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deur était ou non privé de la jouissance actuelle de ses droits civiques; que dès lors le tribunal de Saumur a pu, sans excéder ses pouvoirs, y statuer en tout état de cause;

» Attendu qu'il résulte de l'art. 7 du C. civ. que l'exercice des droits civiques est réglé par la loi constitutionnelle; Qu'à l'époque où ce code fut promulgué la loi constitutionnelle à laquelle il se référait était l'acte du 13 déc. 1799; Qu'aux termes de l'art. 59 de la charte constitutionnelle, le code civil et les lois actuellement en vigueur qui ne sont pas contraires à la présente charte restent en vigueur jusqu'à ce qu'ily soit légalement dérogé; → Que les dispositions de l'art. 5 de l'acte du 15 déc. 1799 ne sont pas contraires à la charte, et qu'il n'y a été dérogé par aucune loi;

Attendu qu'en appliquant les dispositions de cet article au demandeur, et en jugeant que l'héritier immédiat, détenteur à titre gratuit de la succession totale ou partielle d'un failli décédé postérieurement au code civil, est suspendu de l'exercice de ses droits civiques, sans distinguer le failli concordataire du failli unioniste, distinction que la loi n'autorise pas, et que l'art. 608 du C. de com. repousse, le tribunal de Saumur n'a violé aucune loi; REJETTE.

COUR D'APPEL DE COLMAR.

C.

L'hypothèque judiciaire résulte-t-elle d'un jugement qui ne renferme que le germe d'une condamnation conditionnelle pour son existence et indéterminée pour sa valeur? (Rés. aff.).

Particulièrement, le jugement qui, sur les conclusions du demandeur, et pour établir clairement ses prétentions, combattues par voie de simple débouté, ordonne un décompte, engendre-t-il au profit de celui qui l'a obtenu une hypothèque judiciaire ? (Rés, aff.) C. civ., art. 2114, 2116, 2117, 2123, 2132, et 2148, § 4. HÉRITIERS MOCH, C. HÉRITIERS DE DURCKEIM ET LINCOURT,

Les sieurs Moch et Lincourt s'associent pour acheter et revendre divers immeubles. Lincourt recouvre une grande partie des bénéfices des opérations de leur société, mais n'en rend -pas compte à Moch. Tous deux décèdent sans avoir réglé leur liquidation. Les héritiers Moch assignent les héritiers Lincourt devant le tribunal de Strasbourg en paiement de 6,385 fr., reliquat présumé leur être dû, et subsidiairement pour se voir envoyer devant notaire pour établir le décompte de leur créance. Les héritiers Lincourt, sans former de demande réconventionnelle, se bornent à conclure à ce que le tribunal les renvoie de la demande.

Le tribunal de Strasbourg, par jugement du 4 mai 1824, « Attendu que, pour pouvoir régler les parties, il est nécessaire que les prétentions des demandeurs soient établies clairement

et en détail, ce qui ne se peut faire que par un décompte préalable, avant faire droit, ordonne que les parties décompteront devant Me Lacombe, notaire à Strasbourg, pour, sur le rapport en procès-verbal par lui dressé, être statué ce que de droit, dépens réservés. »

En vertu de ce jugement, les héritiers Moch prennent inscription, à la date du 24 fév. 1825, pour sûreté des recouvrements éventuels à résulter du décompte ordonné par le tribunal. Quelques années après, un ordre s'ouvre sur le prix d'une maison appartenant aux héritiers Lincourt, adjugée à un sieur Klotz, et les héritiers Moch sont utilement colloqués. Mais d'autres créanciers, les sieurs de Durckeim, contestent cette collocation, et soutiennent la nullité de l'inscription hypothécaire du 24 fév. 1825, comme fondée sur un jugement qui n'emporte aucune obligation et n'a pu engendrer d'hypothèque.

Le 14 nov. 1831, le tribunal de Strasbourg accueille cette contestation par un jugement ainsi motivé: « Attendu qu'aux termes de l'art. 2114, dont se prévalent les héritiers Moch, l'hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés à l'acquittement d'une obligation, et que, si l'art. 2113 fait résulter l'hypothèque judiciaire des jugements en faveur de celui qui les a obtenus, ce ne peut donc être qu'autant que ces jugements emportent une obligation quelconque (1);-Attendu que, dans l'espèce, le jugement déjà rendu en 1824, dont se prévalent les héritiers Moch, ne fait qu'ordonner un décompte et ne préjuge rien sur les droits respectifs des parties; qu'il s'ensuit que l'existence d'une obligation de la part des héritiers Lincourt est encore purement problématique et nullement reconnue par eux, qu'au contraire ils la dénient formellement. >>

Appel de ce jugement par les héritiers Moch, qui préten'dent que le tribunal de Strasbourg a fait à l'espèce une fausse application des principes qu'il a posés, puisque le décompte

(1) Voy, en ce sens, dans ce Journal, auc. col., t. 29, p. 53; noux. éd., t. 11, p. 794, un arrêt de la cour de cassation du 21 août 1810; et, t. 3 1828, p. 380, un arrêt de la cour de cassation du 4 juin 1828. Voyez, en outre, Grenier, Traité des hypothèques, t. rer, n° 201; Persil, Quest. sur les priviléges et hypothèques, t. 1, p. 272; Tarrible, Répert. de jurisprudence, v Hypothèques, sect. 2, § 3, art. 5; Favaret de Langlade, Répert. de la nouvelle législation, v* Hypothèques, sect. 2, $ 2.

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avait été ordonné seulement sur leurs conclusions et pour préciser leurs prétentions qu'aucune demande reconventionnelle n'était venue combattre ; que le jugement du 4 mai 1824, ainsi que le prouvaient ses motifs, était exclusivement en leur faveur; qu'ainsi ce jugement devait, d'après l'art. 2123 du C. civ., conférer hypothèque.

Du 26 juin 1832, ARRÊT de la cour d'appel de Colmar, troisième chambre, M. Jacquot Donnat président, MM. Chauffour jeune, E. Antonin et Fleurent avocats, par lequel :

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• LA COUR, Sur les conclusions de M. Paillart, avocat-général, et après en avoir délibéré en la chambre du conseil; - Attendu, en droit, qu'aux termes des art. 1117 et 2123 du C. civ., l'hypothèque judiciaire est celle qui résulte des jugements ou actes judiciaires; qu'elle résulte des jugements soit contradictoires, soit par défaut, définitifs ou provisoires, en faveur de celui qui les a obtenus; que ces dispositions sont générales, qu'aucun principe ne tend à les restreindre dans les limites plus étroites que celles dans lesquelles se trouvent circonserites les dispositions relatives à l'hypothèque conventionnelle par l'art. 2132 du même code; que dès lors elles s'appliquent à toutes sortes de jugements, à ceux qui emportent condamnation actuelle pour une somme certaine et déterminée, comme à ceux qui ne renferment que Je germe d'une condamnation conditionnelle pour son existence ou indéterminée pour sa valeur; qu'ainsi elles embrassent même les jugements préparatoires rendus pour instruction de la demande, et qui ne tendent qu'à suspendre la condamnation qui doit la déterminer et en fixer la valeur: que seulement dans ce cas, comme lorsqu'il s'agit d'une hypothèque conventionnelle, celui qui veut requérir inscription en vertu du jugement ne peut la requérir que jusqu'à la concurrence d'une valeurstimative par lui déclarée expressément, et que le débiteur a le droit de faire réduire s'il y a lieu;

• Attendu, en fait, qu'il résulte d'une expédition en forme d'un jugement rendu an tribunal de Strasbourg, passé en force de chose jugée, ladite expédition produite au procès, qu'une société, qui avait pour objet l'achat et la revente des biens immeubles ayant existé entre les nommés Abraham Moch et Daniel Lincourt, les héritiers du premier, après son décès, firent assigner les héritiers du second devant le tribunal de Stras'bourg, aux fins d'obtenir contre eux condamnation pour une somme de 6,000 fr., provenant de leur part dans le prix de reventes dont ceux-ci avaient fait le recouvrement, et, subsidiairement, aux fins de faire ordonner qu'il fût procédé à un décompte; que les héritiers Lincourt, sans former aucune contre-prétention, sétant bornés à demander à être renvoyés de la demande, le tribunal, avant de faire droit, ordonna que les parties décompteraient devant le notaire Lacombe; Attendu que c'est en vertu de ce jugement que les heritiers Moch ont requis une inscription hypothécaire contre les héri tiers Lincourt au bureau des hypothèques établi à Strasbourg, le 24 fév. 1825, et qu'ensuite ils ont été colloqués utilement dans l'ordre provisoire ouvert au greffe du tribunal de Strabourg pour la distribution du prix d'adjudication d'une maison ci-devant appartenant auxdits héritiers Lincourt; Attendu que le jugement dont s'agit, rendu conformément aux conclusions subsidiaires des héritiers Moch, l'était.

-

évidemment en leur faveur; qu'il renfermait le germe d'une condamnation conditionnelle qui n'était suspendue que par l'événement du décompte ordonné et dont le résultat devait déterminer cette condamnation et en fixer le montant; qu'ainsi ce jugement conférait aux demandeurs, héritiers Moch, un droit d'hypothèque pour une créance éventuelle pour sûreté de laquelle ils ont pu valablement requérir in- · scription; Attendu, en conséquence, que la collocation dans l'ordre provisoire obtenue en vertu de cette inscription par les héritiers Moch est régulière et dóit être maintenue;

>> Par ces motifs, statuant sur l'appel du jugement rendu entre les parties par le tribunal civil de Strasbourg le 14 nov. 1831, MET l'ap-. pellation et ledit jugement au néant; emendant, DÉBOUTE les parties de Wilhelm père, originairement demanderesses, ainsi que celles de Nieger (1), de l'opposition qu'elles ont formée à l'état provisoire de collocation dressé par le juge-commissaire, le 22 août 1831, entre les créanciers ayant droit au prix de la maison adjugée à Louis Klotz; par conséquent ordonne que ledit état sera maintenu selon sa forme et teneur; ordonne néanmoins que le bordereau de collocation à délivrer aux héritiers Moch ne le sera qu'après jugement définitif sur l'instance en reddition de compte existant entre lesdits héritiers Moch et les héritiers Lincourt, et jusqu'à concurrence des sommes dont ils seront reconnus créanciers. J. A. L.

COUR D'APPEL DE BORDEAUX.

Doit-on regarder comme juge-arbitre celui à qui est imposée l'obligation de consulter un tiers avant de rendre sa décision? (Rés. nég.)

PORGE, C....

Du 9 janvier 1832, ARRÊT de la cour d'appel de Bordeaux M. Desgranges président, MM. Princeteau et Hervé avocats, par lequel :

LA COUR, Attendu que l'arbitre, aux termes du code de procédure civile, est celui qui a reçu des parties le droit de juger une contestation née ou à naître;

D

Attendu que le droit de juger ne saurait exister dans toute son indépendance, alors que la personne que l'on prétend avoir été nommée arbitre est dans l'obligation de consulter un tiers avant de rendre sa décision;

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Attendu que la clause litigieuse ne désigne pas par son nom, mais seulement par sa qualité, le sous-intendant militaire, ce qui porte à croire que les parties n'ont pas voulu créer un tribunal arbitral, mais bien plutôt exiger, en cas de contestation, l'avis d'un fonctionnaire, afin d'éviter un procès;

» Attendu que la clause, dont argumente le sieur Porge impose au sous-intendant l'obligation, en cas de litige, d'en référer à l'intendant inilitaire; d'où suit que le premier n'avait pas été constitué arbitre,

(1) Les héritiers Durckeim et Lincourt.

c'est-à-dire juge des difficultés qui pourraient s'élever entre le conseil d'administration et le sieur Porge, puisque, encore une fois, le droit de juger suppose une indépendance absolue de la part de celui qui est appelé à l'exercer;

D

Attendu que ces réflexious démontrent que le sous-intendant militrire était seulement tenu de donner son avis, ce qu'il a réellement fait, de l'aven du sieur Porge;

.Attendu que, ce préalable rempli, il ne s'agissait plus que d'obtenir une condamnation contre le sieur Porge, et qu'on ne pouvait atteindre ce but qu'en s'adressant aux tribunaux;

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» Par ces motifs, — Déclare avoir été bien et compétemment jugé; Ordonne que le jugement dont est appel sortira son plein et entier effet..

J. A. L.

COUR D'APPEL DE POITIERS. La vente consentie par l'héritier apparent peut-elle être attaquée par l'héritier véritable, quand la prescription n'est pas accomplie au profit dutiers acquéreur? (Rés, aff.) C. civ., art. i 599 et 2265 (1). Le droit de l'enfant naturel reconnu sur la succession de ses père et mére est-il un droit réel, une quote part en nature dans tous et chacun des biens de la succession qui lui est acquise dès le décès de son auteur? (Rés. aff.) C. civ., art. 756.

Quoique l'enfant naturel n'ait fait aucune diligence pour obtenir la délivrance de ses droits, peut-il réclamer pendant trente ans contre l'héritier, et pendant dix ou vingt ans contre l'acquéreur de l'héritier, la quote part que la loi lui reserve? (Rés. aff.)

VACHERON, C. VIAUD ET AUTres.

Du ro avril 1832, ARRÊT de la cour de Poitiers, deuxième chambre, M. Liège d'Iray président, MM. Grellaud et Abel Pervinquière avocats, par lequel ;

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• LA COUR, — Attendu qu'en principe général l'héritier véritable a rente ans pour revendiquer une succession contre l'héritier apparent qui l'a recueillie à son préjudice; que par conséquent pendant tout ce temps le droit de ce dernier sur les biens qui la composent est condisionnel et résolublě;-- Attendu que nul ne peut transmettre à autrui plus de droits qu'il n'en a lui-même; que dès lors il est évident que 'héritier apparent ne peut, avant les trente ans révolus, si un texte préis de loi ne détermine un plus court délai, transmettre irrévocable nent à dos tiers la propriété des immeubles de la succession qu'il ne létenait que d'une manière précaire;

» Attendu que si le code qui nous régit, art. 2265, accorde aux

(1) Voy. Merlin, Questions de droit, vo Héritier, § 5; Toullier, Droit ivil, t. 9, p. 541; M. Duranton, t. 1, p. 462 et suiv.

Voyez, dans ce recueil, anc, col., t. 44, p. 176; nouv. éd., t. 17, p. 19, un arrêt de la cour de cass. du 3 août 1815, et, t. 3 1831, p. 365, narrêt de la cour de Paris qui décide la question en un sens opposé.

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