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avant d'en venir à l'effet, et dans l'intention sincère de prévenir de nouvelles atteintes, elle a cru être de sa justice d'exposer aux vœux de l'Europe les principes qu'elle va suivre, et qui sont propres à lever tout malentendu et ce qui pourrait y donner lieu. Elle le fait avec d'autant plus de confiance, qu'elle trouve consignés ces principes dans le droit primitif des peuples, que toute nation est fondée à réclamer, et que les puissances belligérantes ne sauraient les invalider sans violer les lois de la neutralité, et sans désavouer les maximes qu'elles ont adoptées, nommément dans différents traités et engagements publics. Ils se réduisent aux points qui suivent:

10 Que les vaisseaux neutres puissent naviguer librement de port en port et sur les côtes des nations en guerre;

2o Que les effets appartenant aux sujets des dites puissances en guerre soient libres sur les vaisseaux neutres, à l'exception des marchandises de contrebande;

3° Que l'impératrice se tient, quant à la fixation de celles-ci, à ce qui est énoncé dans les art. X et XI de son traité de commerce avec la Grande-Bretagne, en étendant ces obligations à toutes les puissances en guerre;

4° Que pour déterminer ce qui caractérise un port bloqué, on n'accorde cette dénomination qu'à celui où il y a, par la disposition de la puissance qui l'attaque avec des vaisseaux arrêtés et suffisamment proches, un danger évident d'entrer;

5° Que ces principes servent de règle dans les procédures et les jugements sur la légalité des prises.

S. M. I. les manifestant, ne balance point de déclarer que pour les maintenir et afin de protéger l'honneur de son pavillon, la sûreté du commerce et de la navigation de ses sujets contre qui que ce soit, elle fait appareiller une partie considérable de ses forces maritimes. Cette mesure n'influera cependant d'aucune manière sur la stricte et rigoureuse neutralité qu'elle a saintement observée et qu'elle observera tant qu'elle ne sera provoquée et forcée de sortir des bornes de modération et d'impartialité parfaite. Ce n'est que dans cette extrémité que sa flotte aura ordre de se porter partout où l'honneur, l'intérêt et le besoin l'appelleront.

En donnant cette assurance formelle avec la franchise propre à son caractère, l'impératrice ne peut que se promettre que les puissances belligérantes, pénétrées des sentiments de justice et d'équité dont elle est animée, contribueront à l'accomplissement de ses vues salutaires, qui tendent si manifestement à l'utilité de toutes les nations et à l'avantage même de celles en guerre; qu'en conséquence elles muniront leurs amirautés et officiers commandants, d'instructions analogues et conformes aux principes ci-dessus énoncés, pui

sés dans le code primitif des peuples et adoptés si souvent dans leurs conventions.

III. Décret (extrait) de l'empereur Napoléon Io, en date de Berlin, le 21 novembre 1806 (10 ramazan 1221).

Napoléon, empereur des Français, roi d'Italie, considérant:

1° Que l'Angleterre n'admet point le droit des gens suivi universellement par tous les peuples policés; 2° qu'elle répute ennemi tout individu appartenant à l'État ennemi, et fait en conséquence prisonniers de guerre, non-seulement les équipages des vaisseaux armés en guerre, mais encore les équipages des vaisseaux de commerce, et des navires marchands, et même les facteurs du commerce et les négociants qui voyagent pour les affaires de leur négoce; 3° qu'elle étend aux bâtiments et marchandises du commerce et aux propriétés des particuliers, le droit de conquête, qui ne peut s'appliquer qu'à ce qui appartient à l'État ennemi; 4° qu'elle étend aux villes et ports de commerce non fortifiés, aux hâvres et aux embouchures des rivières le droit de blocus qui, d'après la raison et l'usage de tous les peuples policés, n'est applicable qu'aux places fortes; qu'elle déclare bloquées des places devant lesquelles elle n'a pas même un seul bâtiment de guerre, quoiqu'une place ne soit bloquée que quand elle est tellement investie qu'on ne puisse tenter de s'en approcher sans un danger imminent; qu'elle déclare même en état de blocus des lieux que toutes ses forces réunies seraient incapables de bloquer, des côtes entières et tout un empire; 5° que cet abus monstrueux du droit de blocus n'a d'autre but que d'empêcher les communications entre les peuples et d'élever le commerce et l'industrie de l'Angleterre sur la ruine de l'industrie et du commerce du continent; 6° que tel étant le but évident de l'Angleterre, quiconque fait sur le continent le commerce des marchandises anglaises, favorise par là ses desseins et s'en rend le complice; 7° que cette conduite de l'Angleterre, digne en tout des premiers âges de la barbarie, a profité à cette puissance au détriment de toutes les autres; 8° qu'il est de droit naturel d'opposer à l'ennemi les armes dont il se sert et de le combattre de la même manière qu'il combat, lorsqu'il méconnaît toutes les idées de justice et tous les sentiments libéraux, résultat de la civilisation parmi les hommes. Nous avons résolu d'appliquer à l'Angleterre les usages qu'elle a consacrés dans sa législation maritime.

Les dispositions du présent décret seront constamment considérées comme principe fondamental de l'empire jusqu'à ce que l'Angleterre ait reconnu que le droit de la guerre est un, et le même sur terre que sur mer, qu'il ne peut s'étendre ni aux propriétés pri

vées quelles qu'elles soient, ni à la personne des individus étrangers à la profession des armes, et que le droit de blocus doit être restreint aux places fortes réellement investies par des forces suffi

santes.

Nous avons, en conséquence, décrété, etc.

IV. — Dépêche (1) du ministre des affaires étrangères de France (M. de Châteaubriand) au chargé d'affaires des Etats-Unis d'Amérique (M. Sheldon), en date du 29 octobre 1823 (23 sâfer 1239).

Monsieur, votre gouvernement a exprimé le désir de voir le système suivi par la France dans les opérations maritimes de la dernière guerre devenir la règle universelle de toutes les nations civilisées et chrétiennes, et vous m'avez fait l'honneur de m'informer, le 13 de ce mois, que les Etats-Unis s'efforcent, autant qu'il est en leur pouvoir, d'établir pour principe: que la propriété individuelle sur mer doit être sacrée en temps de guerre.

Vous pouvez juger, Monsieur, par la mesure que S. M. a adoptée de ne point accorder des lettres de marque à des particuliers et de favoriser la navigation et le commerce, lorsque leurs opérations n'ont point un caractère hostile, combien elle désire que les circonstances lui permettent toujours d'adopter les mêmes principes de modération, et de s'attendre à ce que les autres Puissances suivent un pareil système et observent une parfaite réciprocité.

Si l'essai fait avec succès par la France peut induire tous les gouvernements qui sont intéressés dans une question si digne d'être profondément étudiée, de s'entendre sur l'adoption d'un principe général qui, en temps de guerre, poserait de sages limites aux opérations maritimes et s'accorderait avec les sentiments d'humanité, S. M. se félicitera encore plus d'avoir donné cet exemple salutaire et d'avoir prouvé que, sans compromettre l'issue de la guerre, ce fléau peut être diminué.

Veuillez recevoir, Monsieur, l'assurance, etc.

V.

Note du ministre des affaires étrangères de Russie (comte de Nesselrode) au ministre des Etats-Unis (M. Middleton), à SaintPétersbourg, en date du 1er février 1824 (30 djémaziul-éwel 1239).

Le soussigné, conseiller privé, dirigeant le département impérial des affaires étrangères, s'est fait un devoir de soumettre à l'empereur, son auguste maître, la note que M. Middleton, envoyé extraordinaire

(1) Les pièces originairement françaises n. IV, V et XI sont traduites ici de l'anglais.

et ministre plénipotentiaire des Etats-Unis d'Amérique, lui a transmise pour lui communiquer le projet d'une convention en vertu de laquelle le principe de l'inviolabilité de la propriété privée deviendrait sacré dans toute guerre maritime.

Vers la fin du XVIIIe siècle, la Russie posa les fondements d'un système de neutralité armée, qui a contribué essentiellement à empêcher que le malheur d'une guerre maritime ne fût aggravé par l'interruption totale des relations de commerce.

Le cabinet de Saint-Pétersbourg a vu, en ce temps-là, la plus grande partie des puissances européennes apprécier hautement ces intentions; et il n'a pu qu'être excessivement agréable à l'empereur de se convaincre que, même aujourd'hui, un Etat, dont la marine fait les progrès les plus rapides, rappelle et reproduit les vues salutaires de son auguste et glorieuse grand' mère. S. M. impériale pense qu'elle a prouvé, pour sa part, non seulement qu'un de ses premiers désirs a été constamment de diminuer les horreurs de la guerre, mais aussi qu'il fait volontiers des sacrifices pour sauver le monde de ce terrible fléau.

L'empereur, par conséquent, applaudit sincèrement à l'esprit de la convention qui lui a été proposée par le cabinet de Washington.

Si les gouvernements de notre temps suivaient les calculs étroits d'une vieille politique; s'ils prenaient seulement leurs intérêts pour règle de leurs résolutions au sujet de la convention en question, on pourrait peut-être objecter à cela que plus les ressources privées d'un Etat donnent de l'extension et de l'activité au commerce maritime, plus ce commerce est exposé en temps de guerre, aux entreprises des corsaires, et que les lettres de marque sont les seuls moyens qui restent à des puissances dont la marine est moins employée et moins nombreuse, pour rétablir l'équilibre entre des forces inégales et pour s'assurer une compensation; mais, on le répète, car les calculs ne guideront jamais les cabinets qui ont prouvé qu'ils ne peuvent pas faire de tels avantages l'objet de leurs désirs, et qui, par leurs maximes connues, s'empresseront, sans doute, de rendre justice aussi bien aux motifs qu'aux conséquences d'une proposition dont l'idée fait honneur au gouvernement des EtatsUnis.

Il y a, toutefois, une considération qui n'a pas pu échapper à M. Middleton.

Le principe que les Etats-Unis invitent l'empereur à reconnaître et à sanctionner ne sera d'une utilité réelle que tout auant qu'il aura une application générale. Toute convention isolée que le cabinet de Saint-Pétersbourg concluerait à ce sujet avec celui de Washington,

aura d'autant moins d'effet que, heureusement, une guerre entre la Russie et l'Amérique du Nord doit être rangée au nombre des événements les plus éloignés, les plus improbables, et c'est seulement par le consentement de toutes les autres puissances maritimes que les mesures indiquées pourront produire les effets qu'on a en

vue.

En conséquence, S. M. Impériale charge le soussigné de déclarer, pour sa part, qu'elle apprécie pleinement la conduite du gouvernement américain; qu'elle partage les opinions et les désirs exprimés par la note de M. Middleton, et qu'aussitôt que les puissances dont le consentement est considéré comme indispensable, auront témoigné les mêmes dispositions, elle ne manquera pas d'autoriser son ministre à discuter les différents articles d'un acte qui sera une couronne de gloire pour la diplomatie moderne.

En exécutant, par la présente communication, les ordres de l'empereur, son maître, le soussigné saisit avec empressement cette occasion pour offrir, etc.

VI.

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Résolution prise par la Chambre de Commerce de New-York le.... mars 1854 (djémaziul-akhir 1270)

1. Que, dans l'opinion de cette Chambre, le système de guerre maritime par l'aide des corsaires est contraire aux idées de saine justice et incompatible avec les principes d'humanité, et que le temps est venu où il ne doit plus être toléré par les nations civilisées.

2. Que les déprédations exercées par les corsaires à l'égard des propriétés privées causent beaucoup de malheurs individuels et de ruines d'une part, sans bénéfices nationaux suffisants d'autre part. Que la guerre moderne peut être conduite d'une manière efficace sans avoir recours à ces moyens de vexations et de pillage qui retombent presque exclusivement sur les caisses commerçantes.

3. Que les efforts que fait aujourd'hui l'Europe pour supprimer les corsaires par des conventions diplomatiques dans le vieux monde appellent le concours du gouvernement des Etats-Unis.

4. Que le traité conclu entre les Etats-Unis et la Russie en 1785, négocié par le prévoyant et intelligent Franklin, et par lequel les deux gouvernements s'engageaient à ne pas donner de lettres de marque, démontre la politique de cette époque qui est bien digne d'être appuyée aujourd'hui.

5. Que cette Chambre constate avec une vive satisfaction la proposition de M. Gibson dans la Chambre des communes, le 17 mars, priant S. M. de donner des instructions aux commandants de vaisseaux royaux, en cas de guerre, à l'effet qu'ils s'abstinssent de se. mêler des vaisseaux neutres au sujet des articles qui ne sont pas de

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