona cujusque intelliguntur, quæ deducto cere alieno supersunt; 1. 39, §. 1, ff. de verb. signif.

Il faut que les marchandises se soient encore trouvées sur le navire au moment du naufrage, pour que le propriétaire d'icelles soit tenu de contribuer à l'indemnité, car c'est dans ce cas seul qu'elles ont été sauvées par le jet, art. 427, second alinéa, cod. comm.; 1. 4, princ., ff. de leg. Rhod.

3o Les propriétaires des marchandises jetées y contribuent aussi en faisant confusion sur eux d'une partie de la perte, de la manière expliquée plus haut.

4o Les passagers y contribuent pour leurs ha

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