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pend du gouvernement de soumettre le port des décorations étrangères à une autorisation dont l'absence frappe la décoration d'illégalité. Or les art. 67 et 69 de l'ordonnance du 26 mars 1816 portent : « Tous les ordres étrangers sont dans les attributions du grand chancelier de l'ordre royal de la Légion-d'Honneur. Il prend nos ordres à l'égard des ordres étrangers conférés à nos sujets, et transmet les autorisations de les accepter et de les porter. » Et l'ordonnance du 16 avril 1824 renferme à cet égard les dispositions suivantes : « Toutes décorations ou ordres, quelle qu'en soit la dénomination ou la forme, qui n'auraient pas été conférés par nous ou par les souverains étrangers, sont déclarés illégalement et abusivement obtenus, et il est enjoint à ceux qui les portent de les déposer à l'instant. Tous Français qui, ayant obtenu des ordres étrangers n'aura pas reçu l'autorisation de les accepter et de les porter, conformément à notre ordonnance du 26 mars 1816, sera pareillement tenu de les déposer, sans préjudice à lui de se pourvoir pour solliciter cette autorisation. Nos procureurs généraux poursuivront selon la rigueur des lois tous ceux qui, au mépris de la présente ordonnance, continueraient de porter des ordres étrangers sans notre autorisation, ou d'autres ordres quelconques, sans que nous les leur ayonsconférés. »

La loi du 28 avril 1832 a supprimé, dans le texte de l'art. 259, une disposition moins grave par elle-même que par le principe qu'elle supposait Cette disposition punissait de la peine portéepar l'article toute personne qui se serait attribué des titres royaux qui ne lui auraient pas été légalement conférés. Des motifs divers ont provoqué cette suppression. La Chambre des Députés l'a fondée sur ce que les individus qui s'attribuent des titres de noblesse qui ne leur appartiennent pas, ne portent préjudice ni aux intérets genéraux de la société ni aux intérêts privés; sur ce que l'art. 62 de la Charte qui permet la conservation des titres de noblesse est purement facultatif et n'a pas besoin de sanction pénale; enfin, sur ce que cette disposition était tombée en désuétude, et qu'il n'appartenait qu'au ridicule de faire justice des

Français et les é ́rangers, ni entre les décorations étrangères et françaises.

Voyez aussi l'arrêté belge du 19 juillet 1814. La loi du 25 juillet 1834, art. 6, statue que quiconque aura porté publiquement, sans autorisation du roi, l'un ou l'autre des insignes d'un ordre

écarts de la vanité. Devant la Chambre des Pairs, d'autres raisons ont éte alléguées : « Cet arti-cle, a dit le rapporteur, qui ne protégeait dans sa sanction pénale que les titres conférés par un décret impérial ou une ordonnance du roi, n'était plus en harmonie avec l'art. 62 de la Charte, lequel, en même temps qu'il conserve à la nouvelle noblesse ses titres, permet à l'ancienne de reprendre les siens. Or il n'est personne qui ne sache que les titres conférés par ordonnance royale étaient autrefois les plus rares, et que presque tous ceux de l'ancienne noblesse reposaient sur une prescription immémoriale qui avait fait de l'usage non contesté un droit, et sur la possession d'anciens fiefs héréditaires, titrés par concession du souverain ou antérieurement à toute concession, et qui conféraient aux possesseurs nobles et à leur famille le droit de porter le titre qui y était annexé. En abrogeant le dernier paragraphe de l'art. 259 vous placez les titres anciens de la noblesse française sur le même rang que les titres glorieux et immortels transmis par l'empire à la restauration. Cette juste assimilation est dans l'esprit de la Charte, et elle devient plus complète par le retranchement opéré par la Chambre des Députés dans l'article qui nous occupe. » Peut-être faudrait-il rechercher le véritable motif de ce retranchement en dehors de ces diverses allégations qui sont peu concluantes; peut-être pourrait on y voir une conséquence de l'état des mœurs et de l'opinion générale, une inspiration de cet instinct d'égalité qui tend à abaisser les hauteurs de l'ordre social, en leur refusant la dernière sanction qui protégeât encore une dernière prérogative. Il résulte, en effet, de la suppression prononcée qu'aujourd'hui chacun peut impunément usurper un titre de noblesse, sans être justiciable d'aucun autre tribunal que de l'opinion publique. Il est bien entendu toutefois que si les ti-tres usurpés ont servi à surprendre la crédulité publique et à commettre une escroquerie, les peines de i'art. 405 demeurent applicables. La loi pénale n'épargne que la vanité : elle sévit dès qu'elle découvre la fraude.

quelconque, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de 50 à 500 fr, sans préjudice de l'application, s'il y a lieu, des peines portées à l'art. 2 de la loi et à l'art. 259 du Code pénal.

CHAPITRE XXXVII.

DES ENTRAVES AU LIBRE EXERCICE DES CULTES.

Caractère général des entraves au libre exercice des cultes.

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Plusieurs espèces d'entraves. Empéchement par voies de fait ou menaces. La loi du 18 novembre 1814. qui prescrit l'observation des fêtes, est-elle encore en vigueur? — Principes consacrés par l'art. 260,— Circonstances caractéristiques des delits qu'il prévoit. - Des troubles ou désordres de nature à interrompre l'exercice du culte. Loi du 20 avril 1825 abrogée. - Caractères du délit. — La confession est un acte d'exercice du culte catholique. — Des outrages par paroles ou par gestes envers les objets ou les ministres du culte. - Conciliation de l'art. 262 avec l'art. 6 de la loi du 25 mars 1822. · Ce qu'il faut entendre par les lieux destinés à l'exercice du culte. Des coups portés et des violences exercées contre les ministres du culte, — Abrogation de l'art. 263. (Commentaire des art. 260, 261, 262, 263 et 264 du Code pénal.)

Ce chapitre termine la série des actes de résistance, désobéissance et autres manquements envers l'autorité publique. Le législateur a cru devoir ranger dans cette classe les entraves mises au libre exercice des cultes : « Ce libre exercice, porte l'exposé des motifs, est l'une des propriétés les plus sacrées de l'homme en société, et les atteintes qui y seraient portées ne sauraient que troubler la paix publique. »

Le Code pénal distingue quatre sortes d'entraves, quatre délits distincts: l'empêchement par voies de fait ou menaces à l'exercice d'un culte, l'interruption de cet exercice par des troubles ou désordres, l'outrage par gestes ou paroles contre les objets ou les ministres d'un culte, enfin les coups portés au ministre d'un culte dans ses fonctions. Nous allons reprendre l'une après l'autre ces diverses incriminations. La première est la simple atteinte portée à la liberté du culte : « Nulle religion, nulle secte, porte encore l'exposé des motifs, n'a le droit de prescrire à une autre le travail ou le repos, l'observance ou l'inobservance d'une fête religieuse, car nulle d'entre elles n'est dépositaire de l'autorité, et tout acte qui tend à faire ouvrir ou

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fermer des ateliers, s'il n'émane du magistrat même, est une voie de fait punissable. C'est cette règle que l'art. 260 a eu pour but d'appliquer. Cet article est ainsi conçu » Tout particulier qui, par des voies de fait ou des menaces, aura contraint ou empêché une ou plusieurs personnes d'exercer l'un des cultes autorisés, d'assister à l'exercice de ce culte, de célébrer certaines fêtes, d'observer certains jours de repos, et en conséquence d'ouvrir ou de fermer leurs ateliers, boutiques ou magasins, et de faire ou quitter certains travaux, sera puni, pour ce seul fait, d'une amende de 16 à 200 fr. et d'un emprisonnement de six jours à deux mois[1]. »

Cet article a été modifié par la loi du 18 novembre 1814 qui, dans l'intérêt de la religion catholique qui était alors la religion de l'État, commande l'interruption des travaux ordinaires les jours des fêtes célébrées par cette religion. Mais cette loi est-elle encore en vigueur? n'at-elle point été implicitement abrogée par la Charte de 1830 qui a aboli la religion de l'Etat? Nous sommes forcés d'entrer dans l'examen de cette question. L'observation des jours consacrés aux solennités religieuses était prescrite

ne peut être contraint de concourir d'une manière quelconque aux actes et aux cérémonies d'un culte, ni d'en observer le jour de repos. ([b., art. 15.)

:

par le réglement du 8 novembre 1782 à cette époque la religion catholique était la seule dont l'exercice public fût autorisé en France. L'Assemblée constituante proclama le principe de la liberté des cultes; mais ce principe, enfreint par la Convention nationale, ne refleurit que quelques années plus tard : la loi du 4 ventôse an III permit l'exercice de tous les cultes, et celle du 7 vendémiaire an IV défendit aux juges, aux administrateurs et à tous autres de contraindre ou d'empêcher les citoyens d'observer certaines fêtes religieuses. Cependant cette tolé rance fut troublée par la loi du 17 thermidor an vi qui prescrivait sous des peines sévères l'observation des décadis et des fêtes civiques. L'arrêté consulaire du 7 thermidor an VIII posa un principe que la législation n'a fait que développer la prescription d'observer les décadis fut restreinte aux membres des autorités constituées. Les articles organiques de la loi du 18 germinal an x ne modifièrent point cette régle introduite en faveur des particuliers: ils se bornèrent à changer les jours de repos, sans toucher aux obligations qui en dérivaient. Enfin l'art. 260 a été la garantie et la consécration de ce système il protége la liberté de tous il n'impose d'obligations à personne.

Telle était la législation lors de la promulgation de la Charte du 4 juin 1814, dont l'art. 6 proclamait la religion catholique, religion de l'État. Dès le 7 juin suivant, le directeur général de la police rendit une ordonnance sur la célébration des fêtes et dimanches. Cette ordonnance qui rétablissait des peines très-sévères fut l'objet de vives réclamations, et n'eut qu'une existence éphémère, mais elle fut l'origine et le prétexte de la loi du 18 novembre 1814. La proposition de cette loi se fonda sur ce qu'un article de la Charte constitutionnelle ayant reconnu la religion catholique comme religion de l'Etat, il ne s'agissait que d'en fixer les prérogatives et de renouveler en sa faveur les dispositions des ordonnances relatives à l'observation des dimanches et fêtes [1]. Ainsi cette loi n'était qu'un corollaire de l'art. 6 de la Charte de 1814; et l'examen de ses dispositions confirme cette opinion, car elles sont inconciliables avec un système d'égalité légale entre les divers cultes; elles supposent la prééminence du culte catholique. Ainsi les chrétiens des cultes dissidents sont obligés de célébrer des fêtes que leur conscience repousse, de suspendre leurs travaux aux heures des offices

[1] Procès-verbal de la Chambre des Pairs, séance dn 16 août 1814.

du culte catholique; ainsi les Israélites sont contraints d'observer, outre les fêtes prescrites par leur culte, celles d'un culte qui leur est étranger. Or, la Charte de 1830, en abolissant la religion de l'État, a détruit cette prééminence. Dès lors la loi du 18 novembre 1814, conséquence d'un principe qui n'est plus, a dû immédiatement cesser d'exister. Et comment, en effet, la loi qui, dans un esprit religieux, contraignait les cultes dissidents à la célébration des fêtes du culte catholique, pourrait-elle subsister encore, quand tous les cutes ont les mêmes droits, quand tous jouissent de la même liberté? Comment concilier cette gêne et ses entraves avec un principe qui domine toute la législation? Quelle que soit la réserve avec laquelle les abrogations implicites doivent être accueillies, on ne peut se défendre de considérer la loi du 18 novembre 1814 comme abrogée par la Charte de 1830, car ce sont là deux principes contraires, qui ne peuvent vivre ensemble, dont l'un doit nécessairement absorber l'autre : et la pratique, au surplus, vient ici confirmer la théorie; il est certain que la loi du 18 novembre 1814 est aujourd'hui tombée en désuétude et qu'elle ne reçoit plus aucune application.

L'art. 260 a donc repris toute sa vie : les citoyens restent libres d'observer les fêtes ou de ne pas les observer; nulle contrainte ne peut être exercée pour les faire célébrer certaines fêtes, garder certains jours de repos; ils n'ont d'autre règle à suivre que celle de leur conscience [2]. Voilà le principe que cet article applique et qu'il a sanctionné. Toutefois il ne l'a sanctionné qu'à l'égard des actes tyranniques qui peuvent être exercés par des particuliers, il n'a prévu que les attentats privés : les vexations des officiers publics constitueraient des excès de pouvoir ou des actes arbitraires et appartiendraient à un autre ordre de faits. Une autre raison qui a également motivé cette restriction, est que le législateur a voulu réserver à l'autorité civile le droit de célébrer les fêtes nationales. Mais cette limite apportée à l'application de l'art. 260 n'en altère point le principe; les attentats de l'autorité civile échappent à la peine qu'il prononce, mais ils sont saisis par la peine qui punit les actes illégaux, car en les exceptant, la loi ne les a point autorisés.

Les éléments du délit sont faciles à énumérer : le premier est la contrainte ou l'empêchement d'exercer le culte, d'assister à son exercice, de

[1] Voy. la note plus haut.

nal), etc.; les procédures criminelles ont seules été exceptees de cette règle générale par l'art. 2 du décret du 17 thermidor an vi, que l'art. 353 du Code d'instruction criminelle n'a fait que confirmer.

célébrer certaines fêtes, d'observer certains ter les condamnations (art. 25 du Code péjours de repos; le deuxième élément consiste dans le mode d'exercice de cette contrainte ou de cet empêchement : la loi l'a déterminé; il faut qu'il se soit manifesté par des voies de fait ou par des menaces: les ordres ne suffiraient pas pour constituer la contrainte. Enfin, et nous déduisons ce troisième élément de l'esprit même de la loi, il est nécessaire que la contrainte ou l'empêchement ait été exercé avec la pensée d'entraver ou de gêner la liberté religieuse de la personne qui en est l'objet, car il ne faut pas perdre de vue qu'il ne s'agit dans cet article que d'une entrave à la liberté des cultes.

Le texte de l'art. 260 nous suggère encore deux observations importantes et d'abord il ne s'applique qu'à l'exercice des cultes autorisés. Cette distinction entre les cultes reconnus ou non reconnus par l'État, créée par le concordat du 18 germinal an x, formulée de puis par le Code pénal et la loi du 25 mars 1822, est devenue la base de la protection que l'État accorde aux cultes. Nous n'avons point consenti à nous y arrêter quand il s'est agi d'incriminer et de punir les excès des ministres des cultes [1], car puisque la loi a voulu accorder plus de faveur aux cultes reconnus, il eût été contre son esprit d'exempter des peines qu'elle prononce les ministres des cultes non reconnus; mais lorsqu'il s'agit, non plus d'une pénalité à appliquer, d'un péril à prévoir, mais d'une protection à accorder, on peut concevoir que le législateur ait restreint cette concession aux seuls cultes dont il a autorisé l'exercice. Cette restriction est au surplus formelle dans cet article, et nous aurons lien d'examiner tout à l'heure si l'on doit la continuer dans les articles qui suivent.

Notre deuxième réflexion a pour objet l'observation des jours de repos. La règle qui en affranchit les citoyens ne s'étend pas aux fonc tionnaires publics; le repos du dimanche et des fêtes conservées continue d'être obligatoire pour eux [2]. En conséquence, les lois ont défendu de faire, les jours fériés, aucune signification ni exécution (art. 63 et 1037 du Code de procédure), d'exercer aucune contrainte par corps (art. 781 même Code), d'exiger le paiement et de faire le protêt des lettres de change (art. 135 et 162 du Code de commerce), d'exécu→

[1] Voy. suprà, p. 278.

Une deuxième entrave au libre exercice des cultes consiste dans les troubles et les désordres causés dans les lieux où ils s'exercent. L'art. 261 est ainsi conçu : « Ceux qui auront empêché, retardé ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres causés dans le temple ou autre lieu destiné ou servant actuellement à ces exercices, seront punis d'une amende de seize francs à trois cents francs et d'un emprisonnement de six jours à trois mois. >>

Cet article avait été étendu et en même temps implicitement remplacé par l'art. 13 de la loi française du 20 avril 1825 qui portait : « Seront punis d'une amende de 16 à 300 francs et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ceux qui, par des troubles ou désordres commis même à l'extérieur d'un édifice consacré à la religion de l'État, auront retardé, interrompu ou empêché les cérémonies de la religion. » L'art. 16 de la même loi appliquait cette disposition aux autres cultes. L'abrogation de cette loi par la loi du 11 octobre 1830 a fait revivre les dispositions de l'art. 261.

Il faut, pour constituer le délit que prévoit cet article, qu'il y ait eu retard, empêchement ou interruption de l'exercice d'un culte, et que cette interruption, cet empêchement ou ce re-tard ait été causé par des troubles ou désordres produits dans le lieu de l'exercice du culte. Ces deux conditions demandent quelques explications.

En premier lieu, tout trouble, tout désordre n'est pas passible de l'application de cet article; car son texte exige non-seulement l'existence d'un acte de désordre ou de trouble, mais que cet acte ait été la cause d'une interruption, d'un retard, d'un empêchement à l'exercice du culte. C'est donc moins le trouble que l'interruption elle-même que la loi punit, ou plutôt c'est le trouble seul, mais uniquement lorsqu'il est assez grave pour produire une interruption ou un retard dans le service religieux. La Cour royale de Poitiers avait décidé que cet article n'est pas applicable au cas où un ecclésiastique est troublé et interrompu pendant qu'il entend la confession d'une personne dans l'église; elle s'était fondée sur ce qu'il n'y avait pas, dans ce mo

[2] Art. 2, loi 17 therm. an vi; arr. du 7 therm. ment, d'exercices du culte dans l'église, puisque an vii; art. 57, loi du 16 germ, an x.

la confession ne pouvait être regardee comme

l'un de ces exercices. La Cour de cassation a annulé cet arrêt par les motifs : « que la confession est la pratique d'un des devoirs les plus sacrés du culte catholique; que l'accomplissement de ce devoir de la part des fidèles est un acte qui constitue nécessairement l'exercice de ce culte; qu'un curé ou tout autre prêtre catholique qui entend la confession d'un fidèle est dans l'exercice de ses fonctions pastorales ou sacerdotales, et que l'exercice de ces fonctions se confond évidemment avec les exercices de ce culte, dans le sens de la loi [1]. » Dans une autre occasion, la même Cour le 10 mai 1827 (Sir. 27, 1, 508) a également jugé que le père d'un enfant qui l'enlève, malgré le curé, dans l'église et pendant le catéchisme, d'un lieu où il avait été mis en punition, devient passible de la même application.

a

L'article ne parle que des exercices d'un culte, sans ajouter d'un culte autorisé, et cette omission se fait également remarquer dans les art. 262 et 263: faut-il en conclure que le législateur, rejetant brusquement la distinction qu'il venait de formuler dans l'article 260, voulu comprendre tous les cultes, reconnus ou non reconnus, dans les articles suivants? Nous ne pourrions admettre cette interprétation. Nous l'avons dit tout à l'heure, lorsqu'il s'agit d'incriminer les délits commis dans l'exercice des cultes par ceux qui les exercent, il nous paraît nécessaire d'étendre les dispositions de la loi à tous les cultes quelconques, parce que tous les cultes peuvent menacer la société du même péril: mais cette nécessité n'existe plus, lorsqu'il s'agit, au contraire, d'établir, en faveur des cultes, des dispositions protectrices, propres à en maintenir l'exercice et la liberté; car le principe de cette loiest de tolérer tous les cultes, mais de ne protéger que ceux qui sont autorisés par l'État. Or, cette règle, le législateur a dû l'appliquer dans notre espèce, ou bien il eût manqué à ses propres principes. Et comment supposer qu'il ait voulu protéger par une sanction pénale le libre exercice d'un culte non relorsque, par l'ar. 291, il ne leur mettait pas de se réunir et de l'exercer sans autorisation? Le législateur lui-même, en expliquant l'art. 261, a dit : « L'auteur du trouble est également coupable, soit qu'il appartienne au culte dont les cérémonies ont été troublées, soit qu'il lui soit étranger, car respect est dû à tous les cultes qui existent sous la protection de la loi. » Or les cultes autorisés sont les

connu,

[1] Arr. cass. 9 oct. 1824; S. 1825, 1, 76.

per

seuls qui existent sous cette protection. On op-
pose que le mot culte n'est suivi d'aucune res-
triction; mais cet article et les suivants se ré-
fèrent nécessairement à l'art. 260 qui ouvre la
section et qui définit les cultes auxquels s'ap
pliquent les dispositions de cette section. L'art. 2
de la loi du 7 vendémiaire an iv, que l'art. 261
s'étendait
a presque textuellement reproduit,
à un culte quelconque, à quelque culte que
ce soit; en élaguant ces expressions, l'art. 261
indiquait déjà la pensée de restreindre le sens
du mot culte; et cette restriction résulte avec
évidence de son rapprochement avec l'art. 260
et du principe général que le législateur a con-
stamment appliqué. Enfin, une peine ne saurait
reposer sur une qualité vague et qui peut être
inconnue de l'auteur du délit; or, lorsqu'il s'agit
d'un culte nouveau et dont l'existence n'est
point un fait reconnu du public, quels seront
les signes qui feront connaître à l'auteur du
trouble qu'il commet une atteinte à la liberté
d'un culte, qu'il se rend coupable d'un délit?
Les peines ne peuvent s'asseoir que sur des bases
fixes et non sur des circonstances indéterminées.
Nous pensons donc que les art. 261, 262 et 263
ne s'appliquent qu'aux seuls cultes reconnuspar
l'État.

Enfin, l'art. 261, et d'après cet article, l'art. 262 punissent les troubles causés non-seulement dans le temple, mais dans les lieux destinés ou servant actuellement à l'exercice du culte. Ces termes un peu obscurs ne se trouvaient pas dans la première rédaction de l'article; M. Cambacérès crut apercevoir une lacune: L'article, dit-il, ne punit l'outrage fait aux objets d'un culte que lorsqu'il a lieu dans les édifices destinés à exercer ce culte ; cependant dans les villes où il n'existe pas de consistoire, l'exercice du culte catholique est public: or la loi n'atteindrait pas l'homme qui se permettrait d'enlever le viatique qu'on porte à un malade. »> M. Treilhard répondit que l'article devait être entendu dans le sens de cette opinion, et que, par exemple, là où les processions sont permises, les lieux où elles passent deviennent momentanément des lieux où le culte s'exerce. Telle est la pensée que la loi a voulu exprimer ; et M. Berlier l'a rappelée avec clarté dans l'exposé des motifs : « Ces expressions mêmes, a-t-il dit, indiquent la limite dans laquelle le législateur a cru devoir se renfermer; la juste protection due aux différents cultes pourrait perdre cet imposant caractère et dégénérer même en vexation ou tyrannie, si de prétendus outrages faits à des signes placés hors de l'enceinte consacrée pouvaient devenir l'objet des recherches juridi

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