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les populations comprendront ses intentions bienveillantes à leur égard, et que l'Assemblée conformera ses actes au sens de la déclaration. La déclaration prescrit la ligne de conduite que les consuls ont à suivre, et la Conférence ne doute pas du zèle que vous mettrez, conjointement avec vos collègues, à veiller à l'exécution de la décision qu'elle porte à votre connaissance.

Vous voudrez bien inviter le gouvernement provisoire à insérer dans le Journal officiel le texte du document ci-annexé, et m'infor mer, par télégraphe, de cette publication.

IV. Dépêche du marquis de Moustier à M. Drouyn de Lhuys, en date de Péra, 2 mai 1866 (16 zilhidjé 1282).

M. le Ministre, Aali-Pacha est extrêmement satisfait des concessions que, dans la dernière Conférence, Votre Excellence a faites au point de vue qui domine à Constantinople. Je lui ai bien fait comprendre que notre opinion restait la même, et qu'en en faisant momentanément le sacrifice, dans l'impossibilité où nous étions de faire admettre notre point de vue par le Gouvernement turc, nous laissions à ce dernier la responsabilité des résultats qui pourraient être la conséquence de son système.

Veuillez agréer, etc.

V.

Dépêche de M. Drouyn de Lhuys au marquis de Moustier, en date de Paris, le 4 mai 1866 (18 zilbidjé 1282).

Monsieur le Marquis, les dispositions manifestées par Aali-Pacha dans l'entretien que vous avez eu avec lui sur les affaires des Principautés, s'accordent trop bien avec le langage que M. l'Ambassadeur de Turquie tient ici dans la Conférence pour que j'aie pu en être surpris. Il est vraiment regrettable de voir le Gouvernement ottoman méconnaître à ce point les véritables intérêts de sa politique.

La Conférence, dans sa dernière séance, qui a eu lieu avant-hier, a arrêté les termes d'une déclaration destinée à rappeler au Gouvernement provisoire de Bucharest, et par lui à l'Assemblée qui va se réunir, les obligations résultant des stipulations internationales en ce qui concerne l'élection hospodarale. Les Plénipotentiaires ont également, sur la proposition du comte Cowley, adopté une dépêche à adresser aux Agents des Cours garantes en leur envoyant la déclaration. Je vous envoie copie de ces deux documents, qui ont été transmis à l'issue de la séance, par la voie télégraphique, aux Consuls respectifs, et ont dû l'être ensuite par la poste, chacun des Plénipotentiaires étant autorisé à correspondre directement, dans

cette circonstance, avec l'Agent de son Gouvernement à Bucharest. Dans la même séance, M. l'Ambassadeur de Turquie a appelé l'attention de la Conférence sur l'utilité qu'il y aurait à ce que la Porte pût envoyer dans les Principautés un délégué ou un commissaire qui aurait pour mission de veiller, de concert avec les Consuls, à assurer la sincérité des votes. Cette suggestion, sur laquelle Safvet-Pacha n'a pas d'ailleurs insisté, a été écartée, par la raison qu'elle ne rentrait pas dans le cas prévu par les stipulations antérieures.

Agréez, etc.

VI. - Circulaire de M. Ion Ghika, ministre de affaires étrangères à MM. les agents des puissances garantes en date du 12 mai 1866 (26 zilhidjé 1282).

Monsieur l'Agent,

Le peuple roumain des Principautés-Unies se prononce en ce moment par un plébiscite pour un nouveau prince qui doit régner à titre héréditaire sur ce pays.

Dans les villes et les campagnes tout le monde vote avec le plus grand enthousiasme.

Déjà, à l'heure qu'il est, la nation, à la presque unanimité, a destiné la couronne des Principautés-Unies à S. A. le prince Charles-Louis de Hohenzollern.

Je viens, monsieur l'Agent, vous exposer d'une manière succincte les raisons qui ont dicté au Gouvernement provisoire la détermination qu'il vient de prendre.

La déclaration officielle par laquelle M. le ministre des affaires étrangères de S. M. le roi Léopold II a fait connaitre aux délégués que monseigneur le comte de Flandre n'avait pas jugé pouvoir répondre à l'appel du peuple roumain a de nouveau fait naître des espérances illusoires dans l'esprit de quelques ambitieux.

Ces hommes et leurs adhérents, interprétant le refus de S. A. R. le comte de Flandre d'une manière malveillante, portaient le doute, le trouble et le découragement dans l'esprit des populations.

L'activité de menées dues à des visées personnelles ou ayant pour objet la satisfaction d'intérêts politiques, ne concourait pas peu à inspirer des inquiétudes au Gouvernement; il lui était d'autant plus difficile de conserver des doutes sur la nature, les tendances et la gravité des menées en question, que leurs fauteurs, par leurs noms et leur protection, portaient quelques crédules à leur attribuer un puissant appui de l'extérieur, et d'ailleurs comme ils disposaient de grands moyens pécuniaires, dans un moment de

crise et même de misère, je puis le dire, il leur était aisé d'effectuer des enrôlements pour leur coupable entreprise.

Dépourvu de l'autorité morale, attribut exclusif des pouvoirs reconnus, le Gouvernement provisoire se trouve placé, on voudra bien le reconnaître, dans une position que le sentiment profond de son devoir pouvait seul faire tolérer.

La considération de toutes ces causes de danger, jointe aux assertions de quelques journaux répandus avec profusion par des colporteurs, intéressés à présenter les vaines appréciations de certains organes de la publicité européenne comme l'expression fidèle des puissances respectives: tous ces motifs ont fait que le Gouvernement s'est hâté de proposer à l'élection directe du pays un candidat nouveau dans la personne du prince Charles-Louis de Hohenzollern.

C'est à ces fins et pour couper court un moment plus tôt aux menées et intrigues de toutes sortes que le Gouvernement s'est cru en devoir de faire d'un côté des démarches auprès d'un nouveau candidat au trône, et, d'autre part, de soumettre cette candidature à l'appréciation de la nation.

Les qualités personnelles du prince Charles-Louis de Hohenzellern, l'illustration de son nom, les hautes alliances de sa famille, la conviction qu'il réalise, en outre, les conditions voulues pour entraîner l'assentiment général des puissances, ont été autant de motifs qui ont guidé le Gouvernement provisoire dans le choix sur lequel la nation se prononce en ce moment avec enthousiasme par la voie d'un plébiscite.

Sans se préoccuper de savoir si les circonstances de l'élection de S. A. R. le comte de Flandre, par une assemblée dont la formation pouvait mettre en suspicion la qualité, ne sont pas entrées pour quelque chose dans les motifs qui ont porté l'élu à décliner l'offre de la couronne, le Gouvernement provisoire a jugé que, quelle que fût l'autorité d'une future assemblée résultant du libre suffrage, cette autorité ne saurait toutefois équivaloir à celle dont est empreinte la manifestation d'un vou directement exprimé par l'ensemble de la nation elle-même, dès lors exclusif de toute idée d'influence interne ou externe, partant, et offrant tous les caractères de la sincérité la moins contestable.

En portant cette détermination à votre connaissance, je me plais à espérer, monsieur l'Agent, que les raisons qui l'ont dictée seront comprises et appréciées par le gouvernement que vous avez l'honneur de représenter et que le résultat que nous en attendons sera d'autant mieux et plus généralement accepté que tout en n'étant pas de nature à apporter aucune modification dans nos rela

tions avec la Sublime-Porte et les puissances garantes, il est fait pour mettre fin à une situation dont nous avons à tant de reprises dénoncé les périls.

En avisant au seul moyen capable de faire entrer les Principautés dans une voie d'ordre, de tranquillité et de prospérité, le Gouvernement croit correspondre aux intentions bienveillantes exprimées par la Conférence et appeler davantage sur le pays roumain une bienveillance dont il s'efforcera de se rendre digne.

Nous avons la ferme conviction que la Conférence de Paris, appelée à décider sur le sort des Principautés, saura faire une distinction entre les voeux du pays entier et les aspirations ambitieuses et coupables des meneurs isolés qui ont réussi à entraîner dans une manifestation repoussée par toute la nation, quelques malheureux, presque tous étrangers, contre lesquels à Jassy on a dû employer la force armée.

En montrant une fois de plus combien ce parti est faible, cette tentative atteste en même temps la véritable volonté du pays.

VII.

Dépêche du marquis de Moustier à M. Drouyn de Lhuys, en date de Péra le 16 mai 1866 (1er mouharrem 1283).

M. le Ministre, jusqu'ici Aali-Pacha ne parle ni d'entrer dans les Principautés ni de prendre aucune mesure coercitive ou comminatoire. La seule idée qu'il a émise, c'est que la Conférence pourrait nommer directement un Gouverneur temporaire ou autoriser la Porte à faire cette nomination. Aali-Pacha ne s'explique pas, quant à présent, sur les conséquences diverses que cette nomination pourrait entraîner.

Je n'ai pas besoin de m'étendre davantage sur les idées de la Porte. Elles sont suffisamment développées dans la note circulaire dont Savfet-Pacha a dù laisser copie à V. E., et que je m'abstiens, pour cette raison, de vous envoyer.

Aali-Pacha voit souvent le délégué des Principautés et leurs rapports semblent assez bons.

Veuillez agréer, etc.

VIII.

Protocole (extrait) de la conférence du 17 mai 1866
(2 mouharrem 1283).

Présents: les Plénipotentiaires d'Autriche, de France, de Grande-Bretagne, d'Italie, de Prusse, de Russie, de Turquie. Le Secrétaire de la Conférence.

Le Protocole de la séance précédente est approuvé et signé par MM. les Plénipotentiaires.

M. le Plénipotentiaire de France expose qu'il a reçu, comme Président de la Conférence, une dépêche de M. Ion Ghica, Ministre des Affaires Étrangères du Gouvernement Provisoire à Bucharest, en date du 28/16 avril, annonçant que le peuple Roumain a élu, par la voie d'un plébiscite, comme Souverain des Principautés-Unies, le Prince Charles-Louis de Hohenzollern-Sigmaringen, sous le nom de Charles I ; cette élection aurait réuni 685. 969 votes affirmatifs, contre 224 votes négatifs. En priant le Président de la Conférence de porter cette élection à la connaissance de ses collègues, M. I. Ghica exprime l'espoir que MM. les Plénipotentiaires la jugeront conforme aux stipulations qui garantissent au peuple Roumain le libre exercice de son droit intérieur et donneront leur assentiment à une solution qui doit mettre un terme à un état de choses de nature à porter le trouble dans les esprits et à compromettre la tranquillité que toutes les Puissances, aussi bien que les Principautés, sont intéressées à maintenir.

La Conférence, après avoir entendu la lecture de cette communication, décide qu'il y a lieu d'y répondre en se référant purement et simplement à la Déclaration adoptée dans la séance du 2 de ce mois, et qui rappelle que la nomination de l'Hospodar appartient à l'Assemblée et qu'elle ne doit élire qu'un indigène ; qu'en conséquence la Conférence ne peut reconnaître la validité de la nomination du Prince de Hohenzollern.

M. Drouyn de Lhuys, comme Président de la Conférence, se charge, d'après le désir exprimé par la Conférence, d'adresser cette réponse à la communication de M. Ion Ghica.

M. le Plénipotentiaire de France ayant rappelé que la réunion de ce jour a été provoquée par M. l'Ambassadeur de Turquie,

Safvet Pacha dit que le Gouvernement Ottoman, animé envers les populations Moldo-Valaques d'une bienveillante sollicitude qui ne leur a jamais fait défaut, désire assurer le repos et la tranquillité des Principautés et calmer l'effervescence des esprits en leur donnant le temps de revenir à des idées plus saines et plus conformes à leurs véritables intérêts. En conséquence, il a été chargé, par dépêche télégraphique du 13 de ce mois, de faire la déclaration suivante, dont il demande l'insertion au Protocole de la Conférence :

« La Sublime Porte est toujours pour un Prince indigène à vie, si l'union est demandée par l'Assemblée, suivant la dernière décision de la Conférence. Comme conséquence naturelle de ce point de vue, nous sommes pour deux Hospodars également indigènes, dans le cas ou la séparation serait votée. Le Gouvernement Impépérial Ottoman ne ferait cependant aucune objection à ce que l'Assemblée ait la faculté de désigner un indigène, sous le titre de Gou

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