Page images
PDF
EPUB

offices, soit au rétablissement, soit au maintien de la paix, tou ces motifs portèrent l'empereur à faire taire ses justes ressenti mens, il se détermina à demander à la cour de Vienne des ex plications qui fissent connaître les bases sur lesquelles on ponts rait négocier. Il ordona au ministre des relations extérieures de préparer une note à cet effet; le courier qui devaitla porter était au moment de partir lorsque l'empereur apprit l'invasion de la Bavière.

L'electeur avait été sommé de joindre son armée à celle de l'Autriche, et comme si non refus prévu de faire cause commune avec l'Autriche dont il n'a jamais reçu de bien, eût été pour la cour de Vienne, un juste motif de guerre, l'armée Autrichiene, sans déclaration préalable, au mépris des devoirs qu'impose à l'empereur d'Autriche sa qualité d'empereur d'AlJemagne au mépris de la constitution germanique et de l'empire germanique lui-même, au mépris enfin de tous les droits les plus saints, avait passé l'Inn et envahi la Bavière en pleine paix, après un tel acte de la cour de Vienne, l'empereur ne pouvait plus rien avoir à lui demander, il devenait évident que même ce congrès, proposé d'un ton si impérieux, et dans des vues si visiblement hostiles contre la France n'était qu'un nouveau piége tendu à sa bonue foi; que l'Autriche irrévocablement dé cidée à la guerre, ne reviendrait point à des idées pacifiques et qu'elle n'était même plus libre d'y revenir. Les changes de toutes les places prouvaient jusqu'à l'évidence, qu'une partie des sommes accordées au ministère anglais, pour servir à ses fins sur le Continent était arrivée à sa destination, et la puissance qui avoit ainsi trafiqué de son alliance ne pouvait plus épargner le sang de ses peuples dont elle venait de recevoir le prix.

Toute explication ultérieure avec la cour de Vienue étant ainsi devenue impossible, la voie des armes est désormais la seule compatible avec l'honneur,

Que l'Augleterre s'applaudisse d'avoir enfin trouvé des alliés; qu'elle se réjouisse de ce que le sang vacouler sur le Continent; qu'elle se flatte que le sien sera épargnés qu'elle espère trouver sa sûreté dans les discordes des autres états, sa joie sera de courte durée, son espérance sera vaine, et le jour n'est pas élaigné où les droits des nations seront enfin vengés.

L'empereur, obligé de repousser une agression injuste qu'il s'est vainement efforcé de prévenir, a dû suspendre l'exécution des ses premiers desseins. Il a retiré des bords de l'océan ses vieilles bandes tant de fois victorieuses, et il marche à leur tête. Il ne posera les armes qu'après avoir obtenu satisfaction pleine et intière; et sécurité complète, tant pour ses propres états que pour ceux de ses alliés.

Motifs du sénatus-consulté sur la levée de 80,000 conscrits, présenté au sénat par M. Régnaud (de Saint-Jean-d'Angely).

Sire,

Les aigles de vos armées allaient traverser les mers, les viulateurs du traité d'Amiens tourmentés par le remords, agités par la crainte, allaient être punis par votre justice; encore quelques jours et la liberté des mers pouvait être conquise pour le monde dans le siége même de la tyrannie des mers.

Mais voilà qu'un autre parjure appelle V. M. à d'autres combats, au mépris de la foi jurée à Lunéville, l'empereut d'Allemagne menace l'empire français. Il fait marcher contre vos frontières ses propres troupes et des troupes russes, débris de celles que V. M. a vaincues ou renvoyées sans rançon recrutées par des hommes sans patrie et payées par les subsides de l'Angleterre.

Votre armée, Sire, formée des mêmes légions qui ont vaincu les Autrichiens et les Russes complétée par des citoyens français pris dans toutes les classes comme dans toutes les parties de l'empire; votre armée dont la composition accroit la force, dont le dévouement à votre personne double l'énergie; votre armée qui sait sentir et penser comme elle sait se battre, dont l'indignation augmenterait la valeur, s'il était possible; votre armée suffit pour combattre et vaincre, et la diversion si chèremont payée par l'Angleterre n'aura fait que retarder son humi liation et changer le champ de vos premiers triomphes.

Mais si, se préparant d'un côté à combattre la Grande-Bre tagne, et se confiant de l'autre dans le fidélité de ses alliés, se reposant peut-être sur le sentiment éclairé de leurs intérêts qui leur conseillait du moins la neutralité, V. M. n'a pas grossi son armée, et n'en a pas préparé par des levées extraordinaires le recrutement complet et successif; d'autres circonstances commandent d'autres mesures.

Dans les années qui ont suivi la paix comme dans les années qui ont suivi la guerre, V. M. n'a appelé aux drapeaux que la même quantité de conscrits, elle a voulu laisser le plus grand nombre d'hommes possible à l'agriculture et aux arts; aujour d'hui, Sire, votre sagesse veut que la jeunesse française se prépare à payer à la patrie sa dette toute entière et même avant l'époque où elle en réclaimait l'acquittement:

Les orateurs de votre conseil demandent par votre ordre aux sages de l'empire d'armer le génie d'une partie plus considérable de la force de la nation, et d'ordonner pour l'an 1806 une levée de 80,000 conscrits.

Plusieurs raisons ont porté V. M. à penser que le sénat devait décréter cette mesure.

La levée de la conscription a été à la vérité ordonnée jusqu'à ce jour par das actes du corps législatif.

La proposition qui est déférée au sénat n'intervertira pas l'ordre, ne détruira pas l'usage suivi jusqu'à présent, elle y formera seulement une exception que les circonstances justifient.

Et d'abord quand S. M. s'éloigne pour mener elle-même ses

légions à la victoire sa prudence lui prescrit de préparer, d'a surer avant de quitter le centre de l'empire, tous les moyens de succès que sa sagesse a conçus; les délais nécessaires à la convocation du corps-législatif retarderaient des mesures auxquelles l'intervention du sénat garantit une célérité devenue nécessaire.

Secondemeut, le changement de calendrier prolonge l'exercice de l'an 14, qui sera le même que celui de 1806 jusqu'au 1er Janvier 1807, et il sera composé de 15 mois, il en résulte le besoin d'un changement dans l'époque de la conscription

de l'an 15

Eu suivant la règle de division de l'année à laquelle la France vient de renoncer, cette conscription ne devrait comprendre

les jeunes gens qui auront atteint, le 22 Septembre 1805, dernier jour de l'an 14, l'âge de vingt ans.

Pour régulariser cette partie comme les autres branches d'administration publique, la conscription de l'an 14, an 1806 doit enfin comprendre les jeunes gens qui auront vingt ans, du 23 Septembre 1806 au 31 Décembre de la même année, afin que cette levée s'opère sur les conserits de 15 mois, et que la levée suivante puisse compter du 31 Décembre 1806 au 31 Décembre 1807, et ainsi de suite d'année en année.

V. M. a jugé que l'intervention du sénat rendrait cette ré gularisation plus solennelle.

Troisièmement, les conscrits se trouveront cette fois ap pélés avant 20 ans d'après ce que je viens d'exposer, et cette détermination nécessaire mais qui par cela même qu'elle est extraordinaire ne doit pas être dans la législation de la con scription, doit être décrétée par le corps qui a reçu la mission de pourvoir, aux cas imprévus, aux besoins urgens de l'empire. Quatrièmement, enfin tout ce qui touche à l'appel des conscrits de l'an 15, qui sera l'an 1806, même ce qui était du domaine de la loi, comme la confection des tableaux, sera fait par des décrets impériaux, et cette utile dérogation au droit commun doit encore être l'ouvrage du séuat.

Parlerai-je à présent, Sire, de la prudence qui ordonne, et du zèle qui exécutera, et du dévouement qui facilitera, et du succès qui suivra cette nouvelle levée de la jeunesse française?

Sire, V. M. l'a déclaré dans son conseil, vos armées ont dèseet instant en hommes, en armes, en munitions tous les moyens de triompher de l'attaque inopinée, de la déloyauté malavisée de vos ennemis.

Une ligue plus nombreuse et plus redoutable se forma na guères contre la France, et ces armées alliées, grossies, enflées comme elles contre les digues que nos bataillons dirigés et guidés par vous leur ont opposées.

Le sentiment aveugle et froid d'une obéissance passive menera au combat les troupes que rassemblent nos ennemis; le sentiment éclairé et brûlant de l'amour de leur patrie et de

fear monarque, précipitera les soldats français au milieu des perils.

Les chefs des puissances et des armées étrangères, séparés d'intérêts entr'eux, s'unissent un moment dans des traités pour se diviser ensuite sur leur exécution.

D'accord dans leurs cabinets. ils le sont rarement durant la campagne, et plus rarement encore les généraux s'entendent sur le champ de bataille.

En France au contraire aux conseils et aux armées un seul esprit unit toutes les âmes, confond tous les intérêts, associe toutes les forces, conçoit toutes ressources, crée tous les moyens, prévoit toutes les difficultés, dispose de toutes les affections, dirige tous les mouvemens, prépare tous les succès, et cet esprit se compose de l'amour, de la coufiance de la nation, et du génie de son chef.

Toutefois, Sire, V. M. sait que, même à ses favoris, la fortune ne donne jamais, et que souvent elle vend chèrement la la victoire; père du peuple, comme de l'armée, vous serez cependant forcé de payer du sang de vos enfans les triomphes auxquels vous les conduirez.

Mais, Sire, un noble sentiment de dévouement et de patriotisme donnera au peuple, comme à l'armée, le courage de vouloir, d'exécuter, de réparer les sacrifices nécessaires, un brave remplacera un brave; dans les bataillons de réserve tou jours complets, V. M. ser sûre de trouver constamment de quoi remp'ir les vuides que les combats auraient laissés dans les bataillons de guerre. Les conscripts que vous appelerez le disputeront de zèle et de fidélité, d'empressement et de bravoure, aux vieux guerriers de vos légions.

J'en atteste, Sire, et cette marche de votre armée des côtes de l'Ocean aux rives du Rhin, cette marche, presque sans séjour, durant laquelle nul soldat ne s'est éloigné de son drapeau; j'en atteste le vœu de ces conscrits désolés d'être condamnés à l'inaction d'un dépôt, et qui ont réclamé leurs places dans les rangs des combattans.

Le peuple français, Sire, vous a remis le droit de vouloir pour lui, et sa volonté libre, fière, courageuse, est comme la vôtre de maintenir l'intégrité de son territoire, et de défendre ses intérêts, sa gloire, et tous les biens qu'elle tient de V. M.

V.M., soutiendra de sa force toute puissante, de l'énergie de ses regards inspirateurs, la force et l'énergie de la nation, et vous ne prononcerez, vous ne lui ferez entendre le nom de paix que quand elle sera par vous victorieuse et vengée.

Tel est, Sire, le vœu de la France à l'accomplissement duquel le sénat va concourir en ordonnant la levée de 80,000 guerriers, qui assureront que nos bataillons et nos escadrons seront toujours renouvelés jusqu'à la dernière victoire.

Quand V. M. dont la personne est infatigable comme la pensée, se fait du travail un devoir qui remplit ses jours et

abrége ses nuits; quand elle va présenter aux hasards de le guerre sa tête auguste, les Français, Sire, nous en jugeons, nous en jurons d'après nos cœurs ne disputeront que d'émula tion, d'empressement, de dévouement; les regrets ne seront que pour ceux qui, soumis à d'autres devoirs ou condamnés à suivre une autre carrière, ne peuvent aspirer à l'honneur de partager les périls et la gloire de vos braves, d'affronter les dangers avec eux et de vaincre ou de mourir sous les yeux de V. M. pour elle et pour la patrie.

Napoléon, par la grace de Dieu et les constitutions de la ré publique, empereur des Français, décrète ce qui suit: Projet de sénatus-consulte.

Extrait des registres du sénat-conservateur, du..... Le sénat-conservateur réuni au nombre de membres prescrit par l'article xc de l'acte des constitutions, du 22 Frimaire, an 8; vu le projet de sénatus-consulte rédigé en la forme pres crite par l'article 57 du sénatus-consulte organique du 16 Thermidor, an 10.

Après avoir entendu les orateurs du conseil d'état et le rapport de sa commission spéciale, uommée dans la séance du....... L'adoption ayant été délibérée au nombre de voix prescrit par l'article 56, du sénatus-consulte organique, du 16 Ther midor, an 10, décrète se qui suit:

Quatre-vingt mille conscrits seront levés en l'an 1806.

L'appel en sera fait aux époques qui seront fixées par des décrets impériaux, ils seront pris parmi les Français nés depuis et y compris le 23 Septembre 1785, jusques et y compris le 31 Décembre 1786.

Le présent sénatus-consulte sera transmis par un message à sa majésté:

"Le projet de sénatus-consulte ci-dessus, dicuté en conseil privé, conformément à l'art. 57, de l'acte des constitutions de l'empire, du 16 Thermidor, an 10, sera présenté au sénat "le Lundi 1er Vendemiaire, an 14, par MM. Regnaud (de "Saint-Jean-d'Angely) et Ségur, conseillers d'état. Au palais de Saint-Cloud, le jour complémentaire, an 13. (Signé) NAPOLEON.

Par l'empereur et roi.

Le secrétaire-d'état. (Signé) H. B. MARET.

Discours de M. de Segur, conseiller-d'état.

Sire, Votre Majesté se voit contrainte d'aller chercher de nou veaux combats, elle y est forcée par l'injuste aggression d'une puissance dont le trône, ébranlé par vos armes, avoit été relevé par votre générosité. La passion de la jalousie fait taire la voix de l'humanité; la séduction ferme les yeux sur les leçons

« PreviousContinue »