Page images
PDF
EPUB

afin qu'il puissent voyager en toute sécurité, et au cas où ils auraient besoin de changer de costume et de porter des armes, personne ne s'y opposera, ni ne leur demandera des cadeaux ni quoi que ce soit. Les préposés des douanes, aux différentes échelles et aux portes de villes ne s'opposeront pas, conformément à ce qui se pratique jusqu'ici, au transport dans la maison du patriarche des produits de sa vigne destinés à sa consommation personnelle, ainsi que du moût, du vin, du beurre, du miel, et autres denrées que les rayàs lui fournissent à titre d'aumônes. Il ne sera demandé ni perçu aucun droit de douane ou de batch tant aux échelles qu'aux portes des villes sur les objets appartenant au patriarche, à ses vicaires, aux évêques et à leurs églises.

Les Arméniens-Catholiques qui embrasseront l'Islamisme, sans arrière-pensée ou un but intéressé, seront naturellement soustraits à l'autorité religieuse du patriarche. Toutefois, on ne violentera aucunement, en cherchant à le leur imposer par la force, ceux qui ne se seront pas convertis de leur plein gré à l'Islamisme.

Si un prêtre catholique doit être emprisonné avec la permission de la justice, il sera détenu chez le patriarche, sans qu'il puisse l'être ailleurs.

Le patriarche susmentionné ne sera inquiété ni pour sa crosse ni pour ses chevaux de selle, ni dans la personne de ses gens, ni pour son costume: de même, ses vicaires et les évêques de l'intérieur ne seront inquiétés ni pour leurs chevaux de selle ni pour leurs bêtes de somme.

Les maisons occupées par les vicaires et les évêques seront exempts de la corvée du logement.

Lorsque des particuliers auront avec les vicaires et les évêques des procès qui doivent être jugés par le Chéri, ces procès seront portés à Constantinople, afin d'y être réglés avec équité et d'après les clauses et les prescriptions des firmans y relatifs.

Conformément à ce qui se pratique à l'égard de ses collègues, le patriarche susmentionné, ainsi que son agent auprès de la Sublime Porte et quinze de ses serviteurs seront exempts du haratch aussi bien que de toute taxe ou imposition comprises dans celles connues sous le nom d'avarizi divanié et tékialifi eurfié.

Le susnommé Nicooghos prendra donc possession du siège patriarcal, et l'occupera en observant les clauses d'investiture ci-dessus énoncées, de manière à les confirmer de plus en plus, et défense est faite à tous et à chacun de lui opposer la moindre contrariété ni résistance. Que tous respectent ce signe impérial.

Donné à Constantinople, etc., etc.

IV. Firman adressé aux chefs des diverses communautés nonmusulmanes, en date de mai-juin 1853 (fin châban 1269). Ceci est mon ordre impérial adressé à... et à ceux qui dépendent de lui.

Le Dieu Tout-Puissant, souverain dispensateur des grâces, après avoir, par sa divine assistance et sa volonté éternelle, élevé ma personne impériale au rang suprême de sultan et à la glorieuse dignité de prince et de calife, a placé sous la juste autorité de mon califat, comme un dépôt particulier et sacré, un grand nombre de pays et de contrées et beaucoup de nations et de populations diverses.

Depuis mon heureux avénement au trône, mon gouvernement impérial, se ralliant à mes intentions sincèrement bienveillantes et à mes vœux réels, et remplissant les devoirs impérieux de la royauté et de la souveraineté, aussi bien que les saintes obligations du califat, n'a pas cessé, avec l'assistance de la faveur divine et les grâces du Tout-Puissant, d'appliquer ses soins les plus actifs et ses efforts les plus persistants à assurer aux sujets de toutes les classes une protection entièrement efficace, et à leur garantir avant tout la jouissance complète des priviléges dont ils ont été investis de tous les temps pour l'exercice de leur culte et l'administration de leurs intérêts ecclésiastiques. Aussi les heureux effets et les résultats salutaires de cette ligne de conduite ne cessent-ils de se manifester au monde.

Le plus cher de mes vœux étant de faire disparaître complètement certains abus que la négligence et la paresse ont peu à peu enracinés et d'en éviter le retour pour l'avenir, je veux et je désire vivement préserver, dans toutes les circonstances, de toute atteinte, les priviléges particuliers que nos glorieux prédécesseurs ont octroyés aux ecclésiastiques de ceux de mes fidèles sujets qui professent la religion grecque, priviléges qui leur ont été conservés et sanctionnés par ma personne impériale; conserver intacts les églises et couvents grecs situés dans mes Etats, avec les biens, immeubles et institutions ecclésiastiques qui en dépendent; garantir le maintien des droits et des immunités dont jouissent ces objets sacrés et leur clergé; en un mot, maintenir les priviléges et les concessions de ce genre formulés dans les berats des patriarches et des métropolitains qui contiennent les anciennes conditions de leur investiture.

C'est pourquoi est publié un ordre péremptoire et souverain, aux termes duquel doivent être répétées et proclamées de nouveau mes intentions impériales à cet égard. Qu'on se garde de porter la moindre atteinte à l'état de choses défini plus haut, et qu'on sache que ceux qui contreviendraient à mon commandement s'exposeraient à ressentir les effets de ma colère impériale.

Cet ordre est porté à la connaissance des autorités compétentes, afin de leur enlever tout moyen d'excuse pour le cas où la moindre négligence à cet égard pourrait leur être reprochée.

Et c'est pour manifester de nouveau ma haute volonté impériale, en ce qui touche la complète et efficace exécution des ordres qui précèdent, que le présent firman est délivré par mon divan impérial. Toi donc, qui es le patriarche susmentionné, quand tu en auras eu connaissance, tu agiras constamment conformément aux prescriptions de ce firman, tu éviteras de l'enfreindre, et si quelque chose arrive de contraire aux résolutions catégoriques qui y sont exprimées, tu t'empresseras de le porter à la connaissance de la Sublime-Porte. Sache-le, et aie foi dans cet auguste seing.

Donné, etc.

V.

Dépêche de lord Stratford de Redcliffe à lord Clarendon, en date du 15 février 1854 (17 djémaziul-éwel 1270)

Milord, j'ai la satisfaction de vous annoncer que le firman, que j'obtins il y a quatre ans, pour que le témoignage des chrétiens en matière criminelle fût reçu, comme celui des mahométans, va être étendu à tout l'empire, non-seulement pour les étrangers résidant en Turquie, mais pour toutes les classes tributaires du sultan sans exception.

Lorsque le premier firman me fut accordé pour régler la procédure devant les tribunaux criminels mixtes du Caire et d'Alexandrie, j'obtins la promesse que les dispositions de ce firman seraient bientôt étendues à tous les rayas de l'empire. Jusqu'à présent, mes efforts réitérés pour obtenir la réalisation de cette promesse ont échoué et je dois l'apparence de succès que je viens d'obtenir à une demande énergique adressée par écrit à Réchid pacha, il y a quelques semaines. Il est triste de voir avec quelle tenacité déraisonnable les professeurs de l'islamisme s'obstinent à faire une mauvaise applica tion de leurs principes religieux.

Dans cette circonstance, toutefois, je pense que le préjugé est vaincu et que le firman, destiné comme il est, à faire disparaître l'injustice la plus criante dont les rayas aient souffert depuis des siècles, recevra bientôt l'approbation du sultan, outre l'approbation du conseil, avec laquelle il a été soumis à Sa Majesté.

J'ai l'honneur, etc.

ANNEXE

Je donne cet ordre (1) à mon vizir Mehmed pacha, vali de la province de Salonique.

Conformément à ce qui est connu de tout le monde, et comme je l'ai déjà plusieurs fois publié par les ordres souverains qui ont été envoyés en trois lieux; animé comme je le suis, par la grâce de Dieu, d'une active sollicitude pour le bien-être de mes sujets, toutes mes pensées ont été dirigées, en tout temps et en toute occasion, vers le but que je me propose, savoir, d'assurer la paix et la tranquillité de mes sujets et de rendre mon empire prospère. C'est avec ces vues salutaires que le Tanzimat et plusieurs lois et règlements qui en sont la conséquence ont été établis avec l'aide de Dieu, et les nombreux avantages qui en sont résultés sont bien apparents. Et comme je désire beaucoup que toutes les questions relatives à des demandes judiciaires et à des règlements de police soient convenablement examinées, afin que les sujets et habitants de mes Etats n'aient à se plaindre de rien sous ce rapport, j'ai établi depuis quelque temps un tribunal de commerce et un tribunal criminel à Constantinople; d'autres ont été établis dans quelques-unes des villes les plus importantes de mon empire, et les avantages qu'ils présentent sous tous les rapports, soit pour mes sujets ottomans, soit pour les étrangers, sont manifestes. C'est pour cela qu'une commission spéciale a été prise dans le conseil d'Etat et chargée de l'organisation de tribunaux semblables à ceux dont nous avons plus haut, pour qu'ils soient établis dans les autres villes de nos Etats, lorsqu'on le jugera convenable. Ce projet a été discuté et étudié sous toutes ses faces, et le mazbata du conseil a été lui aussi sérieusement étudié par le conseil de mes ministres. Comme les fonctions des cours criminelles consisteront seulement à prendre connaissance des faits et à juger les sujets de ma Sublime-Porte qui pourront être coupables de délits contre les sujets des puissances étrangères, et aussi les sujets étrangers qui pourront être coupables de meurtre, de vol ou d'autres délits contre les sujets de ma Sublime-Porte; comme le but réel de l'établissement de ces tribunaux est de constater la vérité au moyen d'informations de toute sorte et de recherches faites avec soin, afin d'établir équitablement le crime ou l'innocence de l'accusé et d'empêcher les coupables d'échapper au châtiment qui doit leur être in

(1) Adressé d'abord au vali de Salonique, ce firman fut ensuite envoyé à tous les gouverneurs des provinces, avec le règlement y annexé dont nous le faisons suivre. Le firman est daté du mois de djemaziul-éwel 1270 (février 1854).

fligé d'après l'équité et le Code pénal, une fois les faits prouvés, des tribunaux seront établis sous la dénomination de medjlis-tahkika (tribunaux d'instructions) semblables au tribunal de police qui existe dans ma capitale et dans plusieurs villes importantes des provinces, indépendamment de ceux qui existent déjà dans d'autres lieux.

Ces tribunaux seront chargés exclusivement de l'examen des atfaires qui peuvent s'élever entre les musulmans et les chrétiens et toute autre classe de mes sujets, aussi bien entre les sujets de la Sublime-Porte et les sujets étrangers relativement aux crimes qui peuvent avoir été commis. Le but de l'établissement de ces tribunaux est de constater et prouver d'une manière satisfaisante les crimes qui pourront être commis afin que l'innocent n'en souffre pas.

Les gouverneurs et les officiers de police feront la plus grande attention à faire exécuter les règlements établis pour ces tribunaux ; ils auront soin de ne pas violer les principes qui y sont posés et ne manqueront point d'employer tous leurs efforts à faire observer strictement les règles qui y sont établies. Les personnes employées dans ces tribunaux doivent être, comme il est dit dans un article du règlement, des hommes justes, droits, doués d'un jugement sain, d'un caractère éprouvé, choisis parmi les membres du grand conseil municipal et autres personnes convenables. Il y aura un ou deux greffiers, selon le district, et ma Sublime-Porte sera informée des arrangements qui auront été pris.

Voilà ce qui a été jugé convenable par les membres de la commission, et mes ordres m'ayant été demandés à ce sujet, j'ai voulu que ce qui avait été décidé fût exécuté, et je vous transmets en conséquence copic du règlement sus-indiqué. Vous devez donc, vali, dès que vous en aurez pris connaissance, établir le tribunal en question, d'après votre jugement et votre discrétion, de la manière prescrite ci-dessus; vous nommerez et choisirez les membres du tribunal, et vous informerez ma Sublime-Porte de ce que vous aurez fait. Vous devrez avoir soin que les affaires qui pourront survenir soient examinées et dirigées conformément à ce règlement avec la plus stricte impartialité et la plus grande justice, que le crime de l'accusé soit complètement prouvé et établi et que l'innocent ne souffre pas.

RÈGLEMENT POUR LES TRIBUNAUX D'INSTRUCTION CRIMINELLE.

Le tribunal d'instruction criminelle n'a rien de commun avec le conseil municipal ni avec le tribunal de commerce. Il sera organisé

« PreviousContinue »