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front large, yeux bruns, nez long, bouche petite, menton rond. visage ovale, teint pâle, ayant le regard sombre, l'habitude du corps un pen vouté, tous les deux prévenus d'espionnage.

La séance ouverte, M. le général président a demandé à M. le commissaire rapporteur la lecture des pièces de la procèdure, tant à charge qu'à décharge envers les accusés, lesquelles pièces sont au nombre de soixante-deux.

Cette lecture terminée, M. le président a ordonné à la garde d'amener les accusés, lesquels ont été introduits libres et sans fers.

laterrogés de leurs noms, prénoms, age, lieux de naissance, profession, qualités et domicile,

Ont répondu, savoir; le premier nommé Pierre-Paul Dubuc, être âgé de 44 ans, natif de St. Malo, département d'Ille-etVilaine, ancien officier de la marine, ex-général en chef, ambassadeur de feu Tippoo-Sultan auprès du gouvernement français, et ex-agent du gouvernement auprès des Marattes, logé à Paris, rue du Helder, hôtel Mirabeau.

Le second se nomme Jean-Jacques-Antoine Rossolin, âgé de 41 ans, natif de Toulon, département du Var, négociant de profession, logé à Paris, rue du Helder, hôtel Mirabeau.

Après avoir donné connaissance aux accusés des faits à charge et à décharge, et leur avoir fait prêter interrogatoire par l'organe de M. le président; ouï M. le colonel, rapporteur dans son rapport et ses conclusions, et les accusés dans leurs moyens de défence, lesquels ont déclaré l'un et l'autre n'avoir plus rien à ajouter à leurs moyens de défence, M. le président a demandé à MM. les membres de la commission s'ils avaient des observations à faire. Sur leur réponse négative et avant d'aller aux opinions, il a ordonné que les accusés soient reconduits par leur escorte à la prison.

Le greffier et les personnes assistantes dans l'auditoire se sont retirés sur l'invitation de M. le général, président.

La commissson délibérant à huit clos, seulement en présence de M. le commissaire, M. le général, président, a posé les questions suivantes : les nommés Dubuc et Rossolin, désignés et qualifiés ci-dessus, accusés d'espionnage pour l'ennemi;

1°. Le nommé Dubuc est-il coupable?

2o. Le nommé Rossolin est-il coupable?

Les voix recueillies en commençant par le grade inférieur, M. le général, président, ayant émis son opinion le dernier. La commission déclare, 1o. à l'unanimité des voix, le nommé Dubuc coupable d'espionnage pour l'ennemi;

2o. A l'unanimité des voix, le nommè Rossolin coupable d'espionnage pour l'ennemi.

Sur quoi M. le colonel remplissant les fonctions de commis

saire-rapporteur, a fait son réquisitoire pour l'application de la peine.

Les voix recueillies de nouveau, par M. le général président dans la forme indiquée ci-dessus;

La commission, faisant droit sur le dit réquisitoire, condamne à l'unanimité des voix, les nommés, Pierre Paul Dubuc et Jean-Jacques-Antoine-Thomas Rossolin, à la peine de mort.

En conformité, 1o de l'art. 2 du titre 4 de la loi du 21 Bru"maire an 5, ainsi conçu: "Tout individu, quoique soit son "état, qualité ou profession, convaincu d'espionnage pour "l'ennemi, sera puni de mort."

2o. De l'art. 1er. de la loi du 16 Juin, 1793, ainsi conçu "Les Français ou étrangers convaincus d'espionnage dans "les places de guerre ou dans les armées, seront punis de """mort."

3o. De l'art. 4, sect. 1ère. du titre 1er. de la 2e partie du code pénal du 6 Octobre, 1791; ainsi conçu: "Toute ma"nœuvre, toute intelligence avec les ennemis de la France,

tendant, soit à faciliter leur entrée dans les départemens de "l'empire français, soit à leur livrer des villes, forteresses, "ports, vaisseaux, magasins ou arsenaux appartenans à la "France, soit à leur fournir des secours en soldats, argent, "vivres ou munitions, soit à favoriser d'une manière quel "conque le progrès de leurs armées sur le territoire français, ་་ ou contre nos forces de terre ou de mer, soit à ébranler "la fidélité des officiers, soldats, et des autres citoyens envers "la nation française, seront punis de mort."

Enjoint à M. le commissaire rapporteur de lire de suite le présent jugement aux condamnés, en présence de la garde rassemblée sous les armes, et de faire exécuter le dit jugement dans tout son contenu.

Ordonne qu'il en sera envoyé à la diligence de M. le géné→ ral président et de M. le colonel rapporteur, une expédition, tant à leurs excellences Messeigneurs les ministres de la guerre et de la police générale, qu'à S. A. S. Mgr. le prince Murat.

Fait, clos et jugé sans désemparer en séance publique à Paris, les jours, mois et an que dessus, et MM. les membres de la commission ont signé avec MM. le rapporteur et le greffier la minute du présent jugement. Ainsi signé à la minute Cazaux, Veilande, Tereyre, Rouvillois, Remoissenet, Preval, Lucotte et Lhuillier, greffier.

Collationné par moi, greffier, Lhuillier Pour expédition,

Le général de brigade, commandant de la légion d'honneur,

président,

LUCOTTE.

4 Juin, 1805.

Milan, le 27 Mai, (7 Prairal.)

Hier 26, la cérémonie du couronnement du roi d'Italie a été exécutée avec la plus grande pompe et l'ordre le plus impo sant; la beauté du tems la pureté du ciel, la splendeur du soleil concouraient à rendre cette solemnité plus brillante.

A onze heures et demie S. M. l'impératrice, précédée de S. A. impériale la princesse Elisa, s'est rendue à la cathédrale par une gallerie elégamment ornée, et elle a été conduite sous le dais à sa tribune au milien des plus vifs applaudissemens.

A midi, S. M. l'empereur et roi est sortie du palais par la même gallerie, portant sur sa tête la couronne impériale et celle d'Italie, tenant dans ses mains le sceptre et la main de justice du royaume, et revêtue du manteau royal que portaient les deux grands écuyers. S. M. était précédée par les huissiers, les héraults d'armes, les pages, les aides, les maîtres des cérémonies; par le grand-maître des cérémonies; par sept dames portant des offrandes et par les honneurs de Charlemagne, de l'empire et d'Italie, que portaient des grands offciers de France et d'Italie, et les présidens des trois colléges électoranx accompagués par les officiers civils de S. M.; tous les ministres, les grands-officiers, les conseillers d'état français et les officiers de la maison royale suivaient l'empereur et roi. Le cardinal-archevêque est venu avec son clergé recevoir S. M. au portail, l'a encensée et lui a adressé le discours suivant:

"Vous daignâtes accueillir avec cette clémence et cette bonté qui caractérise votre Majesté impériale et royale, les hommages que j'eus l'honneur de vous offrir au nom du clergé et du peuple de Milan, dans le jour mémorable de votre entrée en cette capitale. Daignez en user de même dans ce temple sacré choisi par V. M. même pour la cérémonie solemnelle de votre couronnement, et regardez avec les yeux d'un père attendri le concours des cardinaux, des évêques et du clergé, qui s'unissent à moi pour célébrer aujourd'hui votre sacre auguste, et pour demander à l'auteur de tout bien, l'abondance des bénédictions célestes sur votre personne impériale et royale."

Après ce discours S. Em. le cardinal archevêque a conduit S. M. sous le dais jusqu'au sanctuaire. Les applaudissemens qu'excitaient la vue d'un si noble cortège et la présence d'un héros, permettaient à peine d'entendre les sons d'une musique nombreuse qui annonçait l'arrivée de S. M. par une marche triomphale. L'empereur s'est assis dans le chœur sur un trône ayant à sa droite les honneurs de l'empire, à sa gauche ceux d'Italie; les honneurs de Charlemagne étaient à l'entrée du sanctuaire, en face de l'autel, le cardinal-légat sur un fauteuił

du côté de l'évangile, les grands officiers civils derrière 9. M le grand-maitre et les maîtres des cérémonies à droite et gauche de l'autel, les officiers civils dans le chœur.

Après les prières et les interrogations nsitées, les grands officiers d'Italie ont été déposer sur l'autel les ornemens royaux que leur avait remis successivement S. M. Le cardinal les à bénis. L'empereur est venu ensuite au pied de l'autel recevoir, des mains de l'archevêque, l'annean, le manteau, l'épée qu'il a remise à S. A. S. le prince Eugène, le sceptre et la main de justice, enfin il est monté et a pris sur l'autel la cou ronne de fer en la posant avec fierté sur sa tête, il a prononcé à haute voix ces paroles remarquables, Dieu me la donne, gare à qui la touche. Ayant ensuite posé sur l'autel cette couronne, il a pris celle d'Italie et l'a placée sur sa tête au bruit des applaudissemens unanimes de la foule de spectateurs qui remplissait cette vaste enceinte. Après cette cérémonie l'empereur, précédé par le même cortége qui l'avait conduit au chœur, a de nouveau traversé l'église, recevant à chaque pas, par de nombreuses et vives acclamations, des preuves évidentes de l'amour et du respect qu'il inspirait.

S. M. est allée s'asseoir au fond de la nef sur un trône éléré et magnifique. Les honneurs d'Italie se sont placés derrière le trône; à la droite de l'empereur S. A. S. le prince Eugène était assis sur une chaise; plus bas et à droite les honneur de Charlemagne, et à la gauche du trône les honneurs de l'empire; au dessous d'eux à droite et à gauche, les ministres, les grands officiers militaires, les membres de la consulte et les conseillers d'état sur des gradius. Devant le trône et trois degrés plus bas, le grand chambellan, le grand écuyer de France, le grand maître des cérémonies et le grand écuyer d'Italie sur des tabourets; les aides-de-camp bordoient la haie de tout sur les dégrés du trône; les pages etaient assis sur les marches; au bas de l'escalier, les sept dames portant les offrandes etaient assises sur des chaises; à droite et à gauche en avant d'elles, les maîtres, les aides des cérémonies, et plus loin les hérauts d'armes et les huissiers; les deux côtés de la nef étaient garnis de banquettes occupées par les trois colléges électoraux, le corps-législatif, les tribunaux de cassation et de révision, la comptabilité nationale, les généraux, les colonels, les inspecteurs, les commissaires; les préfets, les tribunaux d'appel, les présidens de départemens, les conseils munici paux, l'institut et les députations de l'université. Les dépuitations militaires occupaient la croisée du chœur et de la nef; au-dessus de ces bancs, étaient élevées des galleries et des tribunes occupées par les personnes les plus distinguées da royaume; dans la première de ces tribunes à droite du trône, dans la tribune impériale, étaient le doge, deux membres de la légation ligurienne et quarante dames richement parées; vis-à-vis était la tribune du corps diplomatique; à côté d'elle,

celle des généraux français; plus loin celle des étrangers; l'impératrice et la princesse Elisa occupaient une autre tribune dans le chœur.

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Les voutes, les murs, les colonnes de la cathédrale étaient couverts d'étoffes de soie, de crêpe et ornés de frange d'or. Rien n'égalait la noblesse et la magnificence de ce superbe tableau qui commandait l'admiration et le respect.

Le grand-aumônier est venu porter l'évangile au roi après le credo. S. M. a traversé de nouveau l'église précédée par les dames qui portaient les offrandes qu'accompagnaient les aides de camp de l'empereur; elle a présenté les offrandes à l'antel et est venue se replacer sur le grand trône. Après la messe, le grand aumônier est venu apporter l'évangile; le grand chancelier du royaume, averti par le grand-maître, a dit au président de la consulte d'apporter le serment, et a appelé près du trône les trois présidens des colléges électoraux, celui du corps législatif et celui du conseil : S. M. a lu à haute voix le serment, alors le chef des héraults a dit; Napoléon, empereur des Français et roi d'Italie, est couronné et intronisé. Vive l'empereur et roi! Ces derniers mots, ont été répétés par tous les assistans et accompagnés par les acclamations les plus vives et les plus prolongées.

On a entonné le Te Deum, pendant lequel le secrétaire d'état a dressé le procès-verbal de la prestation du serment; le clergé s'est rendu avec le dais au pied du trône, et S. M. est revenue dans son palais avec le même cortége, et au bruit des acclamations d'un peuple immense qui se pressait sur son passage. La sainteté du lieu, la beauté des décorations, l'ordre de la marche, la pompe des cérémonies, la régularité des évolutions, la symétrie noble des groupes, la richesse des costumes, Ja marche gracieuse et élégante des dames qui portaient les offrandes, la magnificence du trône, la majesté de l'empereur, et plus encore le souvenir de tant d'exploits et tant de gloire, rendaient cette solemnité si auguste et faisaient une si vive et si profonde impression, qu'il est plus facile de la concevoir que de la peindre.

Le même jour à quatre heures leurs majestés se sont rendues en grand cortége en voiture à l'église de Saint-Ambroise pour y entendre un Te Deum, et pour rendre grâce à l'Eternel dans l'un des plus saints et des plus autiques édifices qui lui aient été consacrés: toutes les rues étaient ornées de riches tentures et remplies par un peuple innombrable qui faisait retentir les airs de ses vœux pour la durée et la prospérité du règne de l'heureux guerrier qui nous a rendu la gloire, et qui nous promet le bonheur.

Voici le discours prononcé par M. le prévôt de la Basilique de Saint-Ambroise, à S M. impériale et royale lorsqu'elle est descendue de voiture.

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