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Ce principe a toujours été maintenu, et si, dans des occasions. rares et exceptionnelles, il a été permis à quelques bâtiments de guerre de franchir les Détroits, ce fut toujours en vertu d'une autorisation spéciale accordée par déférence pour les hauts personnages qui étaient à leur bord.

La Sublime-Porte reconnaît toutefois qu'un relâchement dans la stricte application dudit principe à l'égard des bâtiments de guerre, en dehors des exceptions prévues par les articles 2 et 3 de la convention du 30 mars 1856, ne serait pas compatible avec la déclaration contenue dans le traité de Paris précité.

Aussi a-t-elle décidé que désormais il n'y aura absolument d'autre exception que pour celui des bâtiments de guerre sur lequel se trouverait un Souverain ou le Chef d'un État indépendant.

La décision qui précède ayant été sanctionnée par S. M. I., j'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien la porter à la connaissance du Gouvernement de.....

Agréez, etc.

IV. — Dépêche de l'ambassadeur de France (M. Bourée) à Constantinople, au mlnistre des affaires étrangères (marquis de Moustier), en date du 29 septembre 1868 (11 djémaziul-akhir 1285).

Monsieur le Marquis,

La venue à Constantinople de M. l'amiral Ferragut, et certaines difficultés auxquelles avait donné lieu la demande des États-Unis. de laisser venir le Franklin mouiller devant Constantinople, avaient prédisposé la Porte à rendre désormais tout malentendu impossible, en renonçant formellement, pour l'avenir, au droit qu'elle s'était attribué de déroger aux stipulations du traité de Paris.

La note ci-jointe, qui vient de m'être adressée ainsi qu'à mes collègues, établit que désormais il ne sera fait d'exception à l'interdiction du passage des Détroits que pour les bâtiments qui porteraient des Souverains ou des Chefs d'États indépendants.

Veuillez agréer, etc.

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N° 2. Une restriction à la liberté de navigation, stipulée par les traités, est apportée par la défense faite aux bâtiments marchands de franchir les Détroits, de nuit. Il n'y a d'exception que pour les paquebots-poste du Lloyd autrichien et des Messageries françaises. Par une note identique du 27 novembre 1867, tous les représentants des Puissances étrangères, à l'exception des ambassadeurs d'Autriche et de France, ont demandé à la Sublime-Porte que le passage, de nuit, des Détroits, fût libre pour tous les navires marchands à voiles ou à vapeur.

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I. Note de la Sublime Porte aux représentants étrangers, en date du 7 août 1862 (10 sâfer 1279).

Monsieur,

J'ai l'honneur de vous informer que la Sublime-Porte autorise à naviguer, la nuit, dans le Bosphore, les bâtiments marchands, soit à vapeur, soit à voiles, qui auront franchi les détroits des Dardanelles et de la mer Noire, après avoir rempli les formalités d'usage. Par mesure de sûreté générale, et afin d'éviter les accidents fâcheux, les remorqueurs resteront seuls en dehors de cette autorisation. En portant cette décision à la connaissance, etc.

II.

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Note identique adressée par les représentants étrangers (1) au ministre des affaires étrangères (Fuad Pacha) de la Sublime Porte, en date du 27 novembre 1867 (30 rédjeb 1284).

Monsieur le ministre, je suis persuadé qu'il entre dans les vues de la Sublime-Porte de témoigner aux intérêts du commerce et de la navigation une sollicitude égale à l'attention qu'il est du devoir des représentants étrangers de vouer à cette branche importante des relations de leur pays avec l'empire ottoman.

En conséquence, j'ai l'honneur de soumettre à l'appréciation éclairée de V. E. le mémoire ci-joint relatif à une question de la plus haute importance pour la marine de toutes les nations.

Ce travail contient l'exposé des motifs qui militent en faveur de l'abrogation immédiate de l'onéreuse restriction qu'un usage suranné fait peser sur les navires de commerce à vapeur et à voiles en leur interdisant de traverser de nuit les Dardanelles et le Bosphore.

Le maintien de cette interdiction serait d'autant moins justifiable que depuis longtemps déjà des charges considérables sont imposées à la navigation pour l'éclairage des détroits dont, dans l'état actuel, elle ne peut guère profiter.

Au reste, la Sublime-Porte elle-même semble avoir reconnu, du moins en partie, les inconvénients de la situation, puisqu'elle l'a modifiée en faveur des paquebots-poste. Plus tard, en novembre 1865, l'idée de la libre navigation dans les détroits en temps de nuit a été également admise pour tous les bateaux à vapeur, bien que ce principe n'ait pas encore reçu d'application.

Et pourtant les mêmes inconvénients se font sentir dans une mesure bien plus grande pour les bâtiments à voile, sans qu'aucune raison plausible paraisse justifier les difficultés qu'ils subissent.

(1) A l'exception des ambassadeurs d'Autriche et de France.

Dans l'espoir que V. E. voudra bien prendre en sérieuse considération l'objet important de la présente communication, je crois devoir la prier d'appeler aussitôt que possible la délibération du conseil de santé sur la double question:

1° De l'application à tous les bateaux à vapeur de la franchise accordée aux paquebots;

2o De l'extension immédiate de cette même franchise aux navires à voiles.

Lorsque cette délibération aura indiqué les moyens de concilier les nécessités de la surveillance et les intérêts de la santé publique avec ceux du commerce maritime, la Sublime-Porte n'hésitera plus, je pense, à lever les entraves qui s'opposent jusqu'ici à la navigation dans les détroits.

Veuillez agréer, etc.

ANNEXE.

D'après une règle établie depuis longtemps, il est défendu aux bâtiments de commerce à voile et à vapeur de traverser de nuit le canal des Dardanelles et celui de la mer Noire et les navires qui tentent de les franchir sont arrêtés par le canon (1) des forteresses existant à ces détroits. Cette défense ne concerne pas seulement les bâtiments provenant de l'archipel et de la mer Noire en destination de Constantinople, mais elle s'étend aussi aux navires qui partent de la capitale pour sortir des détroits et poursuivre leur voyage dans la Méditerranée et la mer Noire.

Par suite de la position topographique du canal des Dardanelles et de la mer Noire, les bâtiments qui observent la règle en question sont exposés à des dangers et dommages qui varient selon la direction qu'ils suivent. Ainsi les navires qui veulent pénétrer de nuit dans l'embouchure du Bosphore ne peuvent pas avancer au-delà de Bouyukliman. C'est un mouillage de la côte européenne du Bosphore située à l'entrée du canal et où les bâtiments ne sont pas sufsamment abrités en hiver contre la fureur des éléments. Les navires qui arrivent à l'entrée du détroit des Dardanelles, à l'entrée de la nuit, sont obligés de s'arrêter malgré le vent favorable et de jeter l'ancre à des endroits dangereux tant par eux-mêmes que par le grand nombre d'autres navires qui encombrent parfois ces parages. Ces bâtiments sont souvent forcés d'y attendre des mois entiers

(1) V. la note de la Sublime Porte, du 24 juillet 1844, au tome III, page 61.

le vent favorable dont ils ont besoin pour franchir de jour le détroit des Dardanelles. Finalement, il y a les bâtiments chargés qui viennent de Constantinople et de la mer de Marmara jusqu'à l'entrée du détroit des Dardanelles, et lesquels ne pouvant pas traverser de nuit le canal, sont contraints de s'arrêter à l'embouchure du détroit. La force des courants et la violence du vent les exposent fréquemment à des abordages et à d'autres avaries et, s'ils ont même la chance d'échapper à ces dangers, la rapidité de leur voyage n'en subit pas moins un retard des plus préjudiciables.

Il y a peu d'années, la Sublime-Porte a établi le système des phares qui servent à l'éclairage des détroits des Dardanelles et de la mer Noire, et elle a exigé, en même temps, des navires qui franchissent ces détroits, le payement d'un droit de phare très élevé. On avait alors tout lieu de croire que cette nouvelle charge imposée à la navigation serait compensée par la permission de traverser de nuit les deux détroits susmentionnés. Mais cette faculté continue à être interdite aux navires, tandis qu'ils sont toujours obligés d'acquitter le droit de phare pour l'éclairage des détroits dont il s'agit.

Par dérogation à la règle établie, il est permis depuis quelque temps aux paquebots-poste du Lloyd autrichien de Trieste et de la compagnie des Messageries impériales de France, de franchir de nuit le détroit des Dardanelles et ces pyroscaphes peuvent ainsi poursuivre leur voyage des Dardanelles à Constantinople, sans éprouver la moindre perte de temps.

Nous constatons avec plaisir que la Sublime-Porte, en faisant en faveur de ces paquebots-poste, l'exception susénoncée, a été la première à reconnaître tous les inconvénients qu'il y avait à retarder la marche de ces pyroscaphes par une mesure administrative dont le maintien ne semble plus nécessaire. Cet exemple et les témoignages irrécusables que nous recueillons tous les jours de la sollicitude éclairée des ministres actuels de la Sublime-Porte pour les intérêts du commerce et de la navigation, nous autorisent à croire que cette dernière voudra bien reconnaître l'opportunité de supprimer entièrement la mesure dont il s'agit et mettre ainsi, une fois pour toutes, la navigation à l'abri des dangers qu'elle court actuellement dans les parages de la mer Noire et des Dardanelles.

Si le gouvernement de S. M. I. le sultan se décidait à prendre cette sage résolution, il peut être sûr d'avance du concours empressé de toutes les légations européennes, afin de substituer à la défense dont il s'agit les mesures nécessaires qu'il y aurait à prendre pour la remise des firmans que les navires sont tenus de consigner aux autorités à leur sortie des détroits.

III.— Mémoire (1) communiqué par le chargé d'affaires (M. Stenersen) de Suède et de Norwége aux autres représentants étrangers à Constantinople en 1867 (1284).

Le passage des navires dans les détroits des Dardanelles et du Bosphore est assujetti à un certain nombre de mesures qui entravent leur navigation et les exposent à des préjudices et à des dangers réels sans qu'il en résulte pour le Gouvernement Ottoman ni les avantanges ni les garanties en vue desquels il les a prescrites. On peut résumer les mesures comme il suit :

1° Tout navire arrivant de l'Archipel dans le détroit des Dardanelles est obligé de s'arrêter pour prendre la pratique dans un des cinq postes quarantenaires situés dans le dit détroit, avant de pou voir continuer sa route pour Constantinople, et une fois arrivé là, il est de nouveau obligé de prendre la pratique.

2° Aucun navire ne peut franchir les forteresses des Dardanelles, ni celles de l'entrée de la mer Noire, après le coucher du soleil.

3o Tout navire descendant les Dardanelles doit s'arrêter devant la forteresse de ce détroit pour délivrer son firman et montrer sa quittance de phare.

Pour mettre l'inutilité de ces mesures en évidence, il suffit de faire les observations suivantes :

Ad. 1. Au point de vue sanitaire, il ne saurait y avoir de danger à permettre à un navire ayant patente nette, et lorsqu'il ne règne point d'épidémie, de continuer sa route pour Constantinople et prendre pratique dans ce port.

Dans tous les autres ports de la Méditerranée qui reçoivent des navires des mêmes provenances que Constantinople, on n'exige nullement que le navire prenne libre pratique à deux différentes étapes.

D'ailleurs avant l'été de 1858, époque de la peste de Benghasi, il était permis à tout navire muni de patente nette et quand la santé était bonne, de continuer sa route pour Constantinople; et si, après la cessation de ce fléau on n'est pas revenu à l'ancien état de choses, ce n'est certainement pas dans l'intérêt de la santé publique.

Le désir de conserver une source de revenus, représentant une somme très-importante à cause de milliers de navires qui remontent

(1) Ce mémoire est de M. Bodtker, chancelier de la légation de Suède et de Norwège, qui déploie le plus grand zèle pour les intérêts de la navigation et du commerce maritime.

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